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[One-shot] Nez cassé, gueule en sang

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 Auteur Message
BloodyDarkDay MessagePosté le: Ven 30 Déc 2016 18:24   Sujet du message: [One-shot] Nez cassé, gueule en sang Répondre en citant  
[Kankrelat]


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Localisation: Great Inagua, 1716.
Spoiler



Nez cassé, gueule en sang




On l'avait attrapé. En plein milieu de la rue. En pleine journée. Une voiture, sombre, s'était brusquement arrêtée. Il avait entendu les pneus crisser. Son regard fut attiré. Deux hommes. Baraqués. Taillés comme deux Goliath. Lui n'était qu'un petit David. Il n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Il marchait au milieu du large trottoir. En deux pas, les géants furent près de lui. Le saisirent. Lui couvrant la tête d'un sac de tissu. Lui attachant les mains d'un large adhésif. Le balançant dans ce qui lui sembla être le coffre. Ils n'avaient même pas posé de question. Personne n'avait rien vu. Il était seul. On était dimanche. La rue n'était pas passante. Il n'avait même pas eu le temps de crier.

Il avait pensé à une attaque du programme informatique. Ses mains, serrées dans son dos, ne lui avaient pas permis de s'extraire du sac posé sur sa tête. Il ne parvenait pas à se libérer. Il était aveugle, et restreint. Il ne discernait rien à travers le tissu opaque. Alors, il avait donné des coups de pieds. Il avait crié. « Au secours ! » Espérant ainsi attirer l'attention. D'un piéton qui passerait près de la voiture. D'un cycliste. De n'importe qui. Mais le véhicule continuait de rouler. Il était ballotté. Secoué. Il ne sait pas combien de temps cela avait duré. Le bruit du moteur lui assourdissait les oreilles. L'odeur puante du sac de jute lui donnait la nausée. Il avait alors tenté de s'en débarrasser. Celui-ci n'était pas attaché. Il avait donné des coups de tête. Dans tous les sens. Avait tenté de se tourner. De se retourner. Le coffre était étroit. Il ne réussit qu'à donner plusieurs coups de tête dans la paroi. La chaleur de son agitation émanait de son corps. Il sentait sa peau devenir moite. Quelque goutte de sueur perlaient çà et là sur son front. Son souffle s'était quelque peu accéléré sous les convulsions. Puis il s'était calmé. Ce n'était pas ici qu'il se libérerait.
Il avait senti la voiture ralentir. Puis s'arrêter. Entendu une portière s'ouvrir. Puis claquer. Il s'était raidi. Le coffre s'ouvrit. L'endroit lui paraissait calme. Ils étaient sortis de la ville. Une main lui arracha le masque de jute. Il fut, un bref instant, ébloui. Puis ses yeux distinguèrent à nouveau. Au sol, un tapis d'herbe. Devant lui, à une centaine de mètres, une rivière. Large. Puis deux hommes. En costume et cravate noirs. La coupe courte. Des lunettes de soleil barraient leurs visages. Masquaient leurs yeux. Ils se tenaient devant lui. Il pensa un instant qu'ils allaient le noyer là. Tout autour n'était que verdure. Ils étaient isolés. Il était vain de crier.

« Qu'est-ce que vous voulez ? »

Son ton était assuré. Il n'avait pas laissé transparaître la tension qui l'enveloppait. Il était cependant sur la défensive. Se préparant à toute éventualité. Une main s'avança sur lui. Celle de l'homme qui était le plus près. Il tenta de l'éviter. Se reculant un peu plus dans l'habitacle. La main l'agrippa tout de même.

« Non, non ! »

Il donnait des coups de pieds. Il sentait les muscles tendus de l'homme sous ses chaussures. L'autre fit un pas. Lui maintenant les jambes. Le premier le plaqua sur le dos. La main était parvenue jusqu'à son cou. Il voulait l'étrangler. Se débattant vainement, bouche ouverte, il luttait pour capter l'air. L'homme en profita pour placer quelque chose dans sa bouche. Il sentit alors que celui-ci portait des gants. Épais. Peut-être en espèce de cuir. Il ne parvint pas à le mordre. Il lui ferma la bouche. La maintenant scellée. Le forçant à avaler. Sa main englobait son nez. Le garçon n'eut pas le choix. C'était un comprimé. Il sentit l'amertume envahir sa bouche. Il déglutit. Et le sentit tomber au fond de sa gorge. La main le relâcha. L'oxygène parvint de nouveau à ses poumons. Il haletait. L'homme mit une main sur le battant du coffre pour le refermer. Le garçon fit un bond.

« Non, attendez, qu'est-ce que vous me voulez ! »

Le ton était déterminé. Il s'était redressé. Il voulait sortir. Les hommes en noirs l'ignoraient. Il vit la porte du coffre s'abattre. Il passa ses jambes maintenant libres au dehors, donnant de nouveau coup. Touché. L'homme relâcha sa prise, la porte du coffre remonta. Le garçon continua de se débattre. L'homme se pencha sur lui. L'adolescent lui asséna un coup de boule courageux, et lui fit perdre ses lunettes. Il voyait désormais les yeux de son agresseur. Des yeux mornes. Des yeux froids. Mais surtout, des yeux normaux. Le blondinet fut surpris. Il cessa une seconde de se débattre. Il scrutait les yeux. Des yeux qui ne le lâchaient pas. Les siens étaient béants. Il se sentit soudain chancelant. Ses forces l'abandonnaient. L'homme le fit rouler. Il reprit sa place dans le coffre. Sa vue était brouillée. Ses yeux, embués. Il vit la porte du coffre se refermer. Ses paupières étaient lourdes. Il ne pouvait plus bouger. La pénombre l'avait enveloppé.
Ils n'avaient pas lâché un mot.
Un air de musique lui vint brièvement en tête, tandis qu'il sombrait. Ils l'avaient drogué.


Soudain la lumière. Sa vision tournoyait. Floue. Ses paupières étaient tombantes. Il avait la tête lourde. Bringuebalante. La bouche sèche. Il reprenait peu à peu conscience de son corps. Il reprenait peu à peu possession de ses moyens. Enfin. De ses faibles moyens.
Il était attaché. Toujours les mains dans le dos. Ses pieds, aussi. Ils étaient entravés. Fixés à ceux de la chaise. Sur laquelle il avait été placé. Métallique. Dure. Ils l'avaient amené dans une vaste pièce aux murs froids, sales et humides. Dont la seule source de lumière provenait d'une grille ronde au milieu du plafond, sous laquelle il était placé. Une large porte métallique lui faisait face. Il ne savait pas combien de temps il était resté inconscient. Il avait le sentiment que ce fut longtemps. L'atmosphère était lourde. Pesante. Il avait chaud. Son front brillait de gouttelettes. Le soleil cognait au-dessus de sa tête. Il devait être aux alentours de midi. Il avait faim. Et la nausée en même temps. C'était ça. La nausée. Il sentait son estomac se tortiller. Il avait des haut l'cœur. Le médicament. Il ne pouvait plus se contenir.
La porte métallique s'ouvrit.

« Oh nan, il s'est gerbé d'ssus. »

Il toussota. Cracha. La tête tournée sur le côté. Expirant lourdement. Il avait effectivement quelques retombées malodorantes sur l'épaule. Deux hommes étaient entrés. Différents. Ils n'étaient pas ceux qui avaient procédé à son enlèvement. Leur teint était mate et quelque peu marqué. Leurs treillis sombres aux nuances kaki et marron. Ils portaient des gilets pare-balles. Des rangers foncées et poussiéreuses. Le premier semblait être le plus âgé. Quelques poils grisonnant dans une barbe fournie. Une cigarette entamée à la main. Il était taillé comme une armoire à glace. L'autre avait les traits plus lisses. Le poil plus noir. Un peu moins imposant. Le garçon se sentit de nouveau tout petit face aux géants. Les scrutant. Un pistolet à la ceinture. Un couteau mal dissimulé au mollet. Un fusil automatique en bandoulière dans le dos. Il déglutit. Ils avaient sorti l'artillerie lourde. Sûrement pour l'impressionner. Lui faire peur. Mais il ne se laisserait pas démonter.

« Alors alors… Qu'est-c'qu'on va faire de toi... »

Le plus vieux avait parlé. D'une voix posée. Calme. Néanmoins ferme. Sur un fond menaçant. Parfaitement maîtrisée. S'approchant lentement. Le scrutant. L'étudiant. L'autre avait fait quelques pas derrière lui. Restant cependant à une légère distance. Le vieux avait fait le tour du garçon. Pour revenir se positionner face à lui. Le fixant de sa hauteur. Exhalant sa fumée de cigarette. Lui les regardait avec un air de défi.

« Oh ça, c'est vous qui voyez, mais si je peux me permettre d'émettre quelques suggestions, vous pourriez installer un peu mieux vos invités. »

Un ricanement. Le vieux vint poser son pied droit entre les genoux du garçon. Prenant appui sur la chaise. Se penchant davantage sur lui. Le coude posé sur sa jambe maintenant surélevée.

« T'es un p'tit marrant toi hein. Ne t'en fais pas. Ça ne durera pas longtemps ici. »

Il donna machinalement un coup sur sa cigarette pour en évacuer les cendres. La portant de nouveau à sa bouche. Ne le lâchant pas des yeux.
Il avait alors vite compris. Les hommes qui l'avaient enlevé n'étaient pas xanatifiés. Pas le moindre sigle dans leurs yeux. Pas le moindre pouvoir électrique. Pas la moindre voix déformée. Cela aurait peut-être dû le rassurer. Mais il n'en était rien. Si le programme informatique avait été à l'origine de son enlèvement, cela aurait voulu dire que les autres étaient déjà au courant, qu'ils allaient désactiver la tour, qu'ils allaient lancer le retour vers le passé. Qu'il s'en sortirait forcément. La réalité était toute autre. Ces hommes agissaient bien de leur propre volonté. Cela rendait considérable le champ des possibles. Il ne pouvait être certain de son avenir. Excepté qu'il vivrait encore assez longtemps tant qu'il ne leur donnerait pas ce qu'ils voulaient. Peut-être même encore après. Oui. Cela restait très probable. Après tout, ce n'était encore qu'un enfant. Il tentait silencieusement d'éclaircir le mystère de leurs identités. Était-ce les hommes en noirs qui avaient enlevé la mère d'Aelita ? Était-ce ceux qui avaient remonté la piste de Jérémy lors du coup monté de X.A.N.A il y a un peu plus d'un an ?
Il n'en savait rien. Tout cela n'avait pas le moindre sens.
Ils lui avaient expliqué, pourtant.

