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  Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens  
Ellana

Réponses: 63
Vus: 102312

MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Ven 10 Juil 2020 19:47   Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens
Bonjour, bonsoir !

Cela fait des années que je réfléchis à quelque chose pour fêter le 10 juillet (a). Mais de flemme en démotivation, ce ne sera pas vraiment pour cette fois ci. Mais marquons un peu le coup quand même !
Le temps passe vite (2 ans et demi, seriously ?!? O.O), blablabla, boulot, blablabla, vie sociale à rattraper, blablabla, nouvelle ligue de Path of Exile, blablabla. Piochez dans mes excuses précédentes pour ce nouveau retard. Comme d’habitude, j’aimerais vous dire que le prochain chapitre sera plus rapide mais bon… Vacances, blablabla, flemme, blablabla, Vilhelm (inlove), blablabla ! En vrai, on va tâcher de faire moins long, c'est pas trop engageant, ça va ! Mr. Green

J’imagine que comme moi, vous aurez besoin de relire les chapitres (et désolée pour ça parce que je sais à quel point c’est énervant de lire 10 fois les mêmes passages…) mais pour ceux qui veulent juste se remémorer la trame principale, petit résumé (très schématique, hein, toujours peur de réellement spoiler) :

Spoiler


Bonne lecture !


Chapitre 15 : Pactes


- Ulrich, t’as pas fini ta valise ?

Le garçon haussa les épaules. Il cherchait encore un moyen de convaincre ses parents qu’il n’avait pas besoin de cours supplémentaires pendant les vacances mais son évaluation d’entrée en seconde ne les avait pas convaincus.
Debout près de la porte, son sac de voyage sur le dos, Odd observait son ami lâcher mollement livres et linge sale dans sa valise.

- Du coup, je t’attends pas, hein !
- Non, non, vas-y. Profite, Odd.
- Toi aussi.

Ulrich soupira. Ces vacances auraient pu être bonnes s’il était resté à Kadic.
Il avait vécu les deux derniers jours dans un état second. Les cours s’étaient enchaînés sans attaque de XANA, les récréations, la cantine, les amis, tout cela avait gardé la même teinte, à une exception près : chaque fois qu’il regardait Yumi, il savait qu’elle savait et que personne d’autre ne savait.
Sans en parler, ils avaient chacun adopter le même comportement : faire comme si de rien n’était. Elle lui faisait la bise en arrivant le matin, ils riaient ensemble en même temps que leurs amis et ils se séparaient le soir avec un signe de la main. Mais dans les minutes qui suivaient, l’un ou l’autre de leur portable vibrait et la vraie vie commençait. La vie où il n’y avait plus qu’eux sur Terre. Les dîners étaient devenus un calvaire, Ulrich trépignait en attendant de pouvoir rejoindre sa chambre. Il ne voulait pas de questions, aussi les messages avec Yumi étaient-ils suspendus le temps du repas. Puis, quand Odd s’affalait sur son lit avec sa console, la voie devenait libre. Ulrich pouvait rester accrocher à son portable entre deux cahiers sans attirer l’attention. Il avait toujours aimé les messages que lui envoyait Yumi, pour la simple idée que les mots n’étaient destinés qu’à lui. Les phrases les plus banales étaient des morceaux de temps qu’elle lui accordait à lui seul.

- Ulrich ?

Voilà que le simple fait de penser à elle lui faisait entendre sa voix maintenant !
Il se retourna. La bonne nouvelle, c’était qu’il ne devenait pas fou. Yumi se tenait debout dans l’encadrement de la porte.

- Tes parents ne sont pas encore arrivés ?
- Ils ne devraient pas tarder. Qu’est-ce que tu fais là ?
- Je devais rendre un bouquin à William. Il reste à l’internat pendant les vacances mais je ne savais pas si j’aurais la motivation de le lui rendre un autre jour.

La réponse n’était pas celle qu’Ulrich attendait. Un air déconfit se peignit sur son visage et Yumi n’eut pas le courage de poursuivre son petit jeu.

- Idiot, c’est la version que j’ai donnée à mes parents. D’après toi, qu’est-ce que je fais là ?

Ulrich se contenta de sourire. Un sourire que Yumi lui rendit avant de venir l’embrasser.

- D’autres projets que le rattrapage scolaire ?
- Essayer de ne pas me prendre la tête avec mon père à chaque repas. Et bosser pour ne plus jamais avoir besoin de quitter l’internat pendant les vacances.
- Tu auras le temps de m’écrire avec tout ça ?
- Comme si on ne le trouvait pas.

Yumi sourit de plus belle. Après des années de doutes et de fatigante incertitude, elle aurait voulu rester indéfiniment blottie contre le torse d’Ulrich. Le timing n’avait pas été bon mais les deux semaines passeraient sûrement plus vite que leurs séparations précédentes puisqu’elle pourrait au moins lui dire cette fois à quel point il lui manquait.

- Et toi, tu as prévu quoi ?
- Je dois aider Hiroki avec son déguisement pour Halloween. Et j’ai un exposé à finir avec William. Rien de très intéressant, je vais surtout en profiter pour dormir pendant des heures ! Si je ne te réponds pas avant midi, c’est que je suis encore dans mon lit.
- Super, cette idée va beaucoup me motiver pendant mes exercices de maths, merci du soutien…
- Mais y a pas de quoi, beau brun ! C’est sûrement ce qui me manquera le moins dans la lutte contre XANA : les réveils nocturnes ! Mathilde ne sait pas ce qui l’attend.
- En parlant de Mathilde, il faut que je te dise quelque chose.

Le sang de Yumi se glaça. Elle était dans les bras d’Ulrich, il jouait avec ses cheveux du bout du nez, lui caressait les hanches et pourtant, le simple prénom d’une autre lui donnait froid.

- Quoi ?
- Pour l’instant, on n’a pas dit aux autres qu’on était ensemble.
- De toute façon, ils ne verront sûrement pas la différence.
- J’aimerais bien pouvoir t’embrasser sans avoir à me poser de question.
- Ulrich, je viens de leur annoncer que je ne voulais plus aller sur Lyoko… Odd me fait quasiment la gueule et Aelita ne me croit pas. Willian a déjà tendance à s’isoler… Ce n’est pas le bon moment pour ajouter ça.
- Mais tout le monde s’en fout de ce qu’on fait, Yumi.
- Laissons passer les vacances, OK, on verra comment on se sent à la rentrée. En tout cas, quel est le rapport avec Mathilde ?
- Bah… Euh… Elle… Elle est au courant.
- Quoi ?
- Ne crie pas, c’est pas grave.
- Pourquoi tu as été lui en parler à elle ?
- Je l’ai appelée pendant votre dernière virée sur Lyoko, avant que tu ne viennes me rejoindre. J’étais un peu paumé, je savais pas quoi penser, j’avais envie de parler avec quelqu’un.
- Et tu ne pouvais pas simplement rejoindre l’usine pour en discuter avec Jérémie ou pour nous retrouver sur le Cortex ?
- Attends, tu es jalouse ? Pour la première fois depuis qu’on se connaît, tu peux être sûre et certaine que c’est toi que je veux et tu es jalouse quand même ?

Yumi ne répondit pas mais Ulrich connaissait cet air de princesse offensée. À une époque encore très récente, il se serait énervé à son tour mais là, il éclata de rire.

- Ces moments ne me manquent pas.
- Désolée. Ce n’est pas parce qu’on est ensemble que je vais réussir à être aimable avec elle du jour au lendemain.
- Je pense qu’elle en serait la première surprise. Et de toute façon, on s’en fout. Soit comme tu veux avec qui tu veux mais tu dois savoir deux choses. La première, c’est que moi, j’apprécie cette fille, elle est cool et ça fait du bien de parler avec de nouvelles personnes. La deuxième, c’est qu’aucune fille ne peut m’apporter ce que tu m’apportes. Je pensais ce que je t’ai dit, Yumi : tu es la personne qui compte le plus pour moi.
- Je sais. Désolée.
- STERN ! Tes parents sont en bas, ça fait cinq minutes qu’ils atten… YUMI ! J’espère que ça ne va pas devenir une manie, hein ! Tu es externe, jeune fille, tu n’as rien à faire là !
- Désolée, Monsieur Morales.
- Bon allez, je ferme les yeux pour cette fois parce que c’est les vacances mais que je ne t’y reprenne plus !
- Merci.

Fermant sa valise en étant conscient d’avoir oublié des choses, Ulrich quitta la chambre, main dans la main avec Yumi, insensible aux marmonnements de Jim. Avant de sortir du bâtiment, elle le tira par le bras pour l’attirer contre elle.

- Bonnes vacances, Ulrich.

Jamais son prénom ne lui avait semblé si beau.

***


- Messieurs, vous vous souvenez sans doute de Laura ?
- Tu nous l’as présentée il y a deux jours et c’est rare de voir une ado se balader ici, râla un vieil homme à lunettes.

Installé sur le bureau le plus proche de l’entrée, il regardait Laura avec une franche animosité qui n’inquiéta pas Tyron.

- Voici Pierre. Derrière lui, c’est Georges et l’homme debout au fond s’appelle Lucas. Si tu pouvais leur éviter une blague sur Star Wars, ils ont l’habitude.
- Je ne suis pas du genre à faire des blagues.
- Tant mieux, marmonna le dénommé Pierre.
- Ils sont le cœur de tout le travail fourni pour le développement de Judas. Bien sûr, l’équipe est plus large que cela mais ils constituent les plus gros cerveaux.
- Vous nous flattez, Monsieur.
- Visiblement, nos gros cerveaux ne valent pas autant que les langues du service juridique…
- Pierre, s’il te plaît. Laura, voici ton espace de travail. Ta mission ici est assez simple. Judas comporte un espace central, un dôme à l’intérieur duquel se trouve le cœur. Des protections ont été mises en place autour de ce cœur mais il semblerait qu’un virus arrive néanmoins à passer au travers. Nous voudrions que tu cherches une nouvelle défense qui contrecarrerait directement ce problème.
- Vous avez des précisions sur l’origine de ce virus ?
- Il s’agit d’un élément virtuel dont l’empreinte comporte des similitudes assez marquantes avec le cœur pour que le système de défense ne le considère pas comme un intrus.

Laura s’assit à son bureau et alluma le PC portable qui s’y trouvait, non sans s’empêcher de sourire. Elle ne pouvait pas encore en être certaine mais il y avait fort à parier que le virus en question n’était autre qu’Aelita. Après tout, elle était bien un élément virtuel capable de s’introduire dans le cœur du Cortex.

- Vous ne pouvez pas agir directement sur le virus ? demanda-t-elle avec une naïveté feinte.
- C’est une piste que nous explorons. Nous essayons actuellement de récolter des données pour nous débarrasser de ce problème.

Le sourire carnassier de Tyron n’augurait rien de bon. Décidée à ne pas compromettre sa situation, Laura resta impassible.

- Georges a commencé à effectuer des recherches. Notre obstacle principal se pose sur un élément que tu découvriras très vite : nous ne sommes pas totalement à l’origine de la création de Judas. Nous avons repris des travaux existants et il nous est donc parfois compliqué d’identifier toutes les subtilités de certains points. Nous n’avons notamment pas encore mis le doigt sur tous les moyens de contourner nos propres défenses.
- Je vais voir ce que je peux faire.
- Merci, Laura.

Tyron s’éloigna. Avant de quitter la pièce, il se retourna pour la regarder une dernière fois.

- La confidentialité n’est pas une clause dans un contrat ici. J’imagine que vu ton jeune âge et tes parents, tu ne me prendras pas au sérieux mais si tu parles de tes recherches en dehors du centre, ce n’est pas ton argent que nous attaquerons mais bien ta vie.

Laura en resta bouche bée. Elle ne s’attendait pas à ce que Tyron se montre si direct.

- Vous ne me faites pas peur. De toute façon, personne ne me croirait, à qui voulez-vous que j’en parle ?
- Pas à ta mère surtout.
- Pour l’instant, vous m’offrez de meilleurs moyens que la Russie. Vous pouvez compter sur ma loyauté.
- Décidément, les chats ne font pas des chiens. Tu parles comme ton père. « Je vous dis que vous pouvez compter sur moi mais si je trouve mieux ailleurs, on en rediscutera ».

Laura ne baissa pas les yeux. Elle n’en menait pas large mais elle avait tout de suite compris qu’elle ne devait surtout pas le montrer.

- Bonne journée, Laura. N’hésite pas à solliciter tes collègues en cas de besoin. Toutes les données déjà récoltées sont sur ton ordinateur.
- Ne sois pas inquiète, la rassura Lucas lorsque la porte se fut refermée. Il est tout le temps sur les dents. Beaucoup de travaux ici ont nécessité des fonds et un investissement personnel importants. Et nous sommes dans un domaine où les fuites vers les concurrents sont aussi catastrophiques que nombreuses. Sans vouloir porter atteinte à qui que ce soit, ton héritage familial ne joue pas en ta faveur.
- Son père est un sacré trou du cul, oui.
- Pierre !
- C’est pas vrai peut-être ?
- Ce n’est pas le sujet, coupa Laura. Essayons de rester professionnels.

Elle avait l’habitude de voir son aplomb et sa maturité désarçonner ses interlocuteurs. Le vieux grincheux ne fit pas exception.
Elle parcourut du regard les documents enregistrés sur son PC. Des données complexes, à n’en pas douter. Donc un sujet passionnant. Mais elle constata rapidement qu’elle était incapable de se concentrer. Une pensée l’obsédait. Une pensée qu’elle allait devoir exprimer avec finesse et prudence.

- Si je peux me permettre d’insister, il semblerait beaucoup plus facile de s’attaquer au virus directement plutôt que de revoir tout le système de protection, non ? En corrigeant un point, on risque d’en affecter un autre.
- Le virus en question est complexe, doté d’une grande intelligence sur laquelle nous n’avons pas beaucoup de données.
- Le professeur a dit que la récolte de ces données était en cours ?
- Oui, Lucas et moi travaillons sur le sujet.
- Et comment ça se passe exactement ?
- C’est confidentiel, intervient Pierre de son ton sec.

Laura sourit. Elle savait comment gérer ce genre d’égo.

- Ah, donc toi non plus, tu n’as aucune idée de comment ils font ?

Pierre lui jeta un regard méprisant.

- Bien sûr que si ! Le virus semble avoir pour origine un autre monde virtuel, on y a placé une balise. Elle va rechercher les traces des dernières activités et utiliser un algorithme ultra performant pour localiser la source desdites activités, on a déjà un tas de données à exploiter !
- La localiser… dans le monde réel ?
- Bah oui, qu’est-ce que tu crois ? On sait où est le monde virtuel maintenant mais il doit être lié à un ordinateur quantique du même style que le nôtre. Et crois-moi, ce genre de matos, ça ne se trouve pas dans une usine abandonnée !

Laura eut du mal à retenir son sourire. Mais cette pointe de joie ne dura pas. Il était peut-être déjà trop tard pour aider les autres. Peut-être que Pierre ironisait sur « une usine abandonnée » pour lui faire comprendre qu’ils avaient déjà trouvé le Supercalculateur. Elle voyait difficilement Tyron travailler main dans la main avec Jérémie. Il avait l’air d’être du genre à détruire ce qu’il ne pouvait contrôler.

- J’espère que vous allez y arriver. Cela faciliterait beaucoup les recherches si on avait le virus sous la main, on pourrait accroître le…
- Oui, bah fais déjà avec ce que tu as !

Décidément, il ne m’aime pas…

Laura passa la matinée à étudier les données à sa disposition. Jérémie aurait sans doute embrassé Hervé pour récupérer ce qu’elle avait sous les yeux. Avec ce genre d’informations, envoyer les autres sur Lyoko ne devenait même plus nécessaire, elle avait la main pour laisser la porte du cœur ouverte et pour bloquer la virtualisation des ninjas ! Du moins le pensait-elle. Elle s’emballait peut-être en mettant à profit ce qu’elle avait observé en travaillant avec les autres. Ses réflexions n’étaient peut-être que d’heureuses coïncidences qui s’avéreraient complètement erronées quand elle aurait creusé un peu. Des heures de travail s’annonçaient.
Mais elle avait quelque chose d’urgent à faire avant.
Deux coups secs furent frappés à la porte à midi pile. Pierre leva la tête vers l’écran situé devant lui et grimaça :

- J’aime pas bien la voir toute seule celle-là…

Laura suivit son regard et sentit une vague de soulagement l’envahir. Sa mère était là. On ne les séparait pas l’une de l’autre, pas encore.

- Bonjour. Laura, tu veux déjeuner ?

La jeune fille n’avait pas faim mais elle quitta quand même la pièce. Sur le chemin qui les séparait de la cantine, elle fut soulagée que sa mère ne lui pose pas de question. Cela lui permettait de réfléchir à sa marge de manœuvre. Être honnête risquait de mettre en danger le Supercalculateur. Elle avait confiance en sa mère mais elle préférait rester prudente. Moins elle en saurait, plus elle serait protégée.

- Alors, cette première matinée ? demanda Sandra lorsqu’elles furent assises devant leurs assiettes.
- Passionnante. Je pense que mon séjour ici va être très enrichissant. Et sûrement plus long que prévu…

Laura laissa volontairement sa phrase en suspens. Sandra s’engouffra dans la faille.

- Nous irons en Russie bientôt, dans un mois maximum, je te l’assure.
- Ce n’est pas pour la Russie que je m’inquiète. En fait, c’est pour…

Toute espionne qu’elle était, Sandra ne perçut pas que la gêne de Laura était factice.

- Que t’arrive-t-il ?
- En fait… je ne t’en ai pas parlé plus tôt parce que je ne voulais pas que tu le dises à Papa et parce que j’aurais voulu que tu le rencontres mais ça semble très compromis. J’ai un petit ami. Il s’appelle Frédéric. Et je n’ai pas pu le prévenir que j’étais ici. Cela doit faire deux jours qu’il est mort d’inquiétude. Avec un peu de chance, il aura été voir le principal qui lui aura appris que je suis partie mais j’aimerais lui dire où je suis, qu’il ne s’inquiète pas. Je me disais que tu pourrais peut-être me prêter ton portable, histoire que je puisse l’appeler. Si je pouvais le voir, ce serait même super.

Laura regretta immédiatement sa dernière phrase. Si Tyron avait des images de l’avatar d’Aelita, il pouvait tout aussi bien connaître celui de William. Elle se força à rester calme : William avait un physique plus commun, il était peu probable qu’un rapprochement soit fait.
Sandra de son côté hésitait entre dégoût et curiosité. Ses rapports avec les hommes étaient très loin de ceux d’une adolescente.

- Un petit ami ?
- Oui. Il est vraiment adorable, ça m’inquiète de le laisser sans nouvelle. Et vu comme c’est parti, le professeur Tyron risque d’être de moins en moins enclin à me laisser lui parler, il a l’air très à cheval sur la sécurité. J’imagine que tant que je n’ai pas trop avancé dans mon travail, il me laissera bien un peu de temps avec Frédéric, je ne risque pas de compromettre ses recherches.
- Il faut voir cela avec lui ma chérie, je n’ai aucun pouvoir ici.
- Je ne sais même pas où est son bureau.
- Je t’y conduirai après le déjeuner. J’imagine qu’il t’a interdit de parler avec moi de ce que tu fais ?
- Oui. Désolée.
- Ce n’est rien. On ne va pas avoir grand-chose à se dire sur le travail, alors si tu me parlais de ce Frédéric ?

Laura passa les vingt minutes les plus longues de sa vie, veillant à retenir précisément le mensonge qu’elle déroulait pour ne pas se compromettre plus tard. Heureusement, Sandra n’étant pas familière avec les relations amoureuses, elle ne nota pas à quel point la description de « Frédéric » manquait de passion.

***


- J’imagine que vous avez déjà un espion chez les russes ?
- Évidemment mais il n’est pas encore assez malin pour avoir été mis près de leur ordinateur quantique. Nous avons très peu d’informations sur Hoth. Et comme la principale certitude que nous avons est qu’on peut y mourir, tu te doutes que les volontaires ne se bousculent pas pour partir en exploration. Sans compter qu’avec les incursions sur Judas, il est difficile de dégager des effectifs.
- Ce qui n’est pas plus mal : plus l’équipe sera nombreuse, plus elle risque de se faire repérer par les russes, en plus d’attirer l’attention du virus. Le mieux serait de détacher une personne seule.
- À notre connaissance, la seule personne assez folle pour s’aventurer sur un monde virtuel sans renfort est cette chère Sandra. Il semblerait qu’elle soit leur agent de terrain principal là-bas. D’où l’intérêt de la conserver chez nous le plus longtemps possible.
- Quelle tâche accomplit-elle pour vous ? Vous ne pouvez pas la laisser fouiner de trop près, elle risquerait de découvrir l’existence de Judas.
- Tout le problème se trouve ici. Elle n’est pas sous notre autorité mais bien sous celle du G7 et plus globalement de son boss. Alors pour être tout à fait honnête, je ne sais pas exactement ce qu’elle va faire de ses journées. Il faut juste veiller à la tenir éloigner de nos recherches et d’Anthéa. Je vais sans doute flatter son ego en lui demandant d’entraîner nos ninjas au corps à corps. Quand je pense qu’ils se font encore rouler dessus par des gamins.

Gauthier n’osa pas réagir. Le sujet paraissait agacé profondément Tyron.
Des coups frappés à la porte firent diversion. D’un regard, Tyron fit comprendre qu’il ne se lèverait pas et Gauthier ravala sa fierté pour aller ouvrir.

- Laura ! Comment s’est passée ta matinée ?
- Excellente, le travail ici est passionnant mais j’ai une requête à formuler à Monsieur Tyron.
- Je t'écoute.

Laura fit semblant d’être gênée.

- C’est une demande assez personnelle.
- Mais bien entendu. Gauthier, sors.

Philippe serra les poings. Il commençait à en avoir assez de se faire malmener mais il savait que Tyron était son seul protecteur contre les russes. Mieux valait pencher la tête plutôt que de se la faire trancher.
Une fois la porte refermée, Tyron croisa les mains, ses yeux perçants rivés sur Laura.

- Je t’écoute.
- J’ai bien compris l’importance de la confidentialité de mes recherches et je préfère vous demander cette faveur avant de trop avancer, afin que vous n’ayez pas de raisons de douter de moi. J’aurais voulu votre autorisation pour passer un appel téléphonique vers l’extérieur. C'est vraiment important pour moi.
- Laisse-moi deviner : tu as un petit ami que ton père ne connaît pas ?
- D’où le caractère personnel de ma demande.
- Je vois… Je ne sais pas à quel point tu es aussi brillante que tes parents le disent mais même si tu n’as qu’un dixième du génie qu’ils prétendent, tu pourrais déjà révéler des choses capitales. Tu ne verras donc aucun inconvénient à ce qu’un de mes hommes écoute ta conversation ?

Laura avait craint cette condition mais elle n’avait pas le choix. Aussi hocha-t-elle la tête, réfléchissant déjà à la manière dont elle pourrait faire passer son message à William. L’espace d’un instant, elle se dit qu’il valait mieux qu’elle contacte Jérémie. Après tout, il n’était jamais allé sur le Cortex et il serait sans doute plus vif d’esprit. Mais c'était pour cela qu'elle ne pouvait pas lui parler. Elle devait rester maîtresse de la conversation et Jérémie risquait de poser des questions pour lesquelles elle ne trouverait pas de réponse qui ne paraîtrait pas suspecte.

- Parfait. Gauthier, tu peux revenir ! Aurais-tu l’amabilité d’accompagner Laura jusqu’à la salle de vidéo surveillance ? Peter est de permanence, ce sera son chaperon. Il a un téléphone professionnel avec lui que tu pourras utiliser, petite.

Gauthier crut qu’il avait mal entendu. Laura allait avoir le droit de communiquer avec l’extérieur ? Tyron était prêt à mettre de côté sa paranoïa sur la confidentialité ? Mais un détail lui revient : le cerveau n’était pas tout. L’adolescente aussi intéressait Tyron. Nul doute qu’avec son absence de famille, c’était un ami qu’elle allait contacter.
Un ami qui pourrait apprendre à Tyron des informations qu’aucun chercheur ne trouverait.

***


William, plongé dans un article d’Alternatives Economiques qu’il relisait pour la troisième fois, faillit ne pas répondre lorsque son portable vibra. Il décrocha presque à la dernière seconde, ayant à peine le temps de pester intérieurement contre les gens qui appelaient encore en inconnu.

- Oui ?
- Salut, Fred. Dis donc, je pensais que tu serais prêt à décrocher tout de suite, mon absence n’a pas l’air de trop t’inquiéter !
- Vous devez faire erreur sur la personne.
- Comment ça va bébé ? Ton exposé sur la nanotechnologie, tu t’en sors sans moi ?
- Laura ? Tu as fumé ? On t’a fait un lavage de cerveau ?
- Oh, tant mieux ! Écoute, moi ça va, c’est super ici. Je ne peux pas te dire où je suis et ce que je fais mais je vais très bien, j’apprends plein de choses ! Le professeur Tyron est super disponible, j’espère vraiment réussir à l’aider.
- Attends, tu as dit Tyron ?
- Oui, c’est dingue, hein ? C’est sûr que ça flatte mon ego, hein, c’est Jéjé qui serait fou ! D’ailleurs, tu pourras lui dire que je n’ai toujours pas retrouvé mon collier ? Il faudrait vraiment qu’il vérifie si je ne l’ai pas oublié chez lui ! Comme ça, je pourrai revenir le chercher et te voir un peu, ça me ferait plaisir. Mais à la réflexion, vue la sécurité ici, on enverra sûrement quelqu’un le récupérer pour moi !
- Ton collier chez Jéjé ? Tu parles de Jérémie ? Tu as oublié quelque chose dans sa chambre ?
- Oui, c'est ça, sans doute dans sa chambre mais vérifie chez sa copine aussi. Non, aucune idée de quand je rentre. Pas avant un moment, j’imagine. Et je vais déjà devoir retourner travailler. Pense à bien demander pour mon collier surtout, s'il te plaît ! Je t’aime, Fred. À bientôt, j’espère. Tu me manques déjà tellement !
- Euh… à bientôt.

William resta plusieurs secondes le portable collé contre l'oreille. Il imaginait mal Laura toucher à des substances illicites, un tel appel ne pouvait signifier qu'une chose : elle avait voulu lui faire passer un message. Et il n'était pas fou, elle avait clairement mentionné le nom de Tyron.
Dans quoi s'était-elle embarquée ?
Ou plus inquiétant encore, dans quoi l'avait-on embarquée ?
Comme il s'y attendait, Jérémie ne s'offusqua pas lorsqu'il entra dans sa chambre sans frapper, pas plus qu'il ne releva la tête. En revanche, un soupir d'exaspération échappa à Aelita lorsque la porte s'ouvrit.

- Jim, on trav... Ah c'est toi William ? Désolée, Jim est déjà passé trois fois nous décocher des regards suspects !
- On a déjà de la chance qu'il ne nous ait pas demandé d'aller en salle d'étude pour qu'il puisse mieux nous surveiller, répondit machinalement Jérémie.
- Je crois que Laura a des ennuis.

Assise sur le lit, dos au mur, Aelita fronça les sourcils. L'annonce était assez inattendue pour que même Jérémie fasse tourner sa chaise vers William.

- Elle vient de m'appeler et soit on lui a lavé le cerveau, soit elle a des informations à nous faire passer.
- Raconte.

William essaya de répéter au mot près sa conversation avec Laura.

- Elle est chez Tyron ?
- On dirait bien.
- Mais... Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
- Ce n'est pas le plus important dans l'immédiat, Jérémie. Elle a pu nous contacter et son appel ne ressemble pas à un SOS. Donc elle ne semble pas menacée. Si elle a quand même tenu à nous appeler, c'est sans doute que...
- C'est nous qui sommes menacés.
- Plutôt Lyoko à mon avis. Je ne sais pas ce qu'elle entendait par collier mais elle a clairement dit qu'il fallait que tu vérifies dans ta chambre et « chez ta copine ». Chez moi, c'est Lyoko.
- Tu penses vraiment qu'elle en a conscience ?
- Elle est tout sauf stupide. Elle était là quand tu as résumé la situation à Mathilde, elle sait que tu m'as trouvée sur Lyoko en rallumant le Supercalculateur et elle m'entend en parler.
- Donc il y aurait quelque chose sur Lyoko ?
- Le ninja, conclurent Jérémie et Aelita au même moment.
- Il a dû amener quelque chose avec lui.
- Impossible, on s'en serait rendu compte !
- Les choses se sont passées vite. Et de toute évidence, Tyron est plus malin qu'on le pensait. Je ne sais pas comment Laura s'est retrouvée chez lui mais il a peut-être une longueur d'avance sur nous. Il n'y a rien d'incroyable à ce que son homme de main ait placé sur Lyoko quelque chose. Pour détruire Lyoko lui-même si ça se trouve.
- Laura a parlé d'un collier. Tu crois que c'est une allusion au collier explosif de Battle Royal ? s'inquiéta William.
- Pas certaine que Laura perde son temps devant ce genre de films.
- Je parlais surtout du manga...
- Bref, je serais surpris que ce soit ce qu'elle ait voulu dire mais je vais dans tous les cas vérifier si je trouve quelque chose sur Lyoko. C'est faisable d'ici, je lance un scan.

***


Sandra toisait un par un les jeunes hommes alignés face à elle. Elle commençait sérieusement à revoir son opinion sur Tyron.
Aucune de ses recrues n'avait lâché un petit sifflement lorsqu'elle était entrée dans le gymnase. Aucune blague grivoise n'avait interrompu sa présentation. Aucun sourire narquois, aucun ricanement, aucun coup de coude qui signifiait clairement « - Deux jours et elle est dans mon lit ! - Tenu ! ». Ils restaient bien droits dans leurs survêtements noirs. Aucun n'était par terre à se tenir douloureusement les parties. Aucun ne lui avait laissé l'occasion de montrer qu'elle n'était pas là pour leur plaisir.
Ils étaient sept, sept combattant concentrés. Sept hommes suffisamment dévoués à leur mission pour ne pas la voir comme une femme désirable mais comme une instructrice.
Visiblement, le petit français qu'elle méprisait de tout son être avait plus de ressources qu'il y paraissait.

- Vous voulez tirer à la courte paille celui qui fera équipe avec moi ou vous avez un leader ?

Personne ne répondit mais six d'entre eux firent un pas en arrière, laissant en avant le plus petit du groupe.

- Très bien. Vous vous mettez par deux et vous me montrez ce que vous valez. Je vous explique après avec votre copain ce que vous devez améliorer.

Sandra aurait préféré porter sa toque virtuelle tous les jours plutôt que de l'avouer mais ce qu'elle vit retint son attention. Ils savaient se battre.

- Notre groupe tourne beaucoup. La moindre faiblesse se paye au prix fort. C'est stimulant, ça nous permet de donner le meilleur de nous-même.

Sandra ne répondit pas au garçon resté debout à ses côtés. Elle hésitait sur la marche à suivre. Tyron lui avait demandé d'entraîner ce qu'il appelait « ses ninjas ». Elle n'avait pas intérêt à le contrarier, cela pourrait revenir aux oreilles du G7 et causer du tort au boss, voire annuler sa mission. D'un autre côté, elle n'avait pas l'intention d'aider le français à créer des armes qu'il pourrait un jour retourner contre elle. Même si les bâtons qu'ils utilisaient et qui justifiaient visiblement leur nom ne tiendraient pas longtemps face à ses balles, elle n'avait pas envie de se créer des ennemis. Elle n'avait pas le temps pour cela. Elle devait surveiller Laura ou plutôt surveiller la manière dont Tyron comptait l'utiliser.
Et ce n'était pas dans ce gymnase qu'elle allait y arriver.

- Bien, changement de plan, on va s'arrêter là pour aujourd'hui.
- Pardon ?
- C'est à peine un échauffement !

Sandra haussa les épaules, preuve que cela ne l'intéressait pas. Sa mission était de ramener Laura en Russie, elle avait l'aval du G7 pour cela. Le boss réussirait à les faire patienter, elle n'en doutait pas, mais Tyron ne pourrait pas se plaindre qu'elle refusait de travailler pour lui. Laura passait avant.
Sans se soucier davantage des protestations, elle tourna le dos aux ninjas et se dirigea vers la sortie. Ce fut à cet instant qu'une main se posa sur son épaule.
Le temps sembla se figer dans le gymnase. Les souffles étaient suspendus à celui de Sandra qui s'était arrêté. Elle détestait qu'on la touche. Lentement, elle posa ses doigts sur ceux qui osaient la retenir. Sans les relâcher, elle se retourna. Ses yeux plongèrent dans le regard émeraude de celui que les autres avaient désigné comme leur chef. A moins qu'ils ne l'aient sciemment offert en pâture à sa colère.

- Ton nom ?
- Qu'est-ce que ça change ? Tu te vois déjà l'écrire sur ma tombe ?

La pointe d'humour dans la voix du garçon déstabilisa Sandra une fraction de seconde. Le temps dont il eut besoin pour ramasser un bâton et bloquer le genou qui aurait dû le priver de descendance. Puis, sans chercher à pousser le combat, il recula d’un pas et s’inclina brièvement.
Tous les sens de Sandra se mirent en alerte. Visiblement, ce garçon n’était pas une offrande à sa colère. D’un regard, elle nota sa garde, simple et efficace. Campé solidement sur ses pieds, la tension presque imperceptible dans ses jambes montrait qu’il était prêt à se déplacer et vite. Il tenait son bâton d’une main ferme et souple à la fois, signe qu’il n’hésiterait pas à le lâcher si cela lui promettait un meilleur angle d’attaque. Son visage affichait une attitude narquoise que Sandra ne trouvait pas professionnelle mais elle comprit que là résidait le danger. Elle n’avait pas affaire à un duelliste bête et concentré qui, aussi mortel qu’il puisse se révéler, garderait une part de prévisibilité. Ce gamin ne comptait pas la tuer. Mais que voulait-il ? L’impressionner ? Impressionner ses amis ? Se prouver quelque chose ?
Elle allait devoir lui faire ravaler son orgueil.
Elle s’inclina à son tour, prenant soin de se pencher bien bas. Il y avait deux options. Soit elle s’était trompé et il attendrait bêtement qu’elle se redresse pour engager le combat. Soit elle avait vu juste et elle se tenait face à un vrai guerrier.
Le sifflement du bâton lui arracha un sourire. C’était bon d’avoir raison.
L’attaque était rapide mais sa main le fut davantage. Au moment où ses doigts se fermaient sur l’arme, elle redressa la tête.
Et reçut un coup de talon directement sur la joue.
Elle ne s’en voulut pas. Le but n’était pas d’esquiver ou de parer. Elle ne perdait pas des points si on réussissait à la toucher. Le but, c’était de laisser l’autre par terre. Ou, étant donné le contexte moins radical, le forcer à reconnaître sa défaite.
Elle accepta donc la douleur dans sa mâchoire et utilisa le bâton pour faucher les jambes de son adversaire, qui esquiva d’un saut. Ce faisant, il se retrouva à la hauteur idéale pour que le poing libre de Sandra lui écrase l’abdomen.
S’il chuta violemment en arrière, le garçon ne se laissa pas abattre. Il roula sur le côté pour éviter un autre coup de bâton et, privilégiant la force à la dignité, il glissa à plat ventre vers Sandra pour lui attraper les deux chevilles. D’un coup sec, il la fit tomber à son tour mais avant qu’il ait pu récupérer son bâton, elle lui attrapa le t-shirt et le tira vers elle, jusqu’à se retrouver sous lui. Elle ne savait pas s’il serait sensible à cette technique qui lui avait plusieurs fois permis de l’emporter. Mais il y avait de fortes chances qu’il se laisse déconcentrer par le contact de leurs deux corps.
Un violent coup de tête sur son front lui fit comprendre qu’il n’était pas si bête. C’était douloureux d’avoir tort.

OK, puisque tu ne me laisses pas le choix…

Du sang coulait dans son œil droit. Il avait dû lui ouvrir l’arcade sourcilière mais elle avait littéralement déjà vu pire. Alors que sa main droite glissait contre sa cuisse, son coude gauche fusa vers le menton du gamin qui essayait de récupérer son bâton. Il sentit alors un contact froid sur sa tempe et ne bougea plus.

- C’est déloyal.
- C’était la leçon du jour : l’honneur ne mène à rien, railla Sandra en appuyant un peu plus fort le Beretta contre la peau. Je ne sais pas ce que Tyron vous demande et je ne sais pas dans quel but on vous entraîne. Mais retenez ceci : si vous ne vous battez pas chaque jour comme si votre vie était menacée, vous finirez par la perdre. Vous devez voir les choses comme dans un jeu vidéo (le regard plongé dans celui du gamin, Sandra ne vit pas le sourire des autres) : si votre adversaire est déjà armé et que vous arrivez les mains vides, il n’attendra pas que vous trouviez un flingue pour vous battre « à la loyale ». Il tirera. Game over.
- Charmante leçon. Merci beaucoup.

Sandra releva la tête. Un groupe de sept filles avait rejoint le gymnase et la meneuse, très grande, avec une longue natte noire, lui souriait.

- Nous aurions adoré profiter de votre enseignement nous aussi mais vous êtes attendue par le professeur.

Le garçon au-dessus de Sandra s’éloigna lentement du revolver qu’elle rangea sans sourciller. Ils se relevèrent et à nouveau, elle lui demanda :

- Ton nom ?
- Qu’est-ce que ça change ? Tu veux m’envoyer une invitation ?

Elle sourit malgré elle.

- La prochaine fois, je serai désarmée. Tu mérites un combat « à la loyale ».
- Si c’est ça que tu veux, tu ferais mieux de garder ton arme.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Ven 19 Jan 2018 21:47   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Spoiler


Bon. Comme dit en spoil à ODR, Odd est un personnage avec lequel j'ai un peu de mal. Si son cauchemar n'est pas une attaque de nourriture, je suis malheureusement tombée dans la facilité et les bas-fonds du cliché. Je m'auto-trolle un peu là-dessus parce que franchement, y aurait pu avoir mieux, clairement. Mais comme après plusieurs semaines à le laisser mijoter, je n'ai pas trouvé comment remodeler ce chapitre, vous aurez le cliché, tant pis ! Coeur sur vous quand même !
Ce chapitre étant court, je vous glisse le dernier avec (bah oui, y en a 13, forcément !)

Bonne lecture !


Chapitre 12 : Le vide


Odd fixait le salon sans oser y entrer. Debout dans le hall, il se sentait presque en sécurité, ce qui n’avait pas de sens. Il avait finalement envie de chercher Kiwi pour ne pas affronter ses démons seuls mais il ne voulait pas mêler son chien à ça. Et d’ailleurs, il n’avait rien dessiné. XANA ne saurait peut-être pas ce qui lui faisait réellement peur. Il ne saurait peut-être pas comment l’impressionner.
Un peu plus sûr de lui, il fit un pas en avant.

- Je suis là, XANA. Pas de bol, je n’ai pas dessiné de cauchemar !
- Tu en es sûr, mon chaton ? Moi je crois que tu te trompes.

La voix sortait des haut-parleurs mais à la grande surprise de Odd, elle était suave. Caressante et amicale, elle fit envisager pour la première fois au garçon que si XANA mettait autant de temps à tous les tuer, c’était parce qu’il voulait les laisser en vie

- Je n’ai pas dessiné de cauchemar, répéta-t-il, moins agressif.
- J’en conviens, mon chaton. Mais qui te dit que ce n’est pas le vide ton plus grand cauchemar ? Pas besoin de dessiner le néant. Tu crois n’avoir peur de rien mais tu as peur du rien. Tu as besoin de vie autour de toi, de bruit et d’animation. Que ferais-tu si soudain tout cessait ?
- Et tu comptes faire quoi ? Me donner l'illusion d'être seul dans cette maison ? Tu ne me fais pas peur. On ne peut pas avoir peur du rien, ça n’existe pas !
- Parce que tu crois exister, toi ?

La question frappa Odd. Il n’eut pas le temps d’y répondre.

- Tu n’es rien. Ce vide dont tu as si peur, c’est celui qui te caractérise. Tu fais des blagues idiotes pour te donner une place dans un groupe de minables, tu es un cancre pour que des adultes indifférents te portent de l’attention, tu alignes les conquêtes pour espérer laisser une empreinte dans le cœur de filles dont tu te moques, tu te goinfres à outrance pour masquer le vide qui te remplit. Tu n’es rien, Odd.
- C’est ça, cause toujours, tu ne m’impressionnes pas.

Mais la voix du garçon tremblait et XANA n’en devint que plus suave.

- Pauvre chaton. Depuis que tes amis ont décidé d’abandonner Lyoko, qui s’intéresse encore vraiment à toi ? Pas eux en tout cas. La preuve, pourquoi m'affrontes-tu seul ?
- Aelita voulait venir.
- Et si Jérémie lui avait demandé de rester, tu crois qu'elle t'aurait choisi ? Je ne fais que constater, mon petit chat. Tu es seul face à moi. Et aucun de tes amis n'a subi ça. Aelita pouvait quand même compter sur vous, vous étiez prêts à la secourir. Mais je ne vois personne t'attendre à la porte. Le savent-ils, tes chers amis, qu'ils ne font qu'alimenter ton cauchemar ?
- Ils ne le font pas.
- Arrête donc. Pourquoi se soucieraient-ils de toi ? Tu n’as aucune utilité. Ton humour n’amuse que toi, ton héroïsme n’existe plus, tes parents t’ignorent toujours, ton attitude en classe n‘attire ni reproche, ni sympathie, les filles ne te prêtent pas la moindre attention, tes amis ont d'autres chats à fouetter et le seul que tu regardes différemment s’en moque bien.

Cette fois, Odd eut l’impression que son sang se glaçait. Il eut envie de faire demi-tour, de quitter cette pièce pour faire cesser le cauchemar mais les autres avaient réussi à triompher du leur. Il ne pouvait pas faiblir maintenant.
Mais comment XANA pouvait-il connaître tout cela de lui ?

- Voyons mon chaton, tu crois vraiment que cela passe inaperçu ? Tout le monde n’est pas aussi stupide que tes amis, tu sais. Je l’ai bien vu moi, la manière dont tu regardais Ulrich. Toutes ces fois où tu n’arrivais pas à dormir en le sachant presque nu dans son lit, à quelques mètres seulement de toi.
- La ferme.
- Qu’est-ce qu’il y a, mon chaton ? J'aimerais me tromper, tu sais. Tomber amoureux de son meilleur ami, c'est tellement cliché. Surtout quand on essaye de passer sur toutes les filles pour se cacher la vérité. Tu es pathétique. Vous formeriez un couple pathétique. Si ça ne tenait qu'à moi, je préférerais le voir avec Yumi, tu sais.
- La ferme...
- Ne me dis pas que tu essayais encore de te persuader du contraire ? Je sais moi, ce qui te fais vraiment peur, outre ce vide dont je t'ai déjà parlé. Tu tentes de maîtriser le regard des autres pour ne pas être jugé. Tu amènes les projecteurs où tu veux pour qu'ils n'éclairent pas l'ombre qui te ronge. Mais moi je sais, mon chaton. Toutes ces fois où en embrassant une potiche, tu imaginais quelqu’un d’autre… Toutes ces fois où tu as souhaité en secret du mal à Yumi… Toutes ces fois où tu t’es laissé aller, seul, à penser à lui…
- LA FERME !

La peur avait laissé place à la honte et à la colère. Dans un mouvement rageur, Odd attrapa une chaussure qui traînait près du canapé et la jeta de toutes ses forces en direction d’une des enceintes. Elle grésilla avant de pendre lamentablement au bout de quelques fils.

- Odd ?

Sans se retourner, le garçon s’écroula sur le canapé. La tête entre les mains, il ne réagit pas quand Ulrich s’assit à côté de lui.

- Odd, ça va ?

Plusieurs minutes s’écoulèrent sans que Odd puisse bouger, ses doigts couvrant son visage. Ulrich attendit sans rien dire, jusqu’à ce que son ami demande :

- Tu as entendu ?
- La fin seulement.
- Je suis désolé.
- Pourquoi ? Ce n’est pas grave, tu n’as pas à avoir honte.
- Je me sens sale, j’aurais voulu par-dessus tout que tu ne l’apprennes pas comme ça, j’aurais voulu que tu ne l’apprennes jamais, je…
- Hey, vieux, chuchota Ulrich. Ça va aller. Arrête de culpabiliser, s’il te plaît. Je te dis que ce n’est pas grave.

Odd tourna la tête vers son ami. Celui-ci lui souriait, un peu gêné, mais sans la moindre once d’agressivité ou pire, de dégoût.

- Je voudrais que tu n’en parles pas aux autres. Je… j’ai pas très envie qu’ils me regardent différemment.
- Ne t’inquiète pas, j’ai cru comprendre que c’était une affaire entre toi et moi.

Odd rougit légèrement mais il n’y avait plus que du rire dans les yeux d’Ulrich.

- Allez viens, maintenant qu’on a tous surmonté nos cauchemars, XANA devrait nous laisser sortir ou nous dire au moins ce qu’il mijote pour la suite. C’était une bonne idée de ne rien dessiner, ça nous a raccourci le calvaire.

Odd hocha la tête sans répondre et s’avança vers le hall. Il ne fit que quelques pas avant de se retourner vers Ulrich.

- Tu ne m’en veux pas ?
- Qu’est-ce que c’est que cette question débile, Odd ? Pourquoi je t’en voudrais ?
- Bah je… j’ai pas été honnête envers toi. J’aurais voulu être plus que ton ami, je ne t’en ai jamais parlé malgré toutes ces fois où…
- Toutes ces fois où tu t’es laissé aller, seul, à penser à moi ? répéta Ulrich en prenant une voix suave censée imiter XANA.
- Arrête, ce n’est pas drôle !

Ulrich sourit et caressa la joue de Odd qui sentit tout son corps s’enflammer.

- Ce n’est pas drôle mais c’est plutôt excitant.
- Attends, qu’est-ce que tu racontes ?
- Odd, si j’avais voulu sortir avec Yumi, ce serait fait depuis longtemps. Il n’y a pas que toi qui avais du mal à dormir certains soirs.

Les doigts d’Ulrich glissèrent sur la nuque de Odd.

- Viens là, chuchota-t-il.

Alors que le visage d’Ulrich se rapprochait du sien, Odd ne put retenir un mouvement de recul.

- Quoi, qu’est-ce qu’il y a ? lui demanda son ami sans retirer sa main de sa nuque.
- Je suis peut-être encore dans mon cauchemar. Qu’est-ce qui me prouve que tu n’es pas un spectre ?
- Ravi d’apprendre que je suis un cauchemar pour toi ! soupira Ulrich en le lâchant. Je ne pensais pas t’être si désagréable. Mais bon, je comprends. Allons rejoindre les autres si tu veux.

Odd se sentit étouffer par les images et les émotions, les sons et les sensations. Il revit tous les combats sur Lyoko où il avait trouvé Ulrich sexy mais la honte lui étreignit aussitôt le cœur. Comment pouvait-il penser à ça alors que William était mort, alors que Yumi avait voulu tuer Jérémie ? Il devait se concentrer sur ça et pas sur les papillons qui dansaient encore dans son bas-ventre.

- On y va ou pas ? insista Ulrich.
- Allez, saisis ta chance. Qui sait s’il sera aussi conciliant une fois dehors, lorsque Yumi sera revenu dans le secteur ?

Odd sursauta. Le manque de réaction d’Ulrich lui laissait penser qu’il n’avait pas entendu XANA.
Il se prit la tête dans les mains. Il voulait juste que tout ça s’arrête. Lui qui était si heureux de fêter Halloween ne comprenait pas comment les choses avaient pu autant mal tourner.
Un champ de force attira soudain son attention. Il clignotait par endroits, comme s’il s’apprêtait à disparaître. Lorsque Odd se leva pour aller l’examiner de plus près, il retrouva son aspect impénétrable.

- Qu’est-ce qui t’arrive ?

De nouveau, le garçon sentit quelque chose remuer sous son nombril. Ulrich l’avait rejoint et se tenait derrière lui, si près qu’il pouvait sentir son souffle sur son oreille.

- Tout va bien ?
- J’ai cru que ces machins faiblissaient. Tiens, regarde, ils recommencent !
- Tu penses que c’est lié à quoi ?
- Aucune idée. Il faut qu’on en parle à Jérémie.

Mais à peine Odd s’était-il éloigné qu’Ulrich le hélait. Les champs de force avaient retrouvé toute leur intensité.

- On dirait qu’ils s’épuisent quand on est près d’eux mais qu’ils se renforcent si on s’en écarte.
- Génial qu’on se rende compte de ça alors qu’on est que tous les deux, nos QI cumulés doivent faire le quart de celui d’Aelita…
- Odd, comment peut-on vaincre un cauchemar ?

Ulrich semblait soudain avoir compris quelque chose.

- De quoi ?
- Comment peut-on vaincre un cauchemar ? C’est vrai ça, normalement, on n’a aucun impact dessus, on ne peut pas en triompher soi-même et on ne s’est jamais intéressé à ce que signifiait réellement affronter nos peurs… Embrasse-moi.

Odd fronça les sourcils. Décidément, il ne comprenait rien au charabia de son ami.

- Ce n’est pas l’envie qui m’en manque mais en quoi ça va nous aider ?
- Regarde.

Sans se soucier de son incompréhension, Ulrich attrapa la main d'Odd et l’éloigna de la fenêtre. Celui-ci remarqua que le champ de force faiblissait.

- Donc, c’est définitif, je ne pige que dalle.
- Les failles semblent apparaître lorsqu’on s’écarte l’un de l’autre. Or, plus on est proches, plus tu affrontes ta peur qui est qu’on découvre que tu m’aimes, c’est ça ?

Odd rougit et bafouilla :

- C’est plus compliqué.
- Essayons de rester simple. Si tu affrontes cette peur, si tu arrives à la vaincre, le dernier cauchemar sera traité et les champs de force disparaîtront ! Tu n’as rien à craindre, Odd. Je ne peux pas te garantir que je suis amoureux de toi mais je ne peux pas nier que tu m’attires, d’une manière certaine. Est-ce que tu peux l’accepter ? Est-ce que tu peux t’en contenter ?
- Je… je crois.
- Alors, embrasse-moi. Tu ne dois pas redouter ma réaction et le regard des autres, tu t’en fous. Tu t’en fous complètement, qui sont-ils pour te juger ?

Ce fut à cet instant qu'Odd acquit la certitude qu'il était face à un spectre. Jamais Ulrich n'aurait été si franc, quand bien même il aurait partagé ses sentiments. L'Ulrich qu'il avait en face de lui n'était pas le vrai Ulrich.
Ce fut également à ce instant qu'il décida qu'il n'en avait plus rien à faire. Parce qu'il ne ressortirait jamais d'ici et que cet Ulrich lui plaisait.
Ses bras se nouèrent autour du cou du spectre et il se serra contre lui, se moquant bien de son corps qu'il ne contrôlait plus. Doucement, il fut guidé sur le canapé où il se laissa cajoler. La situation ne ressemblait en rien à celle dont il rêvait et ce n'était pas plus mal au fond.
Qui aurait cru que les spectres embrassaient si bien ?
Il grogna quand Ulrich s'éloigna mais ses lèvres se détendirent sur un soupir de bien-être lorsqu'une bouche caressa son cou.

- T'es vraiment trop sexe, tu sais ?

Il ne reçut qu'un clin d’œil en réponse, une langue déjà trop occupée à revenir jouer avec la sienne.

- Odd ?

La voix choquée d’Ulrich résonna dans la salle à manger. Odd mit quelques secondes à réaliser que ce n’était pas possible qu’Ulrich puisse parler alors qu’ils s’embrassaient à pleine bouche.
Il tourna la tête et resta figé. Ulrich se tenait à l’entrée de la pièce, les yeux écarquillés, accompagné par une Aelita qui ne savait plus où regarder.

- C’est une blague ?

Sans savoir quoi répondre, Odd n'eut que le réflexe de se jeter sur le tapis. L’Ulrich du canapé lui jeta un dernier regard de braise avant de disparaître.
Le silence s'installa, pour le moins pesant. Odd n'osait pas relever la tête. Il ne voulait pas se sentir jugé. Il n'était pas prêt.

- Hum, est-ce que ça va ? finit par demander Aelita.
- J’ai pas honte, je me suis dit que même si c’était un spectre, je m’en foutais. Je voulais juste… Je voulais juste oublier tout ça. William est mort, bordel, et on ne sortira jamais d'ici, il faut arrêter de se leurrer !

Odd leva les yeux. Comme il s'y attendait, Ulrich détourna aussitôt le regard vers ses chaussures mais Aelita avança vers lui. Elle tomba à genoux sur le tapis et le serra contre elle.

- On va sortir d'ici, Odd. Quand ce sera fait, on ira à l'internat, on se fera chopper par Jim et on jouera avec lui à Paraplegik Zombie 6.
- Arrête ! Arrête d'être naïve ! Même si on sort d'ici, comment tu peux croire que ce sera aussi facile ? Ce qu'on vit est réel. William est mort. Sissi va sûrement avoir besoin d'une armée de psychologues et regarde à quel point Ulrich voudrait disparaître sous terre.

Le concerné passa nerveusement sa main dans ses cheveux, toujours sans oser lever les yeux.

- Je suis le plus mal placé pour juger mais ouais, c’est bizarre. Il m’est arrivé grosso modo la même chose mais… la vache, Odd !
- Désolé.
- Tu n’as pas à t’excuser, intervient Aelita. On aura tout le loisir d’en parler une fois dehors, c’est pas le moment de craquer, on a déjà assez de Yumi.
- Désolé, répéta Odd. Tu peux venir avec moi, je dois vérifier un truc.

Ulrich ne put dissimuler son air gêné mais il suivit Odd jusqu'à la fenêtre.

- Je m'en doutais.
- Tu m'expliques ?
- Pendant mon cauchemar, XANA a essayé de me faire croire qu'en affrontant ma peur, je les ferai disparaître. Je préférais vérifier mais il y avait peu de chances que ce soit vrai.
- C'est dégueulasse ! s'emporta Ulrich. On a tous subi notre cauchemar, pourquoi ça ne s'arrête pas ?
- Allons chercher les autres.
- Attendez, vous avez laisser Yumi et Jérémie seuls ? réalisa Odd. Vous n'avez pas peur de ce qu'elle pourrait faire ?
- Jérémie pense que c'est au contraire le meilleur moyen de la garder calme : montrez qu'on lui fait toujours confiance.

Odd haussa vaguement les épaules. Cette fois, il se sentait vraiment vide. Il suivit des yeux Aelita qui se dirigea vers la chambre d'amis, non sans grimacer en regardant vers la porte d'entrée. De toute évidence, ils étaient toujours prisonniers.

- Je vais chercher Sissi ? demanda Yumi une fois qu'ils furent réunis dans le salon.
- A quoi bon ? C'est nous que XANA veut.
- Alors mes Kankrelats, on ne joue plus ?

La voix les fit trembler. Instinctivement, les regards se tournèrent vers le haut-parleur survivant.

- Nous n'avons fini que le premier jeu. Tirez les cartes, qu’on rigole un peu.
- L'ancien XANA me manque, soupira Jérémie.

Sans se laisser démonter, Odd s’approcha de la table basse et attrapa la première carte.

- « L’orage a fini d’approcher. Les éclairs jaillissent, la pluie vous frappe ».

Personne ne fit de commentaire. Des trombes d’eau tombaient soudain dehors.