« On sait ce que tes amis et toi trafiquez. On veut leurs noms. On veut celui, ou celle, qui est le cerveau de votre bande. On veut l'accès à votre arme. Ce n'est qu'une question de temps avant que nous la localisions. Tu ferais mieux de parler. Tu t'éviterais bien des désagréments. 
– Une arme ? Mais quelle arme ? Vous rigolez là ? »

Une gifle. Une grosse.

« Est-ce qu'on a l'air de rigoler, tu crois ? »

Il ne disait plus rien. Paralysé. Le geste l'avait secoué. La main avait fusée. Aussi large que sa joue. Celle-ci s'était empourprée. Il ne sentait plus le côté gauche de son visage. Le coup résonnait dans sa mâchoire. Il ne parvenait pas à articuler. Il avait maintenant la bouche ouverte. Sa respiration s'était involontairement accélérée. Il n'avait pas anticipé. Il ne pensait pas qu'ils en arriveraient là si vite. Les coups. La violence physique. Il sentit quelque chose de chaud. S'écouler lentement de sa lèvre. Un mince filet rougeâtre. Mêlé à sa salive. Arraché par la gifle. Il avait les idées dérangées. Le geste l'avait chamboulé. Il réussit tout de même à formuler.

« Mais.. J'vous jure que, nous, on n'a pas d'arme. »

Pourquoi croyaient-ils qu'ils possédaient une arme ? Comment étaient-ils remonté jusqu'à eux, d'ailleurs ? Et pourquoi avaient-ils besoin d'une quelconque arme ? Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien vouloir en faire ? Il est vrai que le supercalculateur, si on en croyait Jérémy, pouvait en devenir une. Il lui paraissait cependant impensable que des hommes comme eux aient connaissance de cette technologie avancée. Qui étaient-ils ? Une organisation secrète du gouvernement ? Un commando d'élite de l'armée ? Une organisation terroriste ? Des talibans ? Il ne comprenait toujours pas.

« Alors, vas-tu te décider à parler ? 
– Parler, ça oui, je veux bien. De quoi voulez-vous qu'on cause ? »

Une gifle. De nouveau. Son autre joue était maintenant tout aussi colorée et douloureuse que sa jumelle. Le plus jeune avait laissé sa main s'emporter.

« Doucement veux-tu ? Nous ne voulons pas brusquer notre très cher invité... »

Ils ricanaient tous les deux. Le calme avec lequel le plus âgé s'exprimait et agissait laissait présager une grande expérience. Ils étaient loin d'être amateurs. Ils savaient exactement ce qu'ils faisaient.

Ils l'avaient assailli de question. Et de quelques coups. Essayant sûrement de lui embrouiller l'esprit. De le déstabiliser. De le pousser à bout. Mais il avait su résister. Il n'allait pas céder aussi facilement. Il avait déjà vécu pire. Il était capable de tenir. Cela n'eut cependant pas l'air de contrarier ces ravisseurs. Ils semblaient avoir tout leur temps. Ils semblaient également apprécier ce qu'ils faisaient. Il avait pu déceler un semblant de contentement sur leurs visages. Un semblant de sadisme dans leurs regards. Ils auraient probablement été déçus d'en finir si vite. Quoi qu'il fasse, il semblait leur donner satisfaction.
Maintenant seul. Après un temps qu'il avait estimé de plusieurs heures, à en juger par la façon dont le soleil avait lentement déclin à travers la grille circulaire du plafond. Ils avaient fini par lui libérer les chevilles. Le balançant au fond de la pièce. Avant de s'en aller. Embarquant la chaise. Le laissant dans l'immensité vide de l'espace rectangulaire. Il avait tenté de se débarrasser encore une fois de l'adhésif immobilisant ses poignets. Il avait essayé de faire bouger ces derniers dans le but d'élargir ses liens. Cependant, la chaleur avait chauffée la colle, qui était à présent bien plus gluante et adhérente que jamais. Il poussa un grognement mêlé d'un soupir de frustration. Il renonçait. Il tenta alors de trouver une position confortable. Difficile les mains liées dans le dos. Il appuya ses épaules sur le mur froid. Assis en tailleur. Et se mit à étudier la pièce. De nombreux anneaux métalliques enfoncés dans les murs. Semblant indiquer que des gens avaient été enchaînés. Retenus prisonniers. Ici. Nombreux. À en juger par la taille de la pièce, et le nombre de ces crochets circulaires qui semblaient en faire le tour. Un frisson lui parcouru l'échine à l'idée de ce qui avait pu se passer ici. Il se mit à avoir des images mentales. Représentant de pauvres innocents. Pleurant. Se morfondant. À bout de force. À peine conscients. Réduit à néant. Esclaves. Il secoua la tête. Il avait trop regardé de séries policières récemment. Il se replia sur lui-même. Remontant ses genoux sous son menton. Espérant se cacher derrière eux. Tel un enfant apeuré. Craignant d'avoir eu un aperçu de ce qui l'attendait ici.
Les questions fusaient dans son esprit. Où pouvait-il bien se trouver ? Était-il encore dans la région parisienne ? Dans le sud du pays ? Sur une île déserte ? Était-il encore même en France ? Il en doutait profondément. Il faisait en effet beaucoup plus chaud que les dernières températures enregistrées dans son pays d'origine. Le soleil cognait fort, et longtemps. Les hommes étaient vêtus de vêtements longs les protégeant des rayons. De plus, il avait entendu quelques bribes de paroles échangées dans un dialecte reconnaissable même si l'on en comprend pas les mots. Il avait peu à peu réduit le champ des possibilités. Il ne se trouvait plus en France. Mais quelque part au sud. L'Afrique. Ou le Moyen-Orient. Combien de temps avait-il pu rester inconscient ? Probablement autant qu'il en fallait pour voyager de Paris à Bagdad, ou Beyrouth. Combien cela pouvait-il représenter ? Deux, peut-être trois jours ? Il n'en savait absolument rien. Il n'avait aucun souvenir. Entre le moment où il s'était éteint dans le coffre de la voiture, et celui où il s'était éveillé attaché à la chaise. Ils avaient sûrement dû faire la traversée de la Méditerranée en bateau. Plus facile de dissimuler le corps d'un gamin inconscient, selon lui. Il secoua la tête. Toutes ces interrogations allaient le rendre marteau. L'intensité des coups et des paroles avait laissé place à une solitude silencieuse. Oppressante. Presque terrifiante. Il n'avait d'idée de l'endroit où il était que de la pièce où il se trouvait. Mais il devait y avoir tout un campement au dehors. Toute une base. Protégée. Stratégiquement placée. Il eut soudainement le terrible sentiment qu'on ne le retrouverait peut-être jamais. De nouveau il secoua la tête. Il ne fallait pas flancher. Pas maintenant. Il avait disparu depuis au moins deux jours. Les professeurs, Jim, ses amis, se seraient bien rendu compte qu'il n'était pas rentré de sa dernière balade. Qu'il n'était plus à l'internat. Qu'il n'était plus nulle part dans l'établissement. Que son téléphone portable restait sans réponse. Qu'était-il devenu, d'ailleurs ? Probablement réduit au silence par les hommes en costumes noirs. Noyé dans la rivière. Écrasé sous un pneu de voiture. Il laissa échapper un soupir. C'était une piste en moins pour le retrouver. Quand bien même, la police avait dû être avertie. Ils ont des moyens, eux. L'accès aux caméras de surveillance. Il y avait plein de caméra de surveillance de nos jours. L'une d'entre elle devait certainement l'avoir dans ses enregistrements. Il essaya de s'en convaincre. Décida alors qu'il lui fallait résister. Tenir. Coûte que coûte. On finirait bien par le retrouver. Lui n'avait qu'à faire le reste. Résister aux attaques et aux coups. Ne pas vendre leur secret. Ne pas vendre ses amis. Et rester en vie. Il prit alors une profonde inspiration. Tout en fermant les yeux. Et laissa doucement l'air s'échapper de sa bouche. Il garda les paupières closes. Se laissant envahir de pensées agréables. Ses amis. Son meilleur ami. Son chien. Compagnon fidèle. Leurs fous rires à la récré. Ses répliques à la fille du proviseur. Toujours bien senties. Il avait l'art et la manière de lui clouer le bec. Il s'en faisait même rire lui-même. Il esquissa un sourire tandis que les images défilaient sur l'écran noir de ses paupières fermées. Une des musiques qu'il avait longtemps aimé vint accompagner ce défilé.

Il faisait à présent presque noir. Le froid avait laissé place à la chaleur brûlante. Une sensation familière l'avait tiré de ses pensées positives. Une sensation qu'il était le seul à ressentir avant tout le monde. Une sensation agréable quand enfin il pouvait la satisfaire. Une sensation qui faisait de lui ce qu'il était. Un ventre à pattes. Il avait faim.
Il n'eut pas à attendre bien longtemps. La porte s'était animée. Dans un grincement métallique. Et comme un envoyé qui aurait reçu son message télépathique, le plus jeune de ses ravisseurs était entré. Avec le même attirail qu’auparavant. Et une gamelle à la main. Il s'était approché sans un mot. Le blondinet s'était quant-à-lui redressé, tout en demeurant assis. L'autre déposa le récipient métallique près de lui. Le regarda brièvement. Avec des yeux impassibles. Presque vides. Contrastant avec la fureur qu'il avait pu y voir lorsqu'il lui avait décollé la gifle. Puis il dégaina brusquement son arme. Le revolver à la ceinture. Pointant entre les deux yeux du garçon. Celui-ci ne put empêcher de laisser échapper un son de surprise. L'autre eu un sourire. Un ricanement. Visiblement satisfait de la réaction suscitée. Le garçon ne bougeait pas d'un cil. L'autre fit alors quelques pas en arrière. Puis une fois à distance et près de la porte, rengaina, et se retourna. Il allait partir.

« Et comment j'mange moi, hein ? Avec mes pieds ? »

Il avait eu le ton téméraire. Plus qu'il ne l'aurait réellement voulu, au fond. Mais il avait les crocs. Les mains attachées dans le dos. Et ne pouvait parvenir à se débarrasser de ses liens lui-même. Alors il avait osé. Il allait peut-être le regretter. Il n'avait pas eu le choix.
L'autre revint vers lui. Sans un mot. Il l'attrapa par le col pour le mettre debout. Le garçon crut d'abord qu'il allait s'en prendre une. Puis l'autre sortit son couteau. Le blondinet laissa échapper un glapissement. Les yeux fixés sur la lame. Qui s'approchait de son visage. Il ferma les yeux. L'autre l'attrapa par l'un de ses bras. Le fit tourner sur lui-même. Abattit d'un seul coup l'arme blanche entre ses deux poignets. Lui ouvrant la peau au passage. Ses mains étaient désormais libres. Il rouvrit les yeux. Regardant l'autre avec méfiance. Il avait toujours l'arme à la main. Il y posa son regard. La lumière du ciel étoilé et lunaire filtrait suffisamment dans la pièce. Un mince filet rouge s'écoulait de la lame. Il regarda ses mains. Il lui avait entaillé superficiellement l'intérieur des poignets. Il releva la tête. L'autre le fixait. Le couteau toujours en main. Il n'avait pas bougé. Un sourire en coin s'était dessiné sur son visage. Laissant échapper un grognement de satisfaction. Ses yeux brillaient à la lumière lunaire. Lui donnant un air de cinglé.
Il le repoussa brusquement au sol. Le garçon s'étala de tout son long à la renverse. Sa tête heurtant le mur derrière lui. Il n'eut pas le temps de comprendre ce qui arrivait. Il se redressa sur ses coudes pour voir l'autre déjà près de la porte. L'ouvrant dans un grincement lancinant. La refermant dans un claquement résonnant.
Il s'assit finalement. Lentement. Sa tête tournait vaguement. Il se frotta l'arrière du crâne. Il allait avoir un hématome. Il jeta un œil à son écuelle. Pas de couvert. Logique. Mais une espèce de bouillie informe à la couleur peu ragoûtante, dans laquelle trempait un morceau de pain qui semblait rance. Il n'était plus sûr d'avoir très faim. Il se risqua néanmoins.


« Franchement si j'peux m'permettre, j'm'attendais pas à un menu quatre étoiles m'enfin quand même, même à la cantine c'est meilleur, et en plus, ils lésinent pas sur les quantités. »

Il avait décidé de leur dire sa façon de penser. Il ne tiendrait pas à ce régime là tous les jours. Ses trois estomacs n'allaient pas se contenter de tambouille prémâchée et de pain rassis. Il doutait que cela changea quoi que ce soit. Mais il se disait qu'il ne perdait rien à essayer. Après tout, ils avaient besoin de lui en vie. Il fallait donc le nourrir. Convenablement. Au moins en plus grande quantité.
À ses paroles, ils se regardèrent. N'échangèrent aucun mot. Poursuivirent.
Ils étaient revenus très tôt, ce matin. Et l'avaient de nouveau attaché à la chaise. Le soleil commençait tout juste à poindre. Le réveillant. Pas qu'il ait beaucoup dormi, de toute façon. La pièce où il se trouvait était un modèle d'inconfort. Aucun matelas. Pas même un tapis. Ni de couverture. Rien que le ciment dur et froid. Puis un seau. Qu'il préférait garder loin de lui.
Le vieux avait sorti son couteau. Et s'était mis à le contourner. Tout en continuant de l'interroger. Il semblait s'amuser à faire tourner l'arme blanche entre ses doigts. Le garçon imagina alors le nombre d'heures qu'il lui avait fallu pour parvenir à une telle dextérité. Il esquissa un sourire. Il n'écoutait déjà plus les paroles de l'autre depuis un moment. Le plus jeune restait toujours quelque peu en retrait. Et semblait observer. Ou garder la porte. Des fois qu'il réussisse à se détacher.
Ils avaient fini par s'impatienter. Son attitude commençait visiblement à leur taper sur le système. Il ignorait allègrement leurs questions. Et se permettait de continuer ses remarques impertinentes sur la nourriture. Sans qu'il ne s'y attende, le vieux était venu poser sa jambe entre les siennes. Appuyant son genou contre sa gorge. Le forçant à garder la tête relevée. À le regarder. Il vit le couteau se rapprocher de son visage. Puis disparaître sur le côté. Il sentit alors la fraîcheur de la lame sur sa joue droite. Il crut un instant qu'il allait le défigurer. Descendant l'arme lentement sur son visage. Au niveau de sa mâchoire. C'était en fait le plat de la lame qu'il sentait. Maintenant dans son cou. Il se raidit encore davantage. Tandis qu'elle descendait sur sa carotide. Il aurait pu l'égorger en une fraction de seconde. Céder en un instant à ses pulsions meurtrières. Son rythme cardiaque et sa respiration s'était involontairement accélérés. Il avait peur. Comme jamais il n'avait eu jusque là. Plus que l'angoisse de prendre des coups ou le stress de l'environnement. Il avait la trouille. Il ne voulait pas mourir. L'autre s'était arrêté un moment sur son cou. Gardant le silence. Accentuant la peur qu'il voyait grandir dans les yeux du blondinet arrogant. Il n'en menait pas large maintenant. Il ne put s'empêcher de sourire. Il semblait prendre un malsain plaisir à lui foutre la trouille. Il continua de faire descendre la lame du couteau. Au creux de son cou. Puis sur son épaule. Le garçon crut un instant que peut-être, il était tiré d'affaire. Le couteau dansait à présent sur le haut de son bras. Et il enfonça. La lame le transperça alors d'une douleur aiguë insupportable. Il ne chercha même pas à retenir le cri qu'elle lui arracha. Il serrait les mâchoires. Envoyant un regard hargneux à son bourreau. Celui-ci avait une expression presque jubilatoire sur le visage. Il continuait de descendre lentement la lame dans le bras. Le garçon eut l'impression qu'il n'en finirait jamais. Qu'il allait le lui ouvrir de haut en bas.
Il s'était arrêté, finalement. Après ce qui parut une éternité au blondinet. S'étant peut-être lassé de le faire crier. Libérant sa gorge de l'appui de son genou. Reprenant l'interrogatoire. Le plus naturellement du monde. Dans le plus grand des calmes. Pensant sûrement que son petit numéro allait délier la langue du garçon. Il n'en était rien. La douleur avait disparu comme elle était venue. Il ne ressentait plus que des tiraillements le long de sa blessure. Il avait jeté un œil à la mince ligne sanglante. L'entaille n'était que superficielle. Pas même un centimètre de profondeur. Plus douloureux que réellement grave. Depuis il n'avait plus lâché un mot. Il s'était muré dans son silence. Par pure impertinence. Se contentant de suivre du regard le vieux qui continuait ses allers et venues devant lui. Le déplaçant de temps en temps sur le jeune resté en retrait. Il essayait de leur faire passer un message. De leur faire comprendre que le charcuter n'était pas la solution. Qu'il était plus fort qu'eux. Qu'il résisterait à leur violence. Quelle qu'elle soit. Quoi qu'il arrive. Qu'ils ne le vaincraient pas. Les gifles fulgurantes semblaient cependant maintenant surannées. Ils venaient de franchir une étape. De passer au niveau supérieur. Ils semblaient visiblement très offensés par la critique culinaire du blondinet arrogant.

Pas de repas pour ce qui lui semblait être midi. Peut-être ne le nourriraient-ils qu'une fois par jour. So much pour avoir tenté de faire passer le message. La faim commençait à poindre. Doucement. Elle serait bientôt omniprésente. Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien fabriquer ? Une mixture pareille ne devait pas prendre bien longtemps à préparer. Il se souvint alors du silence qui avait suivi sa réclamation. De l'échange de regard. Des sourires entendus. Il comprit alors qu'il n'aurait pas à manger. Il leur avait offert son plus grand point faible sur un plateau doré. Pensant ne faire qu'une remarque agaçante. Pensant qu'il servirait peut-être sa cause en passant. Il s'était trompé. Il avait servi la leur. Ils n'hésiteraient pas à employer tous les moyens possibles pour parvenir à leurs fins. C'était maintenant évident. Ils avaient certes besoin de lui en vie. Mais ce n'est pas de faim qu'il finirait par mourir ici. Ces hommes savaient trop bien ce qu'ils faisaient. Ils savaient comment porter les coups pour faire le plus mal sans pour autant porter atteinte à ses fonctions vitales. Ils savaient que, s'il mourrait de ses blessures, cela ne serait que dans un temps relativement long. Ils auraient obtenu ce qu'ils voulaient avant. Ils allaient l'affaiblir. Par tous les moyens possibles.
Il n'allait plus pouvoir se risquer autant. Il n'était pas sur Lyoko. Son décompte de point de vie n'était pas actif. Il n'y avait pas de dévirtualisation et de retour dans les scanners possible s'il encaissait un tir de trop. La douleur était bien réelle. Les blessures bien inscrites sur sa peau.
Une pensée lui vint. Un souvenir. Sa première virtualisation. Le monde virtuel avait été pour lui une fantastique découverte. Tout droit sorti d'un bouquin de science-fiction. Un jeu vidéo géant. X.A.N.A dans le rôle du méchant. Eux étaient les super-héros. C'était comme un rêve de gosse. Comme dans les livres qu'il lisait quand il était petit. Qu'il relisait encore parfois. Les comics. Les bandes dessinées. Les dessins animés à la télé. Il avait toujours eu une imagination aussi débordante que son énergie. Même quand il était petit. Il se figurait souvent dans la peau de ses super-héros préférés. Il pouvait passer des heures à inventer de nouvelles histoires dans sa tête. Parfois, il les mettait même en scène sur du papier. Il aimait beaucoup dessiner. Ses parents lui disaient d'ailleurs qu'il avait un certain talent. Dans le fond, il n'était pas sûr. Mais les compliments le poussaient à vouloir s'améliorer. Puis il avait grandi. Et c'était resté. Il se représentait toujours ses univers fantastiques. Les dessinait toujours sur le papier. Pendant les cours. Mais il ne pouvait maintenant plus les partager autour de lui. Ça n'était plus de son âge. Il fallait évoluer. Les adultes le poussaient sans cesser à changer. Sauf ses parents. Ils restaient en quelque sorte sa bulle protectrice. L'acceptant tel qu'il était. Un grand enfant. Sur Lyoko, il retrouvait cette liberté envolée. Et avec les amis qu'il s'était fait en même temps que le monde virtuel, aussi. Ils le supportaient. Ils avaient accepté son caractère. Son comportement. Son esprit farfelu. Il était un être compliqué. C'était une certitude. À vrai dire, il était surtout perdu. Tiraillé. Entre ce qu'il voulait être. Et ce qu'il devait être. Ce que l'on attendait de lui qu'il soit.