- Il nous avait déjà fait la neige, après tout, la pluie, c’est sympa, railla Odd. S’il croit nous faire peeeeeeeur !
- Odd !

Un rayon électrique avait jailli d’un haut-parleur pour venir frapper Odd. Ulrich se leva aussitôt mais avant qu’il ait pu faire deux mètres, un second éclair brilla dans la pièce.

- Tirez-vous ! hurla Jérémie.

Il attrapa la main d’Aelita et se rua dans le couloir éclairé par des flashs aussi lumineux que mortels.

- On ne peut pas abandonner Odd ! cria la jeune fille.
- Et on ne peut pas rester ici à se faire tuer !

Trop effrayée pour résister, Aelita laissa Jérémie la guider jusqu’à sa chambre. A tâtons, il la conduisit jusqu’à son lit.

- Reste là.
- Mais les autres…
- Je retourne les aider. Il faut que tu restes cacher. Réussir à sortir d’ici ne nous servira à rien si tu es blessée.
- Jérémie…

Aelita se tut. Son petit ami venait de lui déposer un furtif baiser sur les lèvres.

- Je t’aime.
- Jérémie !

Aelita sentit une bouffée d’angoisse l’étouffer.
Elle était seule dans la pièce et il lui fallut quelques secondes pour comprendre à quel point c'était plus effrayant que ce qu'elle croyait. Yumi lui avait annoncé la mort de William et Ulrich avait précisé que Sissi dormait dans sa chambre.
Où était-elle passée ?
Comme si tout son corps avait décidé de paniquer, ses narines s'écartèrent. Une odeur écœurante flottait dans l'air.
De l'essence.

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Chapitre 13 : Game over


- Odd, mon pote, tu m’entends ?
- Ulrich, il faut qu’on sorte de là !
- Pas sans Odd.

Avec un grognement, Ulrich hissa son ami sur son épaule. Guidé par Yumi qui avait eu le réflexe de saisir une bougie, il atteignit le hall au moment où l’orage cessait.

- Merci, XANA, soupira Yumi en se laissant tomber sur le sol. On a perdu Jérémie et Aelita dans la bataille.
- Bonne stratégie. Maintenant, le spectre a le champ libre.
- Au moins, les éclairs ont détruit les champs de force.
- Si tu veux mon avis, c’est encore un piège, soupira Ulrich.

Il s’approcha de son ami inconscient et lui tapota les joues.

- Odd, dis quelque chose mais pas quelque chose.
- Quelque chose mais pas quelque chose.
- Super. Au moins, nous trois, on sait qu’on est les vrais.
- Sauf que sans Jérémie, on ne peut pas sortir d’ici.
- Théoriquement, la bombe est encore dans le salon. Or, Ulrich, tu es le seul à en avoir déjà utilisé une.

Odd et Ulrich échangèrent un regard suspicieux.

- Tu suggères qu’on s’échappe en abandonnant les autres ?
- L'assemblage que tu appelles bombe n'y ressemble clairement pas et sans Aelita, ça ne servira à rien de sortir pour aller sur Lyoko.
- Bon alors on va chercher Aelita.
- Et si c’est elle le spectre ?
- Dans les deux cas, on est perdus.

Les trois amis se relevèrent. Ils avaient à peine fait trois pas qu’ils trébuchaient sur un corps.

- Sissi !

Yumi s'accroupit et grimaça.

- Je ne sens pas son pouls.
- Non, je refuse de croire qu'elle est morte, s'emporta aussitôt Odd. Elle a dû descendre nous rejoindre et a fait un malaise, c'est tout.
- Odd...
- On n'est pas infirmiers. On devrait rester avec elle le temps qu’elle reprenne connaissance.
- Elle n’intéresse pas XANA. Elle ne risque rien.
- On ne sait jamais !

Alors que Yumi allait protester, Ulrich déclara :

- D’accord. Veille sur elle, on revient le plus vite possible avec Aelita. Appelle les pompiers aussi, tant pis pour les remarques qu'ils feront.

Sa main se glissa dans celle de Yumi et il plongea son regard dans le sien. La flamme qui y brûlait interdit toute question à la japonaise. La bougie levée à hauteur de son visage, elle jeta un coup d’œil dans la cuisine.

- Personne.
- J’ai cru entendre du bruit dans l’escalier.
- C’est parti.

À peine avaient-ils atteint le premier étage que Yumi demanda :

- Pourquoi tu cherches à te débarrasser de Odd ?
- D’abord, il insiste avec son jeu, puis il insiste à nouveau pour qu’on mette les cauchemars en même temps, ensuite il réagit à la provocation de XANA, déclenchant la foudre, maintenant il veut absolument protéger Sissi. Y a quelque chose de louche.
- Mais il a été sacrément touché par l’éclair.
- Technique primaire de diversion. Une attaque sérieuse sans être mortelle commanditée par l’assassin qui veut passer pour une victime.
- Et si c’était Sissi le spectre ?
- Dans ce cas, on doit se dépêcher de retrouver Aelita pendant que Odd la surveille.

***


- Rien dans la salle de bain. Super, il ne reste plus que la chambre d’Aelita.
- Ce serait logique qu’elle y soit.
- La logique, c’est l’affaire des programmes informatiques pas la mienne, désolé.
- Ce n’était pas un reproche.

Yumi et Ulrich avaient tous deux conscience qu’ils parlaient pour ne rien dire, simplement pour dissiper leur peur. Ils n’avaient croisé personne, ni entendu le moindre bruit et l’Ermitage n’était pas assez grand pour qu’on puisse croire à un simple éloignement physique. Ils avaient sciemment commencé par la salle de bain, animé par un espoir vain, mais ils n'avaient plus ce luxe. Quelque chose leur soufflait que XANA entamait sa dernière manche.
Ils avancèrent en silence jusqu’à la chambre d’Aelita mais Yumi s’arrêta avant d’y arriver.

- Ulrich ?
- Oui ?
- Tu sais, cette histoire de copains et c’est tout…

Ulrich la regarda sans comprendre.

- Tu veux vraiment qu'on en parle maintenant ? Tu me fais penser à cet abruti de Turner qui demande Elisabeth en mariage en pleine bataille finale !
- C'est vrai que c'est la chose la plus idiote qu'il ait faite.
- Yumi, ça va aller, OK ?

La japonaise hocha la tête.

- Je suis désolée. J’aurais dû me douter que je n’arriverais pas à t’oublier, même avec l’extinction du Supercalculateur.

Dans d'autres circonstances, Ulrich aurait été fou de joie. Mais conscient que Yumi n'était pas dans son état normal, il se contenta d'un sourire forcé.

- Je suis ravi de ton échec. On en reparle plus tard ?

Yumi hocha à nouveau la tête et ouvrit la porte de la chambre d’Aelita. Ulrich entra devant elle, prêt à frapper.

- Y a quelqu’un ?
- Yumi ?

La voix s’élevait du couloir qu’ils venaient de quitter. La japonaise se retourna avec un soupir de soulagement.

- Aelita ! On avait peur que…

Les mots se perdirent dans un horrible gargouillement. La bougie roula sur le parquet et s’arrêta contre une étagère qui prit aussitôt feu.
Assise sur son lit, Aelita hurla.
Le spectre avait pris son apparence. Un couteau tâché de sang à la main, il regarda avec cruauté le corps de Yumi tomber sur le sol.
La japonaise mourut persuadée que c’était son amie qui l’avait tuée.

- YUMI !

Le hurlement d’Ulrich couvrit à peine le grondement des flammes qui se répandaient. Les bras autour du corps de celle qu’il aimait, il hurla encore son prénom, comme si cela avait eu le pouvoir de la ramener à la vie. Les yeux écarquillés, Aelita le regardait sans réussir à bouger.
Son cauchemar, son vrai cauchemar, se réalisait.

- Salut, Aelita, lança le spectre sans se préoccuper d’Ulrich. Je suis tellement content de te voir.

Folle de panique, Aelita n’hésita pas. Elle fit la première chose qui lui passait par la tête pour éviter à la fois les flammes et le spectre.
Elle sauta par la fenêtre.
Le choc lui coupa le souffle et elle crut l’espace d’une seconde que sa cheville s’était cassée. Elle se releva en tout hâte, voulut s’élancer, heurta quelqu’un.

- Aelita ?
- Jérémie !

La jeune fille fondit en larmes.

- Il a eu Yumi ! Le spectre ! Il a…

Aelita s’interrompit et plutôt que de se jeter dans les bras de son petit ami comme elle en avait l’intention, elle le toisa avec suspicion.

- Qui me prouve que c’est bien toi ?

Jérémie manqua s’étouffer. Il avait une lèvre gonflée, un œil au beurre noir et boitillait.

- Aelita, XANA a créé deux spectres polymorphes. Ils me sont tombés dessus cette nuit alors que tu buvais dans la cuisine. Ils m’ont enfermé dans la remise, je viens juste de m’échapper. Je crois que c’est toi qu’ils veulent.
- Et bien sûr, ils ne t’ont pas tué ? railla Aelita avec un rire hystérique. William est mort, Yumi est morte, mais toi, ils t'ont juste enfermé dans la remise. Tu crois que je vais avaler ça ?

Déchaînée par la peur, elle repoussa Jérémie et partit en courant.
Les premiers hurlements ne tardèrent pas à se faire entendre. Lorsqu’Aelita fit irruption dans une clairière, les loups étaient déjà là.
Et ils n’étaient pas seuls.
Jérémie, boitillant du mieux qu’il pouvait derrière sa belle, eut le souffle coupé en arrivant à son tour à la clairière. Son premier réflexe fut de grimper à un arbre mais les loups ne s’intéressaient pas à lui.
Ils regardaient avec passion leur nouvelle maîtresse revenir sur le sol.

XANA a réussi à matérialiser la Méduse. Non, c’est impossible.

Jérémie n’arrivait pas à croire ce qu’il voyait. Aelita, sa douce Aelita, avait le regard déformé par le signe de XANA. Entourée par les loups, elle partit en direction de l’usine, la Méduse sur les talons.

***


- Sissi, réveille-toi, bon sang. Réveille-toi !

Sans se soucier de Kiwi qui aboyait comme un dément, sans se soucier des flammes qui léchaient le plafond au-dessus de sa tête, Odd tirait du mieux qu'il pouvait le corps de Sissi.

- Ils avaient tous raison, je ne suis qu'un maigrichon. Mais merde, Ulrich, Yumi, qu'est-ce que vous foutez ? hurla-t-il en direction de l'escalier.

La seule réponse qu'il obtint fut une planche en feu s'écroulant sur les marches. Il sut que si un jour, il devait à nouveau dessiner un cauchemar, il n'hésiterait pas. L'incendie se propageait vite, tellement vite. Le bois craquait de toute part, les braises pleuvaient, la chaleur l'étouffait.
Et aucun de ses amis ne revenait.
Dans un dernier glapissement, Kiwi courut à l'extérieur de la maison. Une nouvelle angoisse serra la gorge d'Odd. Et si XANA décidait de rétablir ses champs de force ?
Se mordant les lèvres à en saigner, il ne lutta pas contre les larmes qui venaient flouter sa vision.

- Désolé, Sissi.

La gorge nouée, l'estomac au bord des lèvres, il lâcha le corps et courut rejoindre Kiwi. Il ouvrit le portail à la volée, chercha son portable dans sa poche, réalisa qu'il l'avait donné à Jérémie pour sa « bombe ». Il courut entre les arbres, son souffle résonnant dans ses oreilles. Il se concentra sur Kiwi qui détalait devant lui. Il essayait tant de ne penser à rien d'autre qu'il ne vit pas la racine.
Le choc avec le sol lui coupa la respiration. Dans un réflexe, il hurla :

- Kiwi !

Le chien revint vers lui mais se figea à un mètre. Son poil se hérissa alors qu'il fixait un point derrière Odd. Celui-ci se retourna, terrifié, déjà convaincu qu'il allait mourir.
Yumi se tenait devant lui. Glaciale, ténébreuse, belle et repoussante. Elle s'agenouilla et siffla, la main tendue vers Kiwi. Le chien hésita. Déjà, Yumi se matérialisait près de lui. Elle le prit dans ses bras sans se soucier de ses aboiements et sourit à Odd. Celui-ci comprit aussitôt.

- Nan, laisse-le...

Le sourire du spectre s'élargit. Ses doigts se refermèrent autour du cou de Kiwi qui glapit, gémit, pleura. L'emprise se raffermit, les doigts serrèrent encore, plus fort, jusqu'à ce que la tête de l'animal soit séparée de son corps, sautant dans l'air comme un bouchon de champagne.

- NON !
- Tu avais moins de considération pour moi, murmura une voix toute proche.

Odd se tourna sur le côté et manqua vomir. William le regardait mais ce n'était plus William. C'était un cadavre au visage boursoufflé, aux yeux injectés de sang, à la peau en lambeaux. Il était allongé près de lui et laissait apercevoir des crocs acérés. Il ne tarda pas à lever une main griffue vers Odd.

- Alors, il paraît que tu aimes les zombies ?

***


Debout devant le portail de l’Ermitage, Jérémie regardait les restes de la maison brûler. À sa grande surprise, aucun camion de pompier n’était venu. A croire qu’une fois de plus, il était seul. Malgré l’intensité des flammes, il avait l’impression de mourir de froid. Il aurait tout donné pour être effectivement mort.
Il avait retrouvé le cadavre de Odd, déchiqueté, et n'avait pas eu le courage de continuer ses recherches. A quoi bon ?
William mort. Yumi morte. Aelita xanatifiée. Ulrich et Sissi introuvables.
Que lui restait-il, au pauvre Einstein ?
Un cerveau pour se souvenir et des yeux pour pleurer.
Une main se posa sur l’épaule de Jérémie. Il espéra un instant que ce soit un spectre envoyé pour l’achever mais il savait qu’il se trompait. XANA comptait sûrement l’éliminer avec davantage de panache.

- Qu’est-ce qu’on fait ? soupira-t-il.
- J’en sais rien.

Ulrich avança à côté de son ami. Son visage à moitié brûlé n’exprimait plus aucune émotion.

- On a perdu ? insista Jérémie.
- De toute évidence. Tu as trouvé Odd ou Sissi ?
- Odd est mort.
- Donc Sissi était morte avant ou alors, c'était un spectre.
- Je pense qu'elle est morte.

Jérémie marqua une pause. Ulrich l’avait sauvé lors de la toute première attaque de XANA. Il avait été le premier à ses côtés.
Et il serait le dernier.

- Qu’est-ce qu’on fait ? demanda à son tour Ulrich.
- Aelita est xanatifiée.
- Alors qu’est-ce qu’on fait ?
- Ce qu’on a toujours fait.

***


- Comment se fait-il que le Supercalculateur soit rallumé ?
- J’imagine que XANA est passé par un autre réseau pour créer un ou plusieurs spectres qu’il a envoyés ici.

Ulrich n’insista pas. Face à la mort de leurs amis, ce n’était qu’un détail.
Il n’eut pas besoin que Jérémie lui explique l’image qui apparut d’un coup sur l’écran. Aelita les regardait avec un air narquois qui ne pouvait avoir plusieurs significations. En revanche, quand son ami eut un rictus, il demanda :

- Quoi, qu’est-ce qu’il y a ?
- Tu vois ces lignes ? XANA contrôle Lyoko, le Supercalculateur, les scanners. Dans l’hypothèse où on arrive à se virtualiser, il ne nous laissera sûrement pas revenir.
- Tu veux dire qu’on va rentrer dans les scanners sans savoir si on sera virtualisé ou désintégré et sans savoir où on arrivera si tout se passe bien ?
- Je vais utiliser les dernières coordonnées, ce sont sûrement celles de l’endroit où se trouve Aelita. Mais j’ignore effectivement ce qui va marcher ou pas.
- Un retour vers le passé est exclu j’imagine ?
- Le programme a l’air d’avoir disparu et de toute façon, XANA ne me laissera pas l’utiliser.

Jérémie hésita avant d’ajouter, sans grande conviction :

- Ulrich, on peut encore aller chercher la police.
- Pour faire quoi ? On a une maison en feu et trois cadavres, peut-être quatre, sur les bras. Qu’est-ce que tu veux avancer comme justification ? Au mieux, on finira à l’asile en attendant que XANA trouve un moyen de nous achever. De toute façon, tu veux vraiment vivre avec ça ?
- Mais nous sommes les seuls qui restent. Si on se précipite dans la gueule du loup, XANA aura gagné.
- Jérémie. XANA a déjà gagné.

Le blondinet remonta ses lunettes sur le haut de son nez.
Quelques minutes plus tard, il effectuait le même geste, dans le décor aveuglant du Désert. Il avait conscience d’être ridicule mais il s’en moquait.
Toujours à ses côtés, Ulrich sortit un de ses sabres.
Face à eux, debout sur un Krabe, Aelita les regardait avec mépris et amusement. Une horde de monstres s’agitait derrière elle.
Jérémie attrapa son arme dérisoire, grimpa sur l’overwing et attendit que le moteur de l’overbike rugisse.
Pouvait-on appeler ça un sacrifice quand il n’avait aucune utilité ?
Jérémie regarda Aelita. Elle n’avait jamais été si laide. Ses traits avaient perdu toute leur douceur, son sourire n’était plus que sadisme.
Ce fut ce sourire qui lui fit comprendre qu’il avait tout perdu.
Il se lança dans son unique bataille sur Lyoko.

***


- Intéressant, n’est-ce pas ?
- Plutôt.

Les deux scientifiques échangèrent un regard. Sur un écran, ils pouvaient contempler le désert de Lyoko tandis qu’un autre affichait le Supercalculateur.

- Tu penses que les chefs seront satisfaits ?
- Sachant le nombre d’effectifs qu’ils ont mis sur le coup et le nombre d’heures passées à observer ces enfants pour les manipuler au mieux, il y a intérêt.
- Justement, tu es sûr que ça leur ira ?
- On vient de se débarrasser de la pire de leurs plaies, évidemment qu’ils seront satisfaits. Ils voulaient qu’ils souffrent, je pense qu’ils ont souffert. À mon avis, ils regarderont plusieurs fois les enregistrements des visuels.
- Quand même, ce sens macabre du spectacle…
- C’était plus amusant que de les aligner contre un mur, non ?
- Effectivement. N'empêche... On travaille pour de sacrés pervers.
- Évite de faire cette remarque devant eux si tu ne veux pas finir comme ces gosses.

Le silence s'installa, jusqu'à ce que l’un des hommes désigne l’écran du désert, sur lequel une silhouette attendait.

- Qu’est-ce qu’on va faire d’elle maintenant ?
- Ce n’est plus de notre ressort. Aelita Stones est détruite, comme le souhaitait les patrons. Ils ont sa vie, sa mémoire, son enveloppe corporelle. Ce n’est plus notre boulot. À eux de voir ce qu'ils veulent en faire.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

Réponses: 22
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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Sam 13 Jan 2018 23:28   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Spoiler


Ce chapitre est dédié à Ikorih, même si ça n'atténuera pas la douleur du chapitre précédent, n'est-ce pas ? Allez, sans rancune (LACHE CE POMPE TOUT DE SUITE !).
LANCE-GRENADE!
Et puisqu'A8s en parle, allez voir Jumanji, il est grave bien !

Bonne lecture !

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Chapitre 11 : L’éclat froid du métal


- Tu as peur ?
- Je crois que c’est le but. Mais je suis surpris qu’il ne se passe rien.
- Attends un peu.

Aelita se voulait méfiante mais la situation ne l’aidait pas. Elle avait posé sa bougie et celle de Jérémie sur la commode de la chambre d’amis et la petite taille de la pièce permettait à la lumière de se répandre partout. Il n’y avait rien d’autre qu’un lit, un fauteuil et un placard intégré dont la porte coulissante était fermée.

- On devrait peut-être vérifier les étagères ?
- Aelita, mon cauchemar consiste en une attaque de robots. Tu crois vraiment qu’ils se cachent dans le placard en attendant de nous sauter dessus ?

Jérémie alla s’asseoir sur le fauteuil et son amie le dévisagea. Il ne ressemblait soudainement plus à l’adolescent effrayé qu’elle avait vu à plusieurs reprises. Il était serein, bien trop serein.

- Tu n’as pas l’air d’avoir peur, insista-t-elle.
- Bah, après avoir vu l’araignée de William, je t’avoue que des robots me semblent soudain moins effrayants.

Aelita hocha la tête et son cœur se serra en repensant à William. XANA avait mis hors-jeu la seule personne en qui elle avait confiance.

***


Recroquevillée dans un coin de la cuisine, Yumi n’arrivait toujours pas à calmer ses émotions. Ses membres tremblaient, de rage, de peur, elle n’aurait su le dire. Elle avait conscience d’être en état de choc et de devoir rester calme mais l’instant d’après, elle voulait hurler. Dès qu’une pensée rationnelle lui venait à l’esprit, elle était soufflée par les théories de son cœur terrifié.

Ça ne peut pas être mes parents, XANA aurait dû ouvrir une porte pour les faire entrer, ça aurait fait sonner l’alarme. Oui mais l’alarme de Jérémie peut être mal faite. Et un spectre a pu la désactiver n’importe quand pendant la nuit. XANA aussi d’ailleurs, l’électricité c’est son truc. De toute façon, tout est de la faute de Jérémie. C’est lui qui a rallumé le Supercalculateur. C’est lui qui l’a gardé actif pour sauver Aelita. Non, c’est la faute d’Aelita du coup ! De son crétin de père !

Yumi étouffait, elle n’arrivait plus à faire le tri dans ses pensées, sa rationalité n’effectuait plus aucun filtre.

Lyoko ne m’a apporté que des emmerdes. L’aventure, l’amitié, tu parles ! Je me serais fait plus d’amis si je n’avais pas été étouffée dans mon groupe. Jérémie a gâché mon existence le jour où il a abaissé cette manette. Il peut roucouler tranquille avec sa copine et faire joujou avec son gros cerveau sans jamais risquer sa vie de trop près, sans jamais trop se salir les mains. Pourriture.

Perdue dans son combat intérieur, Yumi eut l’impression de s’entendre de l’extérieur.

Cauchemars : un jeu de frissons où vous affronterez vos peurs les plus intimes et vos pires fantasmes. Chaque pièce se transforme en lieu d’effroi. Combattez vos angoisses pour gagner.

En lisant ces trois phrases, elle s’attendait à un jeu débile, pas à une réalité si prenante. Pourquoi avait-elle accepté de participer ? Elle n’était qu’un mouton. Toujours un pauvre et faible mouton, harcelé sournoisement par le loup. Un loup à qui elle n’avait rien fait, un loup qui n’avait jamais voulu la manger elle. Elle qui concrètement ne pouvait rien contre lui…

Vos peurs les plus intimes et vos pires fantasmes.

Aelita n’avait pas choisi son père. Aelita n’avait pas choisi d’être envoyée sur Lyoko. Aelita n’avait pas demandé à ce qu’on se batte pour elle. Elle n’était pas responsable finalement. Elle aurait pu continuer son sommeil éternellement sans que personne n’en souffre, s’il n’y avait pas eu Jérémie…

Vos pires fantasmes.

Yumi sentit son souffle s’accélérer. Ses yeux furent attirés par un tiroir, un tiroir qu’elle avait elle-même rempli. Elle savait ce qu’il y avait à l’intérieur et c’était tentant, si tentant…
Ses doigts agrippèrent nerveusement la poignée. Le champ de force de la fenêtre se refléta sur la lame d’un couteau. Un éclat froid, sans vie.

Offre-moi ce que je veux et tu seras libre.

***


- On peut pas la laisser là.

Odd suivit le regard d’Ulrich et frémit, jugulant à grande peine une envie de vomir. Sissi dormait, la tête encore posée sur la poitrine de William qui ne se soulèverait plus jamais.

- On ne peut pas la laisser se réveiller et voir ça, c’est trop…

Ulrich ne trouvait pas le mot adéquat mais Odd avait saisi l’idée. Il s’approcha de Sissi et lui secoua doucement l’épaule. Elle se réveilla en sursaut.

- Qu’est-ce qui se passe ?
- Il faut laisser William se reposer. Viens, va t’allonger dans la chambre d’Aelita, tu seras mieux.

Sissi ne savait plus où elle était et suivi docilement Odd et Ulrich. Elle se sentait fatiguée, tellement fatiguée, elle voulait juste se recroqueviller pour dormir plusieurs jours.
Elle s’écroula sur le matelas d’Aelita. Odd s’assit à côté du lit alors qu’Ulrich restait debout près de la porte, les yeux rivés vers l’escalier. Il n’osait pas rejoindre Yumi. Il ne savait pas quoi dire pour la rassurer et elle n’avait pas besoin d’entendre des futilités qui n’arriveraient pas à la convaincre. Après avoir jeté un coup d’œil à Sissi pour s’assurer qu’elle dormait, il demanda :

- Si William est vraiment mort, tu crois que les parents de Yumi… Qu’Hiroki…
- Je sais pas. On peut seulement espérer qu’Einstein nous trouve une solution et qu’on se rende compte que tout ça n’est qu’un cauchemar.
- Super espoir…

Odd parut hésiter. Ce fut au moment où il ouvrait la bouche que les premiers sons déchirèrent le silence.

- C’est quoi ce délire ?

Ils se précipitèrent en même temps dans l’escalier. Les bruits venaient de la chambre d’amis. Ulrich secoua la poignée mais elle refusa de s’ouvrir.

- On dirait les tirs de lasers dans Star Wars.
- Tu crois que c’est le cauchemar de Jérémie ?
- Arrête, il a quand même pas peur des Stormtroopers !

Le robot qui affrontait Aelita et Jérémie n’était effectivement pas un soldat de l’Empire. D’un gris sombre, il avait une énorme tête ovale, un corps si large qu’il cachait presque un mur entier et deux bras terminés par des pistolets. Ceux-ci crachaient des tirs bleutés, laissant des traces de brûlés sur ce qu’ils touchaient.
Recroquevillée derrière le fauteuil, Aelita observait Jérémie. Il commençait à paniquer, pourtant, inversion des rôles, elle restait calme. Un détail la perturbait.

- On dirait qu’il attend quelque chose.

Jérémie jeta un coup d’œil derrière le fauteuil. Un tir laser lui frôla aussitôt la joue mais Aelita avait raison : le robot aurait eu mille fois le temps de démolir leur protection improvisée pour les exterminer. Quel était son rôle ?
Avant qu’elle ne trouve une réponse, le fauteuil explosa. Un éclat la heurta à la tête et elle sentit la pièce tourner autour d’elle. Les champs de force lui brûlaient la vue, se reflétant à l’infini sur le robot qui pointait un pistolet sur elle.

- Aelita !

Jérémie se précipita devant son amie, offrant son dos au tir qui n’allait pas tarder à suivre. Ses yeux croisèrent ceux de la jeune fille. Elle n’y vit qu’une angoisse profonde et une affection certaine.

- Pardon, murmura-t-elle.
- De quoi ?
- D’avoir douté de toi.

Jérémie ne répondit pas mais il la serra contre lui, la tête instinctivement rentrée dans les épaules.

- Pardon.
- De quoi ?
- D’avoir dessiné ce fichu robot.

Aelita eut une faible envie de sourire, elle ne réussit qu’à pleurer. Pourtant, ce ne fut pas un tir qui résonna dans la pièce mais une voix sournoise.

- Regardez-vous. Intellectuels, brillants… et si ignorants. Vous avez fait la même erreur stupide, celle de croire que vos peurs résidaient sur des choses purement physiques, des choses fragiles, cassables. Bande de naïfs.

Aelita fronça les sourcils. Que sous-entendait XANA ?
Avant qu’elle ait pu envisager une réponse satisfaisante, le champ de force leur barrant la sortie disparut et la porte s’ouvrit.

- On a gagné ? s’étonna Jérémie, n’osant croire à sa chance.

Comme pour confirmer, le robot disparut. La pénombre reprit ses droits mais Aelita discerna clairement Yumi dans l’encadrement de la porte. Elle allait se réjouir quand elle aperçut le couteau.

- Jérémie.

La voix de la japonaise était glaciale mais le garçon ne sembla pas s’en rendre compte. Il se précipita vers elle alors qu’Aelita était toujours recroquevillée sur le sol.

- Les autres vont bien ?
- Oui.
- Tu as vu le robot ?
- Non.
- Il n’a rien eu le temps de nous faire, il a disparu sans nous tuer ! Aelita a été légèrement touchée mais elle est consciente.
- Et toi tu n’as rien ?
- Non, ça va.
- Tant mieux.

Le pied de Yumi cueillit Jérémie au creux du ventre, l’envoyant s’écrouler contre le mur.

- Qu’est-ce que tu fais ? s’étrangla Aelita. Arrête !

Yumi la repoussa d’un simple revers de la main et s’accroupit à côté de Jérémie qui hoquetait. Il écarquilla les yeux quand son amie l’attrapa par le col. Son visage fermé ne montrait rien d’autre qu’une profonde résolution et sa voix ne tremblait pas quand elle chuchota à son oreille.

- D’abord, je peux te jurer solennellement que je ne suis pas un spectre. Je suis bien moi, Yumi. La Yumi qui a eu le tort de suivre Ulrich quand tu l’as entraîné vers Lyoko. La Yumi qui n’aurait jamais rien dû avoir à faire avec vous.
- Mais…
- Tu as saisi, Jérémie, tu as bien saisi ? Je ne suis pas un pion de XANA comme tu l’as été toutes ces années. Je suis moi et c’est moi qui vais te tuer. Moi, pas XANA. Tu l’as bien intégré ?
- Yumi, tu délires.

Pour toute réponse, la japonaise leva son couteau.

- Yumi, non !

Aelita n’eut pas le temps de bouger mais Jérémie ne sentit pas le coup. Odd et Ulrich venaient de se précipiter dans la pièce et tiraient Yumi en arrière.

- Non mais ça va pas bien dans ta tête, tu crois vraiment que c’est le moment de péter un câble ?
- Lâchez-moi.
- Yumi, calme-toi, la supplia Ulrich en la forçant à le regarder dans les yeux.

Ce qu’il vit le fit frémir. Le regard de la japonaise dégageait une violence inouïe, un concentré de haine et d’hostilité.

- Je suis encore dans mon cauchemar, c’est ça ? demanda Jérémie avec un rire nerveux. Vous êtes tous des spectres et je suis dans mon cauchemar.
- Jérémie, ne craque pas non plus.

Le garçon grimaça en se relevant avec difficulté. Aelita se précipita pour le soutenir pendant que Yumi continuait de se débattre.

- Vous croyez que c’est elle le spectre ?

Personne n’osa répondre. Ulrich maintenait du mieux qu’il pouvait les bras de la japonaise serrés contre son corps tandis que Odd s’efforçait de lui faire lâcher son couteau. Finalement, ce fut Yumi elle-même qui répondit dans un ricanement froid.

- Si j’étais le spectre, j’utiliserais mes pouvoirs et vous seriez tous par terre sans pouvoir faire autre chose que me regarder massacrer Jérémie.
- Arrête de dire ça, t’es pas bien ou quoi ?
- Ulrich, tu étais là.

La voix de Yumi avait brusquement changé. De la colère persistait dans ses yeux mais on y lisait soudain un profond désespoir et des sanglots pointaient dans chacun de ses mots.

- Tu étais là, tu as entendu XANA. Si je lui offre ce qu’il veut, je serai libre.
- Et tu crois que c’est ça que XANA veut ? Pourquoi Jérémie plutôt qu’Aelita ? Pourquoi lui plutôt que nous tous ? Qui te dit qu’une fois Jérémie mort, XANA ne te demandera pas de nous égorger un par un ? De m’égorger moi ? Réfléchis un peu !
- Je… ça paraissait tellement évident, je… je…

Le couteau heurta le sol. Kiwi, jamais loin de son maître, s’avança, le museau aux aguets, mais Odd claqua de la langue pour l’arrêter. Il desserra doucement son emprise sur Yumi qui se laissa tomber contre Ulrich, les épaules secouées par ses pleurs. Pendant plusieurs minutes, rien d’autre ne bougea.
Quand elle réussit à retrouver une respiration normale, Yumi se tourna vers Aelita et Jérémie qui eurent un même mouvement de recul.

- Je ne suis pas le spectre.
- Je ne sais pas si c’est censé nous rassurer, avoua Aelita. Tu as vu dans quel état tu es ? Tu te rends compte de ce que tu voulais faire ? De ce que tu veux peut-être toujours faire ?
- Je suis désolée, je pète complètement les plombs...
- Elle ne l'aurait pas fait, intervint Ulrich. Tu n'es pas comme ça, Yumi, et on le sait.
- Je… Mon cauchemar, c’était ma famille morte dans le bureau. Je n’ai aucun moyen de savoir si leurs cadavres n’étaient que des spectres ou s’ils sont réels. Je veux… je veux juste sortir d’ici et les revoir. Serrer ma mère dans mes bras et dire à mon frère que je l’aime. C’est tout ce que je demande.

Les larmes roulèrent à nouveau sur les joues de Yumi.

***


Sissi ouvrit les yeux. Elle n’était pas dans sa chambre. Son cerveau avait beau tourné au ralenti, elle sentait qu’elle n’était pas dans sa chambre.
Un frisson parcourut ses bras alors qu’une peur reptilienne la saisissait. Où était-elle ?

- William ?

Personne ne lui répondit. Elle porta la main à sa poche sans y trouver son portable. Elle réalisa au passage qu’elle était habillée. Au lit mais habillée ? Que lui était-il arrivé ?
Ses yeux n’arrivaient pas à s’habituer à la pénombre. Elle ignorait si un interrupteur se trouvait à portée de main.
Sa tête tourna lorsqu’elle s’assit sur le lit. Une fois debout, elle eut besoin de rester appuyée contre le mur avant de pouvoir marcher. Aidée par un rai de lumière au ras-du-sol, elle discerna la porte et tâtonna pour l’ouvrir. Le palier était éclairé. Il lui était familier mais elle se sentait pourtant toujours aussi perdue.

- William ? appela-t-elle à nouveau.

Le silence l’oppressait. Elle descendit l’escalier et se dirigea vers la porte d’entrée. Celle-ci s’ouvrit.
Sur un mur de briques.
Sissi sentit son souffle s’accélérer. Elle entra dans la première pièce ouverte qu’elle vit. Une salle à manger, à peine meublée, qu’elle traversa pour ouvrir une autre porte.
Elle se retrouva à l’entrée d’un couloir, désert. Il n’y avait que quelques néons accrochés au plafond à intervalles réguliers. Pas de portraits sur les murs, pas de photos, pas même du papier peint. Juste un crépis grisâtre, partout.
Elle eut l’impression de marcher des heures, peu à peu terrorisée à l’idée que ce couloir ne finisse jamais. Comment diable une maison pouvait-elle être aussi longue ?
L’angoisse hurlait qu’elle allait mourir. L’abattement insinuait que de toute façon, faire demi-tour serait rallonger le chemin et qu’il valait mieux marcher. L’espoir, pour une fois, le soutenait car il n’y avait rien derrière elle. La solitude surtout pesait de tout son poids, rendant chaque pas plus difficile. Le calme se fixait aux souvenirs et réussissait à puiser sa force dans leur simplicité. Elle savait qui elle était, ce qu’elle aimait, qui elle aimait. Elle savait qu’elle n’avait rien fait de mal, qu’il y avait forcément une explication.
La méconnaissance de son environnement et de sa situation la rendaient vulnérable, la mettaient en danger. Son ouïe le lui rappela en captant un long sifflement derrière elle. Proche, loin ? Comment savoir ?
La naïveté voulut croire à un ami, la prudence la fit taire et ordonna aux jambes de courir. Elle ressentit les pulsations d’un corps lourd lancé à sa poursuite. Une odeur forte lui parvint. On se rapprochait. Et à perte de vue, il n’y avait toujours que ce couloir maudit.
La raison lui souffla de s’arrêter, c’était peine perdue, autant garder des forces pour faire face. Mais la peur décupla l’activité des jambes et elle courut, encore.
La première porte surgit sur sa gauche.
Elle n’osa pas s’arrêter pour l'examiner, de peur qu’on la rattrape, et grand bien lui en prit. Un mur fit éclater le bois, bloquant le couloir sur ses talons. Le soulagement voulut hurler de joie mais la peur resta plus forte. Des portes recouvraient désormais les murs et des briques en surgissaient. Il fallait courir, ne pas se laisser piéger entre deux remparts et surtout, ne pas les prendre de plein fouet. L’image d’une cloison jaillissant de sa gauche pour l’écraser sur la paroi de droite lui donna des ailes. La douleur mordait ses mollets mais la volonté gardait le cap. Courir, plus loin.
Et soudain, les yeux pleurèrent. Ils voyaient le bout du couloir. Une nouvelle porte, seule face à eux. Les parois du couloir redevinrent lisses et elle s’arrêta. La peur hurla qu’un mur allait peut-être surgir de cette issue providentielle, la percuter comme un train. Elle n’écouta pas. Ses doigts se posèrent sur la poignée qui tourna dans le vide. Elle hurla de frustration.
Quelqu’un frappa à la porte. Elle frappa en retour, de toutes ses forces.

- William ?

La porte manqua lui casser le nez. Décontenancée par la lumière du jour, elle fit face à un homme en uniforme militaire qui la regarda, les yeux écarquillés.

- Mais qu’est-ce que tu fous là ?

Une violente décharge électrique parcourut le corps de Sissi qui se réveilla en sursaut.
Cette fois, elle reconnut la chambre d’Aelita, illuminée par la bougie qu’Ulrich, debout à côté du lit, tenait à la main.
Cette fois, elle avait les idées claires et son instinct lui souffla qu’Ulrich avait quelque chose d’étrange.
Elle n’eut pas le temps de partager l’angoisse de son cauchemar. La main du garçon se posa sur sa poitrine. Elle voulut s’indigner de ce geste déplacé mais déjà, elle était morte.

***


Assise sur le lit de la chambre d’amis entre Odd et Jérémie, Aelita regardait à tour de rôle Yumi, prostrée contre le placard, et le champ de force sur la fenêtre.

- William s'est réveillé ? finit-elle par demander.

Le silence lui fit tourner la tête vers Odd qui se contenta de baisser les yeux.

- C'est pas possible...
- On ne pouvait rien faire. Sissi est dans ta chambre, elle dort à nouveau.
- Si on arrive à rejoindre l'usine, je lancerai un Retour Vers le Passé, promit Jérémie. Qui sait, ça peut peut-être marcher ?

Aelita avait la gorge trop nouée pour répondre. Tout ce qui se passait n'était pas réel, cela ne pouvait pas être réel. Pourquoi devaient-ils vivre ça maintenant ? Ce n'était pas juste !

- Qu’est-ce qu’on fait ? On a affronté nos cauchemars et on ne peut toujours pas sortir.
- On n’a pas vérifié la porte d’entrée, ne put s’empêcher de souligner Odd.

Ulrich, le plus près du couloir, tendit le cou et grimaça.

- Le champ de force est toujours là.
- Et l’un d’entre vous sait très bien pourquoi.

Les adolescents se regardèrent mais n’eurent pas le temps de s’interroger.

- Allez, Odd. Viens jouer. Viens jouer avec moi, chaton.

Le silence ne plana que quelques instants.

- Le salon, devina Odd.
- Je t'accompagne.
- Non Aelita. Je n’ai pas dessiné de cauchemar, je ne risque rien.
- Dans ce cas, pourquoi XANA te réclame ?

Odd haussa les épaules, affichant plus d’assurance qu’il n’en ressentait.

- Restez ici ensemble, ce sera plus sûr. C’est moi qui ai voulu joué, c’est moi qui vais pouvoir crier « Game over ». Fermez la porte, je viendrai vous l’ouvrir quand on pourra partir.
- Il est hors de question que tu y ailles seul.
- Relaxez-vous, j’ai rien dessiné, y a pas de soucis. Gardez juste Kiwi avec vous au cas où.

Il quitta la pièce en fermant la porte derrière lui. Aelita se raidit lorsque Yumi prit la place qu’il venait de laisser.

- Tu ne me feras plus jamais confiance ? soupira la japonaise.
- Ne sois pas si excessive. Je ne te ferai plus confiance jusqu’à ce qu’on sorte d’ici, c’est différent.
- On ne sortira jamais d’ici, alors ça revient au même.

Personne n’eut le courage de la contredire.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Lun 08 Jan 2018 20:39   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Spoiler


Après un chapitre physiquement violent, renouons avec le psychologique, sans pour autant délaisser le physique !

Bonne lecture !


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Chapitre 10 : La mort de l’innocence


Aelita, Jérémie, Ulrich et Yumi se tenaient devant la porte de la chambre d’amis. La première était la seule à avoir un visage serein.

- On se le fait à pierre / feuille / ciseaux ? proposa Yumi.
- Honneur aux dames.
- Jérémie ! Dans ce cas-là, la galanterie voudrait que tu te sacrifies !
- Ce n’est pas très moderne, surtout pour moi qui suis un fervent défenseur de l’égalité des seeeeeee...

La phrase de Jérémie se termina dans un petit cri plaintif lorsque Aelita ouvrit la porte et le poussa dans la pièce. Elle eut juste le temps de s’y glisser avant que la porte ne se referme, barricadée par un champ de force.

- Bon au moins, on a notre réponse, soupira Ulrich. Allons voir ce que nous réserve le bureau.

Yumi hocha la tête, de plus en plus nerveuse.

- Qu’est-ce que c’est ton cauchemar ?
- Ma famille morte. Je ne sais pas trop comment je suis censée en triompher. Je ne peux pas franchement les ressusciter. S’il y a bien un truc définitif, c’est la mort.
- Personne n’a jamais réussi à le prouver.
- Ulrich, je t’en prie… Tu crois vraiment que c’est le moment de s’engager dans un débat théologique ? Surtout face à un adversaire qui est une intelligence artificielle ?
- Peut-être pas.

Une fois à l’étage, Yumi se dirigea vers la chambre. Ulrich resta devant le bureau, conscient qu’il valait mieux la laisser seule pour l’instant.

- Sissi ?
- Elle dort, chuchota Odd en réponse.

Yumi entra dans la pièce. La poitrine de William se soulevait à peine mais Sissi, allongée contre lui, ne cessait de s’agiter dans son sommeil.

- Je ne sais pas comment elle fait pour dormir autant.
- Elle s’en voudra à mort quand elle se réveillera, elle voulait veiller sur William.
- T’inquiète, je suis là pour ça !

Odd avait perdu son ton enthousiaste. Yumi ne savait pas si elle devait se réjouir ou s’inquiéter. D'une certaine manière, cela éloignait les soupçons qui pesaient sur lui mais s'il perdait espoir à son tour, quel optimisme leur restait-il ?

- Jérémie et Aelita sont dans la chambre d’amis. Du coup, le bureau est pour moi.
- Tu vas t’en sortir comme une chef et dans vingt minutes max, on est dehors en train d’appeler les secours pour William.
- Croisons les doigts.
- Yumi, attends.

Cette fois, la japonaise s’inquiéta. Odd avait un air grave et lorsqu’il se redressa, elle vit qu’il tenait dans sa main une feuille couverte de dessins d’araignées noires.

- Quoi ?
- Je t’assure que la feuille qui était dans la cuisine, c’était celle de William. Je n’ai pas conduit Ulrich dans un piège, je n’ai voulu mettre personne en danger. Je te le jure sur ce que j’ai de plus cher. Je ne sais pas comment les dessins ont pu s’inverser.
- Je te crois, Odd.
- Tu pourras le dire à Ulrich, s’il te plaît ?
- Compte sur moi.
- Merci. Bon courage pour ton cauchemar.

Yumi hocha la tête en guise de remerciement et rejoignit Ulrich qui lui demanda timidement :

- Alors ?
- Toujours vivant. Rassure-moi, pour toi, qui surveille qui ?
- Sissi surveille Odd. Je ne lui fais plus confiance.
- C’est bien ce qui me semblait. Tu devrais lui laisser le bénéfice du doute.
- J’aimerais bien, Yumi. Ce serait plus facile pour moi d’accuser Sissi ou William, il n’empêche que ce n’est pas Odd qui est en train de mourir sur ce lit !

Yumi se tut. Elle avait peur qu’insister ne la rend suspecte aux yeux d’Ulrich. Elle connaissait assez son absence de limite quand il s’agissait d’être borné. Elle préféra changer de sujet.

- Ulrich ?
- Oui ?
- Dans le jeu, c’était moi le zombie.

Le garçon haussa un sourcil.

- Tu trouves que ça a encore de l’importance ?
- Je voulais que tu saches que tu aurais été le premier que j’aurais essayé de contaminer. Parce qu’avec toi à mes côtés, je me sens plus forte.

Ulrich observa son amie. Ses yeux timidement baissés, son sourire en coin, ses joues rosies. La lueur de la bougie ne la mettait pas à son avantage mais elle restait tellement belle.
Les doigts d’Ulrich se serrèrent un peu plus sur ceux de Yumi.

- Je serai toujours à tes côtés.
- Je sais. Moi aussi.
- Forcément. Prête ?

La japonaise hocha la tête et ouvrit la porte. Un souffle éteignit sa bougie tandis qu'ils avançaient dans la pièce. La première chose qui la saisit fut l’obscurité. Elle demanda aussitôt :

- Il n’y a pas de champs de force ici ? On aurait pu sortir par là depuis le début ?
- Ne nous réjouissons pas trop vite. J’ai l’impression que XANA ne veut juste pas qu’on voit trop vite ce qui se passe.
- C’est stupide, il doit y avoir trois spectres jouant le rôle de ma famille. Pourquoi il veut maintenir le suspense ?

Par acquis de conscience, Ulrich essaya de rouvrir la porte. Il n’y parvint pas, comme si celle-ci était fermée de l’extérieur.

- On va dire que c’est normal, soupira-t-il.
- Ulrich, j’ai peur.
- Je te rappelle que c’est le but.
- Oui mais là, ce qui me fait peur, c’est de ne justement pas savoir à quoi m’attendre. Si j’avais vu tout de suite les cadavres de mes parents et de mon frère, j’aurais été fixée mais là… Je ne comprends pas ce qui se passe. Qu’est-ce qu’on doit faire ?

Ulrich ne sut quoi répondre. Pendant de longues minutes, ils ne perçurent que leur propre souffle. Ils ne voyaient rien. L’obscurité complète et le silence pesant faisaient monter de plus en plus d’angoisse en Yumi.

- Ulrich, qu’est-ce qu’on doit faire ? répéta-t-elle.
- Je n’en sais rien, c’est ton cauchemar. Qu’est-ce qui te fait peur à part voir mourir ta famille ?
- Les mêmes choses que tout le monde j’imagine : me noyer, brûler vive, souffrir, étouffer, perdre quelqu’un, les psychopathes. Je n’aime pas trop les araignées, les serpents, les scorpions, les requins, les insectes. Et je déteste ne pas comprendre. Je crois… Je crois que j’ai peur de l’inconnu.
- Bon, on va attendre et éviter de faire une psychanalyse, XANA nous montrera sans doute ce qu’il veut.

Comme pour confirmer, un grésillement retentit, les faisant sursauter. Un écran s’alluma soudain.

Sûrement un ordinateur, songea Ulrich.

Personne ne savait vraiment à quoi ressemblait le bureau de Hopper. Avec un peu de chance, il s’agissait d’un bureau ordinaire. Un meuble soutenant un ordinateur et couvert de paperasses, peut-être une bibliothèque et des bibelots.
Loin de ces préoccupations, Yumi fixait l’écran. Il ne montrait qu’une porte mais la jeune fille la reconnut aussitôt. Elle avait l’impression de se tenir devant, comme si la scène avait été filmée à travers les yeux de quelqu’un. Ou de quelque chose.
Une main se leva pour frapper. Quelques secondes s’écoulèrent avant que la porte ne s’ouvre. Yumi eut le souffle coupé en voyant Hiroki apparaître devant elle. Il fronça les sourcils, mimique qu’elle ne connaissait que trop bien, et demanda :

- Vous êtes qui, vous ?

La caméra se tourna vers la rue. Déserte. Elle revint sur Hiroki et cette fois, les deux mains apparurent dans le champ de vision, repoussant le garçon à l’intérieur de la maison.

- Hey !

Le cri du garçon fut à moitié couvert par le claquement de la porte.

- Hiroki, qui est-ce ?

Yumi sentit son cœur s’accélérer. Tout était bien trop réel. La voix de son père venant du bureau, sa mère sortant de la cuisine, adoptant le même froncement de sourcils que son fils.

- Vous désirez, Monsieur ?

Le cri de Yumi fit écho à celui d’Akiko lorsqu’un éclair traversa Hiroki. Le garçon tomba sur le sol, les bras serrés sur la poitrine. Takeho arriva en courant.

- Qui êtes-vous ?

Pour toute réponse, un chuintement retentit et un katana apparut sur l’écran.

- Non !
- Calme-toi, c’est un montage, assura Ulrich en souhaitant de tout son cœur avoir raison.

Cramponnée à son bras, Yumi n’arrivait pas à détourner les yeux. Le premier coup fut pour Hiroki, qui avait péniblement réussi à se relever. À nouveau, les hurlements de Yumi et Akiko se mêlèrent. Le garçon regarda quelques secondes le bras tombé au sol. Il n’eut pas le temps de tourner la tête vers son épaule ouverte sur un flot de sang. Son corps s’effondra et il avait à peine cessé de bouger que la lame du katana s’enfonçait dans le ventre de Takeho.
Ulrich réussit enfin à réagir, attirant Yumi contre lui, enfouissant son visage dans son t-shirt.

- Ne regarde pas. Ne regarde pas. C’est un montage, tout ça n’est pas réel.
- Dans ce cas, pourquoi ne pas regarder ? susurra XANA alors que la vidéo se mettait sur pause. Si ce n’est pas réel, quel risque y-a-t-il ? N’est-ce pas, Ulrich ? Tu sais mieux que quiconque à quel point des choses irréelles sont sans impact sur la situation.

Yumi serra un peu plus ses doigts contre les hanches d’Ulrich. Le jeune homme ne sut quoi répondre à XANA qui poursuivit :

- De toute façon, vous ne pourrez sortir qu’une fois la vidéo finie. Vous n’êtes pas les maîtres du jeu.
- Yumi, plus vite on aura fini cette vidéo, mieux ce sera. Je sais que ce n’est pas agréable mais dis-toi que ce n’est qu’un film d’horreur. Un film d’horreur de très mauvais goût, d’accord ?

La jeune fille hocha la tête, les paupières serrées à se faire mal. Elle inspira profondément et défia l’écran du regard.
La caméra zooma sur le visage incrédule de Takeho. Il posa bêtement ses mains sur la lame qui s’enfonça un peu plus. Yumi eut un haut-le-cœur en la voyant ressortir dans le dos. Akiko hurla encore et Ulrich sut qu’il n’oublierait jamais ce son déchirant.
Lent et sadique, le katana remonta jusqu’à la gorge de Takeho, tranchant les chairs sans aucune difficulté. Il ressortit violemment, accompagné par un torrent de sang. La caméra se tourna vers Akiko et Yumi comprit que le pire était à venir.
Sa mère le sentit aussi. Profitant du fait que l’agresseur secouait son katana pour en enlever le sang, elle se rua vers la porte. Un éclair, bien plus puissant que celui adressé à Hiroki, lui arracha une main. Elle tomba à genoux, le visage baigné de larmes, n’ayant même pas la force de hurler. Elle leva les yeux vers son tortionnaire et Yumi prit de plein fouet son regard. Un regard où incompréhension, douleur et peur se mêlaient.

- Qu’est-ce que vous voulez ?

Il n’y eut pas de réponse. Un second éclair réduit en cendres la main restante d’Akiko qui perdit connaissance. Ses pieds brûlèrent à leur tour. L’inconnu sortir une fiole de sa main et versa méticuleusement son contenu sur le visage de sa victime. En quelques secondes, il n’en restait rien. L’acide rongea la chair à une vitesse surprenante, ce qui n’empêcha pas Yumi d’en voir assez pour vomir.
Par pure gratuité, l’agresseur donna quelques coups de pieds dans le visage d’Hiroki. Ulrich sentit Yumi se recroqueviller un peu plus à chaque craquement. Il était à deux doigts d’être mal mais il ne pouvait pas laisser son amie affronter seule cette vidéo d’horreur.

- Tu triches, petite, tu ne regardes plus, susurra XANA.

Secouée par les sanglots, Yumi n’avait même pas eu conscience de fermer les yeux. Elle n’en pouvait plus. Elle ne voulait pas croire à la réalité de ce qu’elle voyait mais quelque chose lui soufflait qu’il n’y avait aucun trucage.

- Allez, ne pleure pas, ma chérie. Je te mets la fin de la vidéo ?

Malgré elle, Yumi releva la tête vers l’ordinateur. L’image se remit à bouger et soudain, le spectre se mit devant un miroir. L’image d’un homme ne resta que quelques secondes avant de se métamorphoser.
Yumi regardait désormais son clone sourire à l’écran.

- Tout ça c’est ta faute. Sans toi, ils seraient encore vivants. Dommage.

Avant que Yumi ait pu réagir, la lumière s’alluma. L’ordinateur était posé sur un bureau, à côté duquel reposaient trois cadavres. Seul Takeho était nettement reconnaissable mais Ulrich ne doutait pas de l’identité des deux autres corps.
Les nerfs de Yumi n’encaissèrent pas le choc. Avec un hurlement terrorisé, elle se précipita vers la porte qu’elle tenta d’ouvrir sans succès. Elle secoua la poignée, frappa le bois de la main et de l’épaule mais rien ne bougea.

- Yumi, calme-toi.
- Je veux sortir ! Je veux sortir, putain !
- Ce ne sont que des spectres. Cette vidéo est fausse, ta famille va bien. XANA a attendu pour que tu te retrouves dans un état d’esprit angoissé, pour que tu te mettes à croire à une chose qui n’est pas réelle.
- Va donc demander à William si vos cauchemars ne sont pas réels, se moqua la voix. Tu crois que je me donnerais tant de mal pour au final vous ménager ? Bande d’idiots.
- Ne le crois pas. Je t’en prie, ne le crois pas.

Mais Yumi n’entendait plus Ulrich. Il y avait trop de détails réalistes pour qu’elle puisse croire à une mise en scène. À commencer par le fait que sa mère n’avait pas cherché à savoir si elle était bien arrivée.

- Ils sont morts à cause de moi… Parce que j’ai combattu XANA. Pourquoi ça tombe sur moi ? Pourquoi Aelita a eu un pauvre loup alors que moi, ma famille est morte ? Pourquoi Odd va s’en sortir tranquillement sans rien dessiner ? Pourquoi c’est moi qui dois payer autant alors que j’étais la première à vouloir éteindre le Supercalculateur ?

Malgré les larmes sur ses joues, Yumi ne ressentait plus aucune tristesse. Sa voix était soudain devenue un concentré de colère, à un tel point qu’Ulrich ne la reconnut pas et prit peur à son tour. Et si c’était elle le spectre ?

- Yumi, il faut d’abord que tu te calmes. Dans le meilleur des cas, cette vidéo n’était qu’un montage et ces corps sont des spectres. Dans le pire des cas… Dans le pire des cas, on ne peut plus rien faire, si ce n’est essayer d’éviter un autre drame de ce genre.
- C’est facile pour toi de dire ça ! Qu’est-ce que tu as vu dans cette cuisine ? Moi en train de rouler des pelles à William ou à quelqu’un d’autre ? Tu réalises un peu le gouffre qu’il y a entre ça et tes parents morts à tes pieds ?
- Yumi, ce n’est pas ma faute.
- Si ! Bien sûr que si, c’est ta faute, c’est entièrement ta faute ! Si tu n’avais pas existé, je n’aurais jamais été liée à Lyoko, je n’aurais jamais affronté XANA, je ne vous aurais jamais connu, je ne serais pas dans cette foutue maison à cette heure, je serais avec ma famille, chez moi, à l’abri de tout ça ! Loin de vous, loin de toute cette merde !
- Yumi, ce n’est pas ma faute !