****


Il n'avait pas entendu parlé d'eux de toute la journée. Il n'avait vu aucune âme qui vive. Pire que tout, il n'avait pas mangé. Depuis deux jours. C'était un véritable calvaire. Son estomac ne hurlait plus famine, il crevait carrément de faim. Il le sentait se tordre dans tous les sens. Dans une valse incessante de gargouillis. Une douleur creuse au milieu du ventre. Il ne parvenait pas à en détourner son esprit. Il n'avait rien pour l'occuper ailleurs. Il avait le temps ici. Le temps de compter chaque minute, chaque seconde. De regarder le soleil s'élever et briller. Puis un bout de lune et des étoiles venir le remplacer. Il avait le temps d'éprouver la chaleur, la brise, le froid. Les crampes d'estomac. Il avait le temps de penser et de repenser. Et c'était peut-être ça, finalement, le pire. Penser. En boucle. À ce qui allait lui arriver après. À ce qu'ils allaient faire de lui. Imaginer. C'était un de ses points forts, l'imagination. Elle l'avait amené à mixer des compositions originales. À inventer de nouvelles figures au skate-board. À nommer les monstres à l'allure farfelue de X.A.N.A. À imaginer de nouvelles stratégies d'attaque. À écrire de fameux court-métrage. Maintenant elle le desservait. Elle courait dans tous les sens. Lui rappelant un moment les souvenirs de sa vie d'avant. Puis le faisant penser à ce qui aurait dû lui arriver s'il n'avait pas été enlevé. La routine du collège ne lui avait jamais tant manqué. Et la boucle était bouclée. Il revenait à la réalité. Celle de sa cellule. De sa solitude. Il était si loin de tout ça. Et en même temps tellement proche. Dans sa tête. Il n'avait qu'à y penser pour y être. Avant de redescendre sur Terre. Et d'être frappé par le silence. L'isolement. Un sentiment d'abandon. Il n'avait pas pour habitude d'être seul. Et pourtant…
Il voulait arrêter. Arrêter de penser. Arrêter d'imaginer. Mais il n'y parvenait pas. Il soupirait de tristesse. Et grognait d'agacement. Son propre esprit ne lui obéissait plus. Et divaguait malgré lui. Il s'était levé. Faisant les cent pas. Un peu d'exercice occuperait peut-être son esprit indiscipliné ailleurs.
Il renonça bien vite. Se rasseyant cette fois sous la grille lumineuse. Il se sentait comme un animal en cage dont on aurait jeté la clé. Il se sentait devenir fou. Seul dans son trou. À attendre que le temps passe. Il n'avait pas l'habitude. Il était un garçon usuellement toujours très occupé. Sur le dernier jeu piraté par Jérémy. Ou avec la dernière fille sur laquelle il avait jeté son dévolu. C'était peine perdue. Il avait relevé la tête. Fermant les yeux. Laissant son visage baigner dans le soleil.


Finalement sa solitude avait pris fin. De manière brutale. Il était parvenu à s'endormir d'un sommeil profond. Lorsque le soleil était finalement tombé. Malgré le sol dur et froid. Malgré l'endroit et les bruits inquiétants. Ses deux jours de diète l'ayant passablement épuisés. Il avait soudain été réveillé par le bruit de la porte métallique. Il avait entreprit d'ouvrir les yeux et de se redresser. Pour voir arriver sur lui, à grands pas, le plus vieux de ses agresseurs. Tout se passa ensuite très vite. Il eut tout juste le temps de se rendre compte qu'il faisait à nouveau jour. En un instant, il l'avait attrapé. Menotté. Avec de large bracelets en ferraille, liés entre eux par une longue chaîne. Cette chaîne qu'il avait ensuite suspendue à un crochet enfoncé dans le ciment du plafond. Il s'était retrouvé attaché par les poignets. Ses pieds touchant à peine le sol. Il était suspendu comme un poisson au bout d'une ligne de pêche. S'agitant d'une façon semblable. Tentant de reprendre pieds. Il avait lutté quelques secondes contre les chaînes. Puis s'était rendu à l'évidence. C'était du solide. Ses tentatives resteraient vaines.
Le temps s'était alors lentement écoulé. Le vieux était resté majoritairement silencieux. Assis sur une chaise. Semblable à celle où ils l'avaient attaché le premier jour. Fumant tranquillement une première cigarette. Le laissant se tortiller. Puis se questionner. Qu'allait-il bien pouvoir lui faire cette fois-ci ? Le moment lui sembla long. Et le temps ralentit. Exagérément. Comme si tout cela n'était pas réel. Puis l'autre se leva. S'approchant. Il lui posa une énième fois la même question.

« Franchement, vous en avez pas marre de répéter toujours les mêmes choses ? On dirait un vieux disque rayé. »

Il avait la sensation de revivre en boucle le même moment. Ou de revenir chaque jour à la case départ. Des impressions de déjà-vu récurrentes. Le vieux lui avait alors souris. Avant de se retourner. Le garçon crut un instant qu'il allait s'éloigner. En rester là. Puis il avait fait volte-face. Lui assénant un coup de poing dans l'estomac. D'une force égale à celle des gifles qu'il avait déjà pu recevoir. Il était bel et bien réel, lui. Il ne put retenir un bref cri. De surprise. Puis de douleur. Avant d'avoir le souffle coupé. L'air semblait ne plus trouver le chemin jusqu'à ses poumons. L'oxygène semblait avoir quitté l'air ambiant. Comme s'il inspirait dans le vide. Un plongeur sans ses bouteilles. Ou Dark Vador sans respirateur.

« À genoux ou j'te colle une balle dans la tête ! »

Quelqu'un d'autre était arrivé. Sans qu'il ne s'en rende compte. Ne faisant aucun bruit. Il était encore à moitié dans le brouillard. Essayant de reprendre son souffle. L'intrus pointait un flingue sur son agresseur. Ce dernier affichait un large sourire. Un sourire de folie. L'autre derrière éclata de rire. D'un rire sonore. D'un rire de fou. Le garçon reconnut alors son deuxième bourreau. L'armoire à glace se retourna. L'autre avait baissé son arme.

« T'es con toi. »

Les deux compères riaient aux éclats. Lui ne comprenait pas. À quoi ils jouaient ?

« T'as fini d'me faire chier pendant que je bosse ? 
– C'était pour montrer au gamin.»

Ses yeux se posèrent sur le blondinet. Il s'approcha. Doucement. Puis l'empoigna. Brusquement. Par les cheveux. Lui fourrant son arme sous la mâchoire. Plongeant son regard meurtrier dans le sien.

« T'as bien r'gardé j'espère ? C'est ce qui t'arrivera si tu fais pas ce qu'on te dit. »
Son regard était perçant. Incandescent. La fureur brillait dans ses pupilles. Ou la folie. Peut-être les deux. Il sentait le métal dur sur sa peau moite. C'était la première fois qu'il voyait une arme d'aussi près. Il haletait. Bouche ouverte. Plus par surprise et soudaine frayeur que par réel besoin d'oxygène. Ses yeux s'étaient écarquillés. Il était aspiré. Happé. Par le regard brûlant. Il ne pouvait s'en détacher. Il se sentait comme hypnotisé. L'autre esquissa un sourire. Dévoilant ses dents. Dans un grognement de satisfaction. Il semblait animé d'une rage euphorique. Il le relâcha sèchement. Rangea son arme. L'interrogatoire reprit. De la même façon. Inlassablement. Les mêmes questions. Sur les noms de ses amis. Le sien. Leur arme secrète. Leur base. Leurs activités.

« Mon nom ? Quoi, vous m'enlevez et vous ne savez même pas comment je m'appelle ? Vos renseignements ne sont pas très renseignés. »

C'est ce qu'il avait répondu la toute première fois. Le tout premier jour. Collant au personnage qu'il était. Jusqu'au bout. Pensant que son comportement arrogant ferait le poids. Puis il avait appris. Compris de quoi ils étaient capables. Il se taisait maintenant. Se contentant de laisser le silence répondre pour lui. Peut-être seraient-ils moins violents s'il ne les agaçait pas davantage.


****


Ils s'en étaient donnés à cœur joie. Son silence les avait finalement tout aussi agacé. Ils s'étaient lassés des coups de poings. Le jeune lui avait finalement tourné le dos. Après une séance avec son punching-ball humain. Alternant entre l'estomac et les viscères, puis le visage et par dessous les côtes. Le garçon avait du mal à résister. Il ne pouvait empêcher les gémissements de s'échapper de sa bouche. Il s'attendait maintenant à recevoir une nouvelle salve de coups. Mais le jeune avait soudainement dégainé. Puis s'était retourné sur lui dans la foulée. Il n'eut pas le temps de comprendre. Il fut d'abord frappé par l'intensité de la détonation. Le son du coup de feu avait raisonné à travers la pièce. Et résonnait maintenant à l'intérieur de sa tête. Il ressentit alors une vive douleur dans le bras droit. Comme un éclair foudroyant. Il avait lâché un nouveau cri. Un cri sonore, cette fois-ci. Laissant toute sa douleur animer son hurlement. Ses yeux s'étaient exorbités sous la souffrance. À la fois semblable à une déchirure et un coup de poignard. L'entaille au couteau sur son autre bras lui sembla soudain bien lointaine. Une légère odeur s'éleva. La balle avait brûlée ses chaires. Il luttait pour ne pas hurler de nouveau. La douleur demeurait intense. Elle accélérait les battements de son cœur. Ou était-ce la peur ?
Il examina les visages de ses bourreaux. Le jeune semblait satisfait. Son tir avait été parfait. Idéalement placé pour ne rien toucher de ses structures vitales. Il avait été rapide. Efficace. Le vieux s'était lui animé d'intérêt. Comme un requin à l'odeur du sang. Comme un prédateur à la vue d'une proie. Une lueur s'était allumée dans ses yeux. Une lueur malsaine. Il vint appuyer sur la balle. L'enfonçant dans la chair déjà meurtrie. Le garçon ne put retenir son hurlement. L'autre appuya de plus belle. Plus fort. Plus longtemps. Son cri déchirait le silence. Il s'agitait sous le supplice. Faisait s'entrechoquer les chaînes. Il serrait les mâchoires. Serrait les paupières. Il finit par les rouvrir pour voir l'autre le fixer de ses yeux de fou. D'un sourire de sadique prenant son pied. Lui avait des larmes de douleur aux creux des paupières inférieures. Mais il n'était pas question de céder. Pas question de leur donner satisfaction. Pas question de leur donner ce qu'il voulait. Sa volonté ne s'ébranlerait pas si facilement. Il fallait tenir. Et résister. Résister. Il jeta un œil sur sa blessure. À la douleur s'ajouta soudain l'effroi. Son bras pissait le sang. Il ne voyait même pas le point d'entrée de la balle. La manche de son sweat-shirt s'imbibait lentement du liquide. L'autre avait le bout des doigts rouges et du sang s'écoulant entre eux, jusque sur la main. Ce dernier se rendit alors compte de ce que regardait le garçon. Sembla soudain prendre conscience de la situation. Revenir à la réalité. Il retira ses doigts et se retourna. Se mit à parler en arabe à son jeune apprenti. Le blondinet avait pâli sous la vision sanglante. Et se sentait maintenant faiblard. Le vieux s'était essuyé la main. Le jeune le décrocha brusquement. Il s'effondra par-terre. Sur le côté. Tel un amas sans vie. N'ayant ni le temps ni l'énergie pour réagir et se rattraper. Seul le soulèvement de sa cage thoracique indiquant sa respiration le trahissait. L'autre le libéra de ses chaînes. Mais il était incapable de bouger. Incapable de se défendre. Incapable de tenter de s'enfuir. Son bras le faisait souffrir. Atrocement. Le point d'entrée de la balle le lançait dans tout son membre. Il roula vers l'autre côté pour s'étendre sur le dos. Sa respiration s'était accélérée. Il se contentait de fixer le plafond. Les yeux et la bouche grands ouverts. Il avait véritablement peur. Il n'avait jamais imaginé ce qu'était la sensation de se faire trouer la peau. Il n'avait jamais vu autant de sang émaner de son corps en si peu de temps. Rien à voir avec les quelques fois où il avait saigné du nez. Il entendait le vieux parler. Il ne comprenait pas un mot. Mais le ton était différent. Le flot de parole plus rapide qu'à l'accoutumée. Il ne l'avait encore jamais entendu s'exprimer ainsi. Il semblait contrarié. Presque tendu. Le jeune lui répondait de la même façon. Craignaient-ils que leur petit jeu ne fasse rester leur proie sur le carreaux? Dans leur baragouinage étranger et incompréhensible, il crut discerner un prénom. Plusieurs fois. Il n'était pas sûr. Il sentait son cœur se comprimer. Il paniquait. Sa respiration se faisait de plus en plus rapide. Devenait superficielle. Il peinait à la maintenir efficace. Il n'avait pas quitté sa position. Laissant ses yeux se perdre vers le ciel. À travers la grille. Il était éblouit. Le bras gauche étendu sur le côté. Tenant sa blessure éloignée de son corps. De sa vue. De son odorat. Sa respiration se fit soudain bruyante. Il se sentait comme en apnée. Il ne parvenait pas à inspirer profondément. Alors il compensait en accélérant son rythme. Il sentait son cœur cogner dans sa poitrine. Comme jamais il ne l'avait fait. Tout devenait flou autour de lui. Peu à peu. Comme si le temps avait soudain ralentit. Il avait l'impression de se détacher de son corps. De flotter. D'être dans une réalité parallèle. Le sentiment que tout ceci n'était pas réel. Les bruits semblaient s'éloigner. Il n'avait plus que de vagues perceptions de son environnement. Sa vision tournoyait. Bien qu'il soit immobile. Il luttait, bouche ouverte, pour respirer. Il entendit alors les deux autres sortir de la pièce. Puis il ressentit des fourmillements. Tellement intenses qu'il ne ressentait plus que par intermittence ses bras et ses jambes. Il était groggy. Engourdit. En état de choc. Il crut qu'il allait perdre connaissance. Non. Il ne fallait pas que cela arrive. Il ne serait alors plus en mesure de lutter.
Il ferma alors les yeux. Essayant de se calmer. Il n'était pas mort. Et il n'allait pas mourir. Pas aujourd'hui. Pas maintenant. Il tentait d'apaiser son rythme cardio-respiratoire. De prendre de longues bouffées d'oxygène. D'expirer tout ce qu'il pouvait. Se concentrant sur son souffle. Inspirer. Expirer. Il n'écoutait plus que le son de l'air traversant ses poumons. Et répétait cette gymnastique inlassablement. Ses sensations revenaient peu à peu. Doucement. Le bruit de l'air entrant et sortant devenait plus clair. Son rythme ralentissait. Les fourmillements disparaissaient. Il se calmait. Il sentait le froid du sol sous sa nuque. Il lui faisait du bien. Sa respiration se fit de nouveau silencieuse. Plus efficace. Il sentait son cœur ralentir. Lui aussi se faisait plus discret. Il ne cognait plus. Il demeura ainsi un moment, avant de rouvrir alors les yeux. Les tournant prudemment vers sa blessure. Le sang semblait s'être arrêté de couler. Commençait même à sécher par endroit sur son sweat. Il se roula alors de nouveau sur le côté. Gardant son bras étendu. Approchant doucement sa main de la plaie. Elle n'était plus autant douloureuse maintenant.

Après ce qui lui sembla être un instant plutôt court, en comparaison des longues séances d'interrogatoire quotidiennes, la porte métallique s'ouvrit de nouveau. Il se releva vivement avant même de les voir entrer. Comme un réflexe. Cela faisait maintenant quelques jours qu'il était là. Peut-être trois, ou quatre, selon lui. Son corps s'était habitué à réagir aux alertes de son environnement. Ses muscles s'étaient tendus. Instinctivement. Ils l'avaient fait se redresser. Prêt à parer toute éventualité. Le mouvement avait cependant ravivé la douleur partiellement calmée. Il se tenait le bras. La surprise traversa son visage lorsque ce fut une jeune fille qui entra. D'environ sa taille. Elle semblait pourtant un peu plus âgée. Des vêtements longs et poussiéreux. Un voile posé sur la tête. Elle portait également un sac en toile sur l'épaule. Une brûlure au visage. Sur la joue droite. Remontant sous son œil. Descendant jusque dans son cou. Occupant une grande partie de son visage. Elle avait les traits fins. Elle ne le regardait pas. Elle semblait presque nerveuse. Ils étaient pourtant seuls. Personne ne l'accompagnait. Elle avait refermé la porte. Il n'avait vu aucun homme armé avec elle. Comme si elle était venue de son propre chef. Elle semblait libre de ses déplacements. Peut-être était-elle dans leur camp. Elle s'était approchée. Et accroupie près de lui. Déposant son sac sur le côté. Il avait fait de même. Elle en sortait visiblement de quoi le soigner. Enfin, de quoi empêcher que ces blessures ne s'aggravent. De trop. Ses gestes étaient sûrs. Mais elle les exécutait rapidement. Avec hâte. Ça ne collait pas. Elle les craignait visiblement bien plus que lui ne les avait craint jusque là.

« Salut, comment tu t'appelles ? Moi c'est Odd. Tu.. tu parles français ? On est où ici ? »

Il avait tenté d'établir la communication. Elle était la première personne qu'il voyait ici en dehors de ses agresseurs quotidiens. Cela lui mettait un peu de baume au cœur. Il n'était pas seul. Après des jours entiers livré à lui-même, avec pour seule compagnie son esprit vagabondant à loisirs sur les différentes issues possibles et le sort qui l'attendait. Il se sentait comme revigoré. Cette pensée le rendait un peu plus léger. C'est l'espoir qui revenait. Sa perspective venait d'évoluer. Elle était jeune et semblait être retenue captive. Comme lui. Peut-être cela signifiait-il qu'ils ne le supprimeraient pas nécessairement même s'il craquait et leur donnait les informations qu'ils voulaient ? Pas que cela soit une option. Mais cela demeurait un risque. Peut-être n'était-ce pas inévitablement la mort qui l'attendait ? Peut-être cette jeune fille pourrait-elle lui donner des informations sur ce lieu. Sur ses occupants. Sur ce qui s'y tramait. Peut-être pourrait-elle le sortir du brouillard constant dans lequel il se trouvait depuis son arrivée. Peut-être pourrait-elle lui apporter les réponses aux nombreuses questions qu'il se posait. Peut-être que ces informations se révéleraient même utiles. Peut-être deviendrait-elle une alliée. Peut-être pourraient-ils même s'échapper.
Elle avait relevé ses yeux vers lui. Cependant elle ne lui répondait pas. Elle prit délicatement son bras. Le tourna pour l'examiner.