Ulrich avait haussé le ton à son tour. Il puisait sa force dans l’espoir que tout ce qu’il voyait n’était qu’un leurre. Il arrivait à se convaincre et à croire en ce qu’il disait, il fallait juste qu’il aide Yumi à y croire aussi.

- Quel intérêt XANA avait-il à détruire ta famille ? C’est nous qu’il veut. Il n’a jamais réussi à tuer quelqu’un du temps où il était puissant, pourquoi ça aurait changé aujourd’hui ? Il ne pouvait pas entrer dans la maison sans qu’on s’en rende compte, il aurait déclenché les alarmes. Même avec plusieurs spectres, monter les corps à l’étage aurait fait du bruit, quelqu’un l’aurait entendu, Kiwi aurait aboyé. Ça ne peut pas être réel, tu m’entends. Et dans tous les cas, ce n’est pas ma faute !

Les pleurs de Yumi s’estompèrent puis se turent. Ulrich crut qu’il avait réussi à la toucher et ne remarqua pas la lueur inquiétante dans ses yeux.

- Tu as raison. Je dois rester calme, c’est comme ça que je m’en sortirai le mieux.

Approuvant d’un hochement de tête, Ulrich serra son amie dans ses bras.

- A la bonne heure, Yumi, susurra la voix. Tu as toujours été plus futée que les autres. Alors pour toi, je suis prêt à faire un geste. Offre-moi ce que je veux et tu seras libre.
- Cause toujours, marmonna Ulrich.

L’ordinateur s’éteignit sans que XANA ne rajoute quoi que ce soit. Constatant que Yumi ne bougeait pas, Ulrich en profita pour récupérer le dessin posé sur le bureau et le chiffonna.

- Tu crois que le fait d’accepter sans devenir folle équivaut à avoir battu ce cauchemar ? finit par demander la japonaise.
- J’en suis sûr.
- Alors, dégageons de là.
- Attends Yumi, il faut qu’on parle de Odd.
- Ulrich…

La voix de la japonaise comportait un avertissement que son ami ne prit pas en compte.

- Tu ne peux pas te voiler la face.
- Ne recommence pas… S’il te plait, je n’ai pas la force de plonger dans les suppositions et accusations.
- Il n’y a plus de doute.
- Je ne veux pas rendre Odd responsable de tout ça.
- Mais ouvre les yeux, bon sang ! Il avait choisi de mettre un cauchemar dans le bureau plutôt que dans la salle de bain. Pourquoi ? Pour qu’on ne découvre pas les corps avant ! D’ailleurs, c’est impossible qu’il ne les ait pas vus en mettant la feuille.
- La pièce était plongée dans l’obscurité, nous avons aussi mis du temps à les voir.
- C’était dans le contexte de ton cauchemar ! Lui devait avoir toute la luminosité nécessaire ! Nous n’avions pas commencé à jouer, il faisait encore beau dehors, la lumière devait passer à travers les volets. Pourquoi tu refuses d’admettre la vérité ?
- Arrête, je vais finir par croire que c’est toi le spectre. D’ailleurs, si comme tu le répètes depuis tout à l’heure, ce n’est pas réel, les corps ont dû apparaître quand nous sommes entrés. Ils ne devaient pas être déjà là quand Odd a mis les dessins, sinon, il se serait fait tuer par le loup ou l’araignée.

Ulrich hésita. Il avait l’intime conviction que Odd n’était pas innocent mais continuer à l’accuser serait effectivement se rendre suspect aux yeux d’une Yumi encore déstabilisée, malgré son air décidé. Il ne pouvait pas se permettre une telle manœuvre, elle était la seule en qui il avait vraiment confiance.

- Tu as raison. Excuse-moi, je pète un peu les plombs. J’aimerais bien sortir de là.
- On le veut tous. Je ne suis pas certaine qu’il y ait un spectre parmi nous finalement. Avec un peu de chance, on est tous nous.

Sans savoir si elle croyait à ce qu’elle venait de dire, Yumi saisit la poignée qui n’opposa aucune résistance. Elle se retrouva dans le couloir et vit aussitôt Odd assis contre le mur d’en face, le visage entre les mains. La porte de la chambre était fermée, ne laissant aucun doute sur ce qui se passait. Ulrich le comprit lorsque Odd leva vers eux un visage perdu, effrayé, un visage qu’il ne lui avait jamais vu et qui le fit douter de ses certitudes quant à l’identité du spectre.
De son côté, Yumi secoua la tête. Elle ne voulait pas savoir, elle ne voulait pas entendre. Elle avait eu sa dose pour la journée. Mais Odd ne comprit pas son geste.

- William est mort.

Les émotions que Yumi avaient brièvement réussi à museler jaillirent. Elle dévala les escaliers sans qu’il vienne à Ulrich l’envie de la suivre. Au lieu de ça, il se laissa tomber sur le sol aux côtés de Odd.

- Comment va Sissi ?
- Elle ne s’est pas encore réveillée. C’est pour ça que je suis sorti. Je… je ne voulais pas être là quand… Je suis tellement lâche. Je vais y retourner.
- Non. Ça ne sert à rien. Qu’on soit là ou pas, elle va le vivre mal. Mieux vaut attendre qu’elle vienne vers nous.
- Ulrich, comment tu réagirais si tu te réveillais à côté du cadavre de Yumi ?
- Je crois que je deviendrais fou.
- On ne peut pas laisser Sissi seule.
- Ok, t’as raison.

Les deux amis se levèrent, échangeant au passage un regard gêné. Alors qu’ils entraient dans la chambre, Ulrich murmura :

- Odd, je suis désolé pour ce que je t’ai dit tout à l’heure. Je… J’ai été affreusement blessant.
- C’est pas grave mon pote, on est tous sur les nerfs. D’ailleurs, j’ai une théorie si ça t’intéresse.
- Au point où on en est.
- Et si on était tous en train de faire un cauchemar ? Une sorte d’hallucination collective ?
- On n’a pas touché à des substances illicites que je sache, je vois mal les filles mettre de l’herbe dans leurs pâtes carbo. Et on n’a même pas bu.
- Je n’exclue pas une intervention de XANA. Jérémie pourrait sans doute juger la faisabilité de la chose mais imagine que XANA soit effectivement revenu et qu’il se serve des appareils électriques de la maison pour diffuser des ondes capables d’influer sur notre cerveau pour qu’on imagine vivre des choses ? Si ça se trouve, on dort encore et ce qu’on voit n’est que le fruit de… Quoi ?

Ulrich ne répondit pas mais Odd eut un sourire triste.

- Tu penses que ce genre de théorie est digne d’Aelita ou Jérémie et que je me rends suspect en disant ça ?
- Disons que tu es loin du mec insouciant qui s’extasiait sur « Paraplegik zombie 6, le jeu » ce matin.
- Je viens de voir un pote mourir devant mes yeux. Mon meilleur ami m’a accusé de vouloir lui faire du mal et je suis enfermé dans une maison dont je ne suis pas sûr de sortir un jour. Je t’avoue que mon éternel optimisme morfle un peu trop aujourd’hui pour rester convaincant. Et je suis vraiment désolé pour ton cauchemar, je me sens coupable.
- Tu ne dois pas l’être, c’est moi qui ai manqué de prudence.
- On a tous manqué de prudence. Sérieusement, on n’aurait jamais dû laisser Jérémie avec William. Je ne peux pas m’empêcher de me dire que s’il avait été avec toi, les choses se seraient passées différemment.
- Ouais, je serais peut-être mort aussi.

Odd frissonna.

- Ne dis pas ce genre d’horreurs.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

Réponses: 22
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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Sam 06 Jan 2018 14:39   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Réponse au commentaire en spoil pour garder la couleur Mr. Green

Spoiler


Après des cauchemars plutôt psychologiques, on arrive à un cauchemar plus physique. Le titre du chapitre étant éloquent... arachnophobes, s'abstenir Razz

Bonne lecture !

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Chapitre 9 : Arachnophobie


Lorsqu’il entra dans le salon avec Yumi, Ulrich ne put s’empêcher de jeter un coup d‘œil suspicieux à Odd. Celui-ci ne le remarqua pas et lança d’un ton jovial :

- Alors, ce caca ?
- J’ai affronté mon cauchemar.
- A ce point ?

Cette fois, le regard courroucé qu’Aelita lui lança n’échappa pas à Odd.

- Attends, tu veux dire que ton cauchemar s’est déclenché ? Mais c’est pas possible, il n’y avait rien dans les toilettes !
- Sauf que le cauchemar dans la cuisine n’était pas celui de William. Il s’est activé quand je suis rentré et c’était bien mon dessin posé sur la table.

Un silence lourd suivit la révélation d’Ulrich ou plutôt l’accusation à peine voilée. Les yeux se tournèrent vers Odd qui ne put qu’écarquiller les siens.

- Je… je vous jure que j’ai posé la feuille trouée sur la table de la cuisine. J’en suis certain !
- Mais oui bien sûr ! Je viens de vivre un enfer à cause de toi et il aurait pu arriver la même chose à William s’il s’était baladé dans la maison en se croyant à l’abri ! Et comme par hasard, tu n’as pas dessiné de cauchemar ! Tu n’es qu’un spectre qui ne connaissait pas les peurs de Odd, un putain de spectre qui nous a poussés à faire ces jeux débiles et qui nous manipule depuis !
- C’est William qui voulait jouer à « Cauchemars », rappela Odd, j’ai juste ramené « Paraplegik Zombies 6 ». Enfin Ulrich, reprends-toi, je suis ton pote, merde !
- Tellement facile à dire !
- Tu laisses toujours ton réveil sonner deux fois avant de l’éteindre, même si tu es réveillé avant et même si je te fais la réflexion tous les matins ! L’autre jour en cours de maths, tu as dit à la prof que dans le triangle A, B, C comme chaussette, il y avait un angle droit, tout ça parce que le mot qu’on devait caser ce jour-là était chaussette. La veille des vacances, tu as écrit au moins vingt débuts de lettres à Yumi. Ils ont tous finis à la poubelle, sauf un qui a roulé sous le lit parce que tu l’as balancé à la tête de Kiwi. Je n’ai rien dessiné parce que rien ne me venait à l’esprit, tout simplement, et c’est loin d’être la première fois que je rends une feuille blanche, tu le sais. Je le répète, je suis ton pote, Ulrich, pas un vieux spectre débile de XANA !

C’était la première fois que les autres entendaient autant de détresse dans la voix de Odd. Il n’y avait plus aucune trace de rire ou de malice sur son visage et il semblait sur le point de fondre en larmes.
Cela n’eut aucun effet sur Ulrich.

- T’en fais trop.
- Ulrich…
- C’est bon, lâche-moi.

Le garçon alla s’asseoir dans un coin du salon. Odd voulut le suivre mais Yumi posa une main sur son épaule.

- Laisse. Il est encore sous le choc de son cauchemar, il lui faut un peu de temps.
- Mais je n’y suis pour rien !
- Je te crois. Et il te croira aussi lorsqu’il aura repris le contrôle de lui-même. En attendant, laisse-le respirer.

William acquiesça d’un hochement de tête avant de s’asseoir près de Sissi, désormais endormie sur son matelas.

- Vous pensez qu’elle dort simplement ou que c’est plus grave ?
- Aucun de nous n’a de connaissance en médecine, signala Jérémie avec une grimace. Mais elle a l’air de respirer régulièrement et sans difficulté, je pense qu’elle dort. Physiquement, elle a l’air en bonne santé, je pense que c’est nerveusement et mentalement qu’elle a subi un choc.
- Parfait. Je vais en profiter pour aller combattre mon cauchemar. Je refuse qu’elle m’accompagne et elle le demandera sûrement à son réveil. Il faut que je m’en sois occupé avant.
- Tu t’en sens capable ?

William hocha la tête avant d’ajouter :

- Tu devrais venir, Jérémie.
- Pourquoi moi ?
- Il ne reste que nos cauchemars et celui de Yumi. En y allant ensemble, on a deux fois plus de chances d’en déclencher un et donc de mettre fin à ce bordel plus rapidement.
- Tu ne préfères pas y aller avec Yumi ?
- Je n’ai pas très envie de l’emmener dans mon cauchemar et elle sera sans doute mieux accompagnée si elle affronte le sien avec Ulrich.

Le concerné haussa un sourcil. Dans ce genre de situation, il avait encore du mal à s’habituer à l’absence de rivalité entre William et lui.
De son côté, Jérémie consulta Aelita du regard. Quand celle-ci hocha la tête, il comprit qu’il n’aurait aucun soutien et soupira.

- Je te suis.
- On commence par l’étage. Chambre et bureau de Franz Hopper. Une des deux pièces s’activera forcément.
- Vous voulez que je teste la chambre d’amis en attendant ? demanda Yumi.
- Il ne vaut mieux pas. Un cauchemar à la fois, c’est amplement suffisant.
- Mais le spectre ne pourra pas être partout.
- A priori, il y en a au moins deux, intervint Ulrich. S’il y en a plus, ils arriveront sans difficulté à gérer deux cauchemars. Mieux vaut attendre que les garçons soient revenus.
- Sois prudent, chuchota Aelita à l’oreille de Jérémie.

Il lui serra la main et fut le premier à monter l’escalier.

- Le bureau est fermé à clé, lança-t-il à William encore en bas.
- Et on a la clé ?
- Il me semble qu’Aelita l’avait rangée quelque part dans la salle à manger. Il reste quand même deux chances sur trois pour que la chambre de Hopper soit un de nos cauchemars si ça peut te rassurer.
- Je ne suis pas fort en maths mais j’avais deviné…

Insensible à l’ironie de William, Jérémie hésita.

- C’est quoi ton cauchemar ?
- Des araignées. J’en ai la phobie depuis un bail. Et toi, à quoi on doit s’attendre ? Madame Hertz t’annonçant que tu as eu deux à la dernière interro ?
- Des robots. L’idée que la science et la technologie nous dépassent et se retournent contre nous, deviennent indépendantes jusqu’à ce qu’on ne puisse plus rien faire pour les contrôler. Je trouve que c’est la chose la plus flippante qui nous pende au nez.
- C’est vrai que c’est moins facile à écraser que des araignées, sourit William en allumant la lampe-torche.

La réponse de Jérémie le rassurait. Il préférait affronter une armée de robots que des émotions, ils auraient des moyens concrets de se battre. Quoiqu’il voyait mal comment venir à bout de robots avec ses pauvres petits poings… Il alluma néanmoins la lampe-torche qu’il n’avait toujours pas rendue à Aelita et ouvrit la porte.
Le cauchemar fut bien plus violent que pour les autres.
A peine entré, William sentit une barre dure lui frapper les flancs et heurta un coin de la pièce. Jérémie subit le même sort mais eut la chance d’atterrir sur le lit. Sonné, il resta allongé quelques secondes avant de pousser un cri de terreur.
Huit faisceaux aveuglants étaient braqués sur William, empêchant le jeune homme de voir quoi que ce soit. Jérémie n’avait pas cette chance. La lampe que son ami tenait à la main sans savoir où la diriger éclairait le corps énorme et monstrueux d’une araignée qui occupait presque toute la pièce. Ses pattes étaient réparties des deux côtés du lit, si bien que Jérémie se retrouvait à un mètre sous son ventre velu.
Pour l’heure, elle ne s’intéressait pas à lui. Ses crochets, longs de trente centimètres, laissaient échapper un filet de bave et de venin dont l’odeur forte fit tousser William. Il poussa un hurlement quand le liquide tomba sur son jean et lui brûla la peau. Il n’eut que le temps de rouler sur le côté avant qu’une des pattes de l’araignée ne se plante dans sa poitrine. La patte traversa le plancher et William frissonna en imaginant l’effet qu’elle aurait eu sur son corps.
La taille de la créature ne la rendait heureusement pas très mobile. Il rampa sous le lit, les traits tordus par la douleur qui pulsait dans sa cuisse.

- Jérémie !

Aucune réponse ne lui parvint. Mâchoires serrées, il roula de sous le lit et se remit debout. Sa tête frôlait le ventre de l’araignée. Il vit Jérémie recroquevillé sur les oreillers, les mains sur le visage, mais avant qu’il ait pu réagir, il sentit une autre brûlure se répandre sur l’arrière de son crâne et couler sur sa nuque. Les yeux de l’araignée irradiaient toujours leur lumière aveuglante et se braquèrent une nouvelle fois sur lui.

Ce n’est pas une vraie araignée, ce n’est qu’un spectre. Ce n’est qu’un spectre, ce n’est qu’un spectre. Mais un spectre, c’est encore pire qu’une araignée… Bon sang… Bats-toi, William. Remue-toi.

Le garçon bondit sur le côté aux moments où les crochets s’agitaient. Ils transpercèrent l’air, là où se tenait encore William une seconde plus tôt. Profitant de sa vitesse, tentant de juguler au maximum sa douleur et sa terreur, il contourna les pattes puis l’araignée toute entière. La carapace qui recouvrait l’arrière de son corps semblait glissante mais William bondit tout de même pour essayer de l’escalader. S’il réussissait à grimper sur la créature, il pourrait atteindre sa tête par le haut, sans risquer d’être touché par les crochets. Il fallait lui défoncer le crâne, c’était son point faible le plus sûr.
L’araignée ne parut pas sentir tout de suite les mains du garçon sur sa croupe. Ce ne fut que quand il appuya ses pieds sur ses pattes pour se hisser qu’elle réagit. Elle s’agita dans tous les sens, manquant désarçonner William. Celui-ci comprit vite qu’il ne tiendrait pas longtemps mais dans un de ses soubresauts, l’araignée l’envoya sur la partie plus velue de son corps et il réussit à trouver une certaine stabilité. Il manqua vomir lorsque ses doigts accrochèrent de longs poils noirs, poisseux et rêches à la fois.

- Jérémie, il faut trouver un truc pour l’assommer.
- On ne peut pas, on ne peut pas, gémit le garçon sans relever la tête. Elle est trop forte, tu as vu la taille de cette chose, on ne peut rien faire !

Les yeux de l’araignée balayaient la majorité de la pièce au fur et à mesure qu’elle se secouait pour tenter de se débarrasser de son cavalier. William finit par repérer dans les faisceaux lumineux un objet qui pouvait lui servir.

- Jérémie, la lampe !

Le cri de William fit relever la tête blonde. Les yeux de Jérémie passèrent de son ami, à califourchon sur l’araignée à la lampe de chevet, à portée de main. Il n’avait qu’à tendre le bras, il en était capable…

- Jérémie, aide-moi, bon sang !

Le blondinet resta prostré sur le lit, tétanisé.

***


Le claquement de la porte à l’étage avait réveillé Sissi en sursaut. Elle s’était redressée, affolée, le cœur prêt à jaillir de sa poitrine.

- Qu’est-ce qui se passe ?
- Rien, calme-toi, affirma Aelita en posant une main sur son bras.

La jeune fille ne fut pas dupe. Elle n’eut besoin que de quatre secondes pour demander :

- Où est William ?
- A l’étage, avec Jérémie, ils…

Aelita chercha Yumi du regard. Celle-ci hocha la tête.

- Ils cherchent à affronter leur cauchemar.
- C’est une blague ?
- Ne t’en fais pas, je suis sûre qu’ils s’en sortent très bien.

Là encore, le regard de Sissi indiquait clairement qu’elle n’en croyait pas un mot. Elle faillit protester lorsqu’elle comprit l’expression d’Aelita.
Elle n’essayait pas de la convaincre, juste de se rassurer.
Elle devait avoir peur aussi.
Sissi soupira et se rallongea, les bras serrés sur sa poitrine. Elle se souviendrait longtemps de ce Halloween ! Elle qui détestait déjà cette fête n’était pas prête de changer d’avis !

- Tout ira bien, assura à son tour Yumi.

Le hurlement d’Aelita la détrompa. Une longue patte noire, griffue et poilue, venait de traverser le plafond.

- Qu’est-ce que c’est que cette horreur ? s’étrangla Ulrich alors que la patte disparaissait déjà, laissant derrière elle un large trou.

Aelita ne répondit pas, déjà en train de courir vers l’escalier.

- Jérémie !
- William ! cria en écho Sissi.

Elle essaya de se relever mais ses jambes ne la soutenaient pas.

- Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qui se passe ? répéta-t-elle en commençant à pleurer.
- Odd et moi on va aller voir. Yumi, tu restes avec Sissi.
- Ils sont sûrement en danger, je…
- Sissi, tu n’es pas en état.

Sans argumenter davantage, Ulrich suivit Odd en dehors de la pièce. De son côté, Aelita tambourinait contre le mur à défaut de pouvoir le faire sur la porte, celle-ci étant protégée par un champ de force.

- Jérémie ! Jérémie !
- Au secours !
- Jérémie !
- T’es pas super utile là ! fit remarquer Ulrich en éloignant Aelita du mur. Jérémie, William, est-ce qu’il y a un champ de force de votre côté ?

Jérémie étant toujours recroquevillé sur le lit, William hurla en réponse :

- Non !
- Essayez d'ouvrir la porte !
- On a d’autres priorités !

Comme pour confirmer ses propos, l’araignée sous lui se changea en une pluie de mygales. Il heurta le sol et fut recouvert en quelques secondes par les bestioles velues. Malgré son dégoût, il se retint de hurler. L’idée d’avoir la gorge emplie de ces saletés le terrifiait plus que tout en cet instant.
Il crut qu’il allait devenir fou. Il avait beau se rouler sur le sol, agiter les membres dans tous les sens, les araignées le recouvraient sans cesse. Il se mit à pleurer en sentant les pattes velues sur son visage, ses mâchoires lui faisaient mal tant il les serrait pour ne pas hurler. Des crochets se plantèrent dans ses mains, chacun de ses doigts se mit à brûler de l’intérieur. La souffrance se mêlait à la peur dans un cocktail mortel.
Mais XANA ne comptait pas s’arrêter là.
William manqua défaillir lorsqu’une longue patte fine se glissa dans son oreille. Cette fois, il ne put retenir un hurlement et s’empressa de secouer ses mains douloureuses pour se masquer la bouche. La patte s’insinua plus profondément dans son oreille et tous ses poils se dressèrent. Couvert de chair de poule, agité par des tremblements, William sut qu’il allait mourir.

- Tu aurais mieux fait de rester avec moi, tu ne crois pas ?

La voix était faible, à peine plus élevée qu’un murmure, mais cela ne l’empêchait pas de suinter de sadisme.

- Pourquoi as-tu décidé de revenir avec eux ? Ne me fais pas croire que tu ne te souvenais de rien, pas à moi. Ta mémoire t’est revenue, je le sais moi. Ce que tu as vécu sur Lyoko, tu en as retrouvé des bribes, des flashs. Et ça t’a plu de ressentir à nouveau tout ce pouvoir, tout cet univers de possible. Mais tu n’as jamais essayé de rallumer le Supercalculateur, même après tout ce que j’ai fait pour toi. Tu as préféré me tourner le dos pour rejoindre des gens qui ne te faisaient plus confiance. Alors tu sais quoi ? Je ne corrigerai même pas ton manque d’imagination en te montrant un double égorger Sissi ou Yumi ou un autre final plus psychologique. Je n’ai pas envie de perdre mon temps avec toi.

Une patte s’infiltra dans sa deuxième oreille et William hurla. Des mygales s’engouffrèrent aussitôt dans sa bouche. Il toussa, vomit, mais les araignées palpaient sa gorge de l’intérieur, irritaient sa trachée de leurs poils rêches. Sous son crâne, il sentait les longues pattes triturer son cerveau. Chaque partie de sa peau était minutieusement attaquée, sa chair à vif suppliait qu’on la laisse tranquille.

- Adieu William, susurra une dernière fois la voix.

Les araignées disparurent au moment où Ulrich et Odd faisaient irruption dans la pièce. Jérémie pleurait sur le lit mais ils ne le regardèrent pas. Leurs yeux étaient rivés sur William, allongé par terre. Ses mains violettes étaient agitées de soubresauts et un filet de sang coulait de ses oreilles.

- Hey mon pote ça va ? demanda stupidement Odd en saisissant le garçon par les épaules.

Des yeux vitreux le regardèrent sans le voir. Avant de perdre connaissance, William se rappela un détail.
Comment Odd avait-il pu mettre un cauchemar dans le bureau si celui-ci était fermé à clé ?

***


- Qu’est-ce qu’on fait ?

Personne ne réagit. A l’exception de Sissi, au chevet de William dans la chambre de Hopper, les adolescents s’étaient rassemblés une nouvelle fois dans la salle à manger.

- On n’a aucun moyen d’aider William de toute façon. Il a perdu beaucoup de sang mais à quel point ? Ces araignées sont sûrement venimeuses vu l’état de ses mains mais comment savoir si c’est un venin paralysant, toxique ou mortel ? Il peut rester des jours dans le coma, se réveiller dans l’heure qui vient ou…

Là encore, personne ne réagit. Tout le monde savait ce que Yumi voulait dire.

- Si on s’en tire vivants, je m’inscris chez les JSP, promit Ulrich.
- La seule chose qu’on puisse faire, c’est sortir d’ici au plus vite. Et pour ça, il n’y a pas trois mille solutions.

Jérémie grimaça et Aelita lui adressa un regard navré.

- Je sais que tu espérais ne pas en arriver là mais nous ne pouvons plus compter sur la chance pour nous permettre de créer je ne sais quelle machine efficace. Si nous jouons le jeu, XANA tiendra peut-être parole.
- Je ne crois pas…
- Il faut quand même essayer. Pour William.
- C’est ok pour moi, lança Yumi en se levant.

Elle n’eut pas besoin de demander à Ulrich de l’accompagner, le garçon était déjà debout à ses côté, une main sur son bras.

- On gagnera un temps précieux si tu vas aussi affronter ton cauchemar, Jérémie, insista Aelita d’une voix douce. Je viens avec toi.

Son ami hocha la tête.

- Je peux difficilement dire non. C’est ma faute si William est dans cet état, j’aurais dû l’aider. Et même avant tout ça, j’aurais dû m’assurer que XANA ne pourrait pas revenir, qu’on n’aurait pas à vivre quelque chose comme ça.
- Non ! T’y crois pas !

Le hurlement de Odd fit retourner toutes les têtes.

- Kiwi a pissé sur le tapis !

Un silence lourd suivit ses paroles avant que Jérémie ne fasse remarquer d’une voix glaciale :

- On a peut-être des préoccupations plus importantes, non ?
- Ah… Oui, bien sûr, désolé.
- Et si tu rejoignais Sissi et William ? proposa Ulrich. Ça évitera de te laisser tout seul ici avec ton chien incontinent.
- C’est pas sa faute ! Mais ouais, je vais faire ça.

Yumi croisa le regard d’Ulrich et comprit.
Il ne voulait pas que Odd reste seul tout court.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

Réponses: 22
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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Mar 26 Déc 2017 17:29   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Alors, je n'ai pas renoncé au orange, c'est juste que quand il y a une citation, j'ai la flemme de rebaliser pour qu'il y ait la couleur après hihi. Mais du coup, je vais mettre les réponses aux commentaires en spoiler, comme ça, je garderai le orange et ma flemmardise Mr. Green

Spoiler


Sur ce, bonne lecture ! Mr. Green

Chapitre 8 : Le poids de l’amour


Ulrich commençait à souffrir de claustrophobie et ce n’était pas en urinant à la lumière d’une bougie dans des toilettes minuscules que cela allait s’améliorer. L’obscurité lui pesait, les murs ne semblaient pas encore se rapprocher, mais il avait de plus en plus de difficultés à croire qu’il s’en affranchirait bientôt. Il avait l’impression de se retrouver à nouveau enfermé dans la chaufferie avec Yumi, persuadé que sa dernière heure était venue et qu’il mourrait fait comme un rat.
Malgré tout, le souvenir lui donna chaud. Il revit la japonaise retirer son t-shirt, il sentit son dos nu contre le sien, nu également. Il la revit dans la salle à manger, un peu plus tôt, enlevant sa robe. L’obscurité avait beau lui peser, elle n’était pas si totale et il n’avait pas pu s’empêcher de regarder un peu trop longuement son amie.

Ok Ulrich, calme-toi, tu es en danger de mort, tes potes aussi, essaye de te souvenir qu’il est plus urgent de sauver Yumi que de l’avoir contre toi.

Il quitta les toilettes et se dirigea machinalement vers la cuisine pour se laver les mains. Le fait de se trouver seul dans la pièce l’interpella mais il se souvint de ce qu’avait dit Odd : il ne risquait rien, c’était William qui déclencherait le cauchemar.
Le bruit de l’eau couvrit celui d’une personne entrant et fermant la porte, aussi sursauta-t-il quand des doigts caressèrent sa hanche. Il se retourna si brusquement que la bougie posée sur le bord de l’évier tomba et s’éteignit. La lumière du champ de force lui permit toutefois de reconnaître la nouvelle venue et de s’exclamer :

- Bordel, Sissi, tu m’as fait peur !
- Excuse-moi.

La voix de la jeune fille était si faible qu’Ulrich s’en voulut d’avoir été agressif.

- Non, c’est moi qui m’excuse, pardon. Tu vas bien ?
- Oui, merci.
- Tu es sûre ? Tu devrais restée allongée et…

Ulrich devint soudain soupçonneux.

- Pourquoi William n’est pas avec toi ?
- J’avais soif, je suis venue prendre un verre, pas besoin d’y aller à trois sous prétexte que William ne veut pas me lâcher et qu’il ne peut pas venir ici juste avec moi sans déclencher son cauchemar.

Rassuré, Ulrich se décala pour laisser Sissi boire au robinet. Il ne put s’empêcher de la regarder. Il ne faisait pas assez clair pour voir avec précision mais il était soudain fasciné par les mèches noires qui coulaient sur son épaule, offrant aux regards la peau nue de son cou. Son déguisement de diablesse lui avait procuré un charme érotique tout à l’heure mais Ulrich la trouvait bien plus jolie dans son chemisier rose pâle et son jean taille basse.

- Tu veux que je garde la pause pour que tu aies le temps de finir ton balayage corporel ?

Ulrich rougit mais Sissi paraissait plus moqueuse que réprobatrice. Elle se redressa et ses cheveux se replacèrent sur sa nuque dans un mouvement hypnotique.

- Désolé. Viens, rejoignons les autres.
- Attends.

Les doigts de Sissi attrapèrent ceux d’Ulrich qui, s’il fut surpris par leur fraîcheur, en apprécia la douceur. Il regarda sa main dans celle de la jeune fille puis ses yeux, avant de revenir sur sa main.

- Laisse-moi te parler, s’il te plait, supplia presque Sissi. Il y a des choses que j’ai besoin de te dire.

Ne sachant pas quelle attitude adopter, Ulrich se contenta de hausser les épaules. Sissi s’appuya contre l’évier, attirant le garçon davantage vers elle. Il s’écoula plusieurs secondes avant qu’elle ne pose son visage contre le torse d’Ulrich en étouffant un sanglot. Gêné, il lui caressa les cheveux de sa main libre.

- Sissi, tu devrais retourner t’allonger, tu as l’air encore très perturbée par ton cauchemar.
- J’aurais tellement aimé que tu sois là. Tu aurais compris certaines choses, tu aurais tout compris en fait. Ulrich… Je n’ai jamais voulu être avec William.
- Il t’a forcée ? s’inquiéta aussitôt le garçon.
- Abruti ! Je suis avec lui parce que je t’aime toujours, depuis toujours, et que je voulais qu’enfin tu me voies autrement. Mais ça n’a pas marché. Tu n’as d’yeux que pour Yumi, ne nie pas.
- Je n’avais pas l’intention de nier.

Mais malgré son ton assuré, Ulrich commençait à se sentir mal à l’aise, étouffé peu à peu par la culpabilité. Pourquoi avait-il été si mauvais avec Sissi durant toutes ses années ? Pourquoi, alors qu’elle n’avait jamais cherché qu’à se faire bien voir de lui, avait-il soutenu Odd dans ses plaisanteries, parfois cruelles ? Pourquoi restait-il autant accroché à Yumi qui le dédaignait une semaine sur deux alors que Sissi restait d’une constance aussi admirable que triste ?
Et pourquoi ne pouvait-il pas s’empêcher de lui caresser les cheveux ?

- Sissi, tu… Enfin, il ne faut pas rester avec William si tu n’en as pas envie… C’est pas sympa pour lui.

La jeune fille hocha vaguement la tête, sans cesser de sangloter.

- Rester seule peut avoir du bon, ça évite de te fermer des portes, c’est… enfin, rester avec William, ce n’est peut-être pas l’idéal du coup. Même pour toi.
- L’idéal, ce serait que tu arrêtes de courir derrière une chimère, rétorqua Sissi en levant vers lui un visage baigné de larmes. Si ça pouvait marcher entre toi et Yumi, ça aurait marché depuis longtemps. Tu devrais simplement l’accepter, non ?

Tout en parlant, elle avait doucement raffermi l’emprise de ses doigts sur ceux d’Ulrich. Celui-ci commençait à ne vraiment plus savoir quoi faire, rongé entre la culpabilité et l’envie. Il regrettait son comportement passé et s’accrocha à un souvenir :

- Tu te rappelles vers la fin des cours l’année dernière ? Je t’ai dit qu’on était amis.
- Si tu crois que ça suffit à effacer toutes les méchancetés que tu m’as jetées à la figure.

Ulrich perdit le peu d’assurance qu’il avait retrouvé. Si Sissi avait cessé de pleurer, elle semblait tout de même profondément malheureuse. Elle paraissait fragile, désabusée, perdue. Ulrich ne put s’empêcher d’être touché. Il n’était pas particulièrement égoïste mais on lui avait souvent reproché de ne pas penser assez aux autres. En cet instant, Sissi avait besoin de lui. Il ne pouvait pas la laisser tomber alors qu’elle venait de lui ouvrir son cœur. Elle l’avait fait avant, bien des fois, mais le contexte était si différent. Elle ne mentait alors pas à tout le monde en faisant croire qu’elle en aimait un autre et elle avait perdu sa superbe pour afficher une véritable souffrance.

- Si ça peut te rassurer, murmura-t-il, on s’est embrassé deux fois, toi et moi. Et malgré ce que j’ai pu dire pour ne pas perdre la face, ce n’était pas désagréable.
- Deux ?
- On a dû faire un retour vers le passé pour la deuxième fois mais tu m'as embrassé sur le pont de l'usine. Après m'avoir aidé.

Sissi réussit à sourire.

- J’embrasse bien par rapport à Yumi ?
- Je ne sais pas, je n’ai aucun élément de comparaison.
- Je suis la seule fille que tu as embrassée ?
- Oui. D’une certaine manière, ça crée quand même un lien.

Sissi hocha la tête et posa à nouveau son visage contre le torse d’Ulrich, loin de sangloter cette fois. Il continua à lui caresser les cheveux jusqu’à ce qu’elle se redresse.

- Ulrich ?
- Oui ?
- Jamais deux sans trois ?

Le garçon ne fit pas semblant de ne pas comprendre. Il se pencha vers Sissi et l’embrassa, d’abord doucement, gardant à l’esprit qu’elle était nerveusement fragilisée. Il ne devait pas en abuser. Mais lorsqu’elle lâcha sa main pour passer ses bras derrière sa nuque, il l’attrapa par la taille et l’attira davantage contre lui. Une diablesse lascive à la longue crinière noire dansait dans son esprit.
Elle était là, pour lui.
Il n’avait plus besoin de courir. Il n’avait qu’à tendre la main, il pouvait sentir enfin du réel contre lui.
Alors que ses doigts descendaient sur le corps de Sissi, la porte claqua. Il eut l’impression de recevoir une gifle et se retourna aussitôt.

- Qui était là ?
- Je n’ai vu personne, assura Sissi en glissant ses mains sur son dos. Peut-être un courant d’air ?
- Tu te fous de moi ? On est bloqués dans cette maison sans pouvoir ouvrir ni porte ni fenêtre mais il y a des courants d’air ?
- Quelle importance ?

Ulrich sentit sa colère et sa peur disparaître doucement, étouffées par la voix langoureuse de Sissi. Mais le claquement de la porte résonna dans son esprit.

- Stop. Tu as été bouleversée par tout ce qui t’est arrivé aujourd’hui, tu ne sais plus où tu en es et c’est normal. On n’est pas pour autant obligés de faire n’importe quoi, alors tu vas gentiment retourner dans la salle à manger t’allonger.
- Pourquoi tu me demandes ça ? Tu aimes que je te touche, ne nie pas.
- Je… je n’allais pas nier. Mais tu sors avec William que tu le veuilles ou non. Et moi, j’aime Yumi et je n’ai pas envie de penser à elle pour oublier que c’est toi qui es là. Sissi, bon sang, respecte-toi un peu !
- Tu ne pensais pas du tout à Yumi et c’est pour ça que tu t’énerves. Tu te moques éperdument du fait que je me respecte ou non. Je pourrais me traîner dans la boue, faire les choses les plus humiliantes, tu aimerais ça, ça t’exciterait et tu n’aurais aucunement besoin de penser à Yumi pour te faire bander. Tu es un pervers frustré, Ulrich, et je t’offre l’opportunité de te lâcher un peu. C’est normal que ça te plaise, pas besoin de culpabiliser. Yumi n’avait qu’à saisir sa chance plus tôt, non ?
- Sissi, tu me mets mal à l’aise. Retourne avec les autres et s’il te plaît, évite de raconter ce qu’il vient de se passer.
- Tu n’es pas mal à l’aise à cause de moi. Ça aurait pu être n’importe quelle autre fille, exceptée Yumi. Sans rire, Ulrich, regarde autour de toi. Regarde William : tu te crois supérieur à lui, il y aura toujours une rivalité entre vous et combien de temps mettras-tu avant de vouloir le rattraper sur le terrain du sexe ? Regarde Odd : comment réagiras-tu les nuits où il ne dormira pas à l’internat pour s’occuper de sa nouvelle conquête ? Regarde Jérémie et Aelita : même eux goûteront avant toi aux délices de la chair et ça t’énerve. Ça te vexe. Tu resteras un puceau frustré au nom d’un faux respect, d’une fausse fidélité. Accroche-toi à Yumi si tu veux mais ne fais pas croire que tu te refuses aux autres parce que tu l’aimes. Si l’une d’entre elles insiste plus que moi, tu ne te rappelleras pas longtemps de ton « amour ». Dis-moi… Pourquoi cours-tu encore après elle ? Ton instinct de chasseur est excité par ses refus ? Combien de temps mettra ton ego avant de se lasser et de se flatter dans les bras d’une autre ?

Ulrich ne répondit pas. Malgré le regard de braise de Sissi, il ne ressentait plus que de la honte et de la peur. Elle avait raison, il le savait. Plus d’une fois il s’était avoué que ce jeu de chat et de souris l’ennuyait, qu’il serait plus facile de lâcher prise et de céder à la facilité. Des années à se courir après, ils seraient forcément déjà lassés le jour où ils arriveraient à s’attraper.

- Sissi, qu’est-ce que ça t’apporte de me balancer ça ?
- Je ne veux que ton bien, mon Ulrich, souffla la jeune fille au creux de son oreille. Je veux juste t’aider à réaliser ce qui est le mieux pour toi.

Ulrich fut tenté de basculer à nouveau dans l’insouciance. Après tout, il ne ferait de mal à personne. Yumi serait sans doute plus énervée que malheureuse et qu’est-ce que ça changerait ? Même quand il n’avait rien à se reprocher, elle trouvait le moyen de l’accabler. Pour une fois, elle aurait une raison de faire sa princesse offensée. Elle n’avait qu’à arrêter avec son « copains et puis c’est tout ».
Mais alors qu’il se faisait cette réflexion, Ulrich eut un sursaut de maturité. Yumi était au minimum une amie, elle ne méritait pas qu’il la blesse sciemment. Qui était-il pour l’accuser d’une faute qu’il commettait lui-même ? Le claquement de porte n’était-il dû qu’à son imagination ? Avaient-ils été surpris ? Par Yumi ? Par William ? La fille qu'il aimait était peut-être en train de toucher le fond dans la salle à manger. Elle se sentait peut-être trahie, déçue. A cette seule pensée, il se trouva misérable.
Même si elle n’était pas entrée dans la cuisine, n’allait-elle pas trouver suspect qu’il reste si longtemps seul avec Sissi ? Les autres allaient forcément se poser des questions, Sissi n’arriverait pas à mentir de manière convaincante. Et lui ? Yumi avait toujours eu un excellent instinct pour deviner les choses qu’il essayait de lui cacher. Si elle l’apprenait, arriverait-il à se justifier ? Comment pourrait-il être crédible alors qu’au fond de lui, il frémissait encore sous les caresses de Sissi ?

- Dégage.
- C’est vraiment ce que tu veux, Ulrich ? Tu veux que je parte ?
- Oui.
- D’accord. Je ne dirai rien… si on ne me pose pas de questions.

Sans un regard en arrière, Sissi quitta la pièce, refermant en douceur la porte derrière elle. Seul dans l’obscurité, Ulrich s’appuya sur l’évier. Il avait l’impression que le champ de force se moquait de lui avec ses lumières pétillantes. Ses doigts cherchèrent à tâtons le robinet et il se couvrit le visage d’eau. Alors qu’il se redressait, il entendit la porte s’ouvrir.

- Sissi, soupira-t-il en se retournant, n’insiste…

Il ne termina pas sa phrase. Ce n’était pas Sissi qui venait d’entrer dans la cuisine mais William et Yumi. Ils n’avaient pas l’air de lui en vouloir, ils n’avaient pas l’air de venir réclamer des comptes. À vrai dire, Ulrich n’aurait pas pu dire ce dont ils avaient l’air puisqu’ils s’embrassaient à pleine bouche.
Estomaqué, il n’eut pas le réflexe de signaler sa présence que de toute évidence les tourtereaux n’avaient pas remarquée. Yumi pouffa quand William la plaqua contre le mur, lui dévorant le cou au passage.

- C’est une blague ? demanda nerveusement Ulrich.

Sa voix ne porta pas et il n’arriva pas à bouger. Malgré la pénombre, il vit très clairement que Yumi avait remis la robe de son déguisement. Ce ne fut que quand William passa la main sous le tissu pour remonter le long de sa jambe qu’Ulrich réagit. Avec un grognement hargneux, il se jeta sur le couple. Sa main agrippa William par le col et le força à se retourner. Alors que Yumi hurlait son nom, le poing d’Ulrich venait s’écraser sur le visage de son rival.

- Tu manques vraiment pas d’air, connard !
- Ulrich, arrête !

Le poing du garçon frappa une deuxième fois sans que William cherche à se défendre. Yumi tira Ulrich par le bras et le troisième coup fut pour elle. Elle se laissa tomber sur le sol, la main sur sa joue.

- Ulrich…
- Pardon, je suis désolé !

Profitant de la diversion, William quitta la cuisine sans demander son reste. Horrifié, Ulrich n’y prêta pas la moindre attention.

- Yumi, je suis vraiment désolé, pardonne-moi.

Au moment où les mots franchissaient ses lèvres, le garçon sentit la colère revenir.
Ce n’était pas à lui de s’excuser.

- Tu te rends compte quand même que tu es une belle salope ? C’est quoi le problème, hein ? Tu te tapes William depuis qu’on l’a libéré de XANA, c’est ça ? Vous vous foutez de ma gueule et de celle de Sissi depuis tout ce temps ? Ou alors elle vient seulement de me balancer et tu agis par vengeance ?
- Je ne me tape pas William, répondit la jeune fille d’une voix glaciale. La moindre des choses serait de t’excuser.
- Tu n’étais pas visée et je l’ai déjà fait.
- En trente secondes, tu m’as giflée et traitée de salope. Tu ne t’es pas excusé pour ce dernier point. Si tu veux que je t’explique, excuse-toi. Maintenant.

La colère d’Ulrich fondit aussitôt. Le regard de Yumi n’avait jamais été si dur.

- Je suis désolée de t’avoir insultée, même si tu l’as mérité.
- Et un mec qui me fait mijoter pendant des années avant de roucouler avec une autre à un moment où on s’entend pour le mieux, tu appelles ça comment ?
- Donc Sissi m’a balancé, grinça Ulrich entre ces dents.
- Ne fais pas cette tête là, elle n’est absolument pas coupable ! Elle n’a rien dit, elle s’est effondrée à nouveau en rentrant dans la salle à manger et pas besoin d’être Sherlock pour comprendre ! C’était à William de te frapper, pas l’inverse ! Et moi… Tu t’en moques donc à ce point de ce que je peux ressentir ?

Ulrich se sentit à nouveau mal à l’aise. En dix minutes, il faisait pleurer sa deuxième fille.

- C’était mon idée de jouer la comédie avec William parce que j’en ai marre de ton comportement puéril !
- Ah oui, bien sûr, ta réaction est un exemple de maturité !
- Arrête ! Arrête de toujours rejeter la faute sur moi ! Arrête de te croire irréprochable ! Arrête de m’accuser dès que ça ne va pas entre nous ! Arrête de penser que William est un rival alors que tu n’as même pas le courage d’entrer dans la compétition !

Yumi se laissa glisser sur le sol, en pleurs, terriblement belle dans sa robe. Ulrich sentit sa gorge se nouer tandis qu’elle hoquetait, la tête cachée entre les bras.

- Je suis vraiment désolé, je sais qu’on a tous les deux nos torts. Bon sang, Yumi, comment tu supportes cette situation ? Comment tu supportes le fait qu’on soit presque en couple un jour puis qu’on se déchire pour rien le lendemain ?
- Je ne le supporte pas.

Il fallut plusieurs secondes à Ulrich pour comprendre que déjà, Yumi ne pleurait plus. Si elle continuait à hoqueter, c’était parce qu’elle riait. Lorsqu’elle leva le visage vers lui, il n’y vit que du mépris et de l’amusement.

- Je ne le supporte pas, Ulrich. Je continue à jouer avec toi parce que ça m’amuse. Sissi sort avec William pour ne pas être seule et parce que ça la rend encore plus populaire. C’est pareil pour moi, c’est flatteur de continuer à rendre fou un des mecs les plus prisés de l’école, même après toutes ces années. Tu me demandais quel était le problème tout à l’heure ? Il n’y en a aucun. Je pète le feu grâce à toi. Je me délecte de tes petites crises immatures et comme tu l’as parfaitement deviné, oui, je me tape William depuis qu’on l’a libéré de XANA et oui, je me fous avec lui de ta gueule et de celle de Sissi depuis tout ce temps.

Ulrich accusa le choc. Sa première pensée fut qu’elle mentait mais quel intérêt avait-elle à le faire ?

- Tu as cru que je t’attendrais tout ce temps ? A quoi tu rêvais ? J’ai autre chose à faire, plein de choses à vivre et William est très bon professeur. Sans compter que comme Sissi se la joue aussi reine des glaces, on avait pas mal de vides communs à combler.
- Tais-toi.
- Tu m’as posé des questions et tu ne veux plus les réponses ? Tant pis pour toi, il fallait mieux savoir ce que tu voulais. Enfin, ce n’est pas comme si j’avais l’habitude de subir tes changements d’humeur. Tu ne peux t’en prendre qu’à toi, Ulrich, et tu le sais. Si tu avais été un homme, si tu avais porté tes parties génitales, en admettant que tu saches que tu en possèdes, si tu avais osé me parler, m’embrasser, enfin concrétiser, je n’aurais pas eu besoin d’aller chercher de la chaleur auprès de William.
- Donc ça t’amuse d’être une salope, tu le revendiques ? railla Ulrich, les poings serrés.
- Sur un autre plan, si tu ne m’avais pas piétinée plusieurs fois en te pensant dans ton droit, si tu ne m’avais pas fait pleuré si souvent, si tu avais eu un peu confiance en moi et si tu avais été aimable au quotidien, pas juste les jours où tu t’étais levé du bon pied, je n’aurais pas eu besoin d’aller chercher du réconfort auprès de William. C’est ce qu’il m’a offert en premier lieu et que tu m’as toujours refusé : une oreille attentive, un ami sur qui compter, de l’affection sincère et constante, pas juste quand ça l’arrange. Ouvre les yeux, Ulrich : si nous ne sommes pas ensemble aujourd’hui et si William me passe dessus dès que ça lui chante, c’est uniquement et pleinement ta faute.

Yumi appuya chacun de ces derniers mots d’une voix dure, tout en conservant son regard narquois, son sourire provocateur. Ulrich n’avait jamais senti un tel déferlement de violence couler dans ses veines et il se sentait peu à peu emporté par ce courant dévastateur.

- Tu ne réponds rien parce que tu sais pertinemment que j’ai raison. J’aurais même été prête à me jeter dans les bras de Odd s’il n’avait pas été si volage, parce que même lui m’écoute davantage que toi. Tu ne te souviens qu’on est amis que quand tu as dépassé les bornes et qu’on arrête de se parler mais dès qu’on se rabiboche, tu en remets une couche. Tout est ta faute. Tu as créé un combat auquel tu n’as pas participé et tu m’as jetée toi-même dans les bras d’un vainqueur que tu redoutais et que tu n’as pourtant même pas affronté. Espèce de lâche.
- Ulrich, qu’est-ce qui se passe ?

Le garçon cligna plusieurs fois des yeux. Il était accroupi, une main accrochée au col de Yumi, l’autre levée. Et à l’entrée de la cuisine se trouvait également Yumi.

- Tu peux éviter de me frapper ? tenta-t-elle de plaisanter.

Horrifiée par ce qu’il avait failli faire, Ulrich se laissa tomber à la renverse et recula le plus loin possible de la Yumi en robe qui disparut dans un éclat de rire.

- Visiblement, ce n’était pas le cauchemar de William dans la cuisine, devina la Yumi restante en rejoignant Ulrich.
- Est-ce que Sissi est toujours dans la salle à manger ?

Surprise par la question, Yumi haussa les sourcils mais devant le visage choqué d’Ulrich, elle répondit :

- Personne n’en est sorti avant moi.
- Dans ce cas, XANA commence à être de plus en plus vicieux. Il a largement dépassé ce que j’avais dessiné. Et j’ai la confirmation qu’il y a au moins deux spectres. Un troisième est peut-être à envisager.
- En tout cas, je ne pensais pas que mon déguisement t’avait déplu à ce point.
- Désolé, je ne suis pas trop d’humeur à plaisanter.
- C’est à moi d’être désolée, pardon. J’aurais dû me rendre compte plus vite que quelque chose n’allait pas plutôt que de rigoler aux blagues de Odd sur tes problèmes de transit.

Ulrich réussit à esquisser un sourire et Yumi s’assit à côté de lui.

- Je suis désolée, je ne pensais pas que tu aurais à affronter ton cauchemar seul.
- Sans vouloir te vexer, il n’est peut-être pas fini. Qui me dit que tu es toi ?
- Rien, tu as raison. Mais il y avait un double de moi vautré dans une robe qui normalement est dans mon sac dans la salle à manger. Ce double a maintenant disparu, il n’y a pas de raison que le cauchemar continue.
- Je n’ai pas l’impression de l’avoir vaincu, j’étais encore en plein dedans... Yumi, contrairement aux autres, je ne me suis même pas rendu compte que j’affrontais mon cauchemar ! Quel débile, c’est pas vrai ! Je suis entrée à 200 % dans le jeu de XANA et si tu n’étais pas arrivée, j’aurais continué ! Mon Dieu, Yumi, je t’ai frappée et j’étais prêt à recommencer !
- Ulrich, ce n’était pas moi. J’étais assise avec les autres dans la salle à manger. Tout ce que je t’ai dit ou tout ce que j’ai fait n’était pas réel. XANA a joué avec tes sentiments. XANA, pas moi.
- Mais c’était moi par contre. XANA n’a pas pris possession de mon corps, il ne m’a pas remplacé par un spectre, je ne jouais aucun rôle. J’étais moi et j’étais… horrible.

La voix d’Ulrich se brisa. La tête entre les mains, il n’arrivait pas à accepter jusqu’où il avait pu aller.

- Ulrich, je ne sais pas ce qui s’est passé et je comprendrais que tu ne veuilles pas me le raconter. Mais rien de ce que tu viens de vivre n’a eu de conséquences. Sissi est dans la salle à manger avec William, personne n’est venu. Ce que tu as vécu, tu l’as vécu seul. Il n’y a d’impacts que sur toi.

Les mots de Yumi rassurèrent Ulrich. Au fond et sans le savoir, elle avait raison : il n’y avait d’impacts que sur lui. Il n’était pas entré dans le jeu de séduction de Sissi de manière réelle et même dans son fantasme, il avait su se reprendre avant d’aller trop loin. Restait qu’il avait été prêt à frapper Yumi. Mais même sur ce point, il n’avait pas été au bout, le coup qu’il lui avait porté plus tôt étant destiné à William. Il y voyait une sorte de signe, la preuve qu’il n’était pas une pure ordure, et il en avait besoin.

- Ne t’en fais pas, ça va passer, assura la jeune fille en entourant ses épaules de son bras. Tout ira bien.
- Yumi, je…

Ulrich sentait que le moment était crucial mais il ne trouvait pas les mots. Désemparé, il chercha du regard de l’aide auprès de la jeune fille qui ne savait visiblement pas quoi dire non plus. Alors, sans réfléchir, il l’embrassa, un baiser rapide, fugace, si bref que Yumi se caressa les lèvres comme pour vérifier ce qui venait de se passer. Profitant de la diversion, Ulrich débita :

- Yumi je suis désolé. Je suis désolé pour tout ce que je t’ai fait subir, tout ce que je nous ai infligé. J’ai été une merde, lâche et prétentieuse. Je suis fou de toi, vraiment fou, j’en perds les pédales et je ne serai sans doute jamais assez bien pour toi mais s’il reste une minuscule chance pour que tu m’acceptes, je t’en prie, donne-la-moi.

Yumi le regardait désemparée. Le contexte n’avait rien d’idéal, ne risquait-il pas de changer de discours une fois le choc passé ?
Dans le doute, elle se contenta de lui sourire et de se relever.

- Allons rejoindre les autres.

Elle se dirigea vers le couloir mais Ulrich lui attrapa le bras.

- Attends…
- On en reparle plus tard, d’accord ?
- Ce n’est pas ça le problème. Quel comportement avait Odd dans la salle à manger ?
- Odd ? Il jouait avec Kiwi en regardant de temps en temps ce que faisaient Jérémie et Aelita. Pourquoi ?
- Parce que c’est sa faute ce qui vient d’arriver. Je me suis cru en sécurité parce que Odd m’a dit que je l’étais, que seul William serait en danger dans la cuisine ! Or, ce n’était pas le cas !
- Ce serait surprenant que XANA tienne parole en ne déclenchant que le cauchemar de la personne dans la pièce. Si ça se trouve, il attaque dès que quelqu’un se retrouve seul, sans se préoccuper du dessin.

Yumi ne put s’empêcher de récupérer la feuille posée sur la table pour vérifier ses propos. Ulrich n’était pas un artiste mais elle se reconnut sans difficulté, dans les bras de William.

- Effectivement, XANA a bien extrapolé.

Ulrich rougit.