« Elle n'est pas ressortie. Il va falloir l'extraire. »

Elle avait l'accent du pays. Mais parlait effectivement la même langue que lui. Et la comprenait, aussi. Elle avait cependant parfaitement éludé ses questions. Ayant énoncé les mots exacts pour recadrer son attention. Extraire la balle. Il déglutit. Elle avait sorti une pince. Évidemment. Il ne fallait pas compter sur un quelconque produit anesthésiant. Pas ici. Encore moins pour lui. Le blondinet s'était assis. Avait calé son dos dans le mur. La jeune fille s'était agenouillée. Il lui tendait son bras. Elle avait placé sa main libre dessous. Le tenant le plus immobile possible. Il savait qu'il fallait qu'il se tienne tranquille. Elle plongea alors la pince dans la blessure. Il eut un sursaut incontrôlé. Il faisait de son mieux. Le geste avait abruptement ravivé la douleur endormie. Il serrait les mâchoires. La sensation était étrange. Mais surtout très désagréable. Il jeta un œil à son bras. Qu'il détourna aussitôt. Il supportait très mal la vue de la pince Kocher trifouillant sa plaie qui saignait de nouveau. C'était un spectacle dégoûtant. Il se demandait comment la jeune fille parvenait à se concentrer avec une telle image sous les yeux. Il grognait. Tentait de lutter contre la douleur qui revenait. Tentait de rester immobile. Ce n'était vraisemblablement pas suffisant puisque l'inconnue lui plaqua alors le bras contre le mur. Le maintenant fermement appuyé. Lui était concentré sur la grille au milieu de plafond. Il expirait bruyamment. Cela apaisait en quelque sorte l'élancement. Puis il sentit que le morceau de métal cheminait finalement vers la sortie. La jeune fille entreprit alors de nettoyer la plaie du mieux qu'elle put. À l'eau claire. Pas de désinfectant. Il savait ce que cela signifiait. Elle lui faisait maintenant un pansement de fortune avec quelques morceaux de tissus noués autour du bras. Cela n'avait pas pour but de l'aider à guérir. Tout juste celui d'éviter une nouvelle hémorragie.

« Ce n'était pas agréable, mais je suppose que je te dois bien un merci. Tu ne veux pas me dire ton nom ? »

Elle rangeait son matériel à la hâte.

« Je ne peux pas te parler. »

Elle s'éloignait déjà. Elle ouvrit la porte. Puis se tourna un dernier instant vers lui.

« Je suis désolée. »

Avant de la refermer.


****


Un visage apparu. Doux. Souriant. Familier. Celui de sa mère. Étincelant. Accueillant. Il aurait tant aimé qu'elle soit là maintenant. Le rassurant. Lui disant que tout irait bien. Elle était toujours d'un naturel optimisme. Voyant sans cesse le bon côté des choses, oubliant le mauvais. C'est la façon dont elle l'avait élevé. Lui apprenant que toute chose avait un bon côté. Qu'il ne fallait retenir que celui-ci et ne plus penser au mauvais. C'est également la façon dont elle l'avait éduqué. Le préservant du danger. Le préservant des reproches. De trop de contraintes. Le laissant s'exprimer librement. Choisissant de voir en ces frasque d'adolescent un moyen de s'exprimer. De s'éprouver. De se chercher. De se trouver. Il avait profité de cette liberté. Outre mesure. Il en avait conscience. Repoussant toujours l'extrême un peu plus. Se demandant sans cesse s'il avait atteint le point de rupture. Il n'en était jamais rien. Sa mère cherchait toujours une excuse plausible pour le disculper. Elle ne pouvait se résoudre à croire que son garçon soit immoral. Elle voyait constamment en lui l'innocence. Lui aurait aimé qu'elle se montre un peu plus sévère. Qu'elle le confronte. Lui fasse la leçon. Lui pose des limites. Un cadre. Comme s'il ne savait pas ce qui était bien ou mal. Comme le petit garçon qu'il avait été il y a des années. Il avait besoin de s'opposer. Mais sa mère n'opposait aucune résistance. Alors il avait peu à peu pris le large. S'éloignant des chemins qu'elle lui avait pavés de manière détournée. Il les discernait pourtant vaguement. Mais il évoluait sans trop de filet. Alors il avait tendance à s'éloigner des côtes éclairées. De nager hors de la zone de baignade. Il prenait maintenant conscience. La vie n'est pas faite que de bonnes choses. Même s'il est important de ne pas en retenir uniquement le mauvais, il l'est tout aussi de ne pas l'oublier complètement. Il avait peu à peu pris les avantages et laissés les inconvénients des enseignements de sa mère. Et de tout ce qui avait suivi. Prenant tout à la légère. S'il s'en sortait, il changerait cela. Si ? Non. Il s'en sortirait. Il aurait une chance d'arranger cela.


Il fut tiré de son léger sommeil par un bruit. Aucune lumière n'émanait cependant du plafond. Ce n'était pas bon signe. Il s'était redressé. Appuyé sur ses mains. Il scrutait la pénombre. Pas qu'il y ait grand-chose à y voir. Il s'arrêta. Un autre bruit. Plus proche. Des éclats de voix. Qu'il ne parvenu pas à déchiffrer. En langue étrangère. Puis un pan de lumière s'ouvrit dans un grincement métallique. Provenant de la porte. C'était eux. Ils étaient là. Il jeta alors à nouveau un œil en direction du plafond. La grille demeurait introuvable au milieu de l'obscurité. Il sentit sa gorge se nouer. Ils allaient remettre ça cette nuit.

Un cri déchirant.

Ils avaient ré-ouvert l'entaille dans son bras. La mince plaie avait partiellement cicatrisé. Malgré les conditions dans lesquelles il vivait maintenant. Le sang s'en échappait déjà. La lame était allée plus profond cette fois. Il luttait pour ne pas laisser ses larmes couler. Des larmes de douleur. Il ne fallait pas leur montrer. Pas la moindre faiblesse. Il serrait les dents. S'agitant sous l'endolorissement. S'efforçant de ne pas baisser la tête. Il voulait les affronter. Il le fallait. Il le savait. Il les fixait. Il se voulait déterminé. L'autre s'impatientait déjà. Il enfonça un peu plus son couteau dans la plaie. De nouveau un hurlement. Les chaînes s'entrechoquaient. Il écartait les chairs. Faisant lentement tourner la lame. Un sourire de sadique sur le visage. De l'euphorie dans les yeux. Ceux du garçon étaient hargneux. Il aurait voulu les combattre à armes égales. Ou sur son propre terrain. Lyoko. Il aurait bien aimé voir ce que cela aurait alors donné. Ces hommes n'étaient que des lâches. La colère. Elle bouillonnait en lui. Il se savait pris. Sans aucun moyen de s'échapper. Sans aucun moyen de se défendre. À leur merci. Sans aucun moyen de les contrer. Sans aucun moyen de leur en faire voir. Il ne pouvait qu'endurer. Souffrances après souffrances. Humiliations après humiliations. Alors il avait tenté de transformer sa peur et sa douleur en haine. Mais ce masque ne lui correspondait pas. Il savait qu'il ne tiendrait pas longtemps dans la peau de ce personnage. Il n'était pas haineux. Son arme à lui, c'était l'humour, les vannes. Sa limite, la résistance de son corps à la douleur, jamais endurée à ce point. Il luttait de toutes ses forces pour contrôler son esprit. S'efforçant de se convaincre que la douleur, c'est dans la tête. Ce qui n'était pas un fait tout-à-fait faux, à dire vrai. Il essayait de canaliser le flux d'information. Le message nerveux qui remontait le long de son bras jusqu'à sa colonne vertébrale, puis jusqu'au lobe pariétal de son cerveau. Comment contrer un phénomène physiologique naturel ? Après tout, c'était simplement son corps lui hurlant la haute perniciosité de la situation et le conviant expressément à y mettre fin. Ce fait n'était cependant pas en son pouvoir. Il était fait comme un rat. Attaché comme un chien dont on veut se débarrasser. Soumis à l'incessante torture. Satisfaisant les désirs tordus de ses bourreaux. Il n'y avait pas de moyen de défaire cette situation. Il ne pouvait que subir. Tenter de maîtriser son esprit. De faire passer le message de douleur au second plan. De ne pas y prêter autant d'attention. C'était dans sa tête, après tout. Une chanson se mit à se jouer dans son esprit. Ayant pour titre "It's Getting Better". C'était une blague. Ou la maîtrise de son esprit sur les maux de son corps commençait effectivement à fonctionner.

« Tu veux que je réduise ton bras en charpie ? »

L'autre continuait de tourner. Le garçon poussa un nouveau cri sous les coups de la douleur. En serrant sa mâchoire toujours plus fort. Les traits de son visage étaient tirés. Il tentait de prendre de grandes inspirations par le nez. Il détournait le regard de la plaie. L'odeur du sang parvenait cependant jusqu'à ses narines. Il se sentait devenir pâle. Faible. Il sentait ses forces l'abandonner. Il n'avait plus l'ardeur de les affronter. Il laissa sa tête aller. Une espèce de chaleur montait en lui. L'autre le saisit soudain par les cheveux. Lui redressant la tête. Le forçant à regarder sa blessure. Elle formait un amas de chairs sanglantes et informes. Une bouillie rougeâtre. Un peu de blanc dans le milieu. Son os. Ses tendons. La plaie était béante. Il se sentit défaillir. Il avait chaud. Des maux d'estomac. Des hauts le cœur. L'autre continuait son inlassable boucherie. La douleur était intense. Trop. C'était plus que ce qu'il ne pouvait supporter.

« I've got to admit it's getting better, better...»