- Tu n’étais pas censée voir ça. Et ça confirme ce que je dis. C’était mon cauchemar qui était dans cette pièce, depuis le début. Soit le spectre a échangé des feuilles de place, soit Odd nous a menti. Et comme je ne vois pas quel intérêt le spectre aurait à déclencher des cauchemars dans une pièce plutôt qu’une autre, ne me demande plus de faire confiance à Odd.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Lun 25 Déc 2017 21:38   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

J'espère que vous n'avez pas l'estomac trop éclaté (parce qu'après tout, la magie de Noël à nos âges, c'est quand même surtout la bouffe Mr. Green), que vous avez été gâtés, patati patata, Joyeux Noël, etc...

*Odd Della Robbia* a écrit:
j'espere vraiment que malgré avoir rien dessiné tu a prévu un sérieux cauchemar pour Odd

Ne t'inquiète pas, il aura sa dose aussi Mr. Green Car pour prendre une image similaire :
Pierre Bottero a écrit:
Le silence est parfois davantage qu'une absence de bruit. Bien davantage.


*Odd Della Robbia* a écrit:
XANA prend son rôle de maitre du jeu tres au sérieux.

=> On peut même dire qu'avec lui, les LG n'ont qu'à mettre leurs mains sur leur cul Mr. Green


Vous savez normalement qui va affronter son cauchemar dans ce chapitre. A noter qu'il m'a été en partie inspiré par l'OS La petite princesse de Callie Rose.

Bonne lecture !


Chapitre 7 : Ignorance


Sissi n’avait pas menti. Assise à la table de la cuisine, elle entreprenait de vider la boite de lardons directement avec les doigts, sous le regard inquiet de William. Appuyée sur l’évier, Aelita enlevait son bandage improvisé. Par chance, la morsure était nette et ne saignait déjà plus. Elle passa un peu d’eau dessus avant d’aller s’asseoir, sans même boiter. Visiblement, XANA préférait la violence morale.

- William ?
- Hum ?
- Je voulais te remercier.
- De quoi ?
- C’est à toi que je dois de m’en être sortie. Sans toi, le cauchemar m’aurait battue. Alors, à moins que XANA ne soit vraiment doté d’un sadisme exceptionnel, tu es le seul en qui j’ai confiance à présent.

William lâcha enfin Sissi des yeux pour observer Aelita. Son visage avait une gravité qu’il ne lui avait jamais vue.

- Et Jérémie ?
- Je ne peux plus laisser parler mes sentiments. Je sais ce que tu vas dire : quand on a parlé de la présence d’un spectre parmi nous, c’est lui qui a proposé de se poser des questions pour démasquer l’imposteur mais même ce genre de détail ne doit pas endormir notre méfiance. Je ne veux pas que vous soyez confrontés à ce que je viens de vivre. Je vous aime tous et je vous aurais confié ma vie avant aujourd’hui mais maintenant, nous n’avons plus le choix. Nous devons nous méfier les uns des autres. D’ailleurs… Tu ne peux pas être sûre que je suis bien moi et que je n’ai pas joué la comédie dans la chambre alors que c’est moi le spectre. Tu ne dois plus être sûr de rien. Remets-tout en question, interroge-toi cent fois avant de croire à quelque chose.

William ne répondit pas. Il était bien d’accord mais le fait qu’Aelita soit la première à exprimer l’évidence à haute voix ne lui plaisait pas. Elle représentait habituellement la candeur, la douceur, la confiance, presque la naïveté.
À quels changements de personnalité XANA allait-il encore les conduire ?

- Je parle aussi pour toi, Sissi. Je pense sincèrement que tu risques moins que nous en affrontant ce cauchemar.
- Je sais, je ne suis qu’un dommage collatéral qui n’a rien à foutre là, pouffa Sissi.

William adressa un regard explicite à Aelita. « Je crois qu’elle est en train de perdre les pédales ».

- Sois quand même prudente.
- J’irai avec elle.
- Je m’en serais doutée.
- Ce n’est pas uniquement pour les raisons que tu crois. D’accord, j’y vais parce que je veux qu’elle soit en sécurité mais surtout, je ne supporterai pas de rester avec les autres. Tu as vu comme ils me regardaient ? Ils sont à l’opposé de ton état d’esprit, ils me suspectent encore plus qu’avant. Entre XANA qui m’appelle son « beau lieutenant » et ma proposition d’affronter les cauchemars, je ne suis clairement pas en odeur de sainteté. Je préfère mettre un peu de distance avant de me retrouver crucifié au mur.

Même si Jérémie, Odd, Ulrich et Yumi n’en était pas au stade de la crucifixion, ils parlaient effectivement de William à voix basse dans le salon.

- Vous doutez encore que ce soit lui le spectre ? s’étonna Jérémie. Qu’est-ce qu’il vous faut de plus ? XANA l’a reconnu comme un des siens et on dirait qu’il cherche à nous faire tuer ! On devrait l’enfermer dans la chambre d’Aelita, parce que si on l’enferme ailleurs, ça va peut-être déclencher son cauchemar et tuer l’un d’entre nous !
- Le rapport entre son cauchemar et notre mort ? S’il travaille vraiment avec XANA, ce serait plutôt un rêve ! se moqua Odd.
- Et puis, pourquoi XANA se serait amusé à démasquer si tôt son spectre ? ajouta Ulrich. Tu t’emballes un peu vite, Jérémie.
- Ouais, tu as sûrement raison. Désolé, je suis super nerveux.
- Compréhensible.

Jérémie soupira. Assis par terre avec son ordinateur, les portables, le sèche-cheveux de Sissi et quelques câbles, il faisait peine à voir.

- Bon j’espère qu'elle a bientôt fini, j’aimerais bien commencer à bosser sérieusement.
- Sissi ? beugla Odd. T’en es où dans ton renouement avec tes racines de carnivore ?
- On y va.

Aelita rejoignit ses amis alors que William et Sissi montaient l’escalier. Ulrich profita du fait que Jérémie était concentré sur son ordinateur et que Odd jouait avec Kiwi pour entrainer Yumi dans un coin de la pièce.

- Le plan de Jérémie ne me plaît pas du tout.
- Tu crois que ça pourrait être le spectre ?
- Disons que ça prête à confusion. Je n'y connais pas grand-chose en électronique, en informatique et tout ça, mais j'ai l'impression qu'il nous mène en bateau et qu'il ne va jamais pouvoir créer quelque chose capable de nous sortir de là.
- Je sais. Je pense qu'il a juste besoin de s'occuper l'esprit et que c'est le seul domaine qu'il maîtrise.
- Mouais...
- J’ai confiance en Jérémie et j’ai déjà prouvé que je savais mieux le reconnaître que toi, non ?

Ulrich sourit. Tant que Yumi était prêt de lui, il pouvait encore croire que les choses n’étaient pas catastrophiques.

- C’est davantage Odd qui m’inquiète.
- Pourquoi ?
- C’était le plus emballé par le jeu et comme par hasard, c’est le seul qui ne trouve pas de cauchemar à dessiner ? Cela correspond à l’hypothèse du spectre.

Ulrich haussa les épaules.

- De toute façon, tout le monde peut être suspect.
- Pas faux. On change de sujet avant de s’accuser ?
- A ton avis, Sissi va s’en sortir ?
- William est avec elle, ça devrait aller.

Contrairement ce à ce que les « copains et puis c’est tout » pensaient, William n’en menait pas large. Il n’avait aucune idée de ce que pouvait receler le cauchemar de Sissi. D’une certaine manière, il se rendait ainsi compte d’un point essentiel : il la connaissait peu. Il n’était pas assez naïf pour croire que la pire crainte de sa petite amie était de le voir mort. Elle ne parlait pas souvent de sa famille, glapissait devant une araignée et des films d’horreurs mais ce n’était qu’une peur irrationnelle et même recherchée dans le deuxième cas. Qu’est-ce qui l’effrayait vraiment ? Il n’en savait rien.

- Tu veux bien me dire ce que tu as dessiné ? J’ai besoin de savoir à quoi m’attendre.
- Crois-moi, on s’en sortira très bien.
- On n’est pas obligés d’entrer si tu ne te sens plus prête.
- Comme je l’ai dit tout à l’heure, je n’ai pas envie d’y passer mes vacances.
- Je suis là.
- Je sais.
- Si tu veux…
- Bon, t'as fini ? J’y vais.

Sissi ouvrit la porte.
Tout d’abord, ils crurent que la pièce était vide. A la lumière de la lampe torche prêtée par Aelita, William vit le dessin posée sur une petite table près de l’entrée, entouré par des piles de CD. Sissi quant à elle remarqua un homme, surgi de la pénombre pour aller s’accouder à la fenêtre électrifiée. L’éclat bleuté détailla ses traits et si William eut un mouvement de recul, elle ne cilla même pas.

- Papa ?

L’homme resta immobile mais son identité ne faisait aucun doute.

- Sissi, ce n’est pas ton père, tu le sais.

La jeune fille hocha la tête. Pendant plusieurs secondes, il ne se passa rien, si bien que William finit par demander :

- Euh… On est censés faire quoi ?
- Je n’en ai aucune idée. Je sais très bien ce qui se passe mais ce que tu prends pour un cauchemar n’est que le résumé de ma vie.

William fronça les sourcils. Sissi fixait le dos de son père, indifférent à leur présence, et des larmes commencèrent à rouler sur ses joues.

- Est-ce qu’il t’a… fait du mal quand tu étais enfant ? s'inquiéta-t-il. Il t’a battue ou… ou pire ?
- Regarde-le. Tu le trouves agressif ?
- Non. Mais c’est peut-être un piège.
- Crois-moi, ça ne l’est pas, soupira Sissi en récupérant sa feuille et en la tendant à William.

Celui-ci découvrit, non sans surprise, la finesse du dessin. On reconnaissait très clairement Sissi en arrière-plan et son père au premier plan, lui tournant le dos.

- Aux yeux de tous, je suis la petite fille chérie du proviseur mais il n’en est rien. Notre maison, c’est le collège. Tous les élèves sont ses enfants. J’ai de l’argent de poche et pas eux, Papa pense que ça fait toute la différence. Je mange avec lui certains soirs mais d'autres passent davantage de temps en sa compagnie. Je crois qu’il m’aime mais il ne sait pas le montrer. Et moi je l’adore parce que je garde de lui l’image que j’en avais étant petite. Avant…

La voix de Sissi se brisa. William la prit dans ses bras et ses larmes se changèrent en sanglots.
Elle resta plusieurs minutes à pleurer sans que le spectre ne réagisse. William ne savait pas quoi faire, à part lui caresser maladroitement les cheveux. Il avait l’impression de ne plus la reconnaître et il eut honte de penser l’espace d’un instant qu’elle pouvait être un second spectre.

- Ma mère est morte quand j’avais sept ans. Mon père n’a plus jamais été pareil après. Il ne s’en est jamais remis. Moi, tout l’amour que j’avais pour Maman s’est reporté sur lui, je croyais que ça nous rapprocherait et qu’on pourrait quand même continuer à former une famille. Mais lui, son amour s’est perdu. Il n’a plus été capable de montrer quoi que ce soit de manière sincère. Les seules fois où j’ai l’impression qu’il m’attache encore un peu d’importance, c’est quand il s’inquiète parce que je suis malade ou blessée. Et dans ces cas-là, je ne sais même pas si c’est l’amour qui ressort ou son sens des responsabilités.
- Tu crois que tes états d’âme l’intéressent ?

Sissi eut l’impression de recevoir une gifle. Le spectre leur faisait enfin face. Ce regard froid, teinté d’ennui, elle y avait souvent eu le droit mais cette fois, il lui retourna l’estomac.

- Quand accepteras-tu que ta vie pue la médiocrité ? Tu t’entoures de deux gorilles abrutis et laids pour te convaincre d’être intelligente et belle. Mais tu n’es qu’une façade qui s’effrite dès qu’on la frôle. On pourrait souffler toute ta superbe par une simple expiration. Tu rabaisses le peu de personnes qui te manifestent de l’intérêt pour te sentir exister. Parce qu’au fond, tu sais que tu n’es pas aimée. Tu es prête à tout pour ne pas être ignorée. Tu préfères que les gens te craignent ou te méprisent, tu préfères avoir des ennemis plutôt que des amis tant que ça te permet d’avoir un lien avec quelqu’un, tu préfères attiser le dégoût pour ne pas attirer l’indifférence.
- Ne l’écoute pas, Sissi.
- Il faut que je l’écoute si je veux lui prouver qu’il a tort, répondit mollement la jeune fille.
- Belle mentalité, railla le spectre. Dommage que tu ne l’appliques pas plus souvent, Madame je n’écoute pas les gens parce que ce que j’ai à dire est forcément plus important. Madame je veux être le centre de l’attention. Madame je dois aveugler les autres par mon apparence et mes gesticulations pour qu’ils ne se rendent pas compte d’à quel point je suis creuse.
- Tu n’es pas comme ça, tu le sais, Sissi.
- William, William, tu es plus malin d’habitude. Tu crois sincèrement qu’elle en a quelque chose à faire de toi ? Tu n’es qu’un pion de plus dans sa cour, un moyen d’accéder à la normalité et à l’attention. Elle se sert de toi pour se sentir adolescente extraordinaire, pour réchauffer son cœur glacé à un peu d’affection. Mais tu n’es qu’un faire-valoir, comme tous les autres. Elle n’est avec toi que pour se glorifier encore un peu plus, montrer qu’elle peut attirer d’autres garçons que celui qu’elle vise vraiment. Elle ne t’aime pas, tu l’indiffères.
- Ce n’est pas vrai, c’est mon ami !

Sissi s’était exclamée avec force mais elle réalisa trop tard que ses mots n’étaient pas les bons. Le spectre éclata de rire et soudain, la jeune fille se retrouva avec deux William : celui à ses côtés qui gardait un visage dur, prêt à bondir, et celui face à elle qui la couvait d’un regard vide.

- Tu crois que je ressens quelque chose pour toi ? Mais non, je suis effectivement comme tous les autres. Tu m’indiffères. J’aime juste l’idée de montrer au monde et à cette pimbêche de Yumi que je suis un beau gosse pouvant avoir la nana soi-disant la plus populaire de l’école. C’est glorifiant. Tu croyais être la seule à jouer la carte du couple comme attiseur de jalousie ? Tu vois, Sissi, il n’y a pas que toi qui peux jouer avec les gens.
- Ignore-le, conseilla le vrai William.
- Oh ça, elle ne sait pas faire. Son rôle, c’est d’être ignorée, pas l’inverse. Et quand elle jubile parce qu’on lui adresse enfin la parole, tu ne crois pas qu’elle va gâcher cette joie en ne prenant pas en compte ce qu’on lui dit. Chaque parole lui tient à cœur, tous les mots qu’on lui adresse se gravent en elle. Sais-tu combien de fois, elle a pleuré, seule comme toujours, dans son lit le soir en repensant à des blagues de Odd et du reste de sa bande ? Sais-tu combien de fois elle s’est murmuré à nouveau des mots gentils pour se donner l’énergie d’affronter le quotidien ? Elle est si faible et si niaise que la moindre phrase prend des proportions considérables. Elle ne peut que s’accrocher à du vent, des mots qu’on lui a jetés avant de les oublier. Elle est persuadée que le monde a sa mémoire mais le monde se fout d’elle.

Sissi était devenue livide. Aelita avait eu tort en pensant que XANA la connaîtrait moins que les autres. Chaque syllabe crachée par le spectre venait la heurter en pleine poitrine, trempée dans le venin douloureux de la vérité.

- Sissi.

William l’attrapa par le poignet et l'obligea à le regarder.

- Sissi, je t’aime.

La jeune fille en eut le souffle coupé. Elle n’avait plus entendu ses mots depuis des années. Personne ne les lui avait offerts depuis que sa mère était morte.

- Il dit ça pour que tu arrêtes de chialer, siffla le spectre en reprenant l'apparence du proviseur. Il n’en pense pas un mot. Il est avec toi juste parce que tu as une allure de fille facile et qu’il espère te passer dessus rapidement. Car tu n'imagines pas à quel point c'est frustrant d'être considéré comme un playboy, de faire fantasmer les filles et même les mecs sans être capable de concrétiser. Avec toi, il ne devrait pas y avoir trop de difficultés.
- Sissi, combien de fois est-ce que j'ai essayé de te toucher de manière déplacée ? Je n'ai jamais profité de l'obscurité d'une salle de ciné pour te tripoter, je n'ai rien tenté à Séville alors que nous étions seuls. Je sais que tu ne me vois pas comme je te vois et que tu n'as aucune envie de te donner à moi. J'en meurs d'envie mais je te respecte et jamais je ne te forcerai à quoi que ce soit.
- Il te ment. Il ne pense qu'à ça.
- Je suis un mec, pauvre con de spectre, évidemment que je ne pense qu'à ça, ricana William.

Malgré elle, Sissi sourit.

- Tant mieux si tu le crois. Mais ça reste ton cauchemar, jeune idiote. Et sais-tu qui s'y connait en la matière ? menaça le spectre.

Ses doigts commencèrent à se changer en griffes alors que son visage se couvrait de cloques.

- Vas-y, l'encouragea Sissi. Change-toi en Freddy Kruger. Triche si ça t'amuse. Mais mon cauchemar, je l'ai battu et je t'emmerde. Tu as eu William un jour sous ton emprise ? Maintenant, il est à moi. Sans rancune.

Le spectre termina sa transformation sans répondre. Pendant de longues secondes, il regarda les deux adolescents. Puis, il haussa les épaules.

- De toute façon, tu ne m'intéresses pas.

Il disparut dans l'ombre comme il était arrivé et William se tourna vers Sissi avec des yeux exorbités.

- Comment tu fais ?
- Comment je fais quoi ?
- Avant le cauchemar d'Aelita, tu étais paniquée. Avant d'entrer ici, tu étais archi sereine, tu as de nouveau paniqué, et là, tu lui dis tranquillement de se casser et il t'obéit ? Mais ça n'a aucun sens !
- Un truc de fille j'imagine. Par contre, je crois que je vais m'évanouir.

William eut juste le temps de tendre les bras avant que les jambes de Sissi ne flanchent. Il l'accompagna sur le sol où il la garda serrée contre lui. Elle transpirait et son regard brûlait d'une étincelle de folie douce.

- Je voulais que tu saches que ce qu'il a dit... Enfin, je ne savais pas que je t’aimais. Ce matin encore, je croyais que…
- Que tu aimais Ulrich, c’est ça ? Sissi, je ne suis ni naïf, ni aveugle. Je le savais.

Sissi garda les yeux rivés dans ceux de William. Il la regardait avec un sourire triste et ne semblait pas bluffer.

- Évidemment que je le savais. Mais je tiens à t'assurer que je me moque de Yumi.
- Tu te fiches de ce que je viens de te dire ?
- Je m’en fiche. Parce que je suis persuadé que tu apprendras à m’apprécier. Ce que tu ressens pour Ulrich n'est qu'un attachement familier. Une habitude plus qu'un amour. Je suis persuadé qu'au fond, tu as déjà des sentiments plus forts que tu ne le penses pour moi. Il te suffit de t'en rendre compte. Et il est donc hors de question que je laisse XANA t’empêcher de disposer de ce temps.

Sissi sourit. Elle avait l'impression d'être plongée dans du coton, elle ne sentait plus vraiment ses membres et sa tête lui faisait mal. D'un geste maladroit, elle caressa la joue de William.

- Désolée. Tu ne méritais pas ça. Tu es le garçon le plus gentil et le plus prévenant que j'ai jamais rencontré.
- Ce ne sont pas vraiment les qualificatifs les plus flatteurs mais c'est un début.
- Tu veux toujours de moi ?
- Évidemment.
- Pourquoi ?
- Mon côté sadomaso. Ou chevalier servant si tu préfères. Tu ne te rends pas compte à quel point tu es touchante et adorable. Tu me fais vraiment craquer, Sissi. Malgré tes grands airs, tu es la demoiselle la plus en détresse que j'ai eu l'occasion de croiser.
- Toi non plus, t'es pas très flatteur !

William sourit et quand il se pencha pour l'embrasser, ce fut la première fois que Sissi s'en sentit vraiment heureuse.
Ils restèrent plusieurs minutes enlacés avant qu'un toussotement ne se fasse entendre.

- Excusez-moi, tout va bien ?

William tourna la tête. Debout devant la porte désormais ouverte, Aelita les regardait avec inquiétude.

- Sissi va bien ?
- Oui, elle est encore un peu sous le choc.
- On a été idiots, on aurait dû attendre sur le palier.
- Crois-moi, il ne valait mieux pas. Je pense que Sissi préfère garder pour elle les choses que le spectre a dites.

La jeune fille hocha la tête et s'appuya sur le bras de William pour se remettre debout. Aelita lui adressa un sourire encourageant avant d'annoncer :

- J'ai une bonne nouvelle en tout cas. Odd, c'est souvenu d'un truc qui pourrait nous être utile. Tu te sens de marcher ?
- Pas de soucis.

Malgré son ton assuré, Sissi fut obligée de laisser William la porter à moitié pour réussir à descendre les escaliers. Par chance, elle n’eut pas besoin de demander aux autres de ne pas poser de questions, un Odd surexcité monopolisant l’attention.

- Ah bah enfin, vous voilà ! Tu te souviens de ta feuille, William ?

Sans laisser au garçon le temps de répondre, Odd poursuivit :

- Tu l’as percée en dessinant ton cauchemar, tu te souviens ?
- Oui et ?
- Et bien je me rappelle avoir mis cette feuille dans la cuisine. Donc on sait déjà que les autres peuvent y aller tranquilles.
- Oui, bien sûr, pour se rendre compte que si ça se trouve, XANA a modifié les emplacements des feuilles !
- Il ne respecterait pas ses propres règles.
- Il n’a jamais précisé que les cauchemars seraient ceux présents de base.
- Ok, on évite de s’éparpiller, relativisa Aelita. Si les règles sont comme décrites, Sissi et moi sommes tranquilles. La cuisine est dangereuse pour William mais par conséquent, il peut se rendre partout ailleurs seul.
- Je ne laisserai pas Sissi de toute façon.
- Je vois où tu veux en venir, Aelita, intervint Yumi. Tu penses que te balader dans toutes les pièces avec quelqu’un qui n’a pas encore trouvé son cauchemar nous permettrait de les démasquer un par un ?
- En tout cas, ça éviterait qu’on les découvre par inadvertance sans y être préparés.
- On pourrait aussi faire une pause dans les poussées d’adrénaline et rester un peu ici, proposa Jérémie. Ça m’aiderait si tu pouvais me donner ton avis sur quelques points, Aelita. Je ne l’avoue pas de gaieté de cœur mais je patauge.
- Je vote pour la pause, annonça Sissi.

Sans attendre de réaction, elle alla s’écrouler sur son matelas, suivie par William.

- Où tu vas ? s’inquiéta Yumi en voyant Ulrich se lever.
- Désolé, à un endroit où tu ne peux pas aller pour moi.
- Heureusement qu’on n’était pas plus nombreux, vous imaginez si on avait mis un cauchemar dans les toilettes ? L’un de nous aurait peut-être eu une fin atrocement sale ! Sérieusement, vous imaginez ?
- Merci pour cette précision, Odd…
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

Réponses: 22
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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Ven 22 Déc 2017 21:09   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, Bonsoir !

Alors, avant toute chose, je m'effondre. Ma vie s'écroule. La PCSI aura définitivement bousillé mon existence.

Ikorih a écrit:
"Et mention spéciale pour "la lueur narquoise des champs magnétiques", qui sonne si bien **"
Du coup je vais m'autoriser à revenir sur le commentaire de Dyssery
Mathilde, il faut que je t'avoue quelque chose....
Un champ magnétique n'émet pas de lumière <3


*PAN*

J'ai effectivement confondu « champ magnétique » et « champ de force ». Honte à moi (et désolée Dyssery Crying or Very sad ). Après, je laisse aux scientifiques le débat ouvert, perso, je m'en moque un peu de savoir si un champ magnétique produit de la lumière ou pas Mr. Green Dans le doute, les champs magnétiques deviendront quand même des champs de force dans les chapitres suivants.

Afin d'expier cette faute, je pars en week-end sans mon ordinateur. On ne se retrouvera donc pas avant lundi soir.

Après avoir remplacé TOUS les « champ(s) magnétique(s) » par des « champ(s) de force », je vous laisse le chapitre 5, qui finit cette longue mise en bouche pour ensuite laisser le chapitre 6 ouvrir les hostilités Mr. Green Personnellement (et c'est pas si souvent), j'adooore ce chapitre 6 !

Vive les lardons crus et bonne lecture !

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Chapitre 5 : Nouvelles règles



- Bon. Qu’est-ce qu’on fait ?
- J’imagine que ce n’est pas le moment de proposer un goûter ?
- Odd !
- C’est ça, engueulez-moi, en même temps, j’ai bien fait de ramener les bougies, pas vrai Einstein ?

Jérémie ne répondit pas. Il avait été incapable de relancer le générateur et ils avaient tous compris, trop tard, que XANA n’avait aucun mal à les manipuler. Le ciel dehors restait noir et si les champs de force continuaient de les narguer, ils n’étaient pas assez puissants pour éclairer correctement. Odd avait donc raison de préciser que ses bougies étaient salvatrices mais Jérémie avait d’autres soucis en tête.

- Il faut qu’on trouve un moyen de sortir. Pour l’instant, XANA n’a pas été offensif mais qui sait combien de temps ça durera. En admettant qu’il ne fasse que nous regarder comme des souris en cage, je préfère être dehors avant qu’on manque de nourriture ou qu’on commence à s’entretuer sous l’effet du stress.
- L’avantage, c’est que ceux qui ne s’entretueront pas pourront manger les autres. Crus, vu qu’il n’y a plus d’électricité, mais c’est déjà ça.
- Odd, arrête !
- Ne vous énervez pas, petits agneaux. On va continuer à jouer.

La voix caverneuse, qu’ils allaient devoir s’habituer à reconnaître comme la voix de XANA, résonna dans le salon où les adolescents étaient retournés s’asseoir. Kiwi se mit à aboyer furieusement. Sissi se serra contre William alors qu’Aelita attrapait la main de Jérémie, la gorge nouée.
Ils n’étaient que des créatures fragiles, attendant que l’horreur les frappe.
Ils ne pouvaient rien faire d’autre et cela la rendait malade.

- J’ai beaucoup appris de vous en vous regardant vous agiter toutes ces années. Vous êtes faibles mais vous essayez de jouer les durs quand vous agissez les uns pour les autres, ça en devient très amusant. Et pour une fois, j’ai envie qu’on s’amuse ensemble.

La voix était si glaciale que même Kiwi alla se cacher dans les bras de Odd en couinant.

- Je trouve vos petits cauchemars très touchants. Je ne les concrétiserai que si vous entrez à un ou deux dans une pièce. Et vous savez quoi ? Si vous décidez de rester groupés, ils ne se déclencheront jamais et vous ne gagnerez jamais la partie. Sans vouloir être mélodramatique, vous resterez ici pour toujours. Enfin, quand je dis toujours, c’est plutôt jusqu’à ce que je me lasse de vous. En tout cas, choisissez bien votre copain, pas comme certaines. Moi par exemple, j’ai un super copain. Un ou plusieurs d’ailleurs, pourquoi être égoïste ?

Yumi eut toutes les peines du monde à ne pas regarder les autres avec suspicion, ce que ne put s’empêcher de faire Sissi.

- Magnanime, je vous laisse faire vos cauchemars dans l’ordre que vous voulez. Je reviendrai quand vous aurez tous battu vos peurs. Oh, et n’oubliez pas que le zombie court toujours. Bye-bye mes agneaux.

Pendant près d’une minute, personne n’osa parler.

- « Moi, j’ai un super copain en tout cas. Un ou plusieurs d’ailleurs, pourquoi être égoïste ? », répéta Ulrich. Qu’est-ce que ça veut dire d’après vous ?
- Il y a au moins un spectre qui traîne dans la maison.
- Un fantôme tu veux dire ? Parce que si c’est le cas, on ne risque rien, non ?
- Les spectres de XANA n’ont rien d’immatériel, Sissi, crois-moi. Ils peuvent prendre la forme qu’ils souhaitent et interagir avec la matière.
- N’importe quelle forme ?

Aelita comprit aussitôt ce que Sissi craignait.
- « N’oubliez pas que le zombie court toujours », répéta-t-elle à son tour. Sans vouloir noircir le tableau, j’ai peur que…
- … que l’un de nous soit le spectre ? finit Odd, lugubre.
- J’y ai pensé aussi, avoua William.

Le silence revint s’installer.

- On pourrait se poser des questions auxquelles seuls nous pouvons répondre, suggéra Jérémie. Comme ça, on verra vite qui joue la comédie.
- Je ne pense pas que ça marchera : si XANA se sent assez sûr de lui pour nous prévenir, c’est qu’il sait qu’on ne pourra pas démasquer le spectre. Réfléchissez ! Il revient comme par hasard aujourd’hui, il donne dans le sens du spectacle. Ce n’est pas cohérent pour une intelligence artificielle. Quelqu’un a peut-être rallumé le Supercalculateur, quelqu’un qui se sert de lui, de nous. Qui nous dit qu’en fait, XANA a été vaincu ? Il a très bien pu refaire surface tout de suite après. Peut-être qu’il s’amuse à nous épier depuis tout ce temps.

Tous les regards fixèrent William qui finit par avoir un ricanement sinistre.

- Quoi, vous pensez qu’en disant ça, je remporte le rôle de suspect idéal ?
- Les questions permettraient de démasquer le spectre, insista Jérémie.
- Non, William a raison, intervint Yumi. XANA veut jouer avec nous. Je ne sais pas pourquoi il a attendu aujourd’hui, la seule raison logique étant qu’il voulait s’amuser à nous faire peur.
- Vous avez l’air d’oublier qu’on parle d’un programme informatique ! Il n’a pas de sentiments, il ne peut pas vouloir s’amuser à nous faire peur, ce n’est pas logique ! Il aurait plus vite fait de révéler qui est son spectre et d’électrocuter les six qui restent ! s’entêta Jérémie.
- D’ailleurs, vous ne pensez pas que la priorité, c’est de retrouver celui d’entre nous qui a été remplacé par le spectre ? Il est peut-être en danger.

La question de Sissi jeta un froid et tous pensèrent aux mêmes choses. Le spectre était peut-être présent depuis des semaines ou plus parmi eux. Un de leurs amis était peut-être mort à l’heure actuelle pour permettre à XANA de dérouler son plan.

- Elle a raison, c’est la priorité.
- Aelita…
- Non, Jérémie. Je me moque de savoir qui est le spectre si le temps utilisé à le démasquer est fatal à l’un d’entre nous !
- Mais…
- On va faire deux équipes de trois pour éviter de réveiller les cauchemars et on va fouiller la maison pour essayer de voir si on trouve quelqu’un d’autre. William et Sissi, vous venez avec moi, on s’occupe de l’étage. Ulrich, Yumi et Odd, vous vous occupez du rez-de-chaussée. Jérémie, tu restes ici et tu essayes de voir si avec ton ordi, tu ne peux pas faire quelque chose : vérifier si tu as accès aux données du Supercalculateur, voir si en bidouillant ton système de sécurité, tu ne peux pas trouver un moyen de désactiver les champs de force pour qu’on puisse sortir, n’importe quoi qui pourrait nous aider.
- Tu veux me laisser tout seul ? glapit l’adolescent.
- Non, tu peux garder Kiwi.
- Mais imaginez que mon cauchemar soit dans cette pièce et qu’il se déclenche une fois que je me retrouve seul ? Comment je fais ?
- Il a raison, grimaça Yumi. On n’est plus en sécurité dans les pièces principales.
- La seule pièce sûre, c’est celle où il y a mon cauchemar.
- Pourquoi tu dis ça, Odd ?
- Euh… J’ai rien dessiné sur ma feuille, avoua le blondinet en ébouriffant ses cheveux avec un sourire gêné.
- Quoi ? s’étranglèrent les autres.
- Tu te fous de nous ?
- Bah je savais vraiment pas quoi mettre, y a rien qui m’est venu, j’allais pas y passer la journée.
- Sale tricheur !
- Sale tricheur ? Ulrich, réfléchis, il vient de nous donner une pièce où nous serons en sécurité !
- Ah parce que tu es assez naïf pour croire que XANA s’arrêtera à ça ?

Jérémie et Ulrich se foudroyaient du regard si bien que Yumi finit par demander d’une voix timide :

- On devrait essayer de trouver une solution ensemble plutôt que de se disputer.
- Coup de chance, Jérémie, tu ne risques rien.

Les têtes se tournèrent vers Aelita, à l’écart du groupe avec une feuille vierge à la main.

- Ici, c’est le cauchemar de Odd. Autrement dit, on peut tous rester seuls dans le salon sans risquer de voir un truc horrible arriver.
- Enfin une bonne nouvelle, soupira Sissi.
- De manière générale, il vaut mieux éviter de rentrer dans une pièce à moins de trois, ça évitera de prendre des risques.
- Tu as entendu XANA ? On ne sortira pas d’ici si on ne triomphe pas de nos cauchemars.
- Crois-moi, Sissi, tu ne connais pas XANA. Il ne nous laissera pas sortir d’ici. Mieux vaut trouver un moyen de partir par nous-mêmes, en évitant de se compliquer la tâche avec nos angoisses.
- Va pour l’exploration alors, trancha Yumi. Mais qu’est-ce qu’on fait si on ne trouve pas celui que XANA a remplacé par son spectre ? S’il tient tant que ça à nous faire tourner en bourrique, ça m’étonnerait qu’il ait laissé le corps, mort ou vif, ici.
- De toute façon, rester ici à angoisser n’aidera pas.
- Il y a un autre point qui m’inquiète, avoua Ulrich. « Choisissez bien votre copain, pas comme certaines ». Qu’est-ce que ça voulait dire d’après vous ?
- Qu’Aelita ou Sissi sort avec le spectre ? suggéra Yumi.
- N’importe quoi ! s’exclamèrent les deux filles en cœur.
- Que Yumi a eu tort de choisir de sortir avec Ulrich et aurait dû lui préférer William ? blagua Odd.
- Arrête !
- Qu’une des filles va mourir en premier ? paniqua Sissi.
- Pourquoi ?

Sissi ne répondit pas, envisageant soudain une autre possibilité. Et si la menace lui était directement adressée ? Si ce XANA lui faisait sournoisement savoir qu’il connaissait ses sentiments ?
Impossible, ce n’était qu’un programme informatique.
Oui mais il était également impossible qu’un programme informatique prenne sept adolescents en otage dans une maison perdue.
Elle se prit la tête entre les mains et William passa un bras autour de ses épaules.

- Comment tu te sens ?
- Je rêve de repartir en arrière et je me dis que j’ai été idiote de vouloir découvrir votre secret pendant tout ce temps. Je préférerais ne rien savoir.
- Désolé.
- Pas ta faute.

Le silence retomba.

- Bon… Si ça ne te dérange pas de rester seul Jérémie, je suggère qu’on commence à fouiller la maison.
- De toute façon, je travaillerai mieux sans vous dans les pattes, reconnut le garçon.
- Dans ce cas, c’est parti ! Une petite carte pour se donner du courage ?
- Odd, tu crois vraiment que c’est le moment ?

Sans se démonter, le blondinet attrapa la première carte de la pioche.

- « Les loups ont réussi à entrer ! Va vérifier toutes les pièces afin de sécuriser les lieux ! ». Génial, c’était prévu de toute façon.
- Génial, c’est vite dit…

***


- Ce qu’on fait ne sert à rien, soupira Yumi alors qu’elle entrait dans la cuisine avec Odd et Ulrich, bougies à la main. Je persiste à croire que XANA ne va pas nous laisser trouver celui ou celle qu’il a remplacé par un spectre.
- Je suis d’accord avec toi mais ça me rassure de faire quelque chose, même si c’est une chose inutile.
- Moi, je préfère faire quelque chose d’utile ! Je vais nourrir Kiwi !

Alors que Odd attrapait une boite de conserve posé sur la table et sifflait son chien, Yumi s’adossa à l’évier, imitée par Ulrich. Le garçon passa nerveusement la main dans ses cheveux, geste qui n’échappa pas à Yumi.

- Hey, arrête de stresser, on va s’en sortir.
- Ce n’est pas à ça que je pensais. En fait… Tu es vraiment super belle.

La japonaise rougit.

- Je pense que je vais aller me changer, cette robe ne va pas franchement avec la situation.
- Fais gaffe, Yumi, tu devrais attendre Sissi et Aelita. Parce que rappelle-toi qu’on ne peut pas entrer dans une pièce seul ou à deux sans déclencher un cauchemar ! Tu risques de te faire mater !
- Odd, grogna Ulrich.
- Bah quoi ?
- En fait, je suis plus rassurée avec vous.
- Qu’est-ce que tu sous-entends ?
- Rien… Enfin, si. Il y a un point que je trouve bizarre : c’est la première fois qu’on se trouve véritablement en danger dans ce monde à cause de XANA et c’est comme par hasard la première fois où Sissi est vraiment intégrée au groupe.
- Où est passée celle qui se plaignait il y a encore dix minutes d’avoir failli être explosée par un satellite militaire ? railla Ulrich.
- Tu as compris ce que je voulais dire. Les autres fois, on a eu une bonne dose de chance, c’est vrai, mais pas seulement. On savait qu’on pouvait compter sur Lyoko et Aelita. Aujourd’hui, on n’a pas ce luxe.
- Ce n’est pas la faute de Sissi. Tu l’as vue ? Elle a plus peur que nous tous réunis.
- Si XANA se permet de faire de l’humour ou de montrer des sentiments proches de ceux d’un humain, pourquoi ses spectres ne pourraient-ils pas faire semblant d’avoir des émotions fortes ?
- Yumi, t’es sûre que t’es pas jalouse sur les bords ? se moqua Odd.

La lumière de la bougie fut suffisante pour remarquer que la japonaise levait les yeux au ciel.

- J’ai un peu plus de maturité que ça.
- On a pu le voir à de nombreuses reprises effectivement !
- T’es vraiment lourd, Odd.
- Je te prouve que je ne suis pas un spectre, XANA n’aurait jamais pu imiter mon sens de l’humour subtil et raffiné !

Cette fois, Yumi sourit.

- Ok, tu marques un point.

Ils quittèrent la cuisine pour fouiller la chambre d’amis sans rien trouver et revinrent dans la salle à manger. Jérémie avait troqué son déguisement contre ses vêtements habituels et pianotait nerveusement sur son ordinateur.

- Tout est planté. Je n’ai plus la main sur rien, que ce soit l’alarme ou la sono. Je n’ai aucune idée de la manière dont on va pouvoir sortir. Je ne peux même pas avoir accès à Internet pour envoyer un mail de détresse, je ne peux rien faire.
- En dernier recours, on pourra essayer de creuser un tunnel ou de démonter le toit, marmonna Ulrich.

Jérémie lui adressa un regard surpris mais il ne lui fallut qu’un instant pour comprendre que son ami avait répondu n’importe quoi, simplement pour ne pas tourner la tête vers Yumi en train de se changer.

- Je note tes idées mais au cas où tu ne le saurais pas, les maisons ne sont plus faites en paille et en bois, on va voir du mal à creuser un tunnel dans du béton.
- Qu'est-ce que tu proposes ? s’impatienta Odd.
- Les autres ne devraient pas tarder à redescendre, on verra s’ils ont quelque chose. Par contre, toi, il y a un truc que tu peux faire.
- Je t’écoute !
- Retire ton bout de cervelle ou je le fais bouffer à ton chien.


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Chapitre 6 : Les loups sont entrés



- Sissi, calme-toi, tu vas finir par lâcher ta bougie.

La jeune fille tourna la tête vers William et essaya de lui sourire sans succès. D’une main, elle agrippait son bras tandis que l’autre tenait une bougie à la flamme tremblotante.

- Comment vous faîtes pour rester aussi détendus ? Vous n’avez jamais eu peur ? Yumi a parlé d’un satellite qui aurait pu la tuer et vous arrivez à ne pas paniquer ? Vous vous croyez dans un jeu vidéo ou quoi ?
- Je n’ai jamais eu vraiment affaire à XANA en dehors de la période où il m’a lavé le cerveau et gardé sous son contrôle sur Lyoko, essaya de plaisanter William.

Sissi se recroquevilla encore un peu plus sur elle-même si bien que le garçon la prit dans ses bras.

- Je te jure que ça va aller. Il y a eu pire à affronter qu’une maison vide.
- Sans doute...

A un mètre derrière eux, Aelita marchait en silence, sa lampe-torche à la main. Elle ne savait pas si elle avait plus de chances que les autres mais en tout cas, Jérémie avait toujours su la rassurer. William ne semblait pas très doué en la matière.
Elle ouvrit la porte de sa chambre et balaya la pièce avec le faisceau de sa lampe.

- Génial. Champs de force sur les fenêtres ici aussi, impossible d’ouvrir les volets.
- Est-ce que ça vous dérange si on entre ? Je voudrais me changer.
- C’est si important ?
- Je suis pour aussi, William. Si on a besoin de courir, j’aime autant porter autre chose que des talons.
- D’accord mais on entre bien tous les trois ensemble. Prêtes ? Go !

Aelita et Sissi faillirent tomber quand William les poussa en avant, manquant après trébucher sur elles. Ils restèrent quelques instants immobiles, le souffle court, mais rien ne vint troubler le silence de la pièce.
Sissi attrapa son sac et récupéra ses vêtements. Elle se changea dans un coin sombre, loin de William. Aelita fit de même, non sans fixer les champs de force avec insistance, comme si le moyen de les désactiver allait fuser dans son esprit.

- J’espère que Jérémie trouve quelque chose.

William hocha la tête et suivit Sissi en dehors de la pièce. En revanche, Aelita trébucha en voulant sortir, lâchant sa lampe qui roula dans le couloir. À genoux sur le sol, elle tâtonna pour trouver l’objet ayant causé sa chute et sentit une matière douce sous ses doigts. Son cœur s’arrêta. D’abord, parce que l’objet était trop mou pour l’avoir fait tomber, à moins d’être bien plus grand.
Ensuite, parce qu’elle se retrouvait seule dans la pièce.

- William ?
- Quoi ? lança le garçon depuis le palier.
- Tu as mis ton masque dans ma chambre ?
- Nan, je l’ai rangé, pourquoi ?

Aelita ne prit pas la peine de répondre. Un grognement retentit près d’elle tandis que sous ses doigts, la fourrure bougeait. Horrifiée, elle sauta sur son lit. Sa main se tendit machinalement vers sa lampe de chevet avant qu’elle ne se souvienne de l’absence d’électricité. Dans sa panique, elle la fit tomber.

- Aelita ! hurla William, alerté par le bruit.

Il se rua vers la porte de la chambre mais celle-ci-claqua et se retrouva bloquée par un champ de force. Derrière lui, Sissi ne put s’empêcher de reculer.

- Aelita !
- Qu’est-ce qui se passe ? s’inquiéta Jérémie en bas de l’escalier.
- Ne monte pas ! Je crois qu’Aelita doit affronter son cauchemar.
- C’est un excellent motif pour monter ! s’étrangla le garçon.

Il s’élança dans le hall mais se retourna arrivé au pied de l’escalier.

- Non, Yumi !

La japonaise s’arrêta une fraction de seconde avant de quitter la pièce.

- Reste avec les garçons, ils vont être deux sinon.
- Mais Odd n’a rien dessiné.
- On ne prend aucun risque !

Sans attendre de réponse, Jérémie monta les marches quatre à quatre.

- Ne t’approche pas de la porte, le retint William, ça ne servira qu’à te faire griller.
- Tu crois ?
- Je ne sais pas mais tu viens de le dire : on ne prend aucun risque. On ne peut pas l’aider, elle va devoir s’en sortir toute seule.

Le regard de Jérémie passa de son ami au champ de force. Il colla ses mains sur le mur et cria :

- Aelita, je suis là ! Tout ce que tu peux voir n’est pas réel, tu ne risques rien. Je suis là, ne crois à rien d’autre !

Aelita n’entendit pas l’encouragement. Plaquée contre le mur, debout sur son lit, elle essayait de voir le loup mais l’obscurité de la chambre était totale. Elle entendait en revanche parfaitement bien ses grognements, tantôt à son oreille, tantôt à l’autre bout de la pièce. Était-il rapide ou avait-il ramené des amis ?

- Va-t-en !

Un rire remplaça les grognements.
- Va-t-en !
- Pauvre petite créature fragile.

Aelita eut un haut-le-cœur. Une haleine de mort frappait son visage tandis qu’une fourrure douce frottait son bras gauche. Elle crut qu’elle allait s’évanouir lorsqu’une langue râpeuse lui lécha la joue.

- Voyons, je ne suis qu’un loup, gronda la voix, rocailleuse et amusée.
- Non, tu n’existes pas, va-t-en !
- Tu as raison, je ne suis pas qu’un loup, on ne peut rien te cacher. Ma brillante petite esclave qui s’est bêtement leurrée. Tu as vraiment cru que c’était ça, ton pire cauchemar ? Un animal à quatre pattes, tout ce qu’il y a de plus solide, tout ce qu’il y a de plus réel ? Aelita, tu me déçois, tu me déçois tellement ! Un loup, ce n’est qu’un vulgaire corps avec un cœur et une tête, deux cibles faciles à atteindre. D’accord, il a de grandes dents et aime hurler la nuit, d’accord il a des papattes griffues et un sale caractère mais tu pensais vraiment avoir si peur de ça ? Tu es vexante. Combien de loups meurent chaque année, de blessures, de vieillesse, de la main de l’homme ? Des centaines. Et moi, qui peut vraiment m’atteindre ? Quand m’as-tu réellement menacé ? Tu croyais pouvoir définitivement me détruire ? Ma douce naïve. Tu me froisses.

La langue fut remplacée par des doigts sur la joue d’Aelita et elle poussa un hurlement. Dans le couloir, Jérémie frappa sur le mur tandis que l’estomac de William se nouait.
Qu’était en train de subir la jeune fille ?

- Aelita ! Aelita, réponds-moi !
- C’est moi ton pire cauchemar, petite idiote. Tu as vraiment cru que tu pourrais me vaincre ? Tu as vraiment cru que tu me tiendrais tête toutes ses années impunément ? Que tes amis en soient convaincus, cela pouvait encore se comprendre, ils n’ont jamais pu voir tout ce que je pouvais accomplir. Mais toi, tu as vécu prisonnière comme moi de Lyoko, j’ai pris le contrôle de ton corps, de ton esprit. J’ai joué avec toi si souvent. J’ai tant de fois envoyé des monstres qui te visaient explicitement.
- Tais-toi, réussit à articuler Aelita.

Sa voix était faible, trop faible, elle s’en rendait compte. XANA ricana.

- Pauvre petit agneau. Tu as eu des idées de grandeur à force de fréquenter les mauvaises personnes. J’avais de l’espoir pourtant. Après tout, même ton père t’a abandonnée à moi. Tu n’es qu’un pion entre mes mains comme tu l’étais entre les siennes.

Aelita eut l’impression d’avoir reçu une gifle et elle sentit tout son être se révolter face aux accusations de XANA. Son père ne l’avait pas abandonnée. Son père l’avait toujours aimée et avait toujours cherché à la protéger. Comme s’il suivait ses pensées, Jérémie tapa sur le mur en criant :

- Énerve-toi ! La colère te réveillera si tu as trop peur ! Pense qu’on l’a toujours battu et qu’on est avec toi, Aelita ! Odd, Yumi et Ulrich viennent de monter, on est tous derrière la porte et on sait que tu vas ressortir victorieuse. Tu as toujours été la plus forte, ne lâche pas !

Aelita visualisa ses amis derrière le mur. Elle savait pertinemment qu’elle n’était pas la plus forte, elle avait trop de fois dû être sauvée. Mais justement, elle avait l’opportunité de montrer qu’elle n’était pas plus faible que XANA, elle le devait.
Avant qu’elle ne trouve le courage de répondre, un souffle glacé chatouilla son oreille :

- Tu te croyais la petite fille chérie à son papa ? Mais tu n’étais pas assez importante pour ce cher papa. Il n’a pas hésité une seule seconde à se sacrifier pour sauver Lyoko. Il se moquait bien de te perdre, il se moquait que tu sois privée de tes parents. Il a fait passer en priorité son dur labeur, même si ce faisant il me maintenait en vie. Tu vois, petite créature fragile, il me préfère à toi. Il t’a laissée à ma merci pour défendre un monde virtuel. Et toi, sa fille chérie bien réelle, il t’a offert en pâture à ma suprématie. Tu m’appartiens, Aelita. Tu croyais appartenir à Lyoko ? Pauvre sotte. Je suis Lyoko. Et tu es à moi.

Aelita perdit tout son sang-froid et hurla à nouveau, le visage désormais baigné de larmes. Si elle ne pouvait pas voir le spectre dans l’obscurité, elle le sentait tout proche. Elle eut un haut-le-cœur lorsqu’il lui lécha l’oreille et voulut se débattre mais déjà, deux mains lui tenaient fermement les bras contre le corps.

- Arrête, tu te ferais du mal. Aelita… Pourquoi lutter ? Tu sais très bien que tu n’es pas à ta place ici. Tu sais très bien que tu aimais être sous mon emprise. Détruire les territoires te procurait du plaisir. Tu faisais disparaître l’œuvre de ton père, cette œuvre qui t’a volée ton enfance et ta famille. Tu pouvais te venger et grâce à qui ? Grâce à moi. En détruisant Lyoko, territoire par territoire, tu pouvais enfin laisser jaillir ta colère et tu te rapprochais de moi, tu t’accrochais à moi. Même de retour dans ton monde d’êtres faibles, tu sentais encore ma présence. Ce que tu qualifiais de noirceur, ces pensées que tu avais, ne nie pas qu’elles te plaisaient au fond. Si tu avais écouté plus souvent ces conseils que je te soufflais, ta vie aurait été bien plus intense aujourd’hui.
- Aelita !

Le cri de William, moins angoissé et plus fort que celui de Jérémie, sortit Aelita de la transe hypnotique dans laquelle le spectre était en train de la plonger. Sans savoir comment réagir, elle fit la première chose qui lui venait à l’esprit et donna un coup de tête vers la voix du spectre. Celui-ci grogna et la lâcha.

- D’accord, tu veux jouer. Tant mieux, je m’amuse comme un fou. Je ne suis toutefois pas certain que tes amis apprécieront.

A l’extérieur de la chambre, des hurlements de loups résonnèrent. Le regain d’énergie qu’avait eu Aelita disparu.

- Et oui, ma chérie, il y a tellement de peurs en toi, tellement d’angoisses. Celle-ci est sans doute la plus drôle : tu crains par-dessus tout que tes chers copains soient blessés par ta faute. S’ils avaient eu du cran et de la jugeotte, ils auraient éteint le Supercalculateur après avoir réalisé ma présence et la menace qu’elle engendrait. Mais ils ne pouvaient pas se résoudre à t’abandonner, ils donnaient de leur temps et de leur énergie pour te faire venir avec eux. Est-ce pour ça aujourd’hui que tu te sens responsable d’eux ? Ou est-ce parce qu’ils ont risqué leur vie des centaines de fois par ta faute ?

Aelita n’eut pas le temps de répondre. Des hurlements remplacèrent ceux des loups, des hurlements de douleur et d’agonie, au milieu desquels son nom ressortait.

- Tous ses efforts pour rien… Toutes ses nuits d’insomnie et de cauchemars pour au final ne pas réussir à empêcher l’inévitable. Tu sais quelle autre angoisse ressort beaucoup chez toi ? La solitude. Tu as été seule si longtemps sur Lyoko. J’étais là mais tu ne voulais pas de moi… Et tu es restée vivante sans vivre de longs jours et de longues nuits sans même en voir le déroulement. Tu étais figée loin de tout, loin d’une autre présence. Tu ne veux pas revivre ça. Tu ne veux plus te retrouver seule. Et pourtant, c’est ce qui te va arriver. Tes amis seront morts d’ici quelques minutes et toi tu resteras avec moi. Donc, les choses pourraient être pires, tu aurais pu être vraiment seule mais ce ne sera pas le cas. Réjouis-toi.

La voix murmurait sans s’arrêter au creux de l’oreille d’Aelita. Dans le couloir, les hurlements de Yumi s’étaient tus mais Aelita pouvait entendre les cris des autres, notamment ceux de Jérémie. Elle le visualisait en train de se faire dévorer vivant, un museau de loup ensanglanté fouillant ses entrailles, déchirant sa chair à pleine dents. Elle n’arrivait plus à respirer, elle perdait ses repères, ne savait même plus où elle était. Tout son être n’était plus qu’angoisse, elle allait mourir seule ici à quelques mètres de ses amis.

- Aelita !

De nouveau, la voix de William réussit à couvrir celles des autres.

- Aelita, XANA se sert des hauts-parleurs. Ce n’est pas nous que tu entends, Aelita, nous allons tous bien ! Il n’y a pas de loups, il n’y a que nous et nous sommes tous sains et saufs ! Sors de là !
- Ouais, laisse tombe la clé ! Sors, sors, sors, vite, t’as plus le temps ! renchérit Odd à plein poumons.

Aelita eut l’impression qu’on venait de la sortir de l’eau alors qu’elle était en train de se noyer. Son esprit n’était plus capable de réfléchir, seules les actions comptaient désormais.
Elle se débattit dans tous les sens. Son pied heurta quelque chose, elle marcha à quatre pattes sur son lit vers la sortie. Des mâchoires se refermèrent sur sa cheville et si elle hurla, elle ne s’arrêta pas. Elle tomba sur le sol, donna à nouveau des coups de pieds. L’étreinte sur sa cheville se relâcha et elle rampa aussi vite que possible vers la porte.

- Bien joué, souffla une dernière fois la voix à son oreille alors qu’elle se redressait. Aux autres maintenant.
- Va te faire foutre !

Les doigts d’Aelita se refermèrent sur la poignée qu’elle abaissa violemment. Une main la tira vers l’extérieur à peine la porte entrouverte et elle s’écroula sur le palier.

- Aelita !

La jeune fille crut pendant quelques instants qu’elle allait s’évanouir. Elle sentit qu’on lui tapotait les joues et qu’on posait des doigts fébriles sur son front.

- Laissez-la respirer, gronda Yumi.
- Elle saigne. Sissi, va chercher la serviette de toilette dans mon sac. Pas toute seule ! Odd, William, accompagnez-la.

Au bout de quelques minutes, Aelita réussit à relever la tête. Elle était assise sur le parquet, dans les bras de Jérémie qui la couvait d’un regard inquiet. Yumi était en train d’enrouler sa cheville dans une serviette orangée tout en marmonnant :

- On n’a pas d’alcool pour désinfecter, pas de pommade, pas de pansement, j’espère que ça va aller. Heureusement, ce n'est pas profond mais on aurait dû mieux se préparer.
- Bah oui, sommes-nous bêtes, on aurait dû s’attendre à se retrouver enfermés ici avec un programme informatique psychopathe et des spectres dangereux !
- Fermez-la un peu ! Aelita, comment tu te sens ?
- Je suis vidée. Être un yoyo émotionnel, c’est ce que j’ai vécu de plus épuisant.
- Qu’est-ce qui s’est passé ?
- Il était là. XANA. Il y avait un spectre, c’était un loup puis un humain ou un mélange des deux ou les deux en même temps. Je ne sais pas, c’était confus, je ne voyais pas grand-chose.
- Il t’a fait du mal ?
- Non, à part la morsure, il n’a pas été violent. Mais il a dit des choses affreuses, le genre de choses dont je ne veux pas reparler. Pas maintenant.

Jérémie hocha la tête et même Odd s’abstint d’insister. Aelita réussit à sourire :

- Haut les cœurs, ça en fait déjà un. J’espère que les vôtres ne seront pas aussi terribles.
- On n’aura peut-être pas à les affronter.

Tous les regards se tournèrent vers Jérémie. Sans se lever ni lâcher Aelita, il expliqua :

- On est dans l’ancienne maison de Franz Hopper. Aelita et moi avons fait le tour plusieurs fois, y compris dans la remise, et on a trouvé pas mal de câbles et autres matériel informatique. Même si on n’a plus l’électricité, on a en plus des appareils électroniques dans le salon de mixage, sans compter le micro-ondes.
- Et mon sèche-cheveux, rajouta à tout hasard Sissi.
- Par exemple. Mon ordi a encore un peu de batterie, il y en a aussi dans nos portables. Je ne sais pas encore trop comment je vais me débrouiller mais je suis à peu près sûr de réussir à mettre au point un système qui permettra de dégager des ondes pouvant mettre en échec les champs de force. Ça va me prendre un moment par contre.
- Est-ce qu’il ne vaut pas mieux essayer de vaincre les cauchemars ? suggéra William. C’est peut-être la seule solution pour sortir d’ici.
- Excellente idée, mon beau lieutenant.

Aelita se recroquevilla dans les bras de Jérémie alors que la voix de XANA s’échappait du studio d’enregistrement, dont la porte était close.

- Battez-vous tant que vous voudrez, c’est moi qui dicte les règles. Fais joujou avec tes gadgets tant que tu le voudras, Jérémie, tu n’as pas réussi à me vaincre la première fois, penses-tu avoir plus de chance cette fois-ci ? Jeune imbécile. Enfin bon, si tu veux vraiment t’amuser, envoie donc Sissi prendre le matériel dans la salle de mixage. Je suis sûre qu’elle en sera ravie.

Le fait d’être pointée directement par XANA fit frémir Sissi. William passa un bras autour de ses épaules, le visage fermé, le regard dur. Tous attendirent silencieusement que XANA poursuive mais rien ne vint.

- J’y vais, annonça Sissi à la stupeur générale.
- Qu’est-ce que tu racontes ?
- On est censé parler d’un programme informatique, merde ! Moi je pense plutôt qu’on est dans une caméra cachée ou une connerie de ce genre. Je n’ai pas l’intention d’y passer mes vacances alors j’y vais et j’aurai fait ma part du boulot.
- Attends, tu n’as pas vu dans quel état est Aelita ?
- Ne t’inquiète pas, mon cauchemar ne risque pas de me sauter dessus ou de m’attaquer, bien au contraire. Je ne pense pas courir plus de danger que Odd. Et au moins ça nous évitera d’entrer chacun à tour de rôle dans une pièce pour voir quel cauchemar elle recèle. XANA nous donne un indice, profitons-en.
- S’il donne un indice, ce n’est pas pour être gentil, c’est sûrement parce qu’il sait que tu es la plus fragile et que ta perte nous impacterait, nous enlèverait peut-être même tout espoir de sortir vivants ! s’emporta William.
- Je crois qu’on devrait la laisser faire.

Les regards passèrent de Sissi à Aelita qui se justifia immédiatement :

- Croyez-moi, je ne veux pas que vous subissiez ce que j’ai subi. Mais à mon avis, on devra tous y passer. Si Sissi se sent prête, cela permettra à Jérémie de gagner du temps pour faire joujou avec ses gadgets, comme le disait XANA. En plus, même si je n’avais dessiné qu’un loup sur ma feuille, les angoisses avec lesquelles il a joué étaient bien plus profondes, bien plus intimes. Sissi n’a jamais été sur Lyoko, elle n’a pas été confrontée à XANA d’aussi près que nous, il ne pourra pas avoir autant d’emprise sur elle que sur moi.
- Et les recherches pour retrouver celui qui a peut-être été enlevé par le spectre ? On n’a vérifié aucune des autres pièces de l’étage.
- XANA n’est pas assez idiot pour laisser un corps dans la maison. Mon idée était stupide, pardon.
- Bon, on arrête les mea culpa et on se bouge. J’ai rendez-vous avec mon cauchemar. Par contre, avant, est-ce que je pourrais manger quelque chose ?
- Ne pas perdre le sens des priorités, j'adore ! se réjouit Odd.

Yumi était moins optimiste :

- Sissi, tu es sûre que ça va ?
- Je crois que je craque et que je frôle la crise de nerfs. J’ai envie de pâtes carbo et de tuer quelqu’un.
- On n’a aucun moyen de faire chauffer de l’eau ou de cuire des lardons.
- Tant pis, je les mangerai crus.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Jeu 21 Déc 2017 21:31   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Alors, puisque j'ai un commentateur, je peux publier sans quémander un déblocage niark niark ! En plus, ça donnera quelque chose à faire à Dyssery demain midi ♥ C'est donc à elle et à Tugdual que ces chapitres sont dédiés XD

Bon par contre, j'ai conscience qu'effectivement, deux chapitres par jour, c'est peut-être un peu beaucoup. Je vais quand même en remettre deux ce soir. Deux autres sortiront (vraisemblablement) demain, parce que c'est à partir du 6 qu'on entre vraiment dans le vif du sujet (et que ce sera donc plus marrant de vous faire poireauter niark niark niark).

Merci pour ton passage, Minho, ça fait toujours plaisir (je suis encore morte de rire en fait, ce HOP LA ESQUIVE MON GARS a directement été rejoindre ma bibliothèque d'images ^^), même si ça met un peu la pression pour la suite ! Je n'ai jamais été très douée pour répondre aux commentaires alors je vais juste te dire que tu as déjà snipé deux points à venir Razz

A noter que les cauchemars que j'évoquais dans l'introduction ne sont pas les songes que pourront faire certains personnages (celui d'Aelita était d'ailleurs présent dans l'OS de base, ça n'aurait pas été drôle qu'il n'y ait que ça !). On en découvre plus dans les chapitres qui viennent et que je vous laisse découvrir Mr. Green

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Chapitre 3 : Dessine-moi un cauchemar


Les adolescents étaient assis en cercle autour d’une table basse fournie par Yumi. L’après-midi commençait paisiblement et Odd, après s’être une nouvelle fois vanté de sa rapidité sous la douche, avait sorti un jeu de société.

- « Paraplegik zombie 6, le jeu ». Tu plaisantes, là ?
- On ne critique pas avant d’avoir testé ! Ce jeu est juste trop mortel !
- Tu y as déjà joué ?
- Bah… non… Mais puisque ça a un lien avec Paraplegik zombie 6, c’est forcément trop mortel !
- Odd, on est pas un peu vieux pour ça ? demanda Jérémie avec un sourcil levé.
- Quoi ? Vieux ? Sous prétexte qu’on est maintenant tous au lycée, on devrait devenir des personnes matures et ne plus jouer qu’au Scrabble, c’est ça ? Le dieu des cancres m’en préserve !
- De toute façon, il ne nous lâchera pas tant qu’on n’aura pas fait une partie alors autant en finir tout de suite, suggéra Sissi.

Encore troublée par l’épisode de la salle de bain, elle n’avait qu’une envie : se changer les idées. Tant pis si elle n'avait qu'un jeu débile à se mettre sous la main.

- Sérieusement, vous avez décidé de me tuer aujourd’hui ! Je vais devoir remercier Sissi parce qu’elle est la seule à me soutenir quand mes amis me lâchent ? Oh, dieu des cancres, qu’ai-je fait ?
- Arrête ton cirque, Odd, et explique-nous comment ça fonctionne.

D’un geste théâtral, le blondinet ôta le couvercle de la boîte, dévoilant une cassette audio, six bandeaux de velours noir et un tas de cartes sur lesquelles étaient dessinés des morts-vivants.

- Très glamour, nota Yumi.
- Quel dommage, il n’y a que six joueurs ! Je laisse ma place.
- Tu crois vraiment t’en sortir comme ça, Einstein ? On va bien trouver un truc pour toi !
- Mon serre-tête !
- Super, merci Sissi…
- Allez, ne boude pas, ça peut être amusant, assura Aelita.

Son petit ami lui adressa un regard dubitatif mais garda le silence tandis que Odd se lançait dans la lecture de la règle du jeu.

- C’est un peu le même principe qu’un « Loup-garou » ou « Dracula », résuma-t-il. L’un de nous est un zombie et doit rallier le plus de joueurs possibles à sa cause. Pour cela, on va chacun tirer une carte qui nous dira si nous sommes le zombie. Puisqu’il n’y a que six cartes de départ, je propose qu’on nomme Einstein directement non-zombie parce que de toute façon, il va rougir ou paniquer s’il tire la carte zombie et il n’y aura pas de suspense.

Les autres acquiescèrent avec un sourire en coin et l’intéressé se renfrogna avant de marmonner :

- De toute façon, ça a rien à voir avec un Loup-Garou si le but du jeu est transformer les autres en zombies.
- Si t’es zombie, c’est que tu es mort, idiot !
- Chut, j’essaye de suivre les règles ! Bien, bien, une fois qu’on a tiré nos cartes de départ, on tire la première carte action et on suit les instructions. Le jeu se déroule dans le sens des aiguilles d’une montre, blablabla… Rien de plus simple !
- À quoi servent les bandeaux ? Et la cassette ?
- Les bandeaux sont à mettre quand on sort tous de la pièce.
- Génial, en plus, on va se bouffer les murs…
- Pour la cassette, il s’agit d’une, je cite, « ambiance musicale appropriée ». Trop cool ! Aelita, va chercher ton lecteur !

La jeune fille sortit de la pièce alors que Odd distribuait bandeaux et cartes de départ. Lorsqu’elle fut revenue, chacun regarda discrètement sa carte.

- C’est bon, tout le monde a retenu s’il était zombie ou non-zombie ?
- Tout le monde sait lire, donc je dirais oui, soupira Ulrich.
- Attends, intervint Aelita. Le but du zombie est de rallier le plus de joueur à sa cause, d’accord. Mais comment font les non-zombies pour gagner la partie ?

Odd replongea dans la règle du jeu.

- Si tu accomplis ce qu’il y a sur ta carte action, tu la conserves. Elle prouve ta bravoure et te permets éventuellement de te défendre contre une attaque du zombie, si tu es assez rapide pour la voir venir. Sinon, tu te transformes quand même en zombie. Si tu survis grâce à ton bonus, tu dois revenir dans la pièce centrale du jeu et discuter avec les autres joueurs afin de déterminer si la personne qui t’a attaquée est bien le zombie originel. Parce que les autres peuvent t’attaquer aussi mais les tuer ne tuera qu’eux alors que tuer le zombie originel tue tous les autres zombies. Bien sûr, les zombies ont le droit de faire croire qu’ils se sont fait attaquer pour tuer un joueur encore humain.
- C’est compliqué, soupira Sissi.
- Mais ça a l’air intéressant, reconnut Yumi. Qu’est-ce qu’il y a comme exemple de carte actions ?
- Dans la règle du jeu, ils citent « Si tu veux fermer l’œil ce soir, va vérifier qu’il n’y a pas de monstre sous ton lit ».
- Ce n’est pas trop difficile.
- Alors, c’est parti !

Odd plaça la cassette dans le lecteur et régla le volume au maximum avant d’appuyer sur « play ». Pendant quelques secondes, il n’y eut que le bruit grésillant d’un vinyle qui démarre. Puis, un hurlement de loup résonna dans la pièce comme si un véritable animal s’était trouvé parmi eux.
Aelita sentit son cœur s’accélérer, si vite qu’elle crut un instant qu’elle allait s’évanouir. Sa main attrapa celle de Jérémie qui lançait déjà à Odd :

- Tu peux mettre moins fort ? On va tous faire une crise cardiaque !

Avant que Odd n’ait touché au lecteur de cassette, le hurlement du loup s’estompa pour laisser place au sifflement d’un train, lui-même remplacé par le souffle haché d’une femme qui court, luttant pour sa vie, la mort aux trousses et…

- Aelita !

Aelita ouvrit les yeux sans avoir eu conscience de les fermer. Ses amis la regardaient avec inquiétude tandis que la cassette laissait échapper des croassements.

- Odd, on fait un autre jeu, ordonna Ulrich.
- Non, ça va, assura Aelita avec un léger sourire. C’est juste le loup qui m’a rendue nerveuse, ça va déjà mieux.
- OK, alors c’est parti ! s’empressa de lancer Odd avant qu’elle ne change d’avis. Je commence.
- Attendez, moi aussi j’ai ramené un jeu, intervint William en coupant la cassette.

Il alla chercher son sac et en tira une boite de la taille d’un grand bloc-notes.

- « Cauchemars », déchiffra Yumi. Super original comme titre pour Halloween. C’est quoi le principe ?
- Aucune idée, je n’y ai jamais joué.
- Décidément…

La japonaise attrapa la boite et lut les quelques lignes gravées au dos.

- « Cauchemars : un jeu de frissons où vous affronterez vos peurs les plus intimes et vos pires fantasmes. Chaque pièce se transforme en lieu d’effroi. Combattez vos angoisses pour gagner. »… D’accord, j’ai du mal à saisir le principe.
- Normal, faut lire la règle du jeu !
- Pourquoi on ne commence pas avec Paraplegik zombie 6 ? râla Odd.
- On va faire les deux en même temps. Tu n’as pas compris ? Chaque pièce est censée représenter un cauchemar et dans ton jeu, on est apparemment amener à se balader un peu partout. Cela rajoute du challenge si les pièces comportent des spécificités, non ?
- Il doit déjà y avoir des spécificités comme tu dis mais bon… Lis-nous les règles, on commence à installer celui-ci !

Yumi, qui n’avait pas lâché la boîte, l’ouvrit. Elle ne comportait qu’un manuel blanc avec marqué « Règles du jeu », un paquet de feuilles vierges et des crayons de couleur.

- « Cauchemars : un jeu de frissons où vous affronterez vos peurs les plus intimes et vos pires fantasmes. Chaque pièce se transforme en lieu d’effroi. Combattez vos angoisses pour gagner. »… Bon ça, on le savait déjà. « Préparation du jeu : tous les joueurs dessinent sur une feuille leur pire cauchemar. Ensuite, le maître du jeu indique sur une feuille à part les pièces concernées par les cauchemars. Il doit y avoir autant de cauchemars que de joueurs et autant de pièces que de cauchemars. Il ne sera toutefois pas précisé quelle pièce renferme quel cauchemar. » Mais alors comment on le sait ? Ce jeu est mal foutu !
- Dans notre cas, on s’en fiche : celui qui fait une action dans telle ou telle pièce en déclenche le cauchemar, proposa Odd.
- Oui mais si ce n’est pas le sien ?
- Il se déclenche mais n’a pas à être surmonté. À charge pour celui qui l’a trouvé d’avertir ou non les autres.
- C’est quand même super bizarre, intervint Jérémie. Imagine que mon pire cauchemar, ce soit les… les clowns, tiens ! Aucun clown ne sera dans la pièce en question. Comment je suis censé dans ce cas battre mon cauchemar ?

Odd et William se regardèrent, visiblement à court d’idées.

- Ce jeu est nul, conclut Yumi. On abandonne.
- Non ! On va quand même dessiner nos cauchemars et on verra au fur et à mesure de Paraplégik zombie 6 si on peut les incorporer. S’il vous plait, ça a l’air trop bien ! Et en plus, ça parle de fantasmes !
- Ok, Odd, calme-toi.
- Prem’s pour le beige ! lança Sissi en attrapant les crayons de couleur.

William s’empara du paquet de feuilles pour les distribuer.

- Éloignez-vous, qu’on ne voit pas les dessins des autres.

Le groupe hocha la tête et se dispersa dans la pièce.
Alors que Sissi changeait toutes les dix secondes de couleurs, Jérémie n’utilisa que du gris. Aelita se demanda ce qu’il avait bien pu dessiner. Qu’est-ce qui pouvait effrayer quelqu’un d’aussi pragmatique que Jérémie ? Quel monstre gris pouvait lui faire peur ? Sans doute une machine destructrice contre laquelle son cerveau ne lui servirait à rien.
Mâchouillant par réflexe son crayon brun, Aelita réalisa qu’à part l’arachnophobie de William et la peur du vide d’Ulrich, elle ne savait pas vraiment ce qui pouvait terroriser ses amis. Peut-être l’ignoraient-ils aussi ? Peut-être n’avaient-ils pas envie d’y réfléchir trois ans pour un simple jeu. Elle-même ne chercha pas très loin, d’autant plus qu’elle n’était pas très douée en arts plastiques. Elle eut du mal à donner une forme reconnaissable au loup de ces cauchemars et attrapa le crayon jaune pour lui donner un regard doré qu’elle voulut froid et agressif. Se prenant finalement au jeu et bien décidée à transformer ses mauvais rêves en vulgaires traits de crayons, elle lui fit une langue pendante et des babines rouges.
À l’instar de Sissi, Yumi utilisa plusieurs couleurs alors qu’Ulrich râlait toutes les cinq secondes après William pour récupérer le noir.

- J’imagine qu’on a dessiné la même chose.
- Arrête d’être puéril. Et flûte ! râla William.

À force de frotter frénétiquement la pointe du crayon noir sur sa feuille, il l’avait percée.

- Bof, pas grave.
- C’est bon tout le monde a fini ? demanda Odd cinq minutes plus tard. Je ramasse les copies ! Ah, ça fait du bien de dire ça ! J’en deviendrais presque prof !
- Ne triche pas en regardant ce qu’on a dessiné, sinon tu ne joues pas, avertit Aelita avec un air faussement menaçant.
- Aucun risque princesse ! Hey, si on jouait déguisés ?
- Tu ne crois pas que tu exagères ? ronchonna Jérémie.
- Allez, ça va être drôle ! On vote ? La majorité l’emporte !

Ulrich et Aelita levèrent la main, suivis par Sissi et William.

- C’est bon, ça suffit ! se réjouit Odd.
- Désolée, Jérémie, mais j’étais d’accord aussi, acheva Yumi. Si tu nous trouves déjà trop vieux pour un jeu de société, tu ne voudras sûrement pas qu’on se balade en criant « Des bonbons ou un sort », alors autant les mettre maintenant.
- En plus, tu vas être content Jérémie, on t’a amené ton déguisement, ajouta Ulrich en adressant un clin d’œil à Odd.
- Quoi ? Mais… Mais ce n’était pas prévu.
- Surprise !

Alors que Jérémie se renfrognait davantage, William lança aux filles :

- Allez vous préparer pendant qu’on dessine le plan de la maison.
- OK.

William récupéra le crayon gris et traça deux rectangles sur une autre feuille.

- Euh, on n’a qu’une maison, signala Ulrich.
- Oui mais on va jouer sur le rez-de-chaussée et l’étage !
- Ah oui, pas bête.

William eut un sourire en coin. Il n’y avait plus de réelle animosité entre Ulrich et lui, pourtant, il continuait à sentir une pointe de satisfaction à chaque preuve qu’il lui était supérieur.

- Alors, au rez-de-chaussée, on garde la cuisine, la chambre d’amis et la salle à manger, énuméra Odd. À l’étage, on a la chambre d’Aelita, celle de ses parents, le salon de mixage et le bureau de Franz Hopper. Sept pièces, on est bon, même pas besoin d’utiliser les toilettes ! On est d’un chic, j’aime !
- Tant mieux, se moqua William en découpant grossièrement les rectangles en rectangles plus petit et en indiquant la dénomination des pièces. Donc on est d’accord, on ne note pas les noms des personnes ?
- « Il ne sera toutefois pas précisé quelle pièce renferme quel cauchemar », relut Ulrich.
- Parfait, je commence à mettre une feuille par pièce au rez-de-chaussée, je ferai le reste quand on montera se changer. Arrête de faire la tronche, Jérémie, je t’assure que ton déguisement est top, tu verras !

***


- Tu es superbe.

Yumi rougit. Aelita avait fait les choses vite et bien. Plutôt que de l’affubler d’un dentier ridicule, elle avait dessiné deux canines au crayon blanc sur sa lèvre inférieure, puis l’avait aidée à ajuster son faux col montant et à laquer ses cheveux avant de vérifier que ses bijoux cliquetaient à souhait. Pour finir, elle avait souligné ses yeux de noir et recouvert ses paupières de différents rouges.
Grâce à elle, Yumi se sentait belle.
Plutôt désirable même.

- Si avec ça, tu n’arrives pas à mettre les choses au clair avec Ulrich, se moqua Aelita comme si elle avait lu dans ses pensées.

Yumi s’empourpra.

- Arrête, j’espère qu’il n’a pas besoin de ça pour me regarder.

Occupée à boucler ses chaussures, Sissi regarda la japonaise avec un pincement au cœur. Elle ne la trouvait pas particulièrement jolie, personne ne pourrait rien pour ses traits trop lisses, mais elle devait reconnaître qu’elle avait de la classe. Un charme à la fois sensuel et sage l’auréolait. Sans doute le genre de charme qui faisait craquer Ulrich.
Elle se leva et alla jeter un œil à son reflet. Pour le côté sensuel, elle était servie mais en ce qui concernait le côté sage… Son déguisement de diablesse ne donnait pas franchement le ton. Quant à Aelita, elle avait opté pour un banal déguisement de sorcière qui avait au moins le mérite de trancher avec son style habituel.

- Alors, avec Ulrich, ce n’est toujours pas réglé ? demanda Sissi d’un ton qui se voulait neutre.
- Bah… C'est-à-dire que…
- Je vois.

Le silence retomba sur la salle de bain. Sissi aurait aimé insister mais elle finirait fatalement par dévoiler ses sentiments si elle continuait à discuter d’Ulrich. Aussi préféra-t-elle changé de sujet.

- De quoi parlaient Ulrich et Odd pour le déguisement de Jérémie ? Vous êtes au courant ?
- Oh, c’est une vieille blague entre eux, répondit Yumi, encore plus mal à l’aise. On ne sait pas exactement à quand ça remonte, ce sont des histoires de garçons.

Elle ne pouvait pas avouer à Sissi qu’Ulrich et Odd s’étaient débrouillés pour retrouver un costume d’elfe semblable, selon eux, à l’avatar de Jérémie sur Lyoko. Par chance, la jeune fille ne fit pas preuve de plus de curiosité. Imitant Aelita, elle laissa ses vêtements dans la pièce alors que Yumi reprenait son sac.
Elles descendirent rejoindre les garçons vautrés sur le canapé.

- Pas trop tôt ! s’exclama Odd. On va faire plus vite que ça, sinon, on ne commencera jamais à jouer ! Ne sortez pas de cette pièce, j’ai déjà mis les feuilles ! Ne regardez pas non plus celle qui est sur la bibliothèque, je vais mettre les autres à l’étage !

Il fila vers l’escalier, Kiwi sur les talons et son sac sous le bras. Aelita eut l’impression de voir les élèves de Battle Royal détaler un par un hors de leur classe au début de leur captivité. Cela la mit mal à l’aise. Pourquoi avait-elle des pensées aussi sombres ?

- Bon, Ulrich, tu as mon costume ? soupira Jérémie, résigné.
- Quoi ? Euh… Oui, oui.

Difficile de dire qui de Ulrich ou de Yumi était le plus écarlate. William ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel avant de glisser à l’oreille de Sissi un « Tu es ravissante » qui lui tira un demi-sourire. Ce n’était pas de lui qu’elle espérait des compliments.

- C’est quoi votre cauchemar ? demanda-t-elle alors qu’elles étaient assises toutes les trois sur le canapé.
- Si on triche en te le disant, Odd va nous faire un caca nerveux.
- De toute façon, je ne vois pas à quoi vont nous servir ces bouts de papier. Comme disait Jérémie, ce qu’on a dessiné ne va pas se matérialiser comme par magie dans la pièce où on l’a mis !
- J’imagine que c’est plus un jeu pour discuter, avança Aelita. Cette histoire d’affronter ces peurs et ces fantasmes, ça ressemble limite plus à un « Action, chiche ou vérité » qu’à un jeu de société. Tu décris ton cauchemar, d’où il te vient, à quoi il est lié, comment tu pourrais t’en débarrasser ou le transformer en quelque chose de moins effrayant.
- C’est plus un « Vérité » qu’un « Action, chiche ou vérité » dans ce cas.
- Et puis, c’est glauque de parler de ses cauchemars, il y a quand même mieux pour mettre une bonne ambiance, nota Yumi.
- Je ne te le fais pas dire. Mais bon, disons que c’est une ambiance Halloween.
- Bande de chochottes, c’est pas croyable !

Les filles se retournèrent vers Odd. Son déguisement de zombie était plus que réussi. Outre ses vêtements sales et déchirés, un bout de cervelle pendouillait sur sa tempe.

- Appétissant, grimaça Yumi.
- Aidez-moi à mettre les bougies !
- Odd, on fait un jeu de société, pas du vaudou.
- Et alors ? C’est Halloween ou c’est pas Halloween ?

Aelita leva les yeux au ciel mais aida quand même Odd à disposer des bougies un peu partout dans la pièce pendant que Yumi et Sissi tiraient les rideaux. Jérémie fut le second à descendre, visiblement de mauvaise humeur. Il y avait de quoi. Vêtu de vert des pieds à la tête, serré dans un collant et un t-shirt moulant, affublé de babouches pointues et d’une jupette, il était ridicule.

- Sympa le bonnet, pouffa Sissi. Super seyant la petite plume.
- Je ne vois pas en quoi ça fait Halloween, ronchonna le garçon.
- Moi, ça me fait peur ! se moqua à son tour Yumi.

Seule Aelita eut un sourire compatissant.

- Bon, ils se dépêchent les autres ? s’impatienta Odd.
- Peut-être qu’ils sont en train de se battre.
- Pour qui vous nous prenez, soupira Ulrich en entrant dans la pièce. William m’aidait avec mon « maquillage ».

Yumi rougit en constatant qu’il était également déguisé en vampire. Très élégant dans une redingote qu’il avait dû emprunter à son grand-père, il avait couvert son visage de poudre blanche lui donnant un air blafard, souligné par les faux cernes dessinés sous ses yeux. Quant à William, il avait mis un masque de loup-garou sous lequel il devait mourir de chaud, ainsi que des gants imitant des pattes griffues.

- Je vous préviens, je tiendrai pas une demi-heure là-dessous !
- Dans une demi-heure, j’aurai gagné de toute façon ! assura Odd plein d’enthousiaste. Allez, tout le monde autour de la petite table.

Aelita sourit. Assis à même le tapis avec leurs déguisements, ils devaient avoir une drôle d’allure.

- Je commence ! s’exclama Odd.

Il relança la cassette et attrapa la première carte.


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Chapitre 4 : Des bruits


- « Les loups rôdent dehors. Va vérifier que chaque porte est verrouillée ». Trop simple !

Le blondinet sauta de son fauteuil et quitta la pièce, Kiwi sur les talons. Les hurlements de loups s’élevèrent à nouveau de la cassette.

- Aelita, tu es certaine que ça va ?
- Oui, oui, Jérémie. Je suis sûre qu’on va s’amuser. Et puis, Odd a bien besoin de se divertir un peu, il doit se sentir seul avec tous ces couples autour de lui.
- Ouais, seul contre trois fois deux, le pauvre, compatit William.
- Euh… Deux fois deux, rectifia Ulrich sans conviction alors que Yumi rougissait. Nous, c’est copains et c’est tout.
- Ah oui, j’avais oublié.

Sissi sentit son cœur se serrer. Ils étaient si peu crédibles.
Le silence s’installa jusqu’à ce que Odd revienne dans la salle à manger, une main sur la tempe comme un soldat au garde-à-vous.

- Porte d’entrée verrouillée, porte de la cuisine verrouillée ! Les loups n’entreront pas ce soir, M’dame ! Je garde donc ma carte pour fumer le malheureux zombie qui essayera de m’attaquer.
- Génial. À mon tour !

Sissi prit la seconde carte de la pile.

- « Même s’il vaut parfois mieux être seul que mal accompagné, choisis un camarade qui viendra avec toi lors de ta première sortie ».
- Ce jeu est d’un réalisme ! se moqua William en ôtant son masque, sans remarquer que Sissi était loin d’avoir envie de rire.

La jeune fille avait un peu pâli. Pourquoi fallait-il que cette carte tombe sur elle ? Odd avait-il fait exprès de la glisser sur le haut du tas ? Non c’était stupide, il ne pouvait pas savoir. Personne ne savait, personne n’avait de soupçon, tout le monde la pensait follement éprise de William…

- Alors, Sissi, qui tu choisis ?

Comme si j’avais le choix.

- William.

Le jeune homme lui adressa un clin d’œil avant de tirer une carte à son tour.

- « Quelqu’un frappe à la porte. Si tu l’oses, va ouvrir ! Si tu te défiles, quitte la pièce et va te cacher comme le couard que tu es jusqu’à ce que résonne le tonnerre ! ». Ton jeu est naze, Odd. Tu viens de verrouiller les portes, je ne vais pas aller en ouvrir une !
- Alors va te cacher comme le couard que tu es ! rétorqua l’intéressé en tirant la langue.

William haussa les épaules et se leva.
Au même moment, quelqu’un frappa à la porte.
Cette fois, Aelita ne fut pas la seule à sentir son cœur accélérer. Les adolescents se regardèrent et même Odd ne trouva rien à dire. Finalement, William haussa à nouveau les épaules.

- Juste une coïncidence.

Le jeune homme sortit de la salle à manger et Aelita se surprit à attendre, la gorge nouée. En admettant que ce n’était en effet qu’une simple coïncidence, qui pouvait venir jusqu’ici ? Pourquoi ?
Et en admettant que ce ne soit pas une coïncidence, dans quel jeu venaient-ils de s’embarquer ?
Il sembla soudain à Aelita que son ouïe dominait ses autres sens, à un tel point qu’elle ne voyait plus ce qu’il y avait devant elle mais ce que ses oreilles percevaient. Elle avait l’impression d’être avec William lorsqu’il tourna la clé dans la serrure. Elle eut presque envie de reculer en entendant la porte grincer et le silence qui suivit lui donna le sentiment que son univers n’était plus désormais qu’un jardin vide.

- Alors ? demanda inutilement Yumi lorsque William revint s’asseoir.
- Personne.
- Sans doute des enfants qui venaient réclamer des bonbons et qui sont partis en pensant que la maison était vide, tenta de relativiser Odd.

Mais tous se regardaient désormais avec la même question dans les yeux.
Que se passait-il ?

- Tu as verrouillé derrière toi ?
- Évidemment. J’ai hâte de voir quelle sera la prochaine carte ! s’exclama William d’une voix faussement enjouée. Trop facile ce jeu, à ce rythme-là, le zombie ne pourra atteindre aucun d’entre nous ! À toi, Jérémie.
- Vous ne voulez pas qu’on change de jeu ? intervint Yumi. Je ne le sens vraiment pas, celui-là.
- Arrête, on ne va pas paniquer pour quelques coups sur une porte ! râla Sissi, plus pour la contredire que par réelle confiance. Allez, Jérémie, tire une carte.

Aelita se pinça les lèvres alors que Jérémie tendait une main hésitante vers la pile. Avant qu’il ait pu s’emparer d’une carte, un coup de tonnerre résonna dans la pièce.

- Bordel, c’était quoi ? s’inquiéta Ulrich.
- Relax, c’est la cassette, expliqua Odd en reprenant la règle du jeu. À chaque coup de tonnerre, on doit changer de pièce, sachant qu’il faut alterner avec la principale et les autres. En gros, là, on sort tous les yeux bandés. Le zombie a pour mission de contaminer les humains et au prochain coup de tonnerre, on revient tous dans la pièce principale. Les nouveaux zombies sont alors les premiers à tirer une carte et on reste jusqu’à ce que le coup de tonnerre suivant retentisse. Ensuite, les nouveaux zombies peuvent aider le zombie à contaminer, jusqu’à ce qu’ils tirent des cartes antidotes ou qu’il n’y ait plus d’humains.
- Si les nouveaux zombies sont les premiers à tirer, on finira forcément par savoir qui est le zombie originel, souligna Jérémie.
- Il est vraiment mal foutu ce jeu.
- En même temps, un jeu inspiré de Paraplegik zombie ne pouvait pas être génialissime.
- Vous avez fini de râler ? Maintenant, ça ne sert à rien de sortir de la pièce, on a perdu trop de temps. Tire ta carte, Jérémie !
- Mais le cauchemar de cette pièce ? On ne le regarde pas ?
- Techniquement, on n’est pas rentré dans la pièce donc on n’a pas à le regarder. Si on est tous ensemble en plus, ça ne sert à rien.
- Si tu commences à changer les règles, Odd, on n’est pas sortis.

Malgré sa suspicion croissante, Jérémie attrapa une carte.

- « Le ciel s’est obscurci, l’orage approche. Le prochain coup de tonnerre est maintenant ». On la met de côté.
- Mais pourquoi ? Grâce à cette carte, on peut changer de pièce et aller voir un cauchemar tout de suite !
- On la met de côté. Cette histoire de tonnerre ne m’inspire pas.
- Vous permettez que je vérifie quelque chose ? les interrompit Yumi.

Sans attendre de réponse, elle se leva et s’approcha de la fenêtre la plus proche. Les regards la suivirent lorsqu’elle tira le rideau. Dehors, le ciel avait pris une couleur noir, comme si la nuit était déjà tombée.

- C’est quoi ce délire ?
- Éclipse solaire ?
- Arrête tes bêtises, Odd, gronda Yumi en allant allumer la lampe. Où as-tu trouvé ce jeu ?
- Je l’ai acheté dans un magasin tout ce qu’il y a de plus banal, promis. Entre un Monopoly et un Taboo !
- C’est quand même bizarre qu’on connaisse tous le Monopoly et le Taboo et qu’on n’ait jamais entendu parler de ce jeu !
- Je ne suis pas convaincue non plus… Mieux vaut arrêter.
- Moi, ça me fait penser à Jumanji, fit remarquer William. Si c’est le même principe, les effets ne cesseront que quand l’un de nous aura gagné.
- Vous partez dans du gros délire, les mecs ! assura Odd, vexé qu’on ne prenne pas son jeu plus à la légère.
- Pour une fois, je suis d’accord avec lui, vous devenez parano, soupira Sissi. On ne va pas se mettre à plonger dans le paranormal pour un coup frappé à la porte et de gros nuages. Au suivant, qu’on en finisse.

Aelita jeta un regard hésitant à Jérémie qui haussa les épaules. Elle prit une carte et lut.

- « Les rats courent à l’étage. Va les chasser ». Morte de rire. C’est vraiment un jeu pou…

La voix d’Aelita fut couverte par une série de grattements provenant du plafond.
Sissi glapit et Ulrich se leva d’un bond.

- On arrête tout ! Il y a quelque chose de pas normal.
- OK, là, j’avoue que ça craint, concéda Odd. On va tous voir ce qui se passe, je ne le sens plus non plus !

Les adolescents se levèrent. Si Ulrich et William semblaient plus surpris qu’effrayés, Sissi et Aelita étaient livides. Odd prit la tête du groupe, Kiwi toujours sur les talons tandis que Jérémie fermait la marche.

- On est d’accord que la pièce au-dessus de la salle à manger, c’est ce qu’on a baptisé l’ancienne chambre de Franz Hopper ?
- C’est qui Franz Hopper ? demanda Sissi.

Sa voix fut couverte par celle de William.

- Brillante remarque, Odd. Tu commencerais pas à flipper ?

Vexé, Odd ouvrit la porte en grand. La pièce était sombre mais plongée dans un silence laissant présager que rien d’anormal ne s’y trouvait.
Ils attendirent deux minutes afin de s’assurer que plus aucun grattement ne se faisait entendre, sans oser entrer. Une fois ce délai passé, Odd referma la porte avec un sourire.

- Vous voyez ? Il ne faut pas devenir parano ! Je vous rappelle que dans cette pièce, il y a un cauchemar et que quelqu’un va certainement devoir s’y rendre seul à un moment !
- Pourquoi ?
- Je crois qu’il y a une carte qui dit que pour tester son courage, on doit rester seul dans une pièce jusqu’au prochain coup de tonnerre. Il y en a peut-être plusieurs du même genre.
- C’est quand même bizarre, murmura Aelita alors qu’ils redescendaient l’escalier.
- À qui le dis-tu ! s’exclama Jérémie. Jamais vu un jeu aussi naze.
- Je parlais des bruits.
- Je n’aime pas ça non plus mais il faut avouer qu’on entend souvent des bruits étranges dans les vieilles maisons. Il n’y a pas de quoi paniquer. Si ça se trouve, Odd a passé la nuit à nous préparer des trucs et il sera fier comme un pape ce soir en nous révélant toutes ses astuces pour nous faire flipper.

Aelita tourna la tête pour lui sourire, ce qui l’empêcha de remarquer que les autres s’étaient arrêtés devant l’entrée du salon. Elle heurta William qui ne réagit pas.

- Qu’est-ce qui vous arrive ? demanda Sissi, la seule à être assise à nouveau sur le tapis.

Un silence de plomb suivit sa question et Aelita comprit rapidement pourquoi.
Le signe de XANA était tracé sur la table.

***


Sissi ne savait pas quoi dire. Il avait fallu près de cinq minutes à ses amis pour revenir à la réalité. Tous étaient restés figés face au dessin sur la table sans qu’elle en comprenne la raison. Puis, devant ses questions répétées, ils avaient fini par lui raconter à tour de rôle une histoire à dormir debout. Du moins l’aurait-elle considérée comme telle s’ils n’avaient pas tous eu l’air si grave.

- Alors, si je comprends bien… Ce dessin bizarroïde est le symbole d’un programme informatique maléfique que vous avez combattu pendant des années et que vous avez détruit il y a quelques mois ?

La simplicité du résumé fit sourire les anciens Lyoko-guerriers, assis autour de la table basse.

- En gros, c’est ça.
- Donc il n’y a rien à craindre : vous avez détruit XANA.
- Oui, a priori, consentit Jérémie, mais...
- De toute façon, les programmes informatiques n’ont pas de solidité, ils ne peuvent pas dessiner.

Jérémie fracassa ses espoirs en rétorquant d’une voix sombre :

- XANA peut créer des spectres tout à fait aptes à interagir avec notre environnement. J’avoue qu’il ne nous a encore jamais laissé de mots doux mais il doit certainement en être capable.
- Ce qui expliquerait les coups à la porte et les pattes de rat, conclut Aelita.
- Pour les coups à la porte, oui. Les pattes de rat… je suis moins sûr mais ce n’est pas à exclure.

Sissi repensa au William qui avait voulu la frapper dans la salle de bain. En admettant qu’elle suive ses amis dans leur délire paranoïaque, pourquoi un « spectre » comme l’appelait Jérémie aurait voulu s’en prendre à elle ? Elle ignorait tout de Lyoko, n’avait rien à voir avec toutes ces histoires ! Pourquoi avait-elle accepté ce foutu week-end ?

- Vous ne trouvez pas qu’on s’emballe ? intervint Ulrich. C’est vrai, on devient juste un peu nerveux à cause du jeu de Odd, c’est tout.
- On était tous à l’étage quand le symbole a été dessiné, rappela Jérémie. Comment t’expliques ça ?

Ulrich ne sut quoi répondre et ce fut Sissi qui vint le soutenir, déterminée à se convaincre qu’elle ne risquait rien.

- Les portes sont toutes verrouillées, par où ce spectre aurait pu entrer ?
- À mon avis, si XANA peut créer un spectre, il peut l’envoyer n’importe où.

Le silence s’établit avant que Sissi ne l’éclate d’un petit rire nerveux.

- Génial. Joyeux Halloween à vous aussi ! OK, vous avez réussi à me faire flipper bien comme il faut, j’ai vraiment eu très peur, mais maintenant, je pense qu’on peut arrêter la comédie !

Personne ne réagit.

- Si un spectre a été créé, une tour est forcément activée sur Lyoko, conclut sombrement Aelita. Il va falloir qu’on aille à l’usine.

Un ricanement résonna dans la pièce, si violent et si cruel que Sissi poussa un petit cri avant de se serrer contre William.

- Encore faut-il que vous puissiez sortir d’ici, mes agneaux, fit remarquer une voix caverneuse. Pourquoi on ne continuerait pas plutôt à jouer ? Je m’amuse comme un petit fou, moi.

Kiwi aboya avec fureur. Ce fut le seul capable d’avoir une réaction.

- Le système de sécurité, balbutia Jérémie. XANA a pris le contrôle du système de sécurité.
- Et des haut-parleurs, visiblement. Vous croyez qu’il va nous faire un petit mix ? plaisanta Odd malgré son teint plus pâle que d’ordinaire.

Dans un même réflexe, Yumi et Ulrich bondirent vers la porte d’entrée. Ils essayèrent de l’ouvrir à l’aide de la clé comme à l’aide de leurs coups mais rien n’y fit. Au contraire, un champ magnétique se dressa devant eux, les obligeant à reculer. La même protection apparut subitement autour des fenêtres, tandis que la voix caverneuse ajoutait :

- À vous de trouver le zombie. Bon jeu. Et n’oubliez pas : Cauchemars, un jeu de frissons où vous affronterez vos peurs les plus intimes et vos pires fantasmes. Chaque pièce se transforme en lieu d’effroi. Combattez vos angoisses pour gagner !
- T’y crois pas ! XANA fait de l’humour ?
- Il a un humour encore plus pourri que le tien dans ce cas-là.

Aelita et Jérémie échangèrent un regard, conscient qu’ils partageaient les mêmes pensées.
Si XANA se permettait d’être si sûr de lui, ce n’était pas sans raison.

- On ne peut pas sortir de la maison, commença Jérémie alors que Yumi et Ulrich revenaient s’asseoir.
- Et sans sortir, on ne désactivera pas la tour…
- … ce qui fait qu’on a aucun moyen de vaincre le spectre…
- … et qu’il va forcément nous avoir.

Sissi laissa de nouveau échapper un gloussement nerveux.

- Vous n’avez rien de plus optimiste ?
- Elle a raison, approuva Ulrich. Il doit bien y avoir un moyen de se débarrasser du spectre sans désactiver la tour.
- Depuis le temps que XANA essaye d’avoir notre peau, tu crois vraiment qu’il va nous laisser une chance ? railla Yumi. C’est pas toi qui as failli te faire exploser par un satellite militaire !
- Pardon ? balbutia Sissi.
- En tout cas, il est hors de question que je reste ici sans me battre, insista Ulrich.
- Einstein, il y a un moyen de franchir les champs magnétiques ?
- Hum… Ils sont certainement construits autour d’un courant électrique. Peut-être qu’en coupant le générateur…
- On essaye ! coupa Ulrich.
- Quoi ?
- Au cas où tu n’aurais pas remarqué, sans électricité, on ne voit plus rien, signala Yumi. Tu veux nous plonger dans le noir ? Bravo, brillante idée.
- Tu as mieux ?
- Oui. On sort nos portables et on appelle les pompiers.
- Pas de réseau, avertit Sissi après vérification. Je suis persuadée que j'en avais encore tout à l'heure. Qu’est-ce que c’est que ce cirque ? C’est vraiment nul comme blague !
- Super, il manquait plus que ça !
- Sissi, ne pète pas les plombs maintenant, s’il te plait !
- J’ai une lampe-torche dans ma chambre, je vais la chercher et je t’accompagne au sous-sol, Jérémie, annonça Aelita avant que le chaos ne s’installe.
- Je viens aussi, lança Odd.
- OK, les autres vous restez là. Si les champs magnétiques disparaissent, sortez tout de suite. XANA trouvera sans doute une riposte rapidement, autant ne pas prendre risque. Filez à l’usine et allez désactiver la tour.
- Euh… Einstein, on aura besoin d’Aelita alors ?
- Effectivement. Désolée, Aelita, mais tu vas devoir rester dans le hall.
- T’inquiète, je te remplace, proposa Sissi dans un élan de courage qui surprit tout le monde. Après tout, je ne sais même pas ce que c’est, Lyoko, je ne servirai à rien.

Jérémie hésita avant de hocher la tête.

- On fait comme ça.

Aelita hocha la tête et monta l’escalier, accompagnée de Odd et Yumi. Tous leurs sens en alerte, ils s’attendaient à être attaqués d’une seconde à l’autre mais atteignirent sans encombre la chambre d’Aelita. La jeune fille jeta un bref coup d’œil à sa fenêtre le temps de constater qu’elle aussi était inaccessible. Puis, elle s’empara de la lampe-torche fourrée dans un sac de sport et la tendit à Odd.

- Soyez prudents.
- On va essayer.
- J’avoue qu’éteindre le courant ne me semble pas la meilleure des idées mais bon…
- Me dis pas que t’as peur du noir, Yumi ! Ce serait un comble pour toi !
- Disons que dans des situations comme ça, je préfère voir clair.

Les trois adolescents retrouvèrent leurs amis. Comme il fallait s’y attendre, Jérémie se contenta de conseiller à Aelita de ne pas prendre de risque.
Tous sortirent du salon et alors que Sissi, Odd et Jérémie descendaient vers le sous-sol, les autres se tinrent prêts à ouvrir la porte. Plus vite qu’ils ne l’avaient espéré, la maison se retrouva plongée dans le noir.
Une obscurité seulement illuminée par la lueur narquoise des champs magnétiques.
  Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Mer 20 Déc 2017 19:44   Sujet: [Fanfic] Jeux d'enfants [Terminée]
Bonjour, bonsoir !

Je vous propose en cette période de Noël une fiction courte sur… Halloween \o/.

Le titre paraîtra peut-être familier à certains. En effet, ce texte est basé sur celui qui m’a fait gagner (à égalité avec Ikorih) le concours Halloween XANA en 2013 (c’est aussi le nom d’un film, hein, mais bon si fallait être modeste…).

Certains passages sont repris quasiment à l’identique et la fin est similaire mais avec une nouveauté quand même, parce que hein, faut pas rigoler non plus ! La transformation en fiction vise surtout à ajouter aux sources d’inspiration (Jumanji, le jeu de société Dracula, etc…) le livre Le chasseur (♥) de L.J. Smith, avec du coup un cauchemar par personnage.

Comme pour Pas maintenant (pub, bonjour !), la fiction est déjà rédigée et les chapitres sont courts. Il y en aura deux par jour, sauf le dernier qui sortira seul mardi (si tout se passe bien).

Bonne lecture !


Résumé : L’automne suivant l’extinction du SuperCalculateur, les LG, accompagnés de William, Sissi et Kiwi, se retrouvent à l’Ermitage pour fêter Halloween. Mais XANA vient s’inviter dans leurs jeux…


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Chapitre 1 : Échauffement


- Franchement, ça se fait trop pas.

Yumi leva les yeux au ciel.

- Hiroki, je comprends que tu sois énervé mais pitié, respecte un peu la langue française !
- Mais c’est Halloweeeeeeeeeeeeen, insista Hiroki comme s’il ne le lui avait pas déjà répété cent fois.
- Il n’y a que deux « e » dans Halloween.
- Papa et Maman ne veulent pas que je le fasse tout seul ! Il faut que tu m’accompagnes ! Johnny et moi avons des déguisements trop top, tu ne peux pas nous faire ça, t’as pas le droit !
- Alors, explique-moi pourquoi je prépare ma valise ?

Hiroki jeta un regard noir aux vêtements et à la trousse de toilette posés sur le lit de sa sœur.

- Tu les vois déjà tous les jours, tes potes !
- Toi aussi, je te vois tous les jours, surtout pendant les vacances.
- Mais pas Johnny !

Yumi leva à nouveau les yeux au ciel et fit passer ses affaires de la couverture à la valise.

- De toute façon, quand je suis là, Johnny arrive à peine à parler, rappela-t-elle. Bonjour l’ambiance.
- S’il te plait !
- Hiroki, ça ne sert à rien d’insister, tu sais très bien que je ne changerai pas d’avis. Tu n’es plus un bébé.
- Mais Papa et Maman…
- Va les harceler eux et fiche-moi la paix !
- Mais ils ne rentrent que ce soir, tu seras déjà partie !

Yumi retint un sourire. Elle s’était arrangée pour que ses parents ne puissent pas lui proposer de la déposer.
- Dommage pour toi.
- C’est parce qu’il y a Ulrich, c’est ça ?

Yumi serra les poings avant d’attraper la première chose qui lui passait sous la main. Habitué au comportement de sa sœur, Hiroki n’eut aucun mal à esquiver le flacon de shampooing.

- J’espère que ce sera nul et qu’il sortira avec une autre fille après !
- Dégage, morveux !

Les mains enfoncées dans les poches, vexé et déçu à la fois, Hiroki quitta la chambre de Yumi qui culpabilisa aussitôt. Elle ne pouvait pas s’empêcher d’être dure avec lui. Elle le regrettait toujours et recommençait pourtant à chaque fois. Elle ferait des efforts, promis.
Mais pas pour Halloween.
Le cœur de Yumi s’affola. Hiroki avait raison : s’il n’y avait pas eu Ulrich, elle aurait peut-être envisagé de revenir le 31 pour sortir un peu avec son frère… mais il y avait Ulrich. Elle ne l’avait pas vu depuis une longue semaine et mourait d’impatience.
Pourtant, les choses n’avaient pas évolué depuis l’extinction du Supercalculateur. Dans un sens, ce n’était pas négatif : la destruction de XANA n’avait pas ébranlé leur amitié. Plus que Yumi et Ulrich, c’était bien l’ensemble de leur petit groupe qui était resté soudé, incluant même William. Grâce à ses efforts et à l’intervention surprise de Yumi, il avait su se faire une place entre les anciens Lyoko-guerriers. Il avait réussi à prouver que son orgueil et sa vantardise pouvaient être effacés par son sens de l’amitié et sa sincérité.
Leur groupe s’était donc agrandi, plus qu’ils ne le pensaient. Car qui disait William, disait désormais Sissi.
Odd avait retenu de justesse une plaisanterie lorsque le couple s’était formé. Yumi avait été la seule à ne pas être surprise et Ulrich avait compris avec soulagement pourquoi sa japonaise passait plus de temps avec William : elle ne subissait plus ses tentatives de drague. Il était même prêt à parier qu’elle lui avait donné un coup de main pour séduire Sissi.
L’été avait séparé Ulrich et Yumi. Elle avait réussi à voir ses amis lorsqu’ils faisaient des escales à Paris, entre deux trains de juillet, mais août l’avait entrainée au Japon. Si ses vacances avaient été agréables, retrouver Kadic en septembre l’avait été davantage. Car, comble du bonheur, un changement s’était enfin opéré chez Ulrich.
Conscient que William n’était plus un rival, il avait gagné en maturité. Ses bouderies n’étaient plus qu’un souvenir, ses joutes verbales avec Odd finissaient toujours en éclats de rire et la disparition de XANA l’aidait à se concentrer davantage sur ses cours. Il y avait fort à parier que, pour une fois, son père n’avait pas fait trop de réflexions sur ses résultats scolaires. Il avait dû passer une première semaine de vacances convenable.
Yumi boucla sa valise. Ce week-end prolongé s’annonçait sous les meilleurs auspices. Certes, elle avait menti à ses parents en disant qu’elle allait dormir chez l’oncle d’Aelita. Mais ses amis la feraient déculpabiliser en quelques mots.
Elle ouvrit son armoire dans un grincement et fouilla dans le fond pour retrouver son sac de couchage. Elle attrapa ensuite une robe noire et rouge. Odd avait insisté pour qu’ils prennent des déguisements. Avec un soupçon de maquillage, quelques vieux bijoux, et un faux dentier, elle serait la reine des vampires. Ses yeux passèrent sur le vêtement, pas si long que ça. Elle songea à la manière dont Ulrich la regardait parfois quand il pensait qu’elle ne le voyait pas.
Les choses s’annonçaient définitivement bien.

***


À quelques kilomètres de là, Aelita pleurait. Pliée en deux, le ventre douloureux, elle hoquetait, en proie à une douleur insupportable. Des larmes roulaient sur ses joues et l'air ne trouvait plus son chemin jusqu'à ses poumons.

- Tu renonces ? murmura une voix d’homme à son oreille.
- Pitié, pitié ! réussit-elle seulement à articuler.
- Renonce, ça ne sert à rien de te battre.
- D’accord, d’accord, tu as gagné ! Je me rends !

Aelita roula sur le tapis, hors d’haleine. Les bras écartés, le corps tremblant, elle mit de longues secondes à se calmer.

- Monstre ! finit-elle par lancer.

Assis un peu plus loin, Odd éclata de rire et attrapa Kiwi, rendu fou par cette bataille de chatouilles (ce n’était pas tous les jours qu’on avait l’occasion de se rouler par terre avec son maître).

- Depuis quand tu te crois plus forte que moi ? se moqua Odd alors qu’Aelita se relevait. C’était certain que j’allais te faire craquer.
- J’aurai ma revanche !

Jérémie sourit timidement. Enfoncé dans un fauteuil beige, il regardait avec un brin d’envie la complicité de Odd et Aelita. Il avait beau connaître les sentiments de la jeune fille à son égard, il ne pouvait s’empêcher d’envier un peu la facilité qu’avait Odd à la faire rayonner. Mais lorsqu’elle s’approcha de lui, souriant différemment, Jérémie sentit son cœur se gonfler.
Ce regard, il était à lui et à lui seul.

- Tu as bientôt fini ?
- Presque.

Aelita posa la main sur le bras de Jérémie et balaya la pièce du regard avec une certaine tendresse. Elle était fière et émue du travail qu’ils avaient tous effectué pour l’Ermitage pendant l’été.
Sans être devenue une maison aussi chaleureuse que celle dont se souvenait Aelita, l’endroit avait perdu ses allures de manoir hanté. Jérémie avait entrepris tôt de remettre en marche l’eau et l’électricité. Les techniciens qui étaient passés avaient eu l’air surpris de faire affaire avec un adolescent, sans montrer trop de curiosité. Ulrich avait fait grise mine en comprenant que son argent de poche allait certainement passer dans le paiement des factures et Aelita s’était inquiétée sur des possibles interrogations concernant cette maison sortie de nulle part mais Jérémie avait assuré qu’il s’occupait de tout. Et pour l’instant, aucun problème n’était survenu. Les adolescents avaient pu s’approprier l’Ermitage sans que rien ne vienne heurter leur emballement.
L’une des pièces vide de l’étage avait été transformée en salle de mixage pour Aelita. Elle avait travaillé tout l’été dans une librairie pour s’offrir du matériel et était satisfaite de ses dernières productions. Elle passait des heures à écouter différents morceaux tandis que Jérémie la couvait des yeux en programmant distraitement.
Suite aux supplications de Odd, le groupe s’était également cotisé pour acquérir des enceintes à mettre dans la salle à manger. Le blondinet avait aussitôt ramené une vieille télévision qui traînait chez lui, unique contribution mobilière de sa part. Les autres avaient acheté ou apporté quelques meubles de base, sans compter qu’au milieu du désordre, plusieurs objets avaient pu être sauvés.
Les chambres (celle d’Aelita, de ses parents et la chambre d’ami au rez-de-chaussée) avaient été remises en ordre, les meubles étant quasiment tous intacts. La salle de bain, relativement épargnée par le chaos ambiant, avait juste eu besoin d’un grand nettoyage et Aelita se réjouissait déjà de troquer les douches de l’internat contre un bain bien chaud lorsque le froid s’installerait pour de bon. Le bureau de Franz Hopper était la seule pièce à laquelle ils n’avaient pas touché. Aelita ne se sentait pas encore prête.
Au rez-de-chaussée, outre la chambre d’amis, on trouvait désormais une cuisine peu équipée mais propre et conviviale. Quant au salon, s’il leur avait posé davantage de difficultés, il ressemblait aujourd’hui à quelque chose de convenable.