Il faisait noir. De drôle d'images défilaient devant ses yeux. Floues. Sans organisation. Aléatoires. Comme un rêve. S'était-il endormi ? Quand cela était-ce arrivé ? Il n'en savait rien. Il ne voulait pas savoir. Il était bien. Pour la première fois depuis ce qu'il lui avait semblé être une éternité. Il se sentait apaisé. Flotter. Presque léger. Comme s'il était enveloppé de ouate. Ou sur un nuage. Il ne ressentait aucune douleur. Il avait la sensation d'être dans une phase de sommeil profond. Loin. Très loin. De la réalité. C'était agréable. Il n'avait pas eu une décente nuit de sommeil depuis... Longtemps. Il ne se souvenait pas exactement. Puis la Terre se mit à trembler. Du moins c'est ce qu'il ressentit. Ou eu l'impression de ressentir. Ses visions commençaient à s'estomper. La réalité le rattrapait peu à peu. Il eut de nouveau des sensations. Désagréables. Des fourmillements. Puis le reste de son corps se rappela à lui. Ses bras douloureux et en tension. Son visage enflé par endroit sous les coups de poing. Son abdomen. Son bras. Sa plaie. Il se rappelait. Ses paupières battaient. Sa vision floue lui permettait de distinguer une silhouette face à lui. Une silhouette en mouvement. Des mouvements que son corps encaissait. Se balançant au bout des chaînes qui enserraient ses poignets. Les bruits retrouvaient leur chemin jusqu'à ses tympans. Ils devenaient de moins en moins lointains. Il revenait à lui. À la réalité. À son cauchemar éveillé. Il avait perdu connaissance sous la douleur et le dégoût. Sous la vision d'horreur du haut de son bras dont l'aspect rappelait sans mal celui d'un steak haché. Il était maintenant presque entièrement revenu à lui. Les autres continuaient de le tabasser. Pour le ramener à la réalité.

Le soleil s'était levé. Il saignait du nez. Il avait les lèvres tuméfiées.

« Quoi, vous allez me tirer dessus encore ? »

Il ne savait déjà même plus à quelle question il donnait cette réponse. Il se sentait dans le flou. Perdu dans la brume. Comme s'il avait eu un moment d'absence. Peut-être avaient-ils finalement tellement cogné qu'il avait fini par développer une commotion cérébrale ? Peut-être avait-il simplement du mal à se remettre de sa perte de connaissance ? Ou peut-être était-ce encore autre chose ? L'autre ne lui laissa pas le temps de se poser davantage de question.

« Oh, non. Nous ne faisons pas dans le vieux refroidi. Vois-tu, nous avons énormément de moyen de te faire parler, ou, à défaut, de te faire couiner. »

À ces mots, le garçon sentit une légère brûlure sur son bras. La cigarette. Il jeta un œil. Le bout en devenait plus rouge à mesure que la sensation s'intensifiait. La brûlure devenait insupportable. Elle lui arracha un nouveau cri. Un énième cri.

« Et oui, Odd. Ton clavaire ne prendra jamais fin. À moins que.. Tu ne te décides à nous dire ce que nous voulons.»

Il eut un regard de surprise en entendant son prénom. Jamais ils ne l'avaient utilisé pour le nommer. Le vieux avait dû remarquer.

« C'est exact, Odd, nous savons maintenant comment tu t'appelles. Tu t'es trahi tout seul. Tu as une grande gueule et tu ne sais pas quand la tenir fermée. »

Il se rappela alors les propos de la jeune fille avant qu'elle ne quitte sa cellule. Elle ne pouvait pas lui parler. Se pouvait-il que …. ?


****


La jeune fille était revenue. Il se sentait quelque peu soulagé. Il avait été un peu déboussolé de la façon dont elle l'avait laissé la veille. Il avait compris qu'ils la retenaient contre sa volonté. Et qu'ils avaient sûrement un moyen de pression pour la motiver à agir comme ils le voulaient. Il espérait pouvoir parler un peu plus avec elle. Du moins il espérait qu'elle lui répondrait.

Elle eut un regard résigné. Réprimant un soupir.

« C'est moche à ce point ?
– Oui. Je ne peux pas te recoudre. »

Elle compressa le bras de sorte que l'ouverture soit la plus réduite possible. Le garçon ne put retenir un gémissement.
« Les bords de la plaie ne sont pas assez nets, et la fermeture sera incomplète. Je vais essayer de te faire un pansement le plus compressif  possible.
– Je ne sais pas du tout de quoi tu parles, mais oui, sûr, fais comme tu le sens. 
– Tu sais, il y a un fort risque pour que cela n'empire…
– Génial, tu as d'autre bonne nouvelle ? » tenta t-il avec un sourire.

Elle resta silencieuse. Mais son visage était un livre ouvert. Elle ne faisait que confirmer ce qu'il savait déjà. La plupart de ses blessures ne guériraient pas. Elles lui seraient d'ailleurs très probablement fatales. Pas qu'elles soient d'une extrême gravité, en soit. Lorsqu'elles sont correctement soignées. Lorsque l'organisme ne s'affaiblit pas de jour en jour. Que les conditions sont favorables. Tout ce qui n'arriverait pas ici, en somme. À cette idée, il baissa la tête sur le côté. Il serrait les mâchoires. Fronçait les sourcils. Réprimant quelques larmes. De colère. De peur.
La jeune fille examina le reste de son bras. Couvert de petites brûlures circulaires. Sa peau arborait encore un vif rouge sur les dernières. Certaines lui semblaient profondes, ayant atteint le derme.

« Je n'ai pas suffisamment d'eau avec moi pour te soulager et réduire leur étendue, et ils ne voudront pas que je revienne.
– C'est rien t'en fais pas, je suis un dur à cuire moi tu sais. » Il avait pris un ton faussement enjoué.

Elle vida lentement le contenu d'une gourde sur les tissus meurtrit. Elle n'avait pas de quoi désinfecter. Ni de quoi aider à cicatriser. Elle ne pouvait rien faire de plus. Elle remarqua alors qu'il se tenait le ventre. Qu'il semblait lutter contre les contritions.

« Laisse-moi regarder. »

De larges ecchymoses recouvraient presque entièrement son abdomen. Toutes avaient une couleur différente. Indiquant leur stade de guérison. Violettes et bleues vifs pour les plus récentes. Puis une palette de jaune passant par le vert d'eau et le marron pour les plus anciennes. Jusqu'au marron et violet foncé tirant sur le noir pour les plus sérieuses. Celles-ci étaient plus étendues et demeuraient enflées malgré le passage du temps. Elles ne guérissaient pas.

« Ils t'ont bien amochés. 
– Non tu penses. Ils essaient de me tirer les vers du nez depuis… J'en sais rien, ça doit faire 5 jours ?
– 6. Tu es arrivé ici il y a 6 jours.
– Bien, donc ça fait 6 jours qu'ils veulent savoir comment s'appellent mes amis, où se trouve notre planque, comm..
– Ne dis rien je t'en prie. Ils se servent de moi pour avoir des informations sur toi. C'est comme ça qu'ils ont su comment tu t'appelais. Ils t'ont appelé par ton prénom n'est-ce pas ? Ils savent quand je mens. Ils feront du mal à ma famille. »

_________________

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BloodyDarkDay MessagePosté le: Sam 31 Déc 2016 02:10   Sujet du message: Répondre en citant  
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Elle avait les larmes aux yeux. Et des sanglots dans la voix. Elle s'était relevée. S'éloignant déjà. Il pouvait lire le regret et la culpabilité sur son visage. Il ne lui en voulait pas. Il doutait d'ailleurs fortement que ce soit par elle qu'ils aient véritablement appris son identité. Ils essayaient de le déstabiliser. De le faire douter de la seule bonne âme qu'il pouvait rencontrer ici.