- Fini ! lança joyeusement Jérémie.
- Alors y a quoi ? demanda Odd sans cesser de jouer avec Kiwi.
- Système basique : une caméra au-dessus de la porte d’entrée, un circuit de haut-parleurs entre les pièces de l’étage et le salon et j’ai ajouté une sécurité qui fait qu’une fois activée, je reçois une alarme si une fenêtre ou une porte donnant sur l’extérieur est ouverte. Ça permettra de garder un œil dessus en période scolaire.

Odd hocha la tête et laissa Kiwi lui lécher le visage. Ce week-end s’annonçait bien ! Il avait passé une semaine à l’internat avec Jérémie et Aelita à tout planifier, même si en réalité, il avait davantage trépigné d’impatience que préparé. Les courses étaient faites pour le week-end, ne manquait plus que l’arrivée des autres !
Il jeta un regard rapide à la pendule accrochée au mur. L’après-midi touchait à sa fin. Il n’y avait plus à attendre longtemps.

***


Sissi avait toujours détesté le RER mais cette fois, elle ne pouvait se plaindre. C’était ça ou demander à son père de l’amener en voiture, or, elle n’avait pas envie de lui expliquer qu’elle passait le week-end dans une maison perdue au milieu des bois, surtout si près de l’internat. Il se serait débrouillé pour l’empêcher d’y aller ou pour débarquer à l’improviste afin de s’assurer que tout se passait bien. Paradoxalement, il la surcouvait lorsqu’elle voulait prendre l’air et la laissait parfois seule quand elle aurait eu besoin de son aide.
Elle détailla son reflet dans la vitre et eut un sourire. Il lui en fallait peu pour retrouver sa légèreté. En l’occurrence, elle était heureuse parce que personne d’autre dans la rame n’avait un teint aussi bronzé. Comparée à la grisaille de Paris, Séville paraissait éblouissante de chaleur.
Les parents de William avaient une résidence secondaire en Espagne. Ils n’avaient vu aucun inconvénient à ce que leur fils s’y rende en compagnie de sa petite amie. Ils étaient bien trop heureux de le voir à nouveau dans son état normal, son attitude des derniers mois étant devenu un sujet tabou dans la famille. Sissi avait donc pu profiter d’une semaine de rêve et c’était sans doute la moins enthousiaste à l’idée du week-end d’Halloween. D’abord parce qu’elle n’aimait pas Halloween. Ensuite parce que malgré tout ce que lui avait assuré William, elle restait réticente à l’idée de passer plusieurs jours à l’Ermitage. Si son portable ne passait pas ? Si l’eau chaude tombait en panne ? Et puis, les bois alentours ne donnaient pas une atmosphère chaleureuse à la maison, qu’elle n’avait visitée qu’une fois. D’ailleurs, à qui était-elle vraiment cette maison ? On lui avait dit qu’Aelita en avait hérité mais rien ne semblait très officiel. Elle avait toutefois abandonné sa manie de voir des mystères partout et de poser des questions auxquelles personne ne voulait répondre. De cette manière, elle était mieux intégrée au groupe.

- A quoi tu penses ?

Sissi retrouva son sourire. William venait de lui caresser les cheveux avec un air intrigué. Il devinait assez bien les fois où elle avait besoin de s’isoler dans ses pensées et les fois où il devait l’en tirer.

- Au week-end. Je commence à croire qu’on aurait mieux fait de rester plus longtemps à Séville, je me serais sentie plus rassurée.
- Quoi, tu as peur ?
- C’est pour ça qu’on y va, non ?

William hocha la tête et l’embrassa.

- Je me demande ce que Odd nous prépare…
- Je préfère ne pas trop l’imaginer.
- Relax, ça va être chouette.

Sissi hocha la tête sans grande conviction. Elle garda le silence jusqu’à ce que William la tire par le bras pour la faire descendre.

- Ulrich n’était pas censé nous attendre ? s’étonna-t-elle en arrivant dans le hall de la gare.
- Je suis là.

Sissi se retourna et elle tenta tant bien que mal de garder un air neutre. Elle adorait William, il était plutôt beau garçon et il savait la faire rire. Mais il ne faisait pas battre son cœur aussi fort qu’Ulrich. Elle sentit un frisson la parcourir quand il lui fit la bise, chose qu’aucun geste de William n’avait encore déclenchée.

- Alors les vacances ?
- On vous racontera une fois arrivés, ça évitera de se répéter, répondit William.

Ulrich hocha la tête et ils s’éloignèrent vers les escalators. Sissi resta légèrement en retrait, mal à l’aise. Malgré le temps qu’elle avait mis à accepter ses avances, elle avait tout de suite remarqué que William lui tournait autour. Au début, elle avait pensé qu’il s’agissait d’une tactique pour rendre Yumi jalouse (elle y avait eu le droit assez de fois avec Ulrich). Puis, lorsqu’elle avait compris qu’il était sincère, elle s’était sentie flattée. Après des années de rejet, cela faisait du bien de voir qu’elle pouvait plaire à quelqu’un. Et elle n’avait pu s’empêcher de se dire qu’avec un peu de chance, cela ferait réagir Ulrich.
Les mois passaient toutefois sans que le garçon change fondamentalement de comportement envers elle. Bien sûr, il devenait de plus en plus amical mais Sissi était lucide : cela n’avait rien à voir avec sa relation avec William. Elle commençait donc à se sentir coupable, sauf qu’une fois encore, elle ne voulait pas se leurrer. Malgré ses sentiments pour Ulrich, elle affectionnait bien assez William pour une relation de leur âge.
Elle n’avait rien à se reprocher.

***


Yumi fut la première à se retrouver dans les bras d’Aelita.

- Vous savez que traverser les bois pour venir jusqu’ici alors que la nuit est tombée, ça met déjà bien dans l’ambiance ?
- Désolée, on aurait dû venir te chercher.
- Arrête de dire des bêtises, je suis déjà contente qu’on arrive à se faire un week-end comme ça, j’étais persuadée que mes parents me l’interdiraient à la dernière minute.
- Il faut toujours que tu vois le mal partout.
- Ah non, là, je vais optimiser à fond jusqu’à lundi !
- T’es pas la seule.

La japonaise sentit quelque chose s’agiter sous son nombril. Une semaine, juste une semaine sans entendre cette voix. C’était trop long.
Elle se retourna pour faire face à Ulrich qui venait d’entrer, suivi par William et Sissi.

- Salut.
- Salut.

Ils se dirent bonjour avec la même chaleur que les autres, ni plus, ni moins, mais Yumi se fit une promesse.
Quand ils quitteraient cette maison, ce serait différent.
Elle avait un week-end pour changer les choses et elle sentait qu’elle en avait enfin le courage.

- Alors c’est quoi le programme ? demanda Sissi, décidée à ne pas ternir l’atmosphère par son manque d’entrain.
- Aujourd’hui, on papote pour rattraper la semaine passée, on se fait une montagne de pâtes carbo et on mate un film d’horreur en mangeant des cookies ! répondit aussitôt Odd. Au pire, on peut passer l’étape papotage et attaquer tout de suite les cookies !
- Le film d’horreur, ça va être d’essayer de récupérer des cookies avant que tu les dévores tous !
- No happy end, répondit Odd avec un ton macabre, peu crédible étant donné son air joyeux.

Son enthousiasme fut communicatif et tous sourirent.

- On est quand même super bien ici, non ? lança Yumi.
- Dans les films d’horreur, c’est toujours ceux qui sont persuadés que tout va bien qui meurent en premier, avertit Odd, faussement sérieux. Te voilà condamnée à un trépas terrible, Yumi !
- Arrête, tu me fais peur !
- Tu as raison d’être sûre de toi. Après tout, tu ne risques rien, t’as un chevalier servant pour mourir à ta place !
- Odd, tu vas pas commencer, grommela Ulrich.
- Pourquoi tu t’es senti visé ?
- Et si tu m’aidais à faire les pâtes ? proposa Aelita avant qu’Ulrich, les joues en feu, ne réplique.
- Ah non, surtout pas, il va piquer tous les lardons !
- Comme si c’était mon genre ! William, tu me blesses !
- Je viens avec toi, proposa la japonaise. Sissi, on les laisse entre hommes ?
- Les femmes à la marmite, ça me plait comme concept, se moqua Odd.
- C’est cela, répondit Yumi dans un sourire malicieux, du coup, on aura les hommes à la vaisselle !

Le blondinet en fut estomaqué. Les autres sourirent et alors que les filles se dirigeaient vers la cuisine, Jérémie les retint.

- Pendant que j’y pense, je vous montre juste le système de sécurité.

Il avança jusqu’au mur près de la porte où était accroché un boîtier noir de la taille d’un livre de poche.

- Maintenant qu’on est tous là, je vais l’activer, avertit-il en appuyant sur un bouton situé sous le boîtier. Si vous êtes réveillés avant moi demain et que vous voulez ouvrir une porte ou une fenêtre, pensez à d’abord désactiver l’alarme.
- On ne sort pas ce soir ? nota Odd, déçu.
- Ce n’était pas dans ton programme.
- Bah, je pensais quand même que…
- On va se garder ça pour demain soir.

Odd approuva d’un hochement de tête.

- Démo finie, à la besogne les filles !

Alors que les trois amies disparaissaient dans la cuisine, Ulrich ne quitta pas Yumi des yeux, ce que ne manqua pas de remarquer Jérémie.

- Tu vas lui parler ?
- Bah j’aimerais bien, avoua le samouraï en passant une main dans ses cheveux, l’air gêné. Seulement, je sais pas trop…
- Tu sais pas trop comment, ouais ça, on a fini par le comprendre, soupira Odd. Sans rire, y a que moi que ça écœure ces mièvreries ? Comme si ça suffisait pas que je sois le seul célib’, on va vraiment devoir passer Halloween à se faire des bisous bisous et à roucouler ? Parce que si c’est ça, prévenez-moi, je rentre à l’internat et je reviens avec un couteau le jour de la Saint-Valentin !
- T’inquiète pas Odd, niveau horreur, tu vas être servi, promit William. J’ai ramené de quoi te faire plaisir.
- Pitié, ne roule pas une pelle à Sissi devant mon nez, ce serait plus de l’horreur, ce serait… diaboliquement monstrueux ! Oh, ça y est… J’ai des images affreuses en tête ! Hannibal Lecter soit loué, même Alexandre Aja n’a jamais mis une scène aussi terrifiante dans ses films !
- C’est bon, c’est fini ?
- Oh non William, chuchota une ombre, trop bas pour être entendue. Nous n’avons même pas commencé.

***


- Laisse tomber, elle ne fera pas Halloween avec nous.

Allongé sur son lit, le téléphone fixe calé sur l’oreille, Hiroki apprenait la terrible nouvelle à un Johnny désespéré.

- Elle est partie jusqu’à la fin des vacances avec ses crétins de copains. Je sais pas vraiment où, chez l’oncle d’Aelita. Ouais, mes parents l’ont laissée y aller. Je peux te dire que quand j’aurai son âge, ils n’auront pas le droit de m’interdire quoi que ce soit du coup ! Arrête de pleurnicher, on pourra s’arranger pour se faire un ciné, c’est …

Des coups furent frappés à la porte. Hiroki releva la tête. Se pouvait-il que Yumi revienne ? Avait-elle des remords à le laisser seul pour Halloween ?

- Attends, Johnny, je crois qu’elle est là ! Je te rappelle !

Il dévala l’escalier, courut à travers le hall et se jeta sur la poignée. La porte s’ouvrit avec un grincement inhabituel.
Hiroki, qui avait déjà préparé son plus grand sourire, resta figé face à l’inconnu.

- Vous êtes qui, vous ?

S’il avait su que ce seraient ses derniers mots, il les aurait peut-être mieux choisis.


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Chapitre 2 : Hurlements


Aelita court. Elle ne sait pas pourquoi, elle ne sait pas où.
La seule chose qui compte, c’est de courir.
Derrière elle, aucun bruit ne vient troubler le silence. Pas de martèlement de pattes lourdes sur le sol, ni le souffle haché d’un poursuivant qui se rapproche, pas de brindilles brisées, pas de grognements affamés.
Rien.
Un silence total, presque palpable.
Pourtant, Aelita sait qu’elle doit continuer à courir.
Le silence lui fait peur. Parce qu’il lui indique que si aucun ennemi ne la suit, elle ne peut pas non plus compter sur un ami. Parce qu’elle ignore quand il va voler en éclats. Parce qu’il s’accorde à merveille avec le vide qui a pris possession de son âme. Parce qu’elle n’a plus que ça désormais.
Elle réalise peu à peu que le silence n’est pas si total. Son cœur bat dans sa poitrine, terriblement fort, terriblement vite. S’il s’arrachait de son corps, s’il traversait son t-shirt pour s’écraser contre un arbre, peut-être que cela lui épargnerait une mort atroce ?
Un éclat argenté manque attirer son regard, à l’extrémité gauche de son champ de vision. Ne pas tourner la tête, surtout pas. Ne pas faire le moindre geste qui pourrait la ralentir ne serait-ce que d’une seconde.

- Aelita !

Le cri déchire la nuit, à la fois proche et lointain, regorgeant de douleur et d’angoisse. Aelita étouffe un sanglot mais elle ne peut pas s’arrêter. Pas même pour Jérémie. D’ailleurs, est-ce vraiment lui ?

- Aelita !

Elle n’entend pas ce second cri. Elle a l’impression que son cœur s’est scindé en deux pour se loger dans ses oreilles. Il bat fort, trop fort, elle va se faire remarquer. Si elle veut qu’il se taise, elle doit s’arrêter, mais elle ne peut pas.
Continuer sa course effrénée.
Ne pas regarder en arrière.
Oublier que Jérémie peut être en train de mourir. Si ce n’est pas déjà le cas.
Que Yumi est morte. Que William est mort.
Que Odd et Sissi ont disparu.
Et ne pas songer à Ulrich, pauvre Ulrich, sans doute déterminé à déverser sa haine pour venger sa japonaise. Sans doute mort lui aussi.
Car que peuvent-ils faire, eux pauvres mortels, contre tant d’acharnement ?
Aelita a perdu depuis longtemps la sensation de vol procurée par son statut d’ange de Lyoko mais cette nuit, elle goûte à l’adrénaline toute aussi forte d’une peur sans nom. Cette nuit, elle a l’impression de voler à nouveau, la joie en moins.

On n’échappe jamais au passé, pense-t-elle avec une pointe d’amertume.

Elle surgit dans une clairière et comme un écho à ses pensées, un son aussi familier que craint s’élève devant elle. Un son qui la fait s’arrêter net pour observer avec terreur la lisière opposée.
Un son qui, une fois éteint, est repris partout autour d’elle.
Un son qui fait écho aux croassements des corbeaux.
Un son que ses ancêtres ont redouté avant elle, un son qui la fait trembler dans son sommeil, un son inscrit dans la partie reptilienne de son cerveau où le mot peur a conservé tout son sens.
Un hurlement de loup.
Des hurlements de loup.

***


Aelita fut réveillée par son propre cri. Elle était allongée dans un lit mais pas à l’internat. La fenêtre laissait passer la lumière de la lune mais ne se situait pas là où elle aurait dû.
Le fait de ne pas reconnaître la chambre où elle se trouvait fit hurler à nouveau la jeune fille, juste avant qu’une porte ne s’ouvre à la volée.

- Aelita ?

Jérémie, lunettes de travers et cheveux ébouriffés, avança à tâtons dans la pénombre, trop fatigué pour penser à appuyer sur l’interrupteur. Il heurta le coin d’un meuble, retint un juron et soupira de soulagement lorsqu’Aelita alluma sa lampe de chevet.

- Un problème ? demanda-t-il, frappé d’inquiétude plus que de douleur.
- Rien, juste un cauchemar.
- Je savais qu’on n’aurait pas dû regarder un film d’horreur avant de se coucher. Tu te faisais attaquer par Freddy ?
- Non, ce n’était pas… ce genre de cauchemar.

Jérémie alla s’asseoir sur le lit de son amie. Il aurait dû s’en douter. Aelita n’était pas comme Sissi. Elle n'avait pas fondu en larmes quand Odd avait éteint la lumière de la salle de bain alors qu’ils venaient de finir le film. Elle n’avait peur que de vraies choses et ses cauchemars n’étaient jamais anodins.

- Raconte, incita-t-il en lui prenant la main.
- Franchement, je ne préfère pas.

Aelita avait les yeux fermés, encore angoissée par des images plus vraies que nature. Yumi la gorge ouverte, Ulrich désespéré, Jérémie en qui elle n’avait plus confiance, Odd et Sissi introuvables.
Elle se blottit dans les bras de Jérémie. Surpris, le jeune homme lui caressa maladroitement les cheveux.

- Pourquoi tu n’as pas dormi avec nous en bas ?
- J’ai été stupide.
- Mais non.
- Si. J’aurais eu moins peur si j’avais été avec vous.
- Allez, arrête de dire des bêtises et viens.

Emmitouflée dans sa couverture, Aelita suivit Jérémie. La veille, alors que tous s’étaient déjà endormis, elle n’avait pas trouvé le sommeil. Elle aurait aimé pouvoir dire qu’elle réfléchissait aux choses de la vie mais la réalité était beaucoup plus terre à terre. Elle n’avait juste pas l’habitude de dormir avec un ronfleur et le tracteur qu’était Odd une fois plongé dans le sommeil avait failli la rendre folle. Elle était donc montée dans sa chambre, déçue de ne pas pouvoir dormir contre Jérémie mais soulagée de fermer les yeux dans le silence.
Elle le regrettait à présent. Elle aurait pu gagner une nuit dans les bras de Jérémie puisque contrairement à Yumi et Ulrich, elle n’avait pas besoin de faire semblant. Oui, elle était amoureuse de Jérémie et oui, elle avait l’intention de profiter de chaque seconde à ses côtés.
Arrivés en bas des escaliers, elle caressa le dos de son petit ami.

- Je vais boire, je reviens.
- Je t’attends ?
- Non, j’arrive.

Aelita s’éloigna vers la cuisine. Elle attrapa un verre et le remplit directement au robinet. Debout devant l’évier, elle tournait le dos à la porte et ne pouvait pas voir le couloir. Elle ne remarqua donc pas l’ombre.
Elle sortit de la cuisine, se sentant un peu mieux. Avant d’éteindre la lumière, elle s’arrêta quelques secondes dans l’encadrement de la porte du salon. Un sourire réussit à se dessiner sur son visage.
Ils étaient tous là, tous vivants.
Yumi et Ulrich, toujours incapables de s’avouer leur amour, chacun dans son sac de couchage, tournés l’un vers l’autre. Sissi dans les bras de William sur un matelas. Odd pelotonné dans un fauteuil, Kiwi à ses pieds. Et Jérémie sur le canapé, déjà à moitié rendormi.
Ils avaient changé depuis l’extinction du Supercalculateur, surtout Jérémie. Il avait retrouvé le sens du mot sommeil, ne se promenait plus partout avec son ordinateur et à l’inverse des autres membres du groupe, ses notes avaient légèrement baissé.
Parce qu’à présent, il désirait passer chaque minute de son temps avec Aelita.
Rassurée à l’idée que rien ne pouvait leur arriver, la jeune fille éteignit la lumière. Elle avança avec précaution entre les dormeurs pour venir se blottir contre son petit ami. Dans ses bras, elle ne risquait rien. Il avait toujours su la sauver.
Elle ne risquait rien…
Ce fut au moment exact où elle s’endormait que le hurlement d’un loup retentit dehors. Quelque part dans la maison, un ricanement s’éleva, masquant un gémissement étouffé.
Aucun des adolescents ne se réveilla lorsque la porte d’entrée s’ouvrit. L’alarme ne résonna pas. Ils n’entendirent pas le son mat de corps qu’on traîne, malgré la montée des escaliers. Ils n’entendirent pas une porte s’ouvrir puis se refermer à l’étage.
Ils continuèrent leur nuit, la croyant paisible.
Sans savoir que ce serait la dernière.

***


Ayant dormi comme un loir, Yumi fut surprise d’être la première à se réveiller en ce samedi 31 octobre. Elle ne savait pas qu’Aelita avait quitté le canapé puis l’avait retrouvé et pensait donc que rien n’avait bougé pendant qu’elle était dans les bras de Morphée.
Elle sourit en remarquant Ulrich si proche d’elle. Elle sourit en voyant Aelita blottie contre Jérémie. Elle sourit en constatant que Odd arrivait à dormir dans une position normalement interdite à tout être vertébré. Elle sourit devant l’air serein de Sissi et William. Elle sourit de sourire.
Son attention se reporta sur Ulrich. Elle le trouvait tellement beau. Dans son sommeil, il se débarrassait de son masque de contrôle, de son petit air crâneur et de son regard faussement sûr de lui. Elle eut envie de repousser les mèches folles qui lui tombaient sur le visage mais préféra se lever en silence.
Kiwi ouvrit un œil, s’étira et trottina à la suite de la japonaise. Ils entrèrent dans la cuisine et le chien fila aussitôt vers la porte-fenêtre.

- J’arrive, j’arrive, ne réveille pas les autres ! murmura Yumi alors qu’il aboyait. C’est vrai que ça doit te changer de l’internat, tu n’as rien à craindre de Jim ici et tu peux passer ta journée dehors.

Elle se servit un verre de jus d’orange avant d’aller ouvrir la porte, puis les volets. Kiwi s’élança avec bonheur dans le jardin, sans se préoccuper du froid déjà hivernal. Le sourire aux lèvres, Yumi le regarda s’éloigner.
Elle ne réalisa pas que l’alarme aurait dû sonner.
Après avoir fini son verre, elle entreprit de préparer le petit-déjeuner. Chocolat chaud et céréales pour Jérémie, café et croissants pour Odd, tartines de confitures pour Ulrich, jus d’orange et…
Un violent coup de vent heurta les carreaux, faisant sursauter Yumi. Alors qu’elle reprenait ses esprits, un second coup de vent plus violent encore fit trembler la porte d’entrée, presque aussitôt suivi par le bruit d’une pluie diluvienne.

Temps de chien, songea-t-elle avec une grimace. On ne sortira pas aujourd’hui.

Yumi devait reconnaître qu’au fond, cela ne la dérangeait pas. Elle préférait rester au chaud à faire des jeux de société plutôt que d’arpenter la forêt dans le froid pour calmer les crises d’hyperactivité de Odd.
Un aboiement retentit au moment où Yumi mettait en route le grille-pain. Alors qu’elle se dirigeait vers la porte pour ouvrir au chien, elle entendit le bruit d’une chasse d’eau et des murmures plus ou moins discrets.
Ses amis commençaient à émerger.

- Allez, Kiwi ! s’exclama-t-elle en abaissant la poignée. Viens dire bonj…

Sa phrase se perdit dans un hurlement. Ulrich, réveillé par le départ de Yumi, bondit de son sac de couchage. Vêtu d’un simple pantalon de survêtement, il courut jusqu’à la cuisine en ordonnant aux autres de ne pas bouger.

- Quoi ? hurla-t-il en attrapant la première chose qui lui tombait sous la main, prêt à frapper.

Yumi se retourna vers lui avec un sourire crispé. Une main sur le cœur, elle semblait à deux doigts de vomir mais n’était visiblement pas blessée.

- Désolée, j’ai juste été surprise. Ce cher Kiwi a voulu participer au petit-déjeuner.

Ulrich eut une grimace de dégoût en regardant le chien déposer un corbeau mort aux pieds de Yumi.

- Beurk.
- Comme tu dis.
- Respire, tu ne crains plus rien, se moqua Ulrich.

La japonaise sourit mais il lui fallut encore quelques secondes pour que son cœur se calme. Lorsqu’elle eut retrouvé ses esprits, elle regarda son ami et ce fut à son tour de se moquer :

- Tu comptais me défendre avec ça ?

Le jeune homme rougit avant de reposer son bol sur la table.

- Tu sais, bien lancé en pleine tête avec vigueur, ça peut donner des résultats surprenants… Attends, je vais chercher une chaussure pour remettre ce truc dehors. Non, Kiwi, ne touche pas à ça !
- Qu’est-ce passe ? demanda Odd, à moitié caché sous sa couverture, la voix gorgée de sommeil.
- Ton chien a des goûts culinaires qui me rappellent les tiens, rétorqua Ulrich en attrapant une basket.

Odd se redressa aussitôt.

- Pourquoi tu dis ça ? Ne le laissez pas manger n’importe quoi, hein ! Il a l’estomac fragile !
- Merci, on se souvient des sushis à la moutarde.

Ulrich quitta la pièce pour retourner dans la cuisine, sans se soucier des marmonnements de Odd qui ne bougea pas de son fauteuil.

- C’est très sexy ! se moqua Yumi en désignant l’unique chaussure qu’il portait.
- Désolé, ils n’avaient plus l’armure complète de chevalier servant.

Avec une moue écœurée, Ulrich alla shooter dans le corps du corbeau. L’oiseau effectua son dernier vol jusqu’au muret où il s’écrasa. Yumi referma la porte et Kiwi, comme déçu par l’accueil réservé à son cadeau, se roula en boule sur le carrelage.

- Je n’ai plus très faim d’un coup.
- Moi si ! lança Odd depuis la salle à manger. Le petit-dèj’ est prêt ?
- Tu ne crois quand même pas qu’on va te l’apporter ? railla Ulrich, déjà installé à table.
- Sympa de pouvoir compter sur ses amis !

Tandis qu’Ulrich et Yumi commençaient à manger, Jérémie fixait Aelita, allongée contre lui.

- Tu penses à ton cauchemar ? chuchota-t-il.
- Il ressemblait à celui où j’ai vu mourir mon père… J’ai… C’est stupide mais j’ai peur qu’il se réalise.
- Arrête de t’inquiéter. Ton père a été tué par XANA. Plus de XANA, plus de réalisation de rêve. C’est logique.

Aelita sourit. Avec Jérémie, tout était logique.
Elle l’embrassa doucement et rejoignit les autres dans la cuisine.

- Bien dormi ?
- Super. Je suis mieux ici plutôt que chez moi ! s’exclama Yumi dans un sourire.
- On pense tous la même chose, renchérit Ulrich.

Aelita leur adressa un regard reconnaissant.
Ils étaient là.
Rien ne pouvait arriver.

- Par contre, ça me surprend que mes parents ne m’aient pas appelée pour être sûrs que j’étais bien arrivée, avoua la japonaise. J’ai encore vérifié mon portable ce matin en me réveillant : pas de message ni d’appel manqué et pourtant, j’ai du réseau. Je devrais être contente qu’ils me fassent confiance mais…
- Quand ils te harcèlent, ça t’énerve, quand ils ne le font pas, ça t’inquiète. Est-ce qu’il y a quelque chose qui arrive à te satisfaire ? se moqua Ulrich.

Yumi ne put retenir un léger sourire mais Odd arriva en courant dans la cuisine avant qu’elle réponde.

- T’y crois pas ! Ils ont failli réussir l’exploit incroyable de me couper l’appétit ! Oh pitié, un verre de jus d’orange, d’eau, d’arsenic, n’importe quoi, il faut que je me remette du choc !
- Qu’est-ce qui t’arrive ? soupira Ulrich.
- Halloween commence fort ! La première chose que j’ai vue en me levant… Oh non, je ne peux même pas en parler, c’est trop atroce !
- Accouche, Odd.
- Sissi et William en train de s’embrasser ! Pourquoi ? Pourquoi m’imposer cette épreuve si cruelle ?

Les adolescents éclatèrent de rire tandis que William entrait à son tour dans la cuisine.

- T’es qu’un jaloux, Odd, lança William. Parce que toi, la seule personne qui a envie de t’embrasser, c’est ton chien.
- Au moins, mon chien ne passe pas une demi-heure dans la salle de bain avant de venir prendre son petit-déjeuner !
- Son odeur en témoigne. Enfin quelque chose qui s’accorde à tes pieds !

Aelita sourit alors que les deux nouveaux amis continuaient leur joute verbale. Odd avait trouvé en William un parfait « compagnon de vannes pourries » comme se plaisait à l’appeler Ulrich.
Peu à peu, les images nocturnes qui avaient tant effrayées Aelita disparurent. Elle devait profiter de son présent plutôt que noircir son avenir. Elle était avec le garçon qu’elle aimait et des amis plus chers que sa vie.
Sa famille.
Pas besoin de s’inquiéter.

- Au fait, tout le monde à son déguisement ? demanda Odd en s’installant à table.
- Bien sûr et toi ?
- Évidemment ! Avec le petit détail qui fait toute la monstruosité !
- T’es pas déjà assez monstrueux comme ça ?
- Tu as de la chance que j’aie trop faim pour répondre !

Le petit-déjeuner fut long, parsemé d’éclats de rire et de pauses nécessaires aux adolescents pour reprendre leur souffle.
Personne ne remarqua que le corbeau mort avait disparu.

***


À l’étage, Sissi finissait sa douche lorsqu’un corbeau passa devant la fenêtre. Elle n’avait aucun moyen de savoir que ce corbeau était censé être mort et pourtant, elle se sentit mal à l’aise en suivant l’oiseau des yeux. Il ne manquait plus que ça à l’atmosphère glauque du week-end.
Elle avait passé une nuit épouvantable. D’abord, ce crétin de Odd avait insisté pour qu’ils regardent « Freddy : les griffes de la nuit ». Elle détestait les films d’horreur, même quand elle les regardait avec d’autres personnes dans sa chambre douillette et confortable en plein centre-ville. Alors ici, dans une maison aux allures de demeure abandonnée au milieu de la forêt, l’effet était plus que renforcé.
Où était-elle ? Pas si loin du lycée, c’était sûr, mais quel oncle pouvait bien avoir l’idée de proposer à sa nièce et ses amis un week-end ici ? Le chauffage fonctionnait à peu près, l’eau était chaude, et il y avait du réseau. Techniquement, tous les critères de base qu’elle attendait étaient remplis. Mais cette maison avait quelque chose de malsain.
Sans être sale, elle ne respirait ni la jeunesse, ni l’entretien régulier. Elle n’avait pas cette discrète touche de présence humaine, cette chaleur procurée par l’habitation qui transforme un bâtiment en foyer. Le silence y paraissait trop lourd et pourtant des grincements incessants l’avaient empêchée pendant longtemps de fermer l’œil. Une fois endormie, elle avait fait des cauchemars d’hommes brûlés la poursuivant à travers la forêt. Elle s’était réveillée à trois reprises en sursaut et à chaque fois, William l’avait inconsciemment serrée un peu plus fort contre lui. Loin de la rassurer, cela l’avait mis mal à l’aise.
Elle jeta un regard au miroir, seul élément semblant neuf dans la salle de bain. Des cernes naissaient déjà sous ses yeux et elle avait du mal à sourire. Tout le monde la prenait pour une petite peste idiote mais en cet instant, elle n’était pas assez stupide pour offrir au monde un visage éclatant de bonne humeur.
Alors qu’elle se passait de l’eau sur le visage, elle entendit un bruit derrière elle. La porte n’ayant pas de verrou, elle s’était empressée de s’habiller mais ne doutait pas du talent de Odd pour trouver des blagues douteuses. Elle se retourna, prête à soupirer, avant de réaliser qu’elle n’avait pas entendu la porte s’ouvrir. William la regardait pourtant, d’un air froid et dur.

- Je sais tout, la prévint-il d’une voix lugubre.

Sissi ouvrit la bouche mais déjà, il s’avançait, la main levée. Dans un réflexe, elle ferma les yeux et s’agenouilla en hurlant, les bras au-dessus de la tête. Elle entendit quelqu’un monter l’escalier en trombe et ouvrir la porte à la volée.

- Sissi ! Qu’est-ce qui se passe ?

La jeune fille leva la tête. William la regardait à nouveau sauf que cette fois, il semblait fou d’inquiétude. Elle tourna les yeux mais ils étaient seuls dans la salle de bain.

- Sissi ?
- Désolée, j’ai cru que… j’ai cru que tu allais me taper.
- Qu’est-ce que tu racontes ? Je viens de monter.

Sissi ne comprenait pas. Elle avait vu William lever la main sur elle. Mais elle avait entendu la cavalcade dans les escaliers et la porte s’ouvrir. Il n’aurait pas pu faire l’aller-retour si vite.

- Pardon, je… j’ai dû rêver. J’ai passé une mauvaise nuit. Halloween, c’est vraiment pas mon truc.
- Tu as cru que je voulais te frapper ?

William avait l’air si choqué que Sissi faillit se mettre à pleurer. Ce n’était pas sa faute si elle se sentait chaque jour un peu plus rongée par la culpabilité. Il n’y était pour rien si elle n’avait pas le courage d’avouer qu’elle lui préférait Ulrich et qu’elle restait avec lui parce qu’au fond, il était sympa.

- Désolée, je suis encore remuée par le film.

William la dévisagea encore plusieurs secondes avant de hausser les épaules et de lui sourire.

- Je t’ai sauvé des croissants. Viens manger, ça te fera du bien.

***


- Je comprends pas, il répond pas. Je t’assure Milie, j’ai essayé de l’appeler trois fois tu es certaine que tu n’as pas eu de nouvelles ? Mais non, je te prends pas pour une idiote, je m’inquiète, c’est tout. Il m’a raccroché au nez hier et depuis je n’ai plus de nouvelles, je pensais qu’il était avec toi. Oui, tu as raison, ça doit être une blague pour Halloween. Mais on était censé le fêter ensemble, donc ça me surprend encore plus. Et personne ne décroche sur son fixe. En plus, il… D’accord, d’accord, j’arrête de m’inquiéter. Appelle-moi si tu as de ses nouvelles. Bye.
---------------------------------------------------------------------

Edit : suite à des remontées en coulisses, les chapitres seront sans doutes plus espacés [jamais contents les gens, on met un an à sortir un chapitre, c'est trop long, on en sort deux par jour, c'est trop court Razz]
Kiss love !
  Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Sam 25 Nov 2017 18:29   Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens
Bonjour, bonsoir !

D’accord ce chapitre a été long à venir (j'ai halluciné en découvrant que ça faisait quand même plus d'un an, désolée, avec l'âge, le temps file beaucouuup trop vite !) mais le délai m’a permis de regarder les 13 premiers épisodes de CLE (ce qui fut parfois éprouvant) et relire les chapitres précédents. Certains passages ont été légèrement remodelés ou corrigés (personne n’a eu la bonté de me reprendre sur « un bureau long de deux mètres de large »…).
Bon en vrai, ça m'a pas pris un an tout ça, hein, vous comprendrez mieux quand arrivera Noël Mr. Green

Je rappelle que ne sont à prendre en compte pour cette fiction que les 13 premiers épisodes de CLE. Les deux derniers chapitres reprenaient l’épisode 14 et à partir de maintenant, tout ce qui aura pu se passer dans CLE et divergeant dans la fic est normal, pas la peine de me dire que c’est incohérent Mr. Green D’ailleurs, dans la grande bonté des lecteurs toujours, personne n’a signalé que dans l’épisode 12, le père de Laura lui faisait deux réflexions pouvant sous-entendre que sa mère n’était absolument pas morte. Bah, effacez de vos mémoires ces deux réflexions, si je ne vous l’avais pas dit, vous vous en seriez peut-être jamais souvenu (la preuve, je m’en souvenais pas moi Mr. Green).

J’ai aussi établi une chronologie (oui je sais, normalement j’aurais dû commencer par ça et patati et patata). Cette chronologie n'engage que moi. On sait bien que de base, les dates sont floues dans CL. Encore pire si on essaye de faire un lien entre CLE et CL que 10 ans semblent bel et bien séparés et non quelques mois.
Donc pour cette chronologie, je me suis basée sur les infos offertes par CLE, tout en cherchant dans la mesure du possible à coller à la back-story. Et surtout à être cohérente au sein de la fic elle-même (personne encore n'a tiqué sur le fait qu'Ulrich écoutait une chanson d'un film... pas encore sorti à l'époque ! De même, la séance cinéma de Aelita et Mathilde a été changée et tant mieux parce que le dessin animé a plus de sens Mr. Green).
Comme certains l'ont déjà deviné à travers un élément qu'on retrouve d’ailleurs dans ce chapitre, j'utilise également les Chronicles et m'appuie sur certains points présents dedans mais cette fic n'a pas pour but d'y être fidèle.
En bref, cette chronologie ne vise qu'à rendre la fic cohérente dans un ensemble qui ne l'est pas forcément Mr. Green A noter que pour être cohérent avec CLE et non CL, tous les événements « fixes » (Projet Carthage, départ d'Hopper sur Lyoko, etc...) seront décalés d'une dizaine d'années. A noter donc, si ça peut aider certains, que le chapitre 13 se termine le 25 octobre 2012. Le chapitre 14 (oui, oui, il arrive, j'ai bientôt fini) commence le même jour. En soi, ça n'a pas d'importance capitale.

Sur ce et pour ceux qui sont allés jusque là... Bonne lecture =)

Chapitre 14 : Alliances



- Philippe. Si j’avais cru te revoir un jour.
- Comme quoi tout arrive.

Malgré son ton hautain, Philippe Gauthier n’en menait pas large. Il avait réussi à être amené non menotté et surtout vivant jusqu’à Tyron, on pouvait dire que c’était un bon début. Mais il restait un long chemin à faire avant de retrouver la sérénité.

- Que me vaut le plaisir de ta visite, ancien collègue ?
- J’ai réalisé la portée de mon acte, je suis vieux et je n’ai plus l’âge de courir. Je veux retravailler avec vous.
- Et la vraie raison ?

Il fallait essayer mais Gauthier se doutait que Tyron ne serait pas dupe. Il allait donc devoir jouer franc-jeu.

- Sandra. Je ne pense pas passer pour un faible en disant qu’elle me fait peur. Si je reste seul, les Russes auront ma peau. En remettant mon cerveau à votre service, je peux leur échapper.
- Qui te dit que j’ai envie de te protéger ? Tu as considérablement ralenti nos recherches, tu nous as mis en relation délicate par rapport à nos homologues étrangers en faisant disparaître Laura et tu as le culot de revenir comme si de rien n’était. En voulant en plus que je m’oppose à des membres du G7 alors que je pourrais te livrer à eux en gage d’entente cordiale ?
- Vous oubliez un point contre moi.
- Je t’écoute.
- Je vous ai volé quelque chose.

Tyron leva un sourcil, signe que Gauthier avait touché sa curiosité.

- Développe.
- Je vous ai ramené mon larcin en guise de bonne foi. Il est dans la mallette que vos hommes m’ont confisquée. Allez-y, je vous en prie.

Tyron appuya sur un bouton de son téléphone.

- Anthéa.
- Oui ?
- La mallette a-t-elle été analysée ?
- Oui. Aucun mécanisme n’a été repéré. Elle ne semble contenir qu’une paire de gants.
- Amène-moi ça tout de suite.
- Votre épouse travaille toujours avec vous à ce que je vois.
- Alors, c’est toi qui as volé les gants ? Tu te rends compte j’espère que j’ai bien plus d’éléments qu’il ne m’en faut pour te tuer ? Mieux, je pourrais effectivement te livrer aux Russes, dès ce soir. Sandra saura s’y prendre mieux que moi pour te faire regretter tes actes.
- Nous avons passé l’âge de nous menacer comme des enfants. Si vous voulez me tuer, tuez-moi, mais n’oubliez pas que je peux vous être utile. J’ai élevé Laura, j’ai travaillé avec elle et…
- Et tu t’en es débarrassé dans un internat. J’avoue que ce point me laisse… perplexe.
- Elle arrive à un âge où ses souvenirs peuvent remonter. Elle commençait à poser des questions qu'elle n'était pas censée poser.
- Tu as utilisé les gants sur elle ? comprit Tyron non sans écarquiller les yeux.

Gauthier confirma d’un hochement de tête avant de préciser :

- Limiter sa présence avec moi me semblait la meilleure décision pour la maintenir dans un état satisfaisant. J'avais peur qu'utiliser à nouveau les gants puisse altérer ses capacités.
- Tu es un père admirable.

Gauthier ne réagit pas. Deux coups furent frappés à la porte et une femme aux cheveux roses entra. Elle aurait pu être belle si elle avait souri mais il se dégageait d’elle l’aura froide et concentrée des personnes dévouées à leur travail.

- Anthéa.
- Philippe.

De toute évidence, les deux se connaissaient mais Anthéa n'avait pas de temps à perdre avec des mondanités.

- Tiens, la mallette.

Tyron ne prit pas la peine de remercier sa femme qui quitta la pièce sans s’en offusquer. Une étincelle de victoire s’alluma dans les yeux du scientifique lorsqu’il récupéra les gants.

- C’est déjà une bonne chose que tu nous aies ramené ceci… Mais je ne suis pas certain que tu vailles la peine que je te prenne sous ma protection. S’opposer aux Russes et à Sandra n’a jamais été une option alléchante. Surtout maintenant que Sandra est venue récupérer la fille.
- Sans elle, je n’ai plus de valeur, c’est ça ? ricana malgré lui Gauthier.
- A première vue, exact. Mais malgré tout… Il se pourrait que j’aie un travail pour toi.
- Je vous écoute.
- Comme tu t’en doutes, nos tests sur Judas ont avancé. Nous avons développé ses systèmes de défense et nos virtualisations sont plus performantes que jamais. Nous arrivons désormais à envoyer plusieurs ninjas en même temps sans effets secondaires, ce qui n'a pas été sans mal.
- Où est le problème ?
- Il y a plusieurs semaines, nous avons mis au point un nouveau programme permettant à nos ninjas de se déplacer dans le Réseau. Nous avons envoyé une expédition l’explorer et nous n’avons pas tardé à découvrir un autre monde virtuel.
- Celui de Hopper ?
- Non, ça fait longtemps que nous connaissons celui-ci. Il ne nous intéressait pas jusqu’à présent parce que nous ne voulions pas être repérés.
- Par qui ? Hopper est porté disparu, il a toutes les chances d’être mort, nos agents devaient s’en charger. S’il refaisait surface, nous le saurions.
- Le monde virtuel sur lequel il travaillait est devenu une réalité. De l’extérieur, il est strictement identique à Judas. L’ennui, c’est que nous ne savons pas quand, ni même si c’est lui qui a terminé ses recherches ou si quelqu’un les a reprises. Nous n’avons pas voulu prendre le risque d’être repérés en lançant une expédition et nous l’avons donc laissé de côté pendant des années… jusqu’à maintenant.
- Pourquoi jusqu’à maintenant ?
- Plus tard. C’est de l’autre monde virtuel que je veux te parler. Au début, nous n’arrivions pas à y mettre les pieds. D’après nos hommes, le « tuyau » entre la Mer Numérique et le monde virtuel était barré par des serpents géants à leur approche. Nous avons cependant réussi à avancer en mettant au point un autre programme qui rend nos ninjas indétectables. Ils ont pu se rendre sur ce nouveau monde virtuel, composé principalement de glace et de neige mais c’est là que nous avons rencontré un problème. L’un de nos agents y a laissé sa peau.

Pas si indétectables que ça, songea Gauthier avant de demander :

- Comment est-ce possible ? J’étais là pour les premiers tests, j’ai vu qu’une personne qui mourait sur Judas revenait bien en vie sur Terre.
- C’est ce que nous pensions aussi mais visiblement, ce monde, que nous avons baptisé Hoth, n’est pas soumis aux mêmes règles. Les ninjas sont formels : ils se sont fait attaquer par une sorte de créature de fumée noire. L’un d’eux s’est presque fait décapiter. Il a saigné, alors que c’est virtuellement impossible, et il était mort, mais sans blessure physique, quand il est sorti du scanner. Nous n’avons toujours pas d’explications.
- Vous voulez que je bosse là-dessus ?
- Exactement. Je veux que tu te coordonnes avec l’équipe de recherche. Tu es un de nos rares agents à connaître l’existence du Supercalculateur, tu verras peut-être des choses qui nous ont échappées.
- Vous me cachez quelque chose.
- Brillant. Tu ne m’as pas posé la question que j’attendais.

Gauthier réfléchit à peine.

- Vous soupçonnez les Russes d’être à l’origine de Hoth ?
- Qui d’autre ? L’ennui, c’est que nous ne pouvons pas les accuser directement sans nous dévoiler. La situation est donc extrêmement délicate, d’autant plus que Sandra est sur le point de ramener Laura en Russie. Ils vont prendre un avantage considérable sur nous, avantage que nous ne pouvons pas nous permettre de leur laisser.
- Et les autres membres du G7 ? Ont-ils des soupçons ?
- Nous pensons qu’ils ont aussi accès à des Supercalculateurs mais nous n’avons pas de preuve. Celui de Hopper est le seul censé exister. La Chine considère que c’est un mythe et qu’aucun test concret n’a encore été fait sur des mondes virtuels. Nous nous gardons bien de démentir. Personne au sein du G7 ne connaît mes liens avec Hopper à part peut-être mon homologue russe. Mais comme tout le monde ignore ce que les autres savent, nous ne pouvons que supposer et profiter du fait qu’il ne fait rien jouer contre nous. Je passe pour l’idiot du G7 et je n’ai pas l’intention de compromettre cette couverture. Je suis bien plus efficace et menaçant tant qu’ils me sous-estiment.

Gauthier hocha la tête.

- Rien n’exclut que chaque nation du G7 ait son propre monde alors ?
- Rien, effectivement. Nous jouons un jeu dangereux en cachant Judas aux autres mais nous devons rester maîtres de nos recherches.
- Et concernant… Lyoko, c’est ça ?
- C’était le nom qu’Hopper avait choisi, j’imagine que si c’est bien lui qui a fini ses travaux, il l’a baptisé ainsi.
- Concernant Lyoko, vous semblez ne plus le laisser de côté. Pourquoi ?
- Nous avons récemment eu des incursions sur Judas. Des avatars ont réussi à pénétrer dans le cœur du système et ont tenté de voler des informations à plusieurs reprises. Nos défenses ont été efficaces et nous avons même pu mener une contre-attaque aujourd’hui en nous introduisant à notre tour chez eux. Nous attendons que la balise posée à leur insu par notre ninja nous donne des renseignements. Cela ne devrait plus être long.
- Aux dernières nouvelles, Hopper avait fui en Allemagne et n'était pas resté en France comme nous le pensions. Si son Supercalculateur est là-bas, vous pensez avoir des chances de vous y rendre sans attirer l'attention du G7 ?
- Nous aviserons une fois les renseignements reçus. Il n'est pas à exclure que les dernières données qu'on ait sur Hopper soient erronées.

Le téléphone sonna avant que Gauthier ait pu demander des précisions. Il hésita un instant à sortir mais Tyron avait déjà décroché.

- Oui ?
- Elles sont arrivées.
- Parfait.

Tyron reposa le combiné avant de composer un autre numéro.

- Anthéa.
- Chérie, est-ce que tu peux me dire où tu es ?
- Au laboratoire de chimie.
- Sois gentille, attends-moi là-bas. N’en sors pas avant que je te rejoigne. C’est important.
- D’accord.

Tyron raccrocha.

- Viens avec moi, nous allons accueillir cette chère Laura ensemble.
- Je vous demande pardon ?
- Sandra vient de l’amener. Notre but est de réussir à la garder le plus longtemps possible avant qu’elles ne repartent en Russie.

Gauthier comprit soudain pourquoi Tyron ne voulait pas voir Anthéa arriver ou déambuler dans les couloirs. Il laissa toutefois ce détail de côté pour avertir :

- Sandra s’y opposera. Elle ne quittera pas Laura d’une semelle et si elle découvre que vous avez un Supercalculateur, nous sommes tous morts. Elle mettra hors-service ce campus, préviendra son boss qui en parlera au G7 et…
- Et nous aurons alors la possibilité de révéler à notre tour l’existence de Hoth. Le G7 décidera sûrement d’œuvrer à sa destruction, ce qui obligera les Russes à se démasquer s’ils veulent protéger leur bébé.
- Et si Hoth n’est pas le fruit de leur labeur ?
- Il l’est, nous en sommes quasi-certains.
- Dans tous les cas, comment comptez-vous utiliser Laura sans éveiller les soupçons de Sandra ? D’ailleurs, pendant que j’y pense, ne l’appelez pas Sandra mais Emma, sinon, Laura va se poser des questions.

Tyron hocha la tête avant de répondre :

- C’est l’adolescente qui nous intéresse, pas le cerveau. Sandra ne comprendra rien à ce que nous demanderons à Laura. Elle ne voudra peut-être même pas rester avec elle. Crois-moi, elle déteste cette gamine.
- Excusez-moi, insista Gauthier alors qu’ils quittaient la pièce, mais en quoi Laura en tant qu’adolescente peut être plus utile que son cerveau ?
- Oh, j’ai oublié ce détail ? s’étonna faussement Tyron avec un sourire carnassier. Disons que tu as bien choisi l’internat de ta fille. L’un des avatars qui a attaqué Judas était une gamine aux cheveux roses.

Gauthier écarquilla les yeux. Il ne pouvait pas avoir bien compris.

- La fille d’Hopper est vivante. Si son père l’est aussi, elle nous y conduira. Et j'ai bon espoir qu'elle suive ses cours dans le lycée où enseignait son père. Ce même lycée où étudie Laura. Qui sait... Peut-être qu’elles se connaissent.

***


Laura avait du mal à croire qu’elle était assise à l’arrière d’une limousine. Sandra, bien que plus habituée au phénomène, n’y croyait pas non plus. Tyron était encore plus stupide qu’il n’y paraissait s’il pensait pouvoir impressionner Laura avec une voiture. Il semblait avoir oublié qu’elle était un cerveau, pas un cobaye. Elle en tout cas n’était pas prête de l’oublier, il suffisait de voir cette pauvre gamine recroquevillée comme une souris sur les sièges en cuir trop grands pour elle et conservant pourtant un air hautain.

- Tu sembles connaître des gens hauts placés.
- Hum.

Sandra était trop contrariée pour faire la discussion. Si la limousine les attendait déjà lorsqu’elles étaient arrivées chez Gauthier, lui en revanche avait disparu. Pendant que Laura s’empressait de préparer ses bagages, Sandra avait parcouru chaque pièce de la maison, son agacement croissant à chaque pas. Ce lâche avait fui. Son gros cerveau ne lui avait pas permis de comprendre qu’elle n’en serait que plus minutieuse. Elle qui comptait le tuer vite allait finalement prendre son temps. Il allait payer pour chaque seconde d’inquiétude qu’il avait causée au boss.

Minute papillon, tu écoutes ce qu’Adrian a à te dire et tu retournes en Russie avec Laura. Tu régleras son compte à Gauthier plus tard.

Concentrée sur la priorisation de ses actions, Sandra perdit quelques secondes son masque neutre lorsqu’elle découvrit l’objet de sa haine debout à côté de Tyron, devant le portail de son domaine. Elle se reprit rapidement, le temps de se demander lequel elle détestait le plus. Déjà, le père de Laura s’avançait vers elles.

- Ma chérie ! Tu as aimé la voiture ?

Laura le regarda sans comprendre. Elle ne l’avait jamais vu aussi nerveux.

- Je te présente mon ami, le professeur Tyron.

Laura serra poliment la main dudit professeur en espérant que son visage restait aussi serein que possible.
Tyron.
Elle n’avait pas beaucoup entendu ce nom, Jérémie et les autres ne lui faisant jamais de grands discours explicatifs, mais elle savait qu’il s’agissait a priori du créateur du Cortex. Décidément, il y avait trop de coïncidences dans cette histoire.
Seule Sandra perçut le léger trouble de Laura mais elle mit cela sur un effet secondaire des gants. L’adolescente connaissait déjà Tyron, seulement, son cher père le lui avait fait oublier. Vérifier ce fait permettait à Sandra de s’assurer que Gauthier ne lui avait, en partie du moins, pas menti lors de leur premier entretien.

- Emma, ravi de vous revoir.

Laura retint un sourire. Même un idiot aurait compris que l’affirmation de Tyron était un pur mensonge. Il était tout, sauf ravi de voir sa mère.

- Également.
- Alors, Laura, ton père m’a dit que tu étais une jeune physicienne pleine de promesses ?

Laura haussa vaguement les épaules, occupée à regarder autour d’elle. Elle suivait Tyron sur une large allée pavée menant à un grand bâtiment avec plusieurs annexes. On aurait dit un campus universitaire, il y avait même un gymnase muni de larges baies vitrées où des jeunes d’une vingtaine d’années semblaient s’entraîner au combat avec des bâtons.

- Qu’est-ce que tu veux faire plus tard ?

Sandra leva les yeux au ciel et son agacement ne faisait que refléter celui de Laura qui répondit d’un ton hautain :

- Je ne sais pas, je pense être aussi douée en physique qu’en informatique et en maths, j’aime me laisser des possibilités variées.
- Sois plus agréable avec le professeur Tyron, la reprit son père. Comme tu peux le constater, il dirige un centre scientifique important où tu pourrais apprendre beaucoup.
- Je croyais que de toute façon, je partais en Russie après-demain ?

L’atmosphère sembla se rafraîchir tandis que Sandra et Tyron se fusillaient du regard.

Très crédibles, les vieux amis, songea Laura, déjà convaincue que ce Tyron avait joué un rôle dans la disparition de sa mère.

- Bien sûr, c’est le programme. Mais en deux jours qui sait, nous t’aurons peut-être donné envie de rester !

Sandra allait répondre lorsqu’ils entrèrent dans un laboratoire. Elle capta presque aussitôt le regard de l’espion, assis devant un ordinateur, et préféra tenir sa langue. Autant laisser Tyron dans l’illusion qu’il contrôlait quelque chose.
Elle grimaça sous la vivacité des néons pendant que le professeur expliquait :

- Nos recherches sont variées, nous travaillons sur des programmes informatiques pour des entreprises multinationales mais également sur des nanotechnologies ou encore des molécule organiques à visée pharmaceutiques. Qu’est-ce qui t’intéresserait le plus ?

Laura se tourna vers Sandra qui haussa à son tour les épaules.

- En Russie, nous aurons besoin de tes capacités informatiques, fais peut-être quelque chose de différent ici.

Gauthier eut l’impression de voir scintiller une lueur de victoire dans les yeux de Tyron. Laura sourit en réutilisant son mensonge désormais habituel :

- Je dois rendre un exposé sur la nanotechnologie au lycée, vous pourriez sans doute m’apprendre des choses.
- Mais bien sûr ! Fantastique ! Ton père ne m’a même pas précisé à quelle école tu allais.
- Lycée Kadic, à Paris.
- Il parait que c’est une très bonne institution. Tu t’y plais ?
- Beaucoup.
- Je meurs de soif, je vais chercher une bouteille en cuisine, intervint Sandra. Je te ramène quelque chose, ma chérie ?
- Une bouteille d’eau aussi.

Gauthier eut envie de soupirer. Sur ce coup, la légendaire agent russe ne faisait pas honneur à sa réputation. Elle laissait Laura seule avec Tyron sans se soucier une seule seconde des conséquences.
Mais alors que les deux hommes s’éloignaient avec l’adolescente, l’espion se leva et suivit Sandra jusqu’aux cuisines.

- Fais vite, je ne veux pas laisser Laura avec ces deux abrutis.
- Sage précaution, d’autant plus que j’ai la preuve de ce que le boss soupçonnait depuis longtemps sans trop y croire : les Français ont un Supercalculateur.
- La seule chose surprenante dans cette annonce, c’est que tu ne l’aies pas découvert plus tôt.
- Tyron est moins stupide qu’il n’y parait. Il fait des recherches dans plusieurs domaines poussés de l’informatique et de la physique. La plupart des scientifiques présents sur ce site font un travail fractionné, ils n’ont qu’une vue floue ou atrophiée du travail final et des dizaines de projets se développent tous les trimestres. D’après ce que j’ai compris, très peu ont connaissance de l’existence du Supercalculateur. Pour être franc, je n’aurais peut-être pas eu de certitude si je n’avais pas eu l’occasion moi-même de travailler près du sujet chez nous.
- Arrête, ne fais pas baisser le peu d’estime que j’ai de toi.
- Le boss t’avait-il donné des consignes en cas de découverte de ce type ?
- Elles dataient d’avant les problèmes sur Caldin. Je ne sais pas si elles sont encore d’actualité. J’espère que non.
- Pourquoi ?
- J’avais pour ordre de rester ici pour vérifier l’avancement d’un éventuel monde virtuel. L’idée ne m’enchante pas. J’aimerais rentrer et il y a fort à parier que le boss me voudra à la base.
- De toute façon, ma mission ici n’était pas liée à une découverte particulière, je suis sur le terrain pour une durée indéterminée. Nous n’avons pas besoin d’être deux sur le coup.
- Je vais contacter le boss. Dans tous les cas, ma mission principale reste d’emmener Laura en Russie. Je ne sais pas ce que lui veulent les deux crapauds mais je ne compte pas la laisser trop longtemps entre leurs mains.
- Je m’occupe de contacter le boss. Il te fera suivre ses instructions.
- Je n’en doute pas.

Sandra attrapa deux bouteilles d’eau et quitta la pièce. Alors qu’elle dépassait un couloir perpendiculaire, un éclat rose vif attira son attention et elle fit demi-tour. Elle eut juste le temps d'apercevoir brièvement une femme entrer dans une pièce. Elle eut l’impression qu’une décharge électrique lui traversait le crâne.

- Sandra ? demanda sans émotion l’espion lorsqu’elle plaqua les mains sur ses tempes.
- Rien.

La russe reprenait déjà ses esprits mais une image flotta quelques secondes devant ses yeux. Un visage lisse, au regard doux, illuminé par un sourire encourageant, encadré par des cheveux d’un rose éclatant. Un visage qu’elle ne se souvenait pas avoir déjà vu mais qui lui semblait familier.

- Ce n’est pas le moment d’être malade. Laura ne doit pas être utilisée par Tyron.
- Je sais. J’y veillerai.

***


Laura ne savait pas quel comportement adopter. Son père et Tyron lui présentaient les locaux avec chaleur et enthousiasme, pourtant, elle ne pouvait s’empêcher de conserver un air factice, un sourire poli et calme, loin de l’agitation qui bousculait son cerveau.
Que faisait-elle ici ? Qu’attendait-on d’elle ? Sa mère avait bien précisé que samedi, elles partaient en Russie. A quoi lui servait de découvrir tout ça puisqu’elle n’en profiterait au maximum que deux jours ? Pourquoi Tyron semblait si sûr de la faire rester ? Emma lui avait parlé d’un ordinateur quantique, qu’avait-il de mieux à lui offrir ?
Depuis plusieurs semaines, elle vivait dans la crainte que Jérémie mette sa menace à exécution. Elle avait très bien compris ses sous-entendus lorsqu’Aelita s’était inquiétée d’un possible retour vers le passé pour le nouveau Lyoko-Guerrier, au cas où celui-ci ne ferait pas l’affaire. Elle avait très bien compris qu’en amenant son père à l’usine, elle avait rendu vitale pour Jérémie la nécessité de remonter le temps d'une manière dont elle pourrait être impactée. Elle ne pouvait pas attendre les bras croisés qu’il trouve une solution. Aller en Russie était sa meilleure chance pour travailler sur un autre ordinateur quantique et développer un autre système de virtualisation. Une fois enregistrée dans cet ordinateur, elle n’aurait plus rien à craindre, du moins l’espérait-elle. Elle manquait encore cruellement de données sur ce problème.
Elle regarda à nouveau Tyron. S’il était bien à l’origine du Cortex, il devait également posséder un ordinateur quantique. À l’image d’Emma, voulait-il qu’elle travaille dessus ? Il ne pouvait quand même pas être si emballé par un exposé scolaire, il ne pouvait pas être aussi bête que ce qu’il laissait paraître. Comment pouvait-on s’exprimer autant comme un imbécile heureux et diriger des cerveaux aussi brillants ?

- Alors qu’en penses-tu, ma fille ?
- C’est fascinant, Papa.
- Et tu n’as encore rien vu, le professeur a décidé de te mettre dans la confidence d’un secret gigantesque.

Tyron venait de s’arrêter devant une porte barrée par une large pancarte « personnel autorisé de niveau 5, défense d’entrer ». Il avait perdu son air jovial et Laura perçut enfin en lui une forme d’intelligence froide qui lui fit presque peur.

- Laura, tu dois me promettre de ne rien dire à ta mère. Comme elle te l’a peut-être expliqué, elle travaille pour la Russie et nos travaux sont confidentiels. Nous ne tenons pas à ce qu’ils tombent entre de mauvaises mains.
- Je comprends.

Tyron la jaugea quelques secondes du regard avant de passer son badge dans une machine. Lorsque la porte s'ouvrit, Laura n’eut besoin que d'un regard pour sentir son cœur tomber dans sa poitrine.
Une tour de deux mètres de haut, noire et parcourue de flux dorés, trônait au centre de la pièce. Deux bureaux étaient disposés à sa gauche, occupés par deux ordinateurs sur lesquels travaillaient des hommes à lunettes. Et à droite, il y avait une réplique exacte de l’ordinateur quantique de Jérémie.
Laura avait trouvé l’origine du Cortex.
Un bref instant, elle se sentit jubiler et imagina la tête que ferait cette pimbêche d’Aelita si elle l’appelait pour le lui annoncer.

- Tu sais sans doute de quoi il s’agit ? demanda Tyron alors que la porte se refermait derrière eux.

Le cerveau de Laura tournait à pleine vitesse. Si elle était trop affirmative, elle risquait d’en dire trop. Si elle jouait trop l’ignorante, son père risquait de ne pas comprendre pourquoi, face à Emma, elle semblait maîtriser le sujet.

- C’est un ordinateur quantique ?
- Exactement. Nous l’utilisons pour développer un monde virtuel que nous avons appelé Judas.

Ça sonne mieux que Cortex, c’est clair.

- Dans quel but ?

C’était une question qu’elle n’avait jamais vraiment posée à Jérémie. Sur Lyoko, on désactivait les tours que XANA activait. Mais il y avait forcément plus de possibilités.

- Il est encore trop tôt pour t'en parler. D'ailleurs, ce n'est pas vraiment de ça que je voulais que l'on discute mais c'est un moyen pour moi de m'assurer que je peux te faire confiance.

Laura comprit le piège. Si elle en parlait à sa mère, Tyron risquait de les malmener toutes les deux et elle ne voulait pas courir ce danger, d'autant plus que cela coupait toutes ses chances d'aller en Russie où elle avait la certitude de faire avancer ses propres recherches. Mais si elle n'en parlait pas à sa mère, elle risquait de perdre sa confiance et de ne jamais aller en Russie. Elle allait devoir jouer serré.
Tyron eut un léger sourire, comme s'il suivait le raisonnement de la jeune fille face à lui. Sentant qu'il avait l'avantage, il attrapa une tablette posée sur un bureau et pianota quelques secondes dessus.

- Par le plus curieux des hasards, connaîtrais-tu cette personne ?

Laura eut le bon sens de ne pas regarder tout de suite la tablette, feignant d'être captivée par le Supercalculateur. Cela lui laissa le temps de perfectionner son masque d'impassibilité. Quand ses yeux se posèrent sur le dessin affiché à l'écran, elle put donc répondre d'une voix très neutre, avec un petit sourire naïf :

- Désolée, ça ne me dit rien. Des cheveux roses comme ça, je m'en serais souvenue !

***


Laura était allongée sur un lit qu'elle n'arrivait pas à considérer comme le sien. Elle n'avait rien à faire ici.
À quel point sa venue avait-elle été préméditée ? Les vacances de la Toussaint commençaient dans deux jours. Même si le proviseur avait fait preuve d'une grande compréhension face aux arguments de sa mère pour lui faire manquer les derniers cours, Laura avait préféré être vague devant Jérémie et elle sentait qu'elle avait bien fait.
Il y avait peu de chances qu'elle soit de retour au lycée pour la rentrée. Mais pendant les deux prochaines semaines, personne ne s'inquiéterait de ne pas la voir.
C'était simple et brillant.
Laura resserra la couverture sur elle. Elle se sentait nue, privée de sa tablette et de son portable « pour des raisons évidentes de confidentialité et de sécurité ». Elle s'était bien gardé de préciser que sa mère avait conservé le sien mais elle allait avoir d'autant plus de mal à jouer sur les deux tableaux.
Elle avait beau ne pas être pleinement intégrée à la bande de Belpois, elle ne pouvait pas simplement les vendre dès maintenant sans état d'âme. Elle ignorait encore tout des véritables intentions de Tyron et elle avait fini par bien sentir qu'il était plus fin et plus dangereux qu'il n'en avait l'air. Plus qu'à ses camarades de classe, elle avait peur qu'il s'en prenne à leur Supercalculateur et elle y tenait trop pour le laisser faire.
Oui, mieux valait faire croire à Tyron qu'elle ne savait rien d'autre que ce qu'il lui apprendrait. Il serait toujours temps de voir ensuite à quel point elle devait prévenir les Lyoko-Guerriers de ses activités. Peut-être se faisait-elle des idées. Peut-être que les deux groupes allaient suivre leur vie chacun de leur côté. Elle n'y croyait pas mais il était trop tôt pour se faire des films. Surtout que l'arrivée de sa mère, elle aussi dotée d'un ordinateur quantique, aurait sûrement un impact à un moment ou un autre.
Un sourire naquit sur les lèvres de Laura et elle dut le reconnaître : ce qui l'empêchait de dormir n'était pas la peur mais l'excitation.

***


Elle était assise sur une chaise, dans une pièce sombre. Un homme lui tournait le dos, debout devant une fenêtre battue par une pluie torrentielle. Elle n'aimait pas cet homme mais ce n'était pas lui qui importait. Celui qui importait, c'était son ami, effondré dans un fauteuil à côté d'elle. Il gardait le visage enfoui dans ses mains et si elle avait passé un bras autour de ses épaules, elle n'osait pas parler. Aucune marque de soutien ne serait suffisante, elle le savait. Elle-même ne retenait pas ses larmes. Elle se sentait brisée à l'intérieur.
L'homme debout devant la fenêtre se retourna.
Tyron.

- Ils ne s'en sortiront pas comme ça, Hopper. Je vous le garantis.
- Anthéa...

Elle frémit. Son ami avait prononcé ce seul nom d'une voix rauque, désespérée. Il leva les yeux vers elle et derrière ses lunettes à verres épais, elle lut la même détresse que celle qui ravageait son cœur.

- Il faut la retrouver.

Sandra se réveilla en sursaut. Pendant quelques secondes, elle haleta sur son lit, incapable de bouger. Une angoisse terrible lui enserrait la gorge et lui rongeait le ventre. Réalisant que c'était son portable qui l'avait réveillée, elle s'en empara d'une main tremblante. Un coup d’œil à l'écran lui confirma qu'elle devait se reprendre sur-le-champ.
Sa voix frissonna à peine lorsqu'elle répondit.

- Bonsoir, boss.
- J'ai de nouvelles instructions pour toi. Adrian m'a mis au courant pour le Supercalculateur des Français. Profite d'être avec Laura pour recueillir un maximum de données dessus. Je te veux en Russie dans quatre semaines. Envoie-moi un rapport tous les soirs par la voie habituelle.
- Très bien.

Sandra resta un bon moment avec le téléphone collé à l'oreille, une nouvelle fois tétanisée. Depuis combien de temps n'avait-elle pas rêvé ? Depuis combien de temps autre chose qu'un serpent ne lui avait pas fait si peur ?
L'angoisse monta encore. Elle avait envie d'être sur Caldin. Elle ne pensait plus à la fumée noire, plus à Benji, plus au boss. Elle ne voyait que les grandes étendues enneigées où elle pouvait goûter à sa solitude, où elle se sentait chez elle.

Anthéa.

Le prénom résonnait dans sa tête, comme s'il rebondissait sur des murs en y cherchant une encoche où s'insérer. Elle avait beau fouiller ses souvenirs, elle ne connaissait personne de ce nom. Alors pourquoi lui était-il si familier ? Pourquoi lui donnait-il envie de sourire, de pleurer et de hurler ?
Elle se rallongea, le bras pendant en dehors du lit. Et ce Hopper aux cheveux hirsutes et à la barbe mal taillée ? Cet homme brisé qui avait tant l'air de compter sur elle. Qui était-il ?
Il ne lui fallut guère plus d'une dizaine de minutes pour retrouver ses esprits et écarter son cauchemar. Après tous, les gens rêvaient souvent de personnes qu'ils ne connaissaient pas. La seule vraie interrogation était pourquoi ne rêvait-elle pas de quelqu'un de plus agréable que Tyron ?
Au réveil, elle avait chassé ses questions.
Ne restait qu'une pointe de tristesse fichée dans son cœur, aussi brûlante qu'inexplicable.
  Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Dim 09 Oct 2016 18:17   Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens
Bon on ne commentera pas le délai entre 2 chapitres, ça s’est fait. J’ai plein d’excuses pourtant si, si, j’vous jure (107 heures sur L4D2, 40 heures de vaisselle, 1 semaine à attendre que mon bêta lecteur rattrape son retard de chapitres pour au final passer outre, 1h37 au ciné pour « Victoria » qui n'est absolument pas une comédie, 15 minutes dans les critiques d'épisodes d'Icer en arrivant sur le forum, 20 minutes de balisage et 10 minutes à relire en étant persuadée qu'il y aura comme d'hab des erreurs de balisage Mr. Green ).

Pour ceux qui ont lu le chapitre précédent mais n’ont pas vu l’épisode 14… Pff ça me fait soupirer rien que d’y repenser. Le dialogue est grosso mollo similaire mais la scène se passe dans la forêt (déjà pourquoi, hein, sachant qu’Ulrich est dans sa chambre de base) et à la fin, ils s’annoncent mutuellement qu’ils sont la chose la plus importante l’un dans la vie de l’autre, ils se regardent avec des sourires niais ET ILS RESTENT PLANTES COMME DES C***. Non mais sérieusement, on parle de lycéens qui se tournent autour depuis des années, qui commencent enfin à se bouger le fion, et c’est à ça qu’on a le droit ????? Nan franchement, c’était trop, c’était groumph.

Voilà ceci dit, répondons aux commentaires ! Je ne sais pas trop quoi dire mais vos compliments me font plaisir :$
Spoiler


Donc voilà le chapitre 13. Il se déroule selon deux axes entremêlés se passant globalement en même temps que le chapitre 12 (le début du chapitre est un léger retour arrière) : la partie virtuelle du 14 (ceux l'ayant vu trouveront facilement la référence trollesque) et des avancées dans l’arc Sandra / Laura. Bonne lecture et à dans quelques mois haha.

Chapitre 13 : Les serpents


- Si tu as envie de parler, je suis là.

La douce voix d’Aelita n’eut aucun impact sur Yumi qui garda son air renfrogné. Aux commandes du Megapod, Odd lui lança :

- Faut vraiment que tu règles ton problème avec Ulrich, hein !
- Tu n’aides pas.

Le silence s’installa jusqu’à ce qu’ils atteignent la porte menant au centre névralgique du Cortex. Alors qu’elle s’ouvrait sous les paumes d’Aelita, William lança :

- Tu m’apprendras un jour ?

La jeune fille se retint de lever les yeux au ciel. Quand il ajouta « C’est le calme avant la tempête », ce fut à Yumi de soupirer.
Décidément, c’était la journée des abrutis.
Elle repensa à Ulrich, sans doute enfermé dans sa chambre et sa morosité. Non, il valait mieux qu’elle n’y repense pas. Dommage que la mission soit si simple. S’ils avaient dû affronter des hordes de monstres au péril de leur vie, elle aurait pu être davantage concentrée. Là, il suffisait d’insérer un leurre, puis un fouineur dans l’interface du Cortex pour essayer de récupérer des données susceptibles de localiser Tyron. D’accord, les ninjas n’allaient pas leur faciliter l’affaire mais cette mission était banale à pleurer.

- Vas-y, Aelita, insère le leurre.

***


Assis sur son canapé, Philippe Gauthier profitait de l’absence de Sandra pour évaluer les options qui s’offraient à lui.
Option numéro 1 : se servir un ou deux verres de scotch. Celle-ci ayant l’avantage d’être cumulable avec les autres, il commença par là.
Option numéro 2 : la fuite. Mais cela entraînait d’innombrables questions : fuir où ? Avec ou sans Laura ? Comment être certain que le G7 ne le retrouverait pas à nouveau ? Ou plutôt, combien de temps mettraient-ils à le retrouver ? Difficile de croire qu’on lui laisserait la vie sauve une nouvelle fois. De plus, cela signifiait poursuivre ses recherches dans une clandestinité accrue, avec des moyens diminués. Non, il ne pouvait s’y résoudre.
Option numéro 3 : pactiser avec Sandra pour se remettre dans les petits papiers de la Russie. Non, avec cette vipère, on ne pouvait passer que des contrats se terminant dans le sang. Et puis, qu’avait-il à lui offrir maintenant qu’elle avait Laura ?
Option numéro 4 : retourner travailler pour les français qui, certes, risquaient de le faire mettre dehors, mais avaient au moins le mérite d’haïr Sandra. Entre un employé renégat et une machine à tuer, Tyron n’hésiterait sans doute pas sur la personne à soutenir, même s’il semblait actuellement travailler avec Sandra.
L’option numéro 4 était donc la plus tentante mais Philippe n’arrivait pas à se décider. D’abord parce que rien ne lui garantissait qu’il serait accueilli favorablement chez ses anciens collègues. En admettant que ce soit le cas, il pouvait tout de même se faire vendre aux Russes et là, il ne donnait pas cher de sa peau, ceux-ci ayant moins la notion de pardon.
Philippe soupira. Il avait fait une belle erreur le jour où il avait enlevé Laura à Tyron, qui avait déjà eu un mal fou à convaincre les Russes de la lui « prêter ». Un œil naïf aurait pu penser qu’il n’y avait dans cet acte presque suicidaire que de l’amour paternel. Mais c’était plus le cerveau que la fille qui intéressait Philippe. Il avait été payé par les Américains pour ralentir les recherches françaises et ne pas permettre à celles des russes de reprendre. Il avait donc trahi ses propres compatriotes avant de tourner le dos à toute forme de hiérarchie. Pendant de longues et tranquilles années, il avait pu accélérer son travail grâce aux coups de main de sa fille.
L’expression « coups de main » le fit se lever jusqu’à une commode située dans l’entrée. Il ouvrit l’avant-dernier tiroir et passa sa paume sur le haut de la case. Du bout des doigts, il caressa une matière semblable à du caoutchouc, contrastant avec le bois. Ces gants lui avaient été bien utiles mais il doutait de pouvoir s’en resservir aujourd’hui. Du moins pas sur Sandra, elle n’avait plus rien de la jeune femme douce et travailleuse d’autrefois. Aujourd’hui, ce n’était plus qu’une machine de guerre impitoyable, entrainée à tuer sans poser de questions et surtout sans hésiter. Elle serait impossible à surprendre.
Il détacha cependant les deux gants beiges du haut du tiroir et retourna dans la salle à manger. Il ôta les coussins du canapé pour en tirer une petite mallette dans laquelle il posa précautionneusement les gants. Puis il resta assis dans son fauteuil à fixer le téléphone jusqu’à ce que son verre soit vide. Alors seulement il se releva.

- Allo ?
- Philippe Gauthier. Je voudrais parler à Tyron.

***


- Ta garde, Yumi, ta garde !
- Yumi, concentre-toi.

La japonaise serra les dents. Jérémie en avait des bonnes ! Comment pouvait-elle se concentrer alors que chacune de ses pensées était tournée vers Ulrich ? Elle en avait marre des ninjas, marre de Lyoko, marre d’être là à se battre pour elle ne savait plus quelle cause. Elle n’avait plus aucune curiosité. Elle se moquait de savoir qui était Tyron, quelles étaient ses intentions, où il vivait, et au diable son lien avec Hopper ! Elle voulait bien aider Aelita à décrypter son passé et celui de sa famille mais pas au prix de son propre avenir. Après tout, elle ne lui devait rien. Ce n’était pas elle qui avait rallumé le Supercalculateur, elle avait d’ailleurs toujours été la première à vouloir l’éteindre. XANA n’était plus leur affaire. Qu’il prenne ses codes s’il le voulait et qu’il la laisse tranquille !
Elle n’était pas comme Odd qui exultait d’avoir mitraillé un ninja. Elle n’était pas comme William qui semblait heureux aussi derrière sa concentration. Elle n’était pas comme Jérémie qui pouvait allier aventure et vie de couple.
Elle en avait assez de se battre.

- Jérémie, dévirtualise-moi !

Elle savait déjà que son ami ne l’écouterait pas. Aussi n’hésita-t-elle pas à ouvrir les bras pour se laisser volontiers trancher en deux.

- Bah voyons, soupira William.

***


Sandra sourit.
Quoi de mieux pour endormir les enfants que de belles histoires ? Comme celle d’une mère tant regrettée qui ressurgit avec de belles promesses et de touchantes attentions. Elle ne se serait pas crue taillée pour le rôle mais au final, elle se trouvait douée.
Elle avait demandé à sa « fille » ce qu’elle voulait faire avant de quitter Paris, bonne mère dévouée qu’elle était. Elle ne s’était pas attendue à finir à la Ménagerie du Jardin des Plantes mais pourquoi pas après tout. Si ça pouvait conforter Laura dans l’idée qu’elle avait retrouvé sa Maman aimante…
La mission était simple finalement. Si simple qu’une question lui vint à l’esprit.
Pourquoi le boss avait-il besoin de Laura ?
Après tout, il avait commencé à la rechercher avant que le virus apparaisse, il n’y avait donc pas de lien. Cela faisait plusieurs mois que Sandra se rendait sur Caldin, sans l’avoir jamais vraiment exploré. Le boss avait sûrement de grands projets. Elle eut soudain un pressentiment. Et si Laura était vouée à la remplacer ? Non, impossible, elle n’avait pas du tout un profil de cobaye. C’était un cerveau, le boss ne l’avait jamais caché.
Une seconde réflexion s’imposa dans l’esprit de Sandra. Depuis combien de temps ne s’était-elle pas posée autant de questions ? D’habitude, elle obéissait aux ordres, sans s’interroger sur le but recherché. Mais Laura l’intriguait. Pourquoi tout le monde voulait-il l’avoir sous la main ? Gauthier l’avait arrachée à l’institut de Tyron pour ensuite l’abandonner dans un internat. Pourquoi ? Avait-il obtenu ce qu’il voulait d’elle ? Quoi ?

- J’ai gardé le meilleur pour la fin, signala timidement Laura.

Sandra la regarda et une autre question naquit dans son esprit.
Pourquoi la détestait-elle autant ?
Quelques semaines plus tôt, elle se serait moquée d’elle-même face à une telle interrogation. Laura, c’était l’épine dans son pied, le farfadet agaçant à cause de qui ses projets n’aboutissaient pas. Du moins, c’était ce que répétait le boss.
Mais elle, personnellement, qu’avait-elle à reprocher à la jeune fille ? Pourquoi était-elle incapable de se souvenir de l’origine de sa haine ? Il y avait bien dû avoir quelque chose pourtant. Seulement, comment aurait-il pu y avoir quelque chose alors qu’elles ne s’étaient encore jamais rencontrées ? Elle ne pouvait pas être à ce point dévouée au boss pour que la haine de ce dernier devienne sienne, si ? Et pourquoi le boss la haïssait-il ? Simplement parce qu’il ne l’avait pas eue sous la main lorsqu’il l'avait voulu ?
Bien sûr, il était difficile de vraiment juger. Elles ne se fréquentaient que depuis quelques jours et Laura la prenait pour sa mère perdue, elle n’était donc sûrement pas aussi détestable qu’elle pouvait l’être. Sandra se ferait une véritable opinion avec le temps.
Son cerveau dériva alors vers ce qui continuait de la hanter. Pourquoi les autres mouraient sur Caldin et pas elle ?
Elle était presque heureuse d’être en mission en France. L’espace d’un bref mais intense instant, alors que la tête de Benji était à ses pieds, elle avait craint que les agents ne se jettent sur elle pour la clouer sur une table d’opération. Pourquoi survivait-elle et pas les autres ? Heureusement le boss ne semblait pas obnubilé par la question. Il avait toutefois suspendu pour de bon les séjours sur Caldin, même pour elle. Ce qui expliquait sans doute pourquoi Laura restait sa priorité : une fois en Russie, Sandra serait à nouveau disponible pour des essais virtuels. Mais combien de temps resterait-elle immunisée contre le danger ? Allait-elle finir par mourir, elle aussi ? D’ailleurs, pourquoi le corps de Christelle était-il ressorti intact du scanner alors que la décapitation de Benji sur Caldin l’avait suivi dans le monde réel ?
Plongée dans ses pensées, Sandra passa la porte sans vraiment regarder où elle entrait. Ce ne fut qu’en décelant le léger changement de température qu’elle regarda autour d’elle. Ses poils se hérissèrent.
Des terrariums.
Elle se souvenait de cet endroit. Les tortues sur sa gauche n’avaient rien de terrifiant mais elle savait que plus loin sur sa droite se trouvaient les serpents. Elle avait pris sur elle pour faire le tour lorsqu’elle était venue attirer l’attention de Laura la semaine passée. Comme toujours, elle avait pensé avant tout au succès de la mission. Seulement cette fois, rien ne l’obligeait à aller plus loin, rien ne l’obligeait à devoir voir à nouveau ces monstruosités.

- Tout va bien ?

Sandra se tourna vers Laura. Celle-ci la regardait avec un air presque suspicieux, quoi qu’inquiet.

- Tout va bien, oui, je ne suis pas fan de reptiles, c’est tout. Mais on peut faire le tour, ne t’inquiète pas.

Ne jamais montrer que quelque chose pouvait l’atteindre. Rester insensible, garder un masque neutre, ne laisser transparaître aucune faiblesse. Elle inspira profondément et suivit Laura. Ces bouts de chair flasque restaient enroulés autour d’une branche ou de leur propre tête. Insignifiants, inoffensifs, d’autant plus derrière la vitre.
Alors pourquoi avait-elle envie de prendre ses jambes à son cou ? Elle se sentait prête à sauter dans le bassin des crocodiles si jamais le python faisait mine de s’approcher.
Comment pouvait-on aimer les serpents ? Ceux qui n’étaient pas capables de vous étouffer possédaient du venin mortel. Quant à ceux qui n’entraient dans aucune de ces catégories, ils étaient lents et ennuyeux. Quel intérêt pouvait-on trouver à leur présence ?

- Ils sont fascinants n’est-ce pas ? À chaque fois que je les regarde, je me dis qu’ils savent des choses que nous ignorons. Que s’ils restent aussi immobiles, c’est parce qu’ils sont capables de ressentir des éléments dont nous n’avons pas conscience. Peut-être qu’ils méditent eux aussi, quelles certitudes avons-nous ?

Sandra jeta un regard en coin à Laura qui parlait sans la regarder, les yeux fixés sur un serpent enroulé dans sa gamelle d’eau. Cette fille avait beau être un cerveau recherché par une des plus puissantes nations du monde, elle avait un grain !

- Je pense surtout que ce sont des animaux stupides et inutiles qui passent leur temps à digérer.

La remarque ne serait sans doute pas sortie de la bouche d’une vraie mère aimante et valut à Sandra un regard noir.

***


La dévirtualisation de Yumi n’avait choqué qu’Aelita. William avait abattu presque coup sur coup deux ninjas, Odd l’avait imité et le dernier de leurs adversaires n’avait pas fait long feu.

- Là on est vraiment trop forts !
- Oui mais c’est bizarre. D’habitude, ils sont plus coriaces.
- Hey, tu pourrais quand même nous féliciter…
- C’est vrai, c’est pas eux qui sont plus faibles, c’est juste nous qui sommes plus forts ! ajouta Odd.
- Jérémie, la salle commence à bouger, il faut qu’on parte, avertit Aelita.
- Allez-y, le fouineur a récolté pas mal de données. Je vais commencer à les regarder le temps que vous rentriez.

Aelita, Odd et William quittèrent précipitamment le cœur du Cortex. Une fois dans le Mégapod, Odd laissa échapper son agacement :

- C’est n’importe quoi ce qu’elle nous a fait aujourd’hui, Yumi !
- Hey, à la base, c’est Ulrich qui nous a plantés, intervint aussitôt William.

Il avait beau montré les crocs, une vague d’inquiétude montait en lui. Yumi avait eu un comportement stupide et immature qui ne lui ressemblait pas. Généralement, quand elle agissait ainsi, on pouvait être sûr qu’il y avait un rapport avec Ulrich. En l’occurrence, pas besoin d’être Einstein pour deviner où elle était partie.
Il se retint de serrer les poings. Comment pouvait-elle rester aussi aveugle après toutes ces années ? Pourquoi ne pouvait-elle pas accepter une bonne fois pour toutes qu’Ulrich n’était pas celui qu’il lui fallait ?
Et pourquoi lui-même ne pouvait pas passer à autre chose ?

- Ulrich nous a peut-être plantés mais au moins, il l’a fait dès le début ! Elle avait qu’à rester avec lui si elle est si accro !
- Odd, la ferme.
- Ne pense pas que je soutiens Aelita, Odd, mais je détecte un truc bizarre sur mon scan. Je crois que quelque chose vous suit.

William heurta la paroi du Megapod lorsque celui-ci fit demi-tour sans aucune délicatesse. Les yeux rivés sur leur propre radar, Aelita et Odd ne voyaient rien.

- Jérémie, tu es sûr de toi ?
- Pas trop, je ne repère plus rien… Désolé, ça devait être une fausse alerte.

Cette fois, William anticipa le changement de direction, ce qui ne l’empêcha pas de grogner à l’intention de Odd :

- Tu devrais être encore plus brutal !
- Oh, ça va, tu vas pas te mettre aussi à faire la tronche ! J’en ai marre de ces gens pas foutus de se mettre en couple ! Portez vos…
- Odd !
- Bref, ayez un peu de cran, c’est pas possible ! Je me suis pris des centaines de râteaux, est-ce que ça me rend morose ? Non ! De l’audace, à la fin !
- C’est ça, on s’en souviendra, marmonna William.

Il quitta le Megapod le visage toujours fermé mais eut un sursaut avant que Jérémie ne les transfère dans le Skid.

- Quoi ? s’inquiéta Aelita.
- Rien, j’ai juste cru voir Yumi…

***


Sandra avait du mal à croire qu’une demi-heure auparavant, elle souriait. Elle ne se souvenait pas avoir été déjà plus mal dans sa vie. Au moins sur Caldin, elle avait ses armes pour affronter les Agkis. Là, elle se sentait vulnérable. La partie rationnelle de son cerveau tentait de la convaincre qu’elle ne courait aucun danger, qu’il n’y avait rien de menaçant chez ses êtres emprisonnés, mais une part d’elle plus viscérale lui hurlait de partir.
Elle parvint à reprendre contenance quand son téléphone sonna. Tout cela n’était qu’un travail comme un autre. Elle avait déjà vécu pire, même si elle n’avait pas d’exemple en tête.

- Sandra.
- Adrian.

Il fallut plusieurs secondes à la russe pour se rappeler qu’Adrian était le prénom de l’espion infiltré chez Tyron, celui qui l’avait amenée à l’aérodrome avant sa mission avec Benji. Dans sa tête, il était « l’espion » justement, au point qu’elle en oubliait qu’il avait un nom.

- J’écoute.
- Passe à la base dès que tu peux avec la gosse. Tyron s’impatiente et j’ai quelque chose de très important à te dire.
- Pourquoi il s’impatiente ? Il sait très bien qu’elle repartira en Russie.
- J’imagine qu’il veut se donner un air important.
- Reçu.

Sandra raccrocha. Fascinée par un boa gigantesque, Laura n’avait pas remarqué la conversation.

- Chérie ? Je suis désolée mais nous allons devoir partir plus tôt que prévu. J’ai un ami à voir avant de quitter le pays et je pense qu’il sera enchanté de te rencontrer.
- Aujourd’hui ?
- Tout le monde en serait arrangé.
- On a le temps de finir le tour ?

Sandra sentit son estomac se soulever mais réussit à garder un visage souriant.

- Bien sûr, chérie, bien sûr.

Lorsqu’elles sortirent du Jardin des Plantes, elle se sentait nauséeuse. Les serpents étaient définitivement répugnants.

- Où va-t-on ? demanda Laura.

Sandra prit quelques secondes de réflexion. Le boss lui avait dit qu’elle pourrait tuer Philippe une fois sa mission terminée et elle comptait bien le faire. Si elle était amenée à aller chez Tyron, elle pouvait s’arranger avec l’espion pour partir ensuite directement en Russie. Moins Laura resterait chez le français, mieux ce serait.
Par conséquent, elle avait le droit d’agir.

- Repassons chez ton père, il voudra sans doute venir chez mon ami, il le connaît bien.
- On peut prendre le métro cette fois ?

« Au point où j’en suis », faillit répondre Sandra. Elle se retint de justesse pour acquiescer avec un sourire forcé.
Le retour s’effectua dans un silence total mais Laura ne quitta pas sa mère des yeux. À l’aller, elles avaient fait le chemin à pied. Elle avait pu constater la forme physique impressionnante de sa mère, son pas vif et son regard alerte, comme si elle surveillait tout, prête à bondir d’un instant à l’autre. Et là, dans le métro, elle semblait recroquevillée. Ses yeux surveillaient toujours tout mais à présent, elle semblait davantage prête à sauter de la rame en marche si on faisait mine de trop s’approcher d’elle.
Laura en avait le cœur serré. Elle n’arrivait pas encore à être démonstrative, pas un « Maman » n’avait franchi ses lèvres, mais elle ne pouvait nier le profond attachement qui l’unissait à Emma. La voir ainsi ne faisait que renforcer sa certitude : sa mère avait vécu cachée pendant une décennie. Il lui faudrait sans doute du temps pour retrouver un comportement normal mais elle comptait bien l’y aider.

***


- N’empêche, j’arrive toujours pas à croire que Yumi nous a laissés tomber.
- Odd, lâche-nous.
- Non mais c’est vrai ! Si on se met à tous faire comme elle dès qu’on a une contrariété, autant éteindre le Supercalculateur à chaque fois qu’on quitte l’usine et le rallumer quand tout le monde a un élan de bonne volonté !
- Il a raison, intervint William. Elle a géré sur la mission où tu n’étais pas là – Aelita tressaillit sous la référence – mais depuis que Mathilde se rapproche de nous, elle est moins impliquée, que ce soit sur Lyoko ou simplement au lycée. On dirait qu’elle est jalouse et qu’elle pense que c’est en s’éloignant encore plus que ça va s’arranger !
- On est d’accord, c’est débile.
- Il y a quelque chose sur le Skid ! les interrompit Jérémie.

Les trois Lyokoguerriers firent volte-face. Un ninja se trouvait effectivement accroché au vaisseau.

- Comment il a fait ? s’étrangla William.
- Aucune importance, on s’en occupe !

Odd bondit, accompagné par une pluie de flèches laser mais le ninja esquiva sans peine et atterrit aux côtés d’Aelita qu’il dévirtualisa d’un coup d’épée. Sans prendre le temps de reprendre ses appuis, il leva la jambe pour frapper le félin en plein poitrine. Celui-ci fut éjecté de la plateforme et n’eut d’autre choix que de se dévirtualiser d’une volée de flèches, peu désireux de savoir ce qui pouvait l’attendre en bas.

- William, débarrasse-nous de lui !
- Facile à dire, grogna le jeune homme. Hey, toi !

Il n’eut pas le temps de finir sa provocation. Déjà le ninja attaquait et il ne dut qu’à ses réflexes de ne pas se faire trancher en deux. Les katanas de son adversaire avaient beau paraître dérisoires comparés à son arme, William peina très rapidement et fut sans difficulté repoussé en arrière.

- Jérémie, il se dirige vers l’ascenseur !
- Empêche-le à tout prix de rejoindre le cœur. J’ai appelé Ulrich, il ne devrait pas tarder.

Cette simple phrase donna une bouffée d’adrénaline à William. Il n’avait pas besoin d’Ulrich. Personne n’avait besoin de lui.
D’un bond, il sauta sur l’ascenseur déjà arrivé à l’étage inférieur.

- Hey toi ! répéta-t-il. Tu comptes aller où comme ça ?

Le ninja se retourna et William sentit une profonde colère monter en lui. Était-ce son imagination ou même cet avatar stupide face à lui affichait une forme de dédain, d’ennui ? Y aurait-il quelqu’un pour se rendre compte un jour qu’il n’était pas qu’un pion et qu’il en avait plus qu’assez qu’on le prenne pour un faire-valoir ?
Avec une rage qu’il n’avait plus ressentie depuis longtemps, William commença à attaquer le ninja. Il y mettait toute son énergie, parait à grand renfort de Supersmoke, mais il dut bientôt accepter l’évidence. Il ne faisait pas le poids. Les ninjas du Cortex qu’il avait écrasés un peu plus tôt n’avaient sans doute que pour but de faire diversion.
Cette simple prise de conscience le déconcentra et il sentit son arme lui échapper, balayée par un souple mouvement de katana. Son avatar devint pixels blancs au moment où Ulrich arrivait sur la passerelle.

- T’es notre dernière chance, Ulrich. Le rate pas.
- Bah oui, t’es notre dernière chance. Dommage qu’une certaine personne ici présente se soit laissée dévirtualisée et ne puisse donc plus aller sur Lyoko tout de suite pour te prêter main forte, railla Odd.

Debout près de Jérémie, Yumi ne répondit pas. Elle n’avait donné aucune explication sur son attitude, le moment était trop grave pour cela, et si Odd voulait s’amuser à la juger, grand bien lui fasse. Elle n’estimait plus avoir de comptes à rendre à ses amis. Elle lui en voulait quand même de ternir sa joie alors qu’elle pouvait encore sentir sur ses lèvres la douceur de celles d’Ulrich. Jim avait, comme toujours, parfaitement choisi son moment et ils avaient été tellement gênés qu’ils n’avaient pas parlé jusqu’à l’usine. Yumi avait failli douter mais le baiser que lui avait redonné Ulrich dans le monte-charge était plus que rassurant.
La comédie était finie.
Ulrich s’accrochait également à cette pensée. La journée avait si mal commencé ! Il en faisait quelque chose de bien mieux, il ne pouvait pas échouer maintenant.

- Triplicata !

Comme de nombreux monstres avant lui, le ninja fut déstabilisé par la multiplication d’Ulrich. Il fonça sur un des clones et reçut un coup de katana en pleine poitrine. Cela ne le dévirtualisa pas mais le fit tomber de la passerelle. Il réussit à se rattraper au rebord d’une main. L’espace d’un instant, Ulrich se dit qu’il pourrait peut-être le capturer pour l’interroger. Non, hors de question, il était trop dangereux. Un second coup de katana fit disparaître le ninja dans une pluie de pixels.

- T’as assuré mon pote ! le félicita Odd dès son retour au labo.

William était à deux doigts d’admettre qu’Ulrich s’en était bien tiré lorsqu’il surprit le regard entre lui et Yumi.

De mieux en mieux…

De leur côté, Aelita et Jérémie scrutaient les écrans, sourcils froncés.

- Pourquoi les scanners n’ont pas détecté avant la présence du ninja ?
- Il devait avoir un champ de force qui le rendait invisible. À tous les coups, ce sont des interférences électromagnétiques qui ont fini par le démasquer.
- S’ils peuvent se rendre invisibles, pourquoi n’utilisent-t-ils jamais ce pouvoir contre nous ? souleva Aelita.
- Aucune idée, je manque d’info sur l’origine de cette capacité. Peut-être qu’elle nécessite une forme d’énergie qui rend impossible une utilisation prolongée. Ou peut-être qu’elle doit être programmée à l’avance et ne peut pas être utilisée dans l’urgence. Je ne sais vraiment pas.
- A priori, ils n’ont pas que ça comme pouvoir, intervint William, désireux de penser à autre chose que les regards de merlans frits entre Yumi et Ulrich. Ce ninja a réussi à se cacher sur le Skid sans qu’on le remarque. Il devait nous suivre de près, or, nous avions un véhicule. Ils peuvent donc être beaucoup plus rapides que ce qu’ils nous laissent voir.
- Pas faux. En tout cas, avec ces tours de passe-passe, Tyron aurait pu nous localiser. Il va falloir qu’on soit plus prudents à l’avenir. On devrait peut-être éviter de retourner sur le Cortex pendant un certain temps.
- Tu as réussi à avoir des infos grâce au fouineur ?

Jérémie rougit.

- Euh… Je le croyais mais j’ai fait chou blanc. Le code de décryptage que j’avais trouvé n’était qu’un… ouais, disons le franchement, un troll.
- Dans ce cas, il faut qu’on retourne sur le Cortex. On a besoin d’informations sur mon père, les ninjas, Tyron !
- Je sais ce que tu ressens, Aelita, mais rends-toi à l’évidence : leurs défenses sont efficaces, il faut qu’on soit mieux préparés.

La jeune fille se renfrogna. Sentant l’ambiance s’alourdir, Ulrich lança :

- Odd…. Tu as encore ta tête de voyou. Un nouveau plan jeu vidéo ?
- Mieux, beaucoup mieux ! Mais si je vous en parle, vous allez essayer de me dissuader.
- Autrement dit, tu vas encore nous attirer des ennuis…
- Possible !

Jérémie soupira mais ce simple échange avait rendu une ombre de sourire à Aelita qui leva les yeux au ciel en disant :

- Rentrons avant qu’il ne fasse encore une bêtise.
- Moi, faire une bêtise ? Comme si c’était mon genre !
- Jérémie, je peux te parler ?

Le garçon ne fut pas surpris. Il laissa les autres disparaître dans le monte-charge et se tourna pour faire face à Yumi.

- J’imagine que tu ne comptes pas t’excuser pour ton comportement de tout à l’heure ?
- Effectivement. Je veux quitter le groupe.
- Pardon ?

Jérémie doutait d’avoir bien entendu.

- Tu veux quoi ?
- Je veux quitter le groupe. J’en ai marre de me battre. J’ai envie de profiter de ma vie et si je tiens plus que jamais à notre amitié, je ne supporte plus Lyoko. Le Cortex me rend malade, je ne veux plus me battre, plus entendre parler de virtualité, j’ai envie de vivre dans le réel pour une fois.
- Mais Yumi, XANA est réel. C’est une vraie menace, tu le sais.
- Je sais mais ce n’est pas à nous de nous en occuper. Si je ne vous respectais pas autant, j’enverrais une lettre anonyme aux forces de l’ordre pour leur parler de l’usine et faire en sorte que ce fardeau ne repose plus sur nous.

Jérémie regarda son amie. Il comprenait sa réaction mais…

- Pourquoi tu me dis ça ? Qu’est-ce que tu attends de moi ? Tu veux mon accord, mon avis ?
- Si tu me demandes de replonger, je le ferais. Je peux te garantir que tu ne verras plus mon petit numéro de tout à l’heure et que si tu m’envoies sur Lyoko, je m’y battrai. Mais je veux que tu saches que ça me coûtera. Alors, s’il te plait, ne me le demande plus. Et trouve une solution rapide pour que tout le monde puisse faire comme moi et se concentrer sur d’autres choses.

Le regard de Yumi en disait plus long que ces mots et Jérémie se contenta de hocher la tête.

- On fera comme d’habitude : ce qu’on peut. Que ça nous arrange ou pas.
  Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens  
Ellana

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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Sam 25 Juin 2016 17:51   Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens
Bonjour, bonsoir !

Spoiler absolument pas spoiler puisque c'est la réponse aux commentaires HAHA.
Spoiler


Chapître 12 : Tensions


Ulrich était allongé sur son lit, les yeux fixant le plafond. Il avait vécu le début de la semaine avec un profond détachement, obnubilé par le week-end que son groupe venait de passer.
Samedi : trois tours activées, une dispute entre Jérémie et Aelita.
Dimanche : trois devoirs maisons à bâcler, une annonce inattendue de Laura qui quittait le lycée sans savoir quand elle reviendrait et refusant de dire où elle allait, annonce suivie d’un débat houleux entre Jérémie et Aelita, l’une insistant sur la nécessité d’un retour vers le passé, l’autre indiquant que ce n’était pas prioritaire.
Lundi, mardi et mercredi s’étaient déjà étirés sans qu’ils prennent de décision, ce qui indiquait à Ulrich que Jérémie avait gagné et que Laura partirait avec sa mémoire. A leurs risques et périls. Odd ne trouvait même plus l’envie de blaguer sur le sujet, Yumi s’éloignait au fur et à mesure que Mathilde se rapprochait et seul William semblait parfaitement à son aise au milieu des changements.
Le réveil sonna une deuxième fois. Ulrich envisagea un instant de ne pas se lever. Il y avait trop de choses dont il aurait voulu parler et il savait que personne ne serait en mesure de l’écouter. Par quoi commencer de toute façon ? La culpabilité qui le rongeait atrocement depuis l’attaque massive de XANA ? L’inutilité suite au nombre de codes qu’il avait perdu ? L’espoir face au comportement de Yumi, cachant de moins en moins sa jalousie pour Mathilde et par analogie ses sentiments pour lui ? La frustration de ne pas réussir, malgré cela, à lui avouer qu’elle n’avait pas à s’inquiéter ?

- Ulrich, ton réveil, grogna Odd.
- C’est bon, ça va.

Ulrich se leva. Il sentait que cette journée allait être déprimante. Quel jour était-on déjà ? Jeudi. Jeudi… N’avait-il pas quelque chose de prévu aujourd’hui ? Non, ça ne lui revenait pas.

***


- Jérémie ? interpella Mathilde alors que les autres élèves se levaient pour quitter la classe. Ça m’embête de te demander ça mais je n’ai pas vraiment compris le cours de chimie d’hier. Tu as certainement d’autres choses à faire, je sais, sauf que…
- Effectivement je n’ai pas le temps. Et toi non plus tu n’as pas le temps.
- Je te demande pardon ?
- Il n’y a pas cours au gymnase et on a une heure de perm.
- Je suis au courant mais je comptais bosser sur ma chimie…
- Ulrich est d’accord pour t’entrainer. Vous aurez sûrement Odd dans les pattes, ce qui ne sera pas plus mal. Pendant ce temps, je vais finir de reprogrammer le Skid avec Aelita, en voyant si je peux rajouter un navskid ou s’il faut qu’on trouve un moyen de t’amener toi et William par un autre moyen sur le Cortex.
- J’adorerais être une sirène !
- C’est cela, oui. Arrête les dessins animés.

Mathilde rougit et ils rejoignirent Odd et Ulrich qui les attendaient dans le couloir.

- Prête pour ta séance ? lança gaiement le premier.
- On va dire que oui.
- Je peux aller avec eux ou tu as besoin de moi ? demanda Aelita.
- En fait, je me disais que ça faisait longtemps qu’on n’avait pas travaillé ensemble, juste toi et moi, répondit Jérémie avec un sourire timide.

Le visage d’Aelita s’illumina et les deux génies s’éloignèrent.

- Décidément, j’envie leurs activités de couple ! se moqua Odd.
- Laisse-les tranquilles, tu veux ? intervint Ulrich avec mauvaise humeur. Venez, il faut s’assurer que le gymnase est dispo.
- Il est dispo, répondit Mathilde du tac-au-tac. La classe de Yumi a foot, ils sont à l’extérieur.

Ulrich fronça les sourcils. Il le savait pertinemment. Sa remarque ne visait qu’à lui éviter une énième réflexion d’Odd sur le fait qu’il connaissait mieux l’emploi du temps de la japonaise que le leur. Mais comment Mathilde était-elle au courant ? Pourquoi connaissait-elle aussi l’emploi du temps de Yumi ?

- Génial, Jim ne trainera pas dans nos pattes ! s’exclama Odd avant qu’il ait pu poser la question.
- Je n’ai pas pris mon survêtement, avertit Mathilde.
- Pas grave, ce n’est pas comme si tu mettais des mini-jupes.
- Tu devrais essayer d’ailleurs !

Mathilde s’empourpra à nouveau.

- Laisse-la tranquille.
- D’ac’ cap’taine ! Par contre, il va falloir entrer en douce dans le gymnase parce que si Yumi nous voit, elle va piquer une crise de jalousie pas possible et vous allez encore vous faire la tronche pendant une semaine !

Cette fois, ce fut à Ulrich de rougir.

- Au moins, lorsque Kiwi était là, on avait des moments de paix quand tu le sortais ! marmonna-t-il. Bénies soient quand même tes sœurs de le supporter à notre place !
- Ne remue pas le couteau dans la plaie !
- Qui est Kiwi ? eut la naïveté de demander Mathilde.

Odd put se lancer avec un plaisir larmoyant dans une description de son chien bien-aimé. Il ne s’interrompit que lorsqu’ils arrivèrent au stade. Comme l’avait annoncé Mathilde, la classe de Yumi trottinait en guise d’échauffement, encouragée par un Jim visiblement ravi de s’époumoner dans son porte-voix.

- Allez, allez, encore quatre tours ! On se remue ! Qu’est-ce que tu m’veux Della Robbia ? hurla-t-il sans éloigner le mégaphone.

Yumi et William tournèrent aussitôt la tête. Odd s’était approché de Jim alors que Mathilde et Ulrich attendaient plus loin.

- Pour la discrétion, c’est râpé, soupira le samouraï.

Mathilde hocha la tête mais il n’était pas certain qu’elle l’ait écouté. Ses yeux balayaient la classe en train de courir. Elle répondit par un petit signe au salut de William sans cesser d’observer les autres élèves, jusqu’à ce que son regard se pose sur un groupe de quatre garçons. Ulrich reconnut Christophe M’Bala mais ignorait le nom des trois autres. Le seul blond des quatre aperçut Mathilde et lui adressa un petit signe de la main, bientôt imité par les trois autres. Elle répondit avec un sourire élargi, poussant Ulrich à demander :

- Tu les connais ?
- Non, j’adore dire bonjour à des gens au hasard !
- D’accord, question débile, reconnut Ulrich avec un petit rire.
- Le grand blond, c’est mon frère, Michael.
- Vous n’avez pas beaucoup d’écart.
- En fait, si. Il a redoublé son CM2 et j’ai sauté le CE1. On voulait être dans la même classe.
- Sérieux ? Ton frère a redoublé pour être dans ta classe ?
- Son père en était fou.
- Son père ?
- Bien sûr Della Robbia, tu peux t’entrainer dans le gymnase ! Maigrichon comme tu es, ça ne te fera pas de mal ! Allez, vous autres, encore euh… cinq tours !
- Quoi ?
- On en était à quatre, Monsieur !
- Veux pas le savoir, encore cinq tours !
- Quand est-ce qu’il va comprendre que je suis svelte ? ronchonna Odd en rejoignant ses amis, sous les grognements des coureurs.
- Tu devrais manger plus ! railla Ulrich.

Il jeta un coup d’œil à Yumi et constata qu’elle l’ignorait royalement. De toute évidence, elle était encore en pleine crise.

Tant mieux. Pour une fois que c'est elle qui est jalouse.

- Tu as dit son père et pas notre père, signala-t-il à Mathilde qui suivait un Odd ronchon vers le gymnase. C’est ton demi-frère ?
- Même pas. Nous n’avons aucun lien de sang. Ma mère et son père se sont rencontrés il y a onze ans et ça fait dix ans que nous habitons ensemble. On se considère comme une famille de sang.

Ulrich ne réagit pas. Mathilde était dans leur classe depuis la sixième et ils ne savaient rien d’elle. Plutôt que de s’entrainer, il aurait peut-être été plus bénéfique d’apprendre à la connaître.

- Ton père et sa mère… Ils sont morts ?
- Sa mère oui, elle a eu un accident de la route quand il avait deux ans. Par contre mon père se porte très bien, je vais le voir de temps en temps, mais je préfère rester avec ma mère.
- Mathilde, toi qui as l’objectivité de la nouveauté, tu me trouves maigrichon ? s’inquiéta Odd, insensible à la conversation.
- Non, tu as un physique de nerveux, voilà tout.

Odd s’arrêta subitement, soudain rasséréné. Il attrapa Mathilde par les poignets et lui embrassa la joue avec force.

- T’y crois pas ! C’est exactement ça ! Je suis un petit nerveux !

Son entrain retrouvé, Odd aida Ulrich et Mathilde à installer quelques tapis sur le sol du gymnase.

- Vous vous battez pendant que je vous lance des volants ?
- Odd, laisse-moi un peu de temps avant d’augmenter le niveau ! protesta Mathilde.
- Ok, ok ! De toute façon, faut que je réfléchisse à quelque chose.
- En d’autres termes, il va bientôt nous attirer des ennuis, expliqua Ulrich tandis que son ami allait s’asseoir contre le mur. Tu es prête ?
- Prête à quoi ?
- Je vais t’attaquer et tu vas te défendre.
- Super…
- Go !

La main droite d’Ulrich fusa vers le visage de Mathilde tandis que la gauche attrapait son bras. Avant qu’elle ait réagi, la jeune fille sentit son dos heurter le tatami. Elle resta allongée, le souffle coupé, avec la sensation que ses omoplates avaient éclaté.

- Impressionnant ! railla Odd.
- Tu veux que je te rappelle pourquoi tu ne veux plus t’entrainer avec moi ?
- Parce que je suis le meilleur ?
- C’est ça…

Ulrich aida Mathilde à se relever. Une fois le choc passé, celle-ci se rendit compte qu’elle ne souffrait pas tant que cela.

- Je croyais que tu étais prête.
- Mais jamais un monstre de Lyoko ne me fera une prise comme ça !
- Tu as plus à craindre des spectres, tu ne te souviens pas ?
- Gna gna gna.
- Belle maturité.
- C’est toi qui dis ça ?
- Un partout, balle au centre ! pouffa Odd.

Ulrich sourit. Mathilde avait déjà perdu son air vexé pour retrouver une expression concentrée. Ses yeux brillaient d’une flamme qu’Ulrich n’avait pas encore remarquée, une flamme qu’il reconnut pourtant sans peine pour l’avoir déjà vue à maintes reprises chez les autres Lyoko-guerriers.
La volonté.
Mathilde savait qu’elle avait peu de chance de gagner mais elle était résolue à tout tenter pour y parvenir.
C’était cela que Jérémie voulait véritablement tester.

- Prête ?

Hochement de tête. Au moment où Ulrich levait le bras, les sourcils de Mathilde se froncèrent.

- Yumi ?

Ulrich se retourna aussitôt, avant de réaliser qu’il n’avait pas entendu la porte s’ouvrir. L’espace de quelques secondes, il offrit donc son dos à son adversaire. Or, si Mathilde ne disposait pas d’une grande force ou de technique, elle était rapide.
Ses mains se posèrent sur les épaules d’Ulrich, le poussant vers le sol tandis qu’elle lui balayait les jambes. Il s’écroula, furieux de s’être laissé duper aussi bêtement.

- Bien joué ! félicita Odd en applaudissant. L’amour te perdra mon pote !
- Il nous perdra tous. Pas trop vexé, Ulrich ?
- Un peu quand même. Tu m’as eu en traitre !
- Un spectre aurait pu te faire la même chose, signala Mathilde avec le ton de celle qui savoure une victoire facile.
- Elle a raison ! Arrête de ronchonner, Ulrich.

Le samouraï se releva et, sans prévenir, lança son pied vers l’épaule de Mathilde. Elle esquiva le coup puis le suivant, virevoltant sur elle-même, n’hésitant pas à s’accroupir ou bondir sur le côté.
Ulrich ne recula de quelques pas que lorsqu’elle eut les joues rouges, des bleus le long des bras et le front couvert de sueur.

- Ok, ça suffit ! Tu n’es pas mauvaise du tout en défense. C’est un bon atout, tu pourras couvrir nos arrières.

Mathilde hésita à lancer « Pourquoi, c’est devant qu’il y a le matos à protéger » mais elle n’était pas certaine que ses deux nouveaux amis reconnaissent la citation. Elle passait déjà pour une allumeuse avec son avatar, inutile d’en rajouter.

***


Debout près de la grille, Yumi distribuait ses tracts en souriant mais le cœur n’y était pas. Comment avait-elle pu croire sincèrement qu’Ulrich viendrait ? D’accord, elle aurait dû lui rappeler hier, un petit SMS avant de se coucher pour qu’il n’oublie pas... Non, il ne fallait pas qu’elle commence comme ça, c’était sa faute à lui, il aurait dû s’en souvenir.

Garde le sourire, Yumi, garde le sourire.

- Une heure dans le noir, c'est des années d'espoir, rappela-t-elle aux élèves qui passaient entre elle et Lara.

Des retardataires arrivaient encore mais le flot d'élèves avait assez diminué pour que ladite Lara se tourne vers elle.

- Au fait, j'ai oublié de te dire : t'as carrément assuré au devoir de français. Tu as vraiment du talent.

Le compliment toucha Yumi malgré sa gêne. Leur professeur avait lu la rédaction devant tout le monde et si seul William avait eu un sourire en coin indiquant qu'il n'ignorait pas l'identité de « Eric », elle regrettait de ne pas avoir fait lire son devoir à Ulrich avant tout.
À l'heure qu'il était, elle s'en moquait bien. La seule chose qu'elle regrettait à présent, c'était d'avoir écrit des phrases positives.

- T'avais pas dit qu'Ulrich viendrait nous aider ? s'étonna Lara comme si elle lisait dans ses pensées.
- Si, si, il devait.
- C'est cool, il est fiable ton pote.
- Ouais, super fiable.

Malgré elle, Yumi cherchait à nouveau des excuses à Ulrich. Après tout, à deux, elles s'en étaient bien sorti, sa présence n'aurait pas apporté grand-chose de plus à l'opération. Il avait sans doute été entrainé directement en cours avec Odd puis à la récréation, il était resté avec les autres parce qu'il avait oublié tout simplement.

- Je dois rejoindre mon copain, tu crois qu'on peut s'arrêter là ? demanda Lara.
- Oui, même les élèves qui commencent tard ont dû nous voir. On reviendra peut-être en début d’après-midi. Au pire, avec tous ceux qui les ont jetés par terre, personne ne pourra louper nos tracts.
- Tu es drôlement joyeuse ! s'exclama une voix derrière elle.

Les deux filles se retournèrent pour faire face à William. L’espace d’un instant, Yumi ne put s’empêcher de penser que si c’était à lui qu’elle avait proposé de distribuer des tracts, il ne l’aurait pas laissée en plan.

- J’ai croisé Jérémie, il voudrait nous parler, l’informa-t-il non sans lui jeter un regard un peu inquiet.
- Pas de soucis, on avait fini. À tout à l’heure, Lara.

William jeta un nouveau regard inquiet à Yumi. Elle était arrivée furieuse en français, avait retrouvé le sourire en recevant sa copie lue la veille devant la classe, puis était redevenue morose pendant le cours de sport.
Aussi espérait-il que reparler du français allait la mettre à nouveau de bonne humeur.

- Dis, le devoir que Blanc a rendu ce matin. Je peux y jeter un coup d'oeil ?

Yumi haussa les épaules. Si ça l'amusait... Elle fouilla dans son sac et lui tendit sa copie.

- Tu parles d'Ulrich ?
- Comme si tu n'avais pas deviné.
- Excuse-moi mais en lisant « un ami doux et présent », j'ai eu un doute !
- Rends-moi ça, grogna pour toute réponse la japonaise alors qu'ils arrivaient vers le reste du groupe.

William ne broncha pas mais une fois la copie dans la main de Yumi, il lança à l'attention de ses amis, assis sur un banc :

- 18 ! Elle a eu 18 à son devoir de français et la prof a même lu sa nouvelle devant toute la classe !
- 18 ? Mais moi je pensais que les notes en français, ça s’arrêtait à 11 ! s’exclama Odd. Attends, il faut que je voie cette pièce de collection !
- Non, mais c’est rien d’exceptionnel. C’est juste un devoir.

Avant que Yumi puisse réagir, Odd attrapa la copie et s'éloigna rapidement.

- Odd, je te préviens ! Si tu fais ça...

William eut un sourire ironique. Si Yumi courait récupérer son devoir, les autres allaient lui poser des tonnes de questions. Était-ce pour cela qu'elle ne bougeait pas malgré la menace dans sa voix ? Ou parce qu'elle espérait qu'Ulrich entende ce que Odd allait lire et le prenne en compte, puisqu'ils étaient incapable de se parler de vive voix ?

- « Mia n'en croyait pas ses yeux. Eric, son ami de toujours, son âme-sœur, ce garçon si profond, si sensible, dévoilait soudain un tout autre visage. Celui d'un être immature entêté et qui surtout manquait cruellement d'attention aux autres. »

Aelita et Mathilde échangèrent un regard inquiet. Même Jérémie ne s'était pas fait duper par le changement de prénom. Alors que Yumi reprenait la copie, les joues en feu, crachant à Odd un « T'es vraiment trop nul !», Ulrich sentit une rage froide l’envahir.
C’était comme ça qu’elle le voyait ? Elle n’avait que ça à dire sur lui ?

- J'aurais bien aimé savoir la fin de l'histoire, se plaignit Odd.
- T'aurais pas été déçu, ricana William. À cause de son comportement débile, le mec finit par briser leur amitié.

Ulrich baissa les yeux alors que Yumi tournait les siens vers lui. Pour qui se prenait-elle ? Elle préférait écrire ce genre de choses plutôt que de venir les lui dire en face ? Elle parlait d'amitié alors qu'elle n'était même pas capable de faire preuve d'honnêteté ?

- Bon, si ça vous dérange pas, j'aimerais bien revenir à des choses un peu plus importantes, signala Jérémie. À savoir la Méduse.

William perdit aussitôt son air narquois et Mathilde arrêta de penser qu’il avait décidément une attitude aussi puérile qu’Ulrich et Yumi.

- XANA lance des attaques de plus en plus élaborées et s’il nous envoie la Méduse, c’est qu’il a des objectifs plus ambitieux que ce qu’on peut encore voir. Je pense que le meilleur moyen pour le contrecarrer, c’est d’obtenir davantage d’informations sur le Supercalculateur à l’origine du Cortex. On pourrait trouver des données nous permettant de comprendre le retour de XANA ou alors on pourrait essayer de localiser Tyron pour pouvoir le contacter. A priori, il ne s’entendait pas avec Hopper et ne sera pas ravi qu’on s’immisce dans ses affaires mais j’espère qu’il sera capable de comprendre le danger qu’il héberge… Enfin bref, il nous faut plus de données.
- Brillante idée, Einstein, mais ça va faire arriver des ninjas illico.
- Justement, j’ai prévu un contournement. Je crée un leurre qu’Aelita glisse dans l'interface pour déclencher l'alarme. Les ninjas rappliquent et pendant ce temps-là, Aelita insère le fouineur, masqué par le leurre. Je récolte les données pendant que vous gardez le terminal. Tout le monde est d’accord ?

Seuls Aelita, Odd et William hochèrent la tête. Ulrich et Yumi fixaient leur pied, lui avec haine, elle avec gêne, tandis que Mathilde demandait d’une voix timide :

- Est-ce que je peux venir ?

Jérémie secoua la tête.

- Tu es loin d’être prête pour le Cortex et de toute façon, il n’y a que 5 places dans le Skid.
- Vous venez de le reprogrammer, vous ne pouviez pas y penser ?
- C’était déjà assez difficile de le reprogrammer rapidement…
- Je ne critiquais pas, je posais juste une question !
- Sympa l’ambiance aujourd’hui, nota Odd.
- Vous y allez tout de suite ?
- Oui, autant profiter de la pause déj’.
- Je serai chez moi si jamais il y a un problème.

Alors que Mathilde s’éloignait, Jérémie ne put s’empêcher de penser qu’étant donné l’humeur d’Ulrich et de Yumi, il faisait peut-être une bêtise en la laissant partir.

- Bon, on y va.

Alors que les autres s’éloignaient, Ulrich attrapa le bras de Yumi.

- Attends.

La japonaise sentit son estomac se nouer. Lorsqu’elle se retourna, ce fut pour recevoir le regard venimeux de son ami.

- Le mec que tu décris dans ta nouvelle, c’est moi, c’est ça ? Immature, entêté, manque d’attention aux autres. C’est comme ça que tu me vois ?
- Tu te fais un film, mentit-elle. C’était juste un devoir, c’est tout.
- Ouais, c’est ça. Prends-moi pour un débile. Quand je pense qu’il a été lu devant tout le monde !
- Bon écoute, Ulrich, on en parlera plus tard si tu veux mais là, on doit aller au labo.
- Je viens pas.

Yumi haussa les sourcils. Se rendait-il compte qu’il ne faisait que confirmer ce qu’elle avait écrit ? Pensait-il pouvoir encore soutenir qu’il n’était pas immature avec ce genre de remarque ?

- Quoi ?
- Je viens pas. J’ai besoin d’être seul. Tu vois, Yumi, moi au moins j’ai toujours été honnête avec toi.

La colère remplaça la gêne.

- Tu te fous de moi ? Toi, tu as toujours été honnête avec moi ?
- Oui, je t’ai jamais rien caché.

Yumi ouvrit la bouche pour lui signaler à quel point il était de mauvaise foi mais Ulrich ne la laissa pas parler.

- Je préfère qu’on arrête de se voir, ça sera mieux comme ça.

Un froid glacial coula dans les veines de la japonaise tandis qu’Ulrich faisait demi-tour, la plantant seule au milieu de la cour.
Comme souvent, elle bascula de la tristesse à la colère et lorsqu’elle rejoignit les autres dans le souterrain, son visage fermé indiquait qu’il valait mieux ne pas lui adresser la parole. Pourtant, Odd demanda :

- T’as perdu Ulrich en route ?
- Il ne vient pas.
- C’est une blague ?
- Y a que toi pour faire des blagues aussi pourries !
- Mais…
- Lâche-moi, Odd !

Aelita et Jérémie échangèrent un regard. Cela n’allait pas faciliter la mission.

- On rappelle Mathilde ?
- Non. Elle ne tiendra pas deux minutes face aux ninjas.

***


Allongé sur son lit, les yeux dans le vague, Ulrich ruminait. Elle se moquait de lui. C’était peut-être un pari stupide avec William. Non, elle n’aurait pas été aussi gênée. Quoique…
Son portable vibra. Il le prit pour constater que c’était Jérémie qui l’appelait. Hors de question qu’il décroche.
Les minutes s’écoulèrent sans aucun impact sur son état d’esprit. Il oscillait entre tristesse et colère, l’une le ravageant avant que l’autre ne reprenne le dessus, puis le brûle avec une force égale jusqu’à reculer face à sa rivale. Il attrapa son journal, garda le stylo posé sur le papier sans savoir dans quel ordre écrire sa mauvaise humeur. Il s’empara d’un livre de cours, le rejeta aussitôt. Il prit une BD qui traînait près du lit de Odd et relut quatre fois la même page avant de renoncer. Il posa la main sur la poignée de la porte pour rejoindre le gymnase mais changea d’avis avant d’avoir ouvert. Il tourna en rond, envisageant vaguement de ranger la chambre. Finalement, au bout d’une heure à marmonner, il se laissa retomber sur les draps.

Marre, marre, marre.

Il s’empara de son portable et relut ses derniers échanges avec Yumi. Une tendresse voilée, des taquineries à double sens. Et dire qu’il se pensait sur la bonne voie !
Un scrupule à la dernière seconde retint son pouce au-dessus de la touche « Supprimer ». Au lieu de ça, il bascula vers son répertoire et fit défiler les contacts jusqu’à la lettre M.
Mathilde claqua de la langue avec exaspération lorsque son portable vibra. Elle aurait dû penser à l’éteindre pour se concentrer sur cette satanée chimie mais au fond d’elle, elle espérait une distraction.

- Allo ?
- Mathilde, c’est Ulrich.
- Y a un problème ? demanda-t-elle aussitôt. Vous avez besoin de renforts ?
- Je ne sais pas, je ne suis pas parti avec les autres.

Mathilde ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. Elle aurait dû s’en douter. Une partie d’elle eut envie de signaler à Ulrich qu’il aurait pu le dire avant et la laisser participer à la mission mais la partie dominante l’alerta surtout sur le fait que son ami n’avait pas l’air bien.

- J’imagine que c’est à cause de Yumi.
- Évidemment ! T’as vu ce qu’elle a écrit sur moi ?
- J’ai entendu le même extrait que toi, oui. Rien ne dit que c’était le ton principal du texte.
- T’as aussi entendu ce qu’a dit William sur la fin.
- Ulrich, je peux être franche avec toi ? En bien comme en mal ?
- Au point où j’en suis…
- L’an dernier, j’étais complètement sous ton charme. Je te trouvais incroyablement beau avec ton côté brun ténébreux. Je ne comprenais pas ce que les filles trouvaient à William et son grand sourire alors qu’il existait un type mystérieux comme toi qui ne souriait toujours qu’à moitié.

Ulrich ne put s’empêcher d’apprécier le compliment, tout en restant lucide.

- Mais ?
- Pas encore. Quand vous m’avez proposé de rejoindre votre groupe, tu m’impressionnais encore beaucoup. Mais je suis contente de ne t’en avoir jamais rien dit avant parce que je me rends compte aujourd’hui à quel point tu peux osciller entre bêtise et gaminerie.
- Merci, c’était tout à fait ce que j’avais besoin d’entendre.
- Je n’ai pas fini. Tu peux vraiment être un chic type, Ulrich.
- C’est ça, rattrape-toi…
- Je le pense vraiment. Si tu étais n’importe quel connard venu, tu serais sorti avec une des dizaines de filles qui rêvent de s’afficher dans la cour avec toi. Tu aurais rendu jalouse Yumi, ça t’aurait fait plaisir, et tu aurais gagné une copine en prime. Or, tu ne l’as jamais fait. Pourquoi ? Parce que dans le fond, tu es un mec bien. Et je suis sûre que c’est ce que Yumi a écrit dans sa copie.
- Alors je suis censé la pardonner comme ça ?
- Je dirais plutôt que tu es censé avoir lu plus que quelques lignes pour la juger aussi sévèrement. Et puis, Ulrich, sans déconner, tu n’as pas l’impression d’être en train de confirmer tout ce que tu as entendu ? Tu te trouves mature, là ?
- Bah… Pas trop.
- Ce n’était pas une vraie question…

Ulrich sourit. Mathilde ne lui annonçait rien d’extraordinaire mais le simple fait de parler à quelqu’un qui n’appartenait pas encore totalement à son groupe habituel lui faisait du bien.

- Il y a vraiment des dizaines de filles qui veulent sortir avec moi ?
- J’en connais au moins six. Après, je suis prête à parier que quatre d’entre elles te largueraient rapidement, vu ton caractère… compliqué.
- Ulrich ! Je sais que t'es là. S'il te plait, ouvre-moi.

Le garçon se redressa sur son lit en ayant l’impression que son cœur traversait sa poitrine. Malgré la voix de Mathilde dans son oreille, impossible de ne pas reconnaître l’autre voix.

- Mathilde, je vais devoir te laisser. Elle est là.
- Pas de soucis, ça te fera 72 euros. Bon courage ! Et ouvre-lui la porte, hein !

Ulrich raccrocha, le cœur battant trop fort. La poignée s'abaissa à nouveau mais il avait fermé le verrou.

- C'était toi dans la nouvelle. Tu voulais que je te le dise, je te le dis, t'es content maintenant ? Allez ouvre s'il te plait, Ulrich.

Le garçon ne répondit pas. Il laissa les secondes s'écouler jusqu'à ce qu'un cognement sourd lui indique que Yumi avait tapé sur la porte.

- Ulrich, s’il te plait.

« Ouvre-lui la porte, hein ! ». La voix vacillante de Yumi, en opposition avec la dernière phrase narquoise de Mathilde, décida Ulrich. Il allait ouvrir mais qu’elle ne compte pas sur lui pour faire preuve de bonne humeur.

- Alors, c'est comme ça que tu me vois ? l'accusa-t-il en passant la tête dans l’entrebâillement de la porte.
- Est-ce que tu as au moins essayé de savoir ce que j'avais écrit d'autre ?
- Oh bah oui, j'imagine que si à la fin, je détruis notre amitié, le tableau doit être de plus en plus élogieux !
- Faudrait vraiment que tu grandisses un peu, Ulrich.
- Mais attends, avec tout ce que tu m'as fait aujourd'hui, je sais même pas comment je fais pour continuer à te parler !
- Ce que je t'ai fait aujourd'hui ? s'étrangla Yumi. Tu ne fais que confirmer ce que j'ai écrit dans un DEVOIR en gardant ta mauvaise tête ! En plus, je l'ai écrite juste après ce qui s'est passé avec William, il y a prescription !
- Qu’est-ce qui s’est passé avec William ? s’inquiéta immédiatement Ulrich.

Sa réaction rassura Yumi. Il ne devait pas être si fâché pour avoir encore de si promptes angoisses.

- Tu sais bien. Le fait qu’il ait dû m’embrasser parce qu’on était suivis par un spectre. OK, ça t’a fait souffrir mais justement, ça n’aurait pas dû t’affecter si tu étais juste un copain et c’est tout. Alors ça m’a énervée que tu te braques plutôt que… Enfin, j’aurais aimé que les choses se passent autrement, que tu laisses de côté ton orgueil et ton immaturité pour… Enfin voilà... Côté « j’ai toujours été honnête avec toi », on repassera. Et puis, c'est moi qui devrais t'en vouloir, je t'ai quand même attendu toute la matinée pour les tracts !

Toute colère disparue, Ulrich ouvrit la bouche pour s'excuser mais Yumi n'en avait pas fini avec lui.

- C'est toujours comme ça, t'es jamais là quand j'ai besoin de toi. Et je te parle même pas de ta susceptibilité ! J'ai pas arrêté de penser à toi quand j'étais dans le Cortex, je me suis fait dévirtualisée pour venir te parler en me disant que s'il m'arrivait quelque chose, on se serait séparés fâchés... Je suis vraiment trop bête !

Yumi en aurait pleuré de frustration. Elle sentait que c’était enfin le moment de mettre les choses au clair, de mettre un terme à des années de non-dits et de mensonges bancals. Elle le sentait mais n’arrivait pas à trouver des mots assez forts.
Ulrich faillit ne pas réussir à bouger quand Yumi repartit à grands pas. Lorsqu'il s'élança derrière elle en criant « Attends ! », il trébucha et s'étala de tout son long dans le couloir. Il releva la tête, prêt à crier à nouveau à Yumi de l'attendre, mais elle était revenue vers lui et restait plantée là à le regarder par terre.

- Tu pourras rajouter maladroit à ta liste, suggéra-t-il en souriant timidement.

La japonaise secoua la tête en soupirant mais elle n'avait plus l'air en colère. Au contraire, elle semblait avoir retrouvé un vrai sourire.

- Je suis désolé Yumi, assura Ulrich, assis par terre. Je sais que j'ai pas été à la hauteur, j'aurais dû être là pour les tracts, j'aurais dû être là pour… plein de trucs. T'as raison, je suis nul.

Yumi mourrait d'envie de le démentir, de le prendre dans ses bras et de le rassurer, mais elle ne bougea pas, se contentant de sourire un peu plus en se demandant si elle n'allait pas plutôt fondre en larmes.

- Je n'ai vraiment pas envie de te perdre. Tu es la personne qui compte le plus pour moi. Je te promets de faire des efforts.
- Toi aussi, tu es la personne qui compte le plus pour moi, murmura Yumi.

C'était là. C'était à ce moment qu'elle devait le prendre dans ses bras et le rassurer. C'était maintenant qu'elle devait faire un pas vers lui et l'embrasser. Pourquoi ses jambes refusaient-elles d'avancer ? Pourquoi n'arrivait-elle pas à avoir du courage pour une fois dans sa vie ? Pourquoi ne réussissait-elle qu’à lui tendre la main pour l’aider à se relever ?
Ulrich sourit. Dans une mauvaise série télévisée, il serait resté planté face à Yumi, à la dévorer des yeux comme il le faisait d’habitude. À lui sourire, à laisser passer une nouvelle chance d’enfin montrer que non, ils n’étaient pas juste « copains et c’est tout ».
Il l’aimait et elle méritait d’en être sûre.
Il l’aimait et s’il ne le lui montrait pas, il allait finir par croire qu’il était plus stupide ou du moins plus coincé que William.
Impensable.
Il attrapa la main qu’elle lui tendait et une fois debout, l’attira contre lui sans la lâcher. Ses doigts libres lui caressèrent la joue avant de se poser sur sa nuque pour attirer son visage vers le sien. Ils restèrent enlacés pendant un temps qui leur parut long, s’embrassant avec une tendresse en opposition avec l’attente interminable de ce moment.
Ils ne se séparèrent que quand la voix de Jim les fit sursauter :

- STERN ! ISHIYAMA ! Vous voulez un coup de main ?

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P.S. : Joyeux anniversaire à GummyBear et Père Dudu (qui a fait une nouvelle trouvaille en me soufflant le titre du chapitre juste avant le post, titre à modifier quand j'en trouverai un meilleur ahah) !
  Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens  
Ellana

Réponses: 63
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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Ven 08 Jan 2016 19:42   Sujet: [Fanfic] Le plus puissant des liens
Ouf presque quatre mois sans publication ? XD Comme le temps passe vite...
Mophie, sans vouloir être désobligeante, tu as lu juste une phrase par-ci par-là ? Parce que sérieusement, si tu confonds Sandra et Anthéa, relis depuis le début ^^ Parce que au cas, où cela ne serait pas évident pour les autres, la femme avec le père de Laura est Sandra et ils ne sont pas vraiment mariés... Vous aviez compris ? Merci !

Voilà, sur ce, le chapitre 11 que j'aime plutôt pas trop mal. Il est la continuité directe du chapitre précédent alors petit rappel :
Spoiler






- Tu es certaine que ça va ?

Aelita se contenta de hocher la tête. Mathilde l’avait raccompagnée jusqu’au lycée mais elles n’avaient pas échangé un mot.
Ils étaient allés sur Lyoko sans elle.
Désormais, il n’y avait plus à prouver son inutilité. Aelita avait perdu tout ce qui faisait d’elle une personne hors du commun. Elle n’était plus que l’orpheline Schaeffer, banale lycéenne. Elle avait trouvé plus intelligent qu’elle en la personne de Laura. Ses amis avaient la possibilité de désactiver des tours. Jérémie était en colère contre elle.
Tout allait de travers.

- Hé ho, Aelita ?

La jeune fille tourna les yeux vers Mathilde et son regard inquiet.

- Qu’est-ce qui s’est passé ?
- XANA a attaqué pendant qu’on était au ciné. Les autres s’en sont très bien tirés.

Mathilde marqua un temps d’arrêt, attendant une suite qui ne vint pas.

- Mais… C’est une bonne chose, non ?
- Bien sûr, soupira Aelita. Seulement… Enfin, tu vois, Lyoko c’est ma maison. J’ai…

Elle eut un petit ricanement cynique.

- J’ai l’impression qu’on est entré chez moi en mon absence, sans ma permission pour toucher à mes affaires. C’est égoïste je sais.
- Je suis désolée, je me sens coupable.
- Pourquoi ? C’est moi qui t’ai proposé de sortir.
- Ah oui c’est vrai.

Les deux filles se sourirent.

- Tu veux que je reste encore un peu ?
- Non, ça va aller. À lundi.
- N’hésite pas si demain, ça ne va toujours pas, je peux m’arranger pour passer.
- C’est gentil.

Mathilde tourna les talons après un dernier sourire timide. Aelita la regarda s’éloigner et au moment où elle partait vers l’internat, son portable vibra. En voyant le nom de l’appelant, elle choisit de prendre les devants.

- Écoute, Jérémie, je suis sincèrement désolée et…

Elle se tut aussitôt pour écouter son ami. Une joie presque coupable se peignit sur son visage et alors qu’elle raccrochait, son cœur s’emballa.
Elle avait honte des mots qu’elle allait prononcer mais comme elle se sentait mieux soudainement !

- Mathilde ! Hey Mathilde ! cria-t-elle en s’élançant dans la rue.
- Oui ?
- Tu crois aux miracles ?
- Euh… Je n’ai jamais eu l’occasion d’en voir un. Pourquoi ?
- Tour activée !

Mathilde écarquilla les yeux.

- Tu as des miracles bizarres…

***


Jérémie marmonnait devant son écran, entouré par Odd, Ulrich et Yumi. Son discours n’était pas très compréhensible mais on sentait son ton désapprobateur.
Les portes du monte-charge s’ouvrirent pour laisser apparaître William.

- C’est une blague, Jérémie, on a trois tours activées coup sur coup ?
- Oui mais je pense que XANA s’est surestimé. Une tour est bien activée, seulement… C’est difficile à expliquer, on dirait que le halo est plus faible. J’ai l’impression qu’il n’arrive pas à prendre totalement le contrôle de la tour.
- Il n’y aura pas d’attaque alors ? Parce que c’est le moment idéal, signala Yumi. On est trois codés à ne pas pouvoir retourner sur Lyoko avant douze heures, un spectre se régalerait.
- Il ne faut pas qu’on lui laisse le temps de reprendre un peu d’énergie. S’il finit l’activation de la tour, un spectre risque effectivement de débarquer.

Ulrich se renfrogna. Si seulement il avait été plus vigilant ! XANA regagnait trop de puissance et il n’arrêtait pas de se sentir responsable.

- Donc on attend en croisant les doigts pendant qu’Aelita va désactiver la tour avec William ?
- Et Mathilde, précisa Jérémie. Tu n’étais pas encore remonté des scanners Ulrich, j’ai appelé Aelita pour lui dire de prendre Mathilde avec elle. Seule avec William, ça risque d’être trop juste.

Le samouraï comprit soudain mieux pourquoi Yumi faisait une tête pareille.

- Ah, se contenta-t-il de répondre.

Le silence s’installa dans le labo, bientôt rompu par le monte-charge.

- William, vas-y. Vous descendez tout de suite, tu leur expliqueras rapidement la situation.

Le garçon hocha la tête et lorsque les portes s’ouvrirent, Mathilde adressa aux autres un geste de la main hésitant.

- Salut.
- Salut ! rétorqua Odd avec entrain.
- Territoire Montagnes, magnez-vous, ajouta simplement Jérémie.
- On vous attend là !
- Parle pour toi, Odd, marmonna Yumi alors que les portes du monte-charge se refermaient.
- T’es lourde.
- C’est bon, je rigole.
- Pas moi.

Indifférente aux chamailleries qu’elle déclenchait à l’étage supérieur, Mathilde se dirigea vers un scanner, le corps parcouru d’excitation. Elle n’aurait pas dû se réjouir de se savoir en danger, elle, ses amis, voire le monde, mais à l’instar de Odd, elle ne pouvait s’empêcher d’être heureuse d’aller sur Lyoko.
Elle atterrit sur le sol, entourée par Aelita et William. Constatant que le garçon faisait une drôle de tête en la voyant, elle détailla à nouveau sa tenue.

- Oui… euh… C’est pas vraiment mon genre, balbutia-t-elle, mal à l’aise.
- Arrête donc, tu es super, lui assura William.

L’apparition du loup dissimula sa gêne.

- Je comprends que vous ayez eu peur la première fois ! s’exclama le garçon. Il est mastoc !

Mathilde se contenta de hausser les épaules avant de grimper sur sa monture. Elle ne put s’empêcher de lui caresser le cou et regretta de ne pas en sentir la douceur.

- A quoi tu penses ? demanda Aelita. Tu as l’air songeuse. Ça va ?
- T’as peur ? se moqua William. T’en fais pas, la dernière fois, tu n’étais pas avec le meilleur, tu ne crains rien, là.
- En fait, j’hésite juste sur le nom à lui donner.

Aelita sourit.

- Quoi, tu trouves ça ridicule de donner un nom à une créature virtuelle ? s’étonna Mathilde, gênée.
- Pas du tout. Odd surnomme tous les nouveaux monstres qu’on rencontre et la première fois qu’il m’a vue, Jérémie m’a baptisée Maya. Que penses-tu de Fenrir ? C’est un loup de…
- La mythologie nordique, je sais. Il a eu une vie un peu triste, non ?
- Effectivement. Je proposais cela parce qu’on a surnommé notre sous-marin virtuel le Skidbladnir.
- Vous avez un sous-marin ? On peut aller dans la Mer Numérique sans y laisser notre peau, enfin, notre avatar ?
- Bienvenue sur Lyoko !

Mathilde sourit à son tour.

- Va pour Fenrir alors.
- On fera en sorte qu’il aille une « vie » plus belle que celle de son homonyme.
- Oui, génial, en attendant, y a une tour à désactiver ! On se bouge !

Aelita activa ses ailes alors que William disparaissait dans un nuage de fumée noire, sous les yeux ronds de Mathilde. Elle lança son loup à leur suite et contrairement à la première fois, elle fut beaucoup plus sensible au manque de trois de ses sens. La suppression du goût passait encore mais l’absence absolue d’odeur lui faisait réaliser que dans le monde réel, rien n’était tout à fait inodore. Quant à son toucher inexistant, c’était le plus perturbant. Elle avait l’impression d’être un peu déséquilibrée et s’habituait difficilement à ce que la fourrure de son loup, ses vêtements et sa peau aient tous cette texture lisse et informe.
Penchée sur Fenrir, elle jetait des regards de tous les côtés. Le Territoire Montagnes, comme l’avait désigné Jérémie, lui plaisait davantage que le désert. Ici au moins, il y avait un vrai relief, des semblants d’arbres, des couleurs un peu plus variées.
Elle demanda à Aelita :

- Comment faites-vous pour vous repérer ?
- C’est très instinctif. En cas de besoin, Jérémie nous guide.

Ils n’eurent toutefois pas besoin de Jérémie pour trouver la tour. Elle se situait sur une plate-forme circulaire, reliée à leur propre terrain par une passerelle d’environ quatre mètres de large. D’ici, ils pouvaient déjà voir deux Krabes et une Tarentule.

- C’est un gros comité d’accueil ou ça reste raisonnable ? questionna Mathilde.
- On ne devrait pas avoir trop de mal, répondit William en reprenant forme humaine. Je peux m’en occuper tout seul.
- Hors de question, répondirent les deux filles en même temps.
- M’aurait étonné…
- A priori, il n’y a que ces trois monstres, je n’ai rien d’autre sur mes écrans. J’imagine que XANA commence à être à court de puissance pour aujourd’hui.

Aelita haussa les épaules.

- Allons-y.

William fila en avant, suivi par Mathilde. Aelita resta légèrement en retrait, prête à intervenir si un imprévu surgissait. Mais tout se déroula facilement : William réapparut juste sous le nez de la Tarentule qui fut tranchée en deux. Le premier Krabe subit rapidement le même sort, si bien que Mathilde lança :

- Laisse-moi le dernier !

William hocha la tête et se contenta de parer les tirs du dernier monstre.
Bien que le sens du toucher n'existe pas sur Lyoko, Mathilde crut ressentir quelque chose dans sa paume. Un pressentiment l'étreignit, accompagné d'une image dans son esprit. Guidée par son instinct, elle plaça son fouet à l'horizontal et lui donna une impulsion. Une onde d'énergie fusa, d’un bleu crépitant. Elle coupa les pattes du Krabe qui manqua écraser William. Plutôt que de se plaindre, celui-ci s'empressa d'achever le monstre.

- Copieuse ! Je fais la même chose avec mon arme !
- Les ondes de choc ?
- Oui.
- En fait, je…
- Plus tard ! leur lança Aelita. On s’en sort bien pour l’instant, on ne va pas s’arrêter pour faire causette !

William hocha la tête et Aelita avança vers la tour. À la surprise générale, le halo rouge disparut avant même qu’elle pose la main sur la paroi.

- Vous n’êtes pas censés rentrer dedans pour la désactiver ? s’étonna Mathilde.
- Jérémie ? Qu’est-ce qui se passe ?
- DEVIRTUALISEZ-VOUS !
- Quoi ?

Les trois Lyoko-Guerriers échangèrent des regards surpris. Le hurlement de Jérémie se confondit ensuite avec le cri paniqué de William.

- La Méduse !

Aelita sentit son cœur tomber dans sa poitrine tandis que Mathilde faisait reculer Fenrir dans un geste incontrôlé. Un monstre venait de sortir de derrière la tour. Haut de deux mètres cinquante, peut-être trois, il flottait à la même hauteur au-dessus du sol. Huit tentacules deux fois plus longs que son corps, ajoutés à sa sorte de tête transparente, justifiaient assez bien le nom de Méduse qu'avaient hurlé les garçons. Le signe de XANA apparaissait sur ce qui aurait pu lui servir de visage mais ce ne fut pas là que le champ de force d’Aelita vint s’écraser.
William ne parut même pas sentir l’attaque et s’évapora en confettis blanc avec une expression d’horreur dessinée sur son avatar.

- C’est quoi ? demanda Mathilde, gagnée par la panique de ses amis.
- Je t’expliquerai plus tard ! Dévirtualise-moi !

Mathilde ne chercha pas à comprendre. Elle plaça le manche de son fouet à l’horizontale et envoya une onde en direction d’Aelita. Celle-ci disparut au moment où deux champs de force venaient frapper Mathilde.
La jeune fille réapparut debout dans un scanner. Cette fois, personne ne l’attendait à la sortie. Elle ne tarda pas à remarquer William, assis juste devant un deuxième scanner, tremblant et enlacé par Aelita.

- Calme-toi, ça va aller. Ça va aller.

Mathilde s’approcha d’une démarche hésitante. William avait l’air en état de choc mais elle ne put s’empêcher de demander :

- Qu’est-ce que c’était ?

Aelita serra un peu plus fort William dans ses bras. Elle n’avait pas eu vraiment l’occasion de se montrer tactile envers lui, ce qui ne l’empêchait pas de ressentir à son égard la même affection que pour les autres. Elle savait de plus qu’en cet instant, les mots ne seraient pas suffisants pour l’apaiser.
Elle attendit qu’il respire un peu plus normalement pour glisser sa main dans la sienne et se retourner vers Mathilde.

- La Méduse. Un monstre a priori unique créé par XANA. On pensait s’en être débarrassés avant d’éteindre le Supercalculateur mais j’imagine qu’elle a été reprogrammée.
- Elle doit avoir quelque chose de spécial pour vous faire aussi peur…
- Elle est capable de prendre possession de ton avatar. J’ai déjà attaqué les autres plusieurs fois en étant sous son emprise, j’ai même détruit des territoires et…

Aelita jeta un regard à William qui ne réagit pas.

- Et il a eu ce genre de problèmes.
- Je vois…

Les portes du monte-charge s’ouvrirent et le reste de la bande déferla dans la salle des scanners.

- Vous allez bien tous les trois ?

Les filles hochèrent la tête mais William se recroquevilla un peu plus sur lui-même.

- Je l’ai senti, annonça-t-il d’une voix rauque. J’ai senti XANA dans mon esprit, comme s’il… Comme si je me souvenais, comme si je… j’y retournais… En voyant la Méduse, j’ai cru que j’allais à nouveau être sous son contrôle… Non c’était pire que ça, je savais que j’allais l’être à nouveau, il n’y avait aucun espoir…
- Tu es là, William, la Méduse ne t’a pas touché.
- Peut-être mais on sait qu’on a un problème de plus sur les bras, signala Yumi. De toute évidence, XANA veut récupérer son lieutenant.
- Peut-être pas, objecta Jérémie. Peut-être que c’est après Aelita qu’il en avait ou…

Les regards se tournèrent vers Mathilde qui eut un mouvement de recul.

- Quoi, vous pensez que c’est ma faute ?
- On croyait la Méduse hors course et elle revient comme par hasard à ta deuxième virtualisation. C’est un peu gros comme coïncidence, tu ne trouves pas ?
- Je ne sais pas. Qu’est-ce que je pourrais apporter à XANA ? C’est vrai, je ne connais quasiment rien de Lyoko, je n’ai rien de particulier, je…
- Jérémie se trompe sûrement, intervint Aelita. XANA voulait sans doute récupérer William. Ou alors, la Méduse peut nous prendre des codes sur Lyoko, auquel cas, c’était moi qu’elle visait.
- Mais dans les deux cas, pourquoi on ne l’a pas vue avant ?
- Aucune idée. Je suis perdue aussi.

Le silence s’installa. Mathilde sentait que sa question allait paraître idiote et futile par rapport à la gravité de la situation mais elle demanda quand même :

- Vous croyez que Fenrir s’en est tiré ?
- La Méduse ne pouvait rien prendre en lui mais par précaution, je l’ai supprimé avant qu’elle l’attaque. Après, elle a disparu de mes radars donc oui, on peut dire qu’il s’en est tiré.

Le silence s’installa à nouveau. Perdu dans ses pensées, Jérémie regardait fixement devant lui tandis qu’à l’inverse, les yeux d’Aelita passaient de William à Mathilde. Les autres se jetaient des coups d’œil furtifs sans oser parler.

- Je vais rester un peu pour essayer de trouver quelque chose, finit par annoncer Jérémie.
- Moi aussi alors, ajouta aussitôt Aelita.

Le garçon parut sur le point de protester mais il se contenta de hausser les épaules. Hésitante sur la démarche à suivre, Mathilde lança :

- Je rentre chez moi ou je peux donner un coup de main ?
- Non, rentre, lui répondit Jérémie avec une esquisse de sourire. Merci de ton aide.
- Je te raccompagne.

William avait été plus rapide qu’Ulrich mais il n’échappa pas à Yumi que son samouraï avait également ouvert la bouche. Renfrognée, elle ne répondit pas au salut de Mathilde qui n’en prit pas ombrage. Moins égoïste, Aelita demanda à William :

- Tu es sûr ?
- J’ai besoin de m’aérer un peu.

La jeune fille hocha la tête. Quelques minutes plus tard, William et Mathilde marchaient côte à côte.

- Il faudrait que Yumi réalise qu’Ulrich est fou d’elle, signala timidement Mathilde, ne sachant pas trop comment lancer la conversation.

Les histoires de cœur paraissaient insignifiantes à côté de la peur qu’avait eue William mais la distraction lui convenait :

- Reconnais que son comportement porte à confusion.
- Je ne trouve pas. Au contraire, il essaye de la rendre jalouse en faisant semblant de me draguer. Tu connais mieux Ulrich que moi et tu me détromperas peut-être mais si je l’intéressais vraiment, tu crois qu’il serait aussi entreprenant ?

William sourit.

- Un point pour toi.
- Il a l’air timide.
- Trop. Je suis surpris qu’ils s’accrochent encore l’un à l’autre après tout ce temps.

Mathilde s’arrêta pour laisser passer un vélo avant de demander :

- Tu es jaloux ?
- Je l’ai été.
- Et ?
- Et quoi ?
- Pourquoi tu ne l’es plus ?
- Tu poses toujours autant de questions ?
- Et toi ?

Ils échangèrent un sourire. Mathilde se surprit alors à remarquer des détails auxquels elle n’avait pas prêté attention. La manière dont William gardait toujours les cheveux ébouriffés. Son sourire charmeur, probablement sans qu’il le réalise. Son regard sombre, en contraste avec son teint pâle. Sûr de lui, parfois orgueilleux mais pas inattentif aux autres pour autant. Il avait ce côté « je suis fort mais j’ai mes faiblesses » qui captivait les filles. Mathilde espérait sincèrement qu’ils deviendraient amis.

- Tu sais, le coup des ondes de choc avec mon fouet.
- Oui ?
- Je l’ai vu dans un jeu vidéo, avoua-t-elle avec un petit sourire. Je n’ai aucun mérite.
- C’était quand même bien pensé.
- Tu crois que j’aurai un pouvoir ? Aelita m’a dit que Yumi était télékinésiste et j’ai vu la fumée dans laquelle tu te déplaçais.
- Pour moi, ce n’est pas vraiment un pouvoir, plutôt…

William ne termina pas sa phrase. Mathilde comprit qu’ils abordaient la phase « j’ai mes faiblesses ».

- Ce que tu as dit tout à l’heure sur le fait d’être sous le contrôle de XANA… Ce n’était pas exactement comme pour Aelita, n’est-ce pas ?
- Pas exactement, railla William.

Il hésita un instant. Il n’avait jamais reparlé aux autres du temps que XANA lui avait volé. Il avait énormément échangé avec Yumi mais ce sujet était tabou, sans qu’il sache si la réserve venait d’elle ou de lui.

- Aelita n’était que très temporairement sous l’influence de XANA. Moi, quand la Méduse m’a lavé le cerveau… Je suis resté plusieurs mois prisonnier de Lyoko et de XANA.

Mathilde en eut le souffle coupé et William devina tout de suite ce qu’elle pensait.

- Oui, Jérémie s’est bien gardé de te raconter le revers de la médaille. Cette Méduse… C’est la chose sur Terre qui me fait le plus peur.
- Ce n’est pas vraiment sur Terre, donc tu n’as peur de rien, essaya de plaisanter Mathilde. Mon frère a la phobie des poissons et je te garantis qu’avec lui, ça n’a rien de virtuel !
- J’imagine. En tout cas, sache qu’on a bien agi tout à l’heure. Attendre aurait permis de voir après qui en avait la Méduse mais mieux valait ne pas prendre de risques.
- Nous étions à un contre trois pourtant.
- Crois-moi… Cela n’aurait pas été suffisant.

***


Alors que William et Mathilde se séparaient, Jérémie et Aelita travaillaient en silence. Ou plutôt, Jérémie pianotait sur son clavier tandis qu’Aelita hésitait sur l’attitude à adopter dans cette atmosphère pesante.

- Tu m’en veux ? finit-elle par demander.
- De quoi ? D’avoir pris ton après-midi tranquille, ce qui a entrainé une virée en solo de Yumi sur Lyoko ? Pourquoi je t’en voudrais ? répondit Jérémie, cinglant.
- J’avais besoin de prendre un peu l’air.
- Aelita, on ne peut pas se permettre ce genre de choses. Toi mieux que quiconque, tu sais que…
- Je voulais rapprocher Mathilde et Yumi, je ne pensais pas qu’on aurait une attaque. Je ne pensais pas que couper mon portable quelques heures serait considéré comme un crime de lèse-majesté ! Je ne pensais pas que tu pourrais stupidement bouder autant !

Jérémie leva la tête de son clavier et pour la première fois de sa vie, il eut un éclat de lucidité sur la gente féminine.

- Qu’est-ce qui ne va pas ?
- Tout va bien, j’ai un petit ami qui me fait la tête pour une catastrophe qui n’a pas eu lieu.
- Arrête ta mauvaise foi. Quelque chose te tracasse.

Aelita fronça les sourcils. Jérémie n’avait plus l’air de lui en vouloir. Il semblait même sincèrement inquiet pour elle. Elle n’avait pas le droit de lui mentir.

- Je fais des cauchemars sur ma mère. Depuis qu’il y a eu ce spectre avec son apparence, ça n’arrête pas, j’y ai le droit presque chaque nuit. Elle est là, si proche que je pourrais la toucher, mais dès que je tends la main, elle disparait. Je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’elle…
- Qu’elle est vivante ?

Aelita hocha la tête.

- Pourquoi les hommes en noir l’auraient tuée ?
- Pourquoi l’auraient-ils laissée en vie ? ne put s’empêcher de répliquer Jérémie.
- Elle aurait pu être un moyen de pression sur mon père. Vivante, elle pouvait servir à le faire chanter. Et elle en savait sûrement long sur ses travaux. Peut-être qu’elle pouvait leur donner des informations ?
- Je ne sais pas, Aelita.
- Je pense que Tyron pourrait avoir des infos sur elle. Après tout, il semble avoir travaillé avec mon père. On ne peut pas exactement savoir si c’était avant ou après l’enlèvement de ma mère, si ?
- Je ne sais pas, répéta Jérémie.

Comprenant qu’il ne servait à rien d’insister, Aelita se tut et le silence s’installa à nouveau.

***


Laura était allongée sur son lit. Son vrai lit, celui dans la maison de son père. Dire que quelques heures plus tôt, elle retrouvait sa motivation à travailler ! À présent, elle avait envie de rester tout le reste de la soirée à fixer le plafond en essayant de ne penser à rien. Mais trop de choses se bousculaient sous son crâne.
Sa mère, Emma Gauthier, était vivante.
Elle l’avait espéré en secret pendant son enfance, cet espoir fou et impossible que l’on garde quand même. Adolescente, elle avait accepté l’idée de la mort mais ses rêves n’avaient pas cessé. Son subconscient l’empêchait de vraiment faire son deuil. Parfois, elle imaginait sa mère revenir et dans ces cas-là, elle se voyait folle de joie.
La réalité était toute autre. Elle n’avait pas décroché un mot de tout le trajet en voiture. Son père conduisait, en silence également, et sa mère avait vite renoncé à faire la conversation, comprenant que Laura « aurait besoin de temps pour accepter ».

- Certaines choses devaient rester secrètes. Je te promets que je t’expliquerai tout. Quand tu voudras.

Mais Laura n’était soudain plus sûre de vouloir.
Quel secret pouvait valoir qu’on simule sa mort pendant dix ans ? Qu’on se coupe de sa famille ? De sa fille unique ?
Laura eut un sourire amer. Elle valait moins qu’un secret.
Ses doigts jouaient avec son portable, verrouillé. Elle n’avait aucun ami à appeler, aucune famille non plus. Elle avait toujours cru, après la mort de sa mère, qu’elle resterait seule avec son père jusqu’au jour où elle envisagerait, peut-être, d’avoir des enfants. L’enterrement avait été sinistre, il n’y avait eu que quelques collègues de sa mère pour venir la pleurer. Pas de famille, pas de proches…
L’enterrement.
Elle n’avait pas pu l’imaginer. Le souvenir était bien présent dans sa tête. Il ne restait donc que deux options.
Laura s’empara de sa tablette. Le fait d’avoir grandie sans ami l’avait poussé à souvent écrire pour ordonner ses pensées. Elle n’arrivait pas à parler de ce qui la tracassait, elle n’avait jamais sur résoudre ses problèmes sans les avoir couchés sur le papier ou sur son écran.
Soit cette femme n’est pas ma mère. Auquel cas, pourquoi se fait-elle passer pour elle ? Qu’est-ce qu’elle y gagne ? Qui le lui demande ? Pourquoi mon père est-il complice ? Pourquoi je réagis physiquement en la voyant si ce n’est pas ma mère ?
Soit c’est ma mémoire qu’on a trafiqué, auquel cas, les questions restent semblables. Pourquoi s’être fait passer pour morte ? Qu’y gagnait-elle ? Qui le lui a demandé ? Mon père était-il au courant ? Qui a réussi à jouer avec mes propres souvenirs ?
Il reste aussi l’option de ces deux hypothèses mêlées. Non seulement ma mère n’est pas morte mais en plus, une autre femme se fait passer pour elle. Peut-être pour la retrouver ? Pourquoi ?

Laura écrivit encore une dizaine de fois le mot « pourquoi » avant de reprendre ses esprits. Elle schématisa son écrit et changea son mot de passe, au cas où. Elle glissa ensuite sa tablette verrouillée sous son oreiller.
Maintenant, si elle voulait des réponses, elle n’avait plus le choix. Il fallait qu’elle pose des questions.
Sa mère (jusqu’à preuve du contraire, elle allait devoir la considérer comme telle) était assise sur le canapé à côté de son père. Elle tourna la tête vers Laura quand celle-ci entra dans le salon.

- Bonsoir. Tu as faim ?
- Non. J’ai envie de savoir.

Emma ne soupira pas, ne fit pas celle qui peinait à comprendre. Elle répondit sur un ton neutre, sans trace d’excuse ou de tristesse.

- Pour ta sécurité, il vaut mieux que tu en saches le moins possible. Tu étais sans doute trop petite pour t’en souvenir mais avant de… disparaître, j’étais scientifique. Je travaillais sur un projet gouvernemental secret qui a fini par attirer des personnes mal intentionnées. J’ai dû alors prendre des dispositions pour me protéger et vous protéger aussi. J’ai fait croire à ma mort et j’ai poursuivi mes recherches en Russie. Ton père était au courant.

Laura accusa le choc et se tourna vers son père. Comment avait-il pu lui cacher une chose pareille ? Comment avait-il pu lui mentir toutes ces années ? Une bouffée de haine inhabituelle lui monta au visage mais elle préféra se tourner à nouveau vers sa mère pour demander :

- Pourquoi tu es revenue ?
- Parce que j’ai besoin de toi.

La partie rationnelle, froide et posée de Laura reprit le dessus. D’accord, sa mère n’était pas revenue parce qu’elle lui manquait. Mais elle requérait son aide. La curiosité l’emportait largement sur la rancœur.

- Qu’est-ce que je peux faire ?
- Cela concerne mes recherches. Elles prennent une tournure de plus en plus concrète. Nous savons que nous touchons au but mais nous avons rencontré un problème récemment. Ton père m’a confirmé que tu n’avais rien perdu de ton intelligence. A quatre ans, tu essayais déjà de traficoter notre ordinateur… Tu t’intéresses toujours à l’informatique ?
- Oui.
- Qu’est-ce que tu dirais de travailler sur un ordinateur quantique ?

La méfiance de Laura revint au galop. La coïncidence était trop grande. Sa mère réapparaissait pour lui proposer de travailler sur un ordinateur quantique quelques semaines après qu’elle découvre Lyoko ? C’était forcément lié.
Mais pour le moment, elle devait jouer l’innocente.

- Bien sûr que ça me dirait.
- J’en ai parlé avec ton père et le proviseur. Samedi prochain, toi et moi, nous partons en Russie.

Laura regarda son père. Il souriait mais elle le sentait nerveux.

- Tu ne viens pas ?
- J’ai trop de travail ici ma chérie et ça te fera du bien de passer du temps avec ta mère.
- Et le proviseur me laisse quitter l’école comme ça ?
- Je lui ai assuré que ton enseignement là-bas serait optimal.
- Je ne parle pas russe.
- La majorité du personnel de la base parle plusieurs langues, tu n’auras pas de soucis. Mais si tu ne veux pas y aller, je comprendrais.

Les choses paraissaient de plus en plus incohérentes à Laura. Sa mère se faisait passer pour morte, assurait que c’était pour protéger sa famille, sortait de l’ombre pour venir la chercher et accepterait sans sourciller qu’elle ne vienne pas ? Ce n’était pas logique.

- Tu ne me dois rien, Laura, pas après tout ce temps à te faire croire que je n’existais plus. Mais j’aimerais vraiment que…
- Je viens.
- Tu es certaine ?
- Oui. A demain.

Laura quitta le salon sans attendre de réponse mais déjà, un large sourire s’étalait sur ses lèvres.
Elle n’avait plus besoin de feindre un exposé sur la nanotechnologie.
Elle allait pouvoir travailler sans se cacher sur un ordinateur quantique, ce qui allait drastiquement simplifier ses recherches sur la virtualisation.
Bientôt, elle serait capable d’aller sur Lyoko. Non pas qu’elle en tire un intérêt particulier. Elle voulait juste se savoir capable d’y arriver. Et puis... Cela pourrait toujours être utile plus tard.

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Petite note pour Mophie : Emma = Sandra (trollface)
  Sujet: [One-shot] Au bal masqué  
Ellana

Réponses: 4
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MessageForum: Fanfictions Code Lyoko   Posté le: Ven 02 Oct 2015 08:19   Sujet: [One-shot] Au bal masqué
Bonjour, bonsoir !

J'ai l'impression que cela fait une éternité que je n'ai pas commenté mais je passais par là et j'ai vu ce texte tout jeune et tout frais, ça m'a donné envie de lire et commenter.

Tout d'abord, je ne vous cacherai pas que j'ai un peu de mal avec votre style. Vous trouverez plus bas certaines phrases mais dans l'ensemble plusieurs sonnent bizarrement et ce dès le début du texte : «  'Une fois que la pensée eut émergée du présent », « déchirant le dernier voile qui l’empêchait d’être pleinement », « Quand bien même eût été l’amour, » m'ont par exemple un peu bloquée.

Concernant le fond, j'ai beaucoup aimé votre vision des collégiens, un peu sombre et réductrice, mais néanmoins non-dénuée de fondement. Dans l'ensemble, l'analyse que vous faites des gens est assez bonne (celle de l'organisateur qui prend moins de plaisir à participer est tout à fait juste).
Il y a toutefois, sur le fond encore, quelques moments gênants : le fait qu'il retourne dans sa chambre pour se raser alors qu'il aurait été plus logique de le faire dans la salle de bain. Certes, il semble ne pas vouloir être vu mais tout de même, il n'a qu'à se lever plus tôt... C'est idiot à dire, pourtant, cela serait plus simple.
Si j'avais bien reconnu Jim (le fait qu'il se rase, son rôle d'organisateur, sa distance par rapport aux autres), je ne m'attendais pas à ce que vous repreniez l'épisode 1 (influencée sans doute par le titre, « bal masqué », pris au sens premier du terme alors que dans Teddygozilla, il s'agit d'un simple bal, sans loups). C'était une idée cohérente mais trop de détails ne vont pas avec le texte par rapport à l'épisode. Notamment le fait que Jim rencontre l'ours géant : on ne voit pas assez le contraste entre l'avant et l'après. On aurait pu croire que c'était la rencontre avec l'ours qui aurait causé un choc psychologique mais votre récit prend justement les choses à la racine et nous offre une autre version du personnage puisque, fatalement, nous avons peu d'informations certifiées sur Jim avant le début de la série. En fait, le Jim que nous connaissons ne l'est devenu que parce que XANA est passé par là. C'est une version très séduisante.

Voici les points remarqués sur la forme :
Spoiler


Donc en conclusion, je dirai que la dernière moitié du texte est très bien réussie (c'est tout ce qu'on demande à une chute d'ailleurs) mais que la première moitié se perd un peu dans des phrases alambiquées. Alors, je vous reprendrai en indiquant que si je ne juge pas des goûts et des couleurs, je me permets d'en parler en disant que votre style n'est pas de ceux que j'affectionne. Cela ne remet évidemment pas en cause le fait que votre texte comporte des qualités. Je laisse donc la place à d'autres commentateurs qui auront sans doute mieux réussi que moi à s'immerger dans l'histoire elle-même.
 

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