Il fut réveillé en sursaut. Au milieu de ce qui lui sembla être la nuit. Il avait un instant cru être dans sa chambre. De retour au collège. À l'internat. Il lui avait semblé reconnaître, lors de ses premiers battements de cils, le mobilier. Son chien couché au pied de son lit. Les légers ronflements familiers de son voisin de chambre et meilleur ami. Il avait cru être de retour chez lui. Que son calvaire était maintenant fini. Mais la vision de sa chambre se dissipa rapidement. Et vint la désillusion. L'immense déception. Qui fut néanmoins de courte durée. Son attention s'était effectivement presque immédiatement portée sur autre chose. Et non des moindres. Il avait entendu des chiens aboyer. De l'agitation. Des éclats de voix. Des cris. Puis des fusils automatiques. Des tirs en rafale. Qui le saisirent. Déclenchèrent en lui une intense montée d'adrénaline. Jamais il n'en avait entendu en réalité. Excepté dans les films d'action. Jamais il ne pensait en entendre d'aussi près de sa vie. Il eut le mince espoir, fugace, que peut-être, on l'avait retrouvé. Que peut-être les tirs étaient ceux de militaires armés venus le chercher. Que peut-être, son calvaire était enfin terminé. Puis plus rien. Le silence. Complet. Absolu. Pendant quelques secondes. Puis des voix à nouveau. Dans un dialecte arabe, toujours. La lueur d'espoir s'évanouit, comme la frêle flamme soufflée d'une bougie.
Quelqu'un avait dû essayer de s'enfuir. Jaïma s'était finalement risquée à lui livrer quelques informations sur cet endroit, la veille, entre deux pansements de fortune. Il savait maintenant qu'il était quelque part entre l'Iran, l'Irak et l'Arabie Saoudite. Dans un camp. Ou une base. De rebelles. Ou de terroristes. Des personnes qui gardent secrètes leurs intentions. Mais d'une extrême détermination. Que rien ne semble pouvoir détourner de leur but, qui demeure à ce jour inconnu. Des individus qui savent parvenir à leurs fins. Il avait déjà pu le constater lui-même. Et en faire les frais. Leur influence s'accroissait, d'après les dires de Jaïma. Leurs moyens de pressions étaient aussi divers que meurtriers. Leurs captifs et fidèles, nombreux. L'accès à l'armement, facile. Ils semblaient parfaitement intouchables.
Il se leva alors péniblement. Tentant de garder son bras immobile. Pour venir se placer sous la grille. Il savait qu'il ne distinguerait rien de plus que le ciel. Pourtant il sentit un étrange sentiment guider ses pas. Et il se tint là. Un moment. Ayant une pensée silencieuse pour la victime innocente qui venait de s'éteindre. Sous le clair de lune et les étoiles. Il se sentait touché par la mort de cet innocent. Retenu prisonnier. Privé de ses libertés. Sûrement exposé à la torture, la violence ou le travail forcé. Constamment soumis au danger. Et abattu de sang froid. Tel un animal. Mais il l'était encore davantage par le fait qu'il était proche de cet inconnu. Par leur situation. Ça aurait pu être lui. Tentant de s'enfuir. Tentant l'impossible pour échapper à ce lieu de souffrances et de cauchemars. Et abattu, froidement. Criblé de balles. Cet endroit était lugubre. Morbide. Macabre. Rien n'était bon ici. Rien ne pouvait l'être.
Il sentit soudain un liquide chaud parvenir jusqu'à sa main. Il la retira délicatement pour la placer dans la lumière au-dessus de lui. Sa blessure saignait de nouveau. Le moindre petit mouvement lui était fatal. Sa main ensanglantée se mit à trembler. Il regarda alors son bras. Le pansement était de nouveau tâché de liquide humide. Il reposa la main dessus. Malgré les efforts de Jaïma, la blessure ne cicatrisait pas. Il était dénutri. Il perdait ses cheveux. Son corps ne parvenait plus à se réparer. Ses lèvres en partie tuméfiées tremblaient. Il se rassit là où il était auparavant. Soutenant sous bras meurtrit. Toutes les positions étaient inconfortables. Tout son corps n'était que souffrance. Peu importe comment il se mettait, il ravivait l'une ou l'autre de ses blessures. Il appuya la tête contre le mur. Remontant ses genoux sur sa poitrine. Et posant ses coudes sur eux. Son petit corps formant alors une masse ronde dans l'obscurité. Une petite ombre sur le mur. Une petite tâche gémissante au fond de la pièce. Il regarda à nouveau sa blessure. L'auréole sanglante s'étendait peu à peu. Lentement. Et avec elle, sa peur. Son désespoir. Ils montaient tous deux en lui. Sa main trembla de nouveau. Sa vue devenait presque imperceptiblement troublée. Il la replaça sur sa blessure. Prenant une profonde inspiration. Expirant un long soupir. Il avait fermé les yeux. Sa main agrippait maintenant son bras. Il s'était mis à pleurer.


La porte métallique se fit entendre à nouveau. Les muscles de son corps se tendirent instinctivement. Ses deux bourreaux étaient apparus. Le vieux s'était assis tranquillement sur une chaise. Tandis que son apprenti était venu vers lui. L'attrapant par les cheveux. Le forçant à se mettre debout. Lui attachant les poignets derrière le dos. Avec les menottes, seulement. Le traînant face au vieux. Pour le balancer à ses pieds. À genoux. Le canon du fusil automatique appuyé lourdement sur l'arrière de son crâne. Le vieux avait allumé son habituelle cigarette.

« J'ai une bonne nouvelle pour toi Odd. Grâce à toi, nous avons pu repérer les personnes que tu fréquentes. Et parmi elles, celles que tu fréquentes le plus. »

Il parlait lentement. Articulant presque chaque syllabe. Laissant place un instant au silence. Rendant ainsi l'atmosphère pesante.

« En d'autres termes et pour que tu comprennes bien, nous sommes déjà sur la piste de tes amis. Ce n'est maintenant plus qu'une question de temps avant qu'on ne trouve leurs identités, que l'on étudie leurs habitudes, leurs déplacements... Et qu'ils ne subissent le même sort que toi.
– Non ! Vous mentez ! »

Ils laissèrent éclater leurs rires. Il tenta de se relever d'un bond. Animé d'une rage soudaine. Le jeune derrière lui le saisit par le col d'une main. Appuyant un peu plus lourdement le canon du fusil sur son crâne. Le forçant à demeurer accroupi face au vieux. À genou sur le sol. Cette nouvelle donnée avait ravivé un peu d'énergie en lui. Après son épisode d'hier soir. Il tenta de calmer son esprit qui fusait dans tous les sens. Non. Cela ne pouvait pas être vrai. Il avait résisté tout ce temps. Il avait tenu bon face à la douleur et à la torture. Ils ne pouvaient pas avoir mis la main sur ses amis aussi facilement. Ils devaient être entrain de se jouer de lui. Il n'envisageait aucune autre possibilité. C'était un nouveau stratagème pour le pousser à parler. C'était évident.

« Peut-être que je te mens. Mais tu n'as aucun moyen de le savoir. Et tu as dû apprendre depuis que tu es ici, je ne dis jamais de paroles en l'air. »

Il s'était penché sur le blondinet. L'autre derrière lui l'ayant agrippé par les cheveux pour lui relever la tête.

« Peut-être que l'un d'eux se montrera plus coopératif. 
– Non. Vous n'obtiendrez rien de nous. Et vous ne mettrez pas la main sur eux. Jamais. Ils sont plus malins que vous. Ils vous échapperont. »

Il avait parlé aussi calmement que son agresseur. Et l'avait fixé. Droit dans les yeux. Arborant un léger sourire en coin. Gardant son sang froid. Souhaitant ne pas les satisfaire en montrant son désarroi. Ne pas entrer dans leur jeu malsain. Les affronter. Leur faire face. Leur tenir tête. Leur montrer qu'il n'était pas faible. Qu'ils ne l'auraient pas.

« J'avoue que tu m'impressionnes, Odd. Je ne te pensais pas aussi tenace. »

Il fit un signe à son jeune apprenti. Celui-ci appuya un peu plus le canon du fusil automatique sur son crâne. Le forçant à baisser la tête. À regarder terre. Avant de lui libérer les poignets. Puis de le faire se relever en lui empoignant une nouvelle fois sa crête décrépie. Et de le faire reculer au fond de sa cellule. Le fusil appuyé contre sa poitrine. Le vieux s'était levé. Attendant près de la porte. Ils s'apprêtaient à partir. Quelque chose ne collait pas. Ils s'en allaient plus rapidement que d'ordinaire. Ils semblaient abandonner bien vite.

« Tu ne me crois pas, Odd, mais tu en auras bientôt la preuve. Fais-moi confiance. »

Sur ce, la porte claqua. Et le silence l'enveloppa. Le laissant seul avec ses ruminations. Seul avec ses doutes. Seul avec son désespoir.


****


Jaïma était revenue. Mettant fin à sa solitude. Son arrivée dessina presque immédiatement un sourire sur son visage. Il était content de la voir. Elle incarnait le seul moment de la journée où il pouvait parler. Avoir de la compagnie. Quelques instants emplissant le vide et la solitude habituels de sa cellule. Elle mettait fin à ses cogitations quotidiennes. D'autant plus accentuées en cet instant par ce que venaient de lui révéler ses ravisseurs. Elle était également une source d'information sur ce qui se tramait au-dehors. Peut-être pourrait-elle lui en apprendre davantage sur ce qu'ils avaient prévu pour lui. Pour ses amis. Elle lui semblait cependant encore moins tranquille qu'à l'accoutumée.

« Nous ne sommes pas les seuls ici. Ils enlèvent régulièrement des enfants pour les enrôler ou les utiliser, comme moi. Quand ils ont attaqué, ce qui m'a sauvée, c'est de savoir soigner. »

Il garda le silence sur ces mots. Puis se décida à lui livrer ce que lui avaient dit auparavant ses agresseurs au sujet de ses amis. Il en doutait encore. Espérant que si cela s'avérait vrai, ses amis ne se laisseraient pas prendre. Qu'ils seraient sur leurs gardes. Qu'ils se défendraient. Qu'ils leur échapperaient. Jaïma gardait le silence. Mais son visage laissait transparaître ce qu'elle ne pouvait se résoudre à dire. Elle ne savait vraiment pas mentir.

« Dis-moi ce que tu sais. » Il avait parlé fermement. Elle se résigna.

« J'ai entendu parlé d'un autre garçon. Blanc, comme toi. Ils disaient qu'ils allaient l'amener ici bientôt. »
Son sang ne fit même pas un tour complet.
« Ulrich ! Non !
– Tais-toi, s'il te plaît ! Je ne veux rien leur dire. Mais ils me questionneront et je n'aurais pas le choix. Ils lisent sur mon visage tout comme toi tu le fais. Je ne peux rien leur cacher. Si j'essaie, ils
menacent de massacrer ma famille. »

Des larmes coulaient sur ses joues. Ils étaient tous deux pris au piège de ce lieu. Désarmés. Impuissants. Elle était la plus libre d'eux deux, et pourtant elle avait les mains liées. Ces hommes savaient exploiter la moindre faille. La moindre faiblesse de chaque individu. Dans le seul but de servir leurs propres intérêts. D'obtenir ce qu'ils souhaitent. Des enfants ne pouvaient rien contre eux. Ils ne pouvaient rien tenter. Ils étaient coincés. Rien ne pourrait empêcher l'inévitable de se produire.


****


Ils étaient revenus. Bien entendu. Ils n'auraient pas manqué cette occasion de remuer le couteau dans la plaie.

« Alors, Ulrich hein ? C'est bien comme ça que s'appelle cet ami qui te semble très cher, n'est-ce pas ? »

Il s'agita de fureur. Faisant s'entrechoquer les chaînes. Le temps n'était plus à la contenance et la maîtrise. Mais à la fureur et la rage. Eux riaient. Il aurait pu tout casser. Il aurait pu leur casser la gueule. Les tabasser. Leur rendre chaque gifle, chaque coup de poing, chaque brûlure. Chaque blessure. Il aurait pu leur casser chaque os du corps. Répandre autour de lui chaque goutte de leur sang. Il aurait pu les tuer. Les massacrer. S'il n'était pas attaché. Ces hommes étaient lâches. Monstrueux. Répugnants. Mais il était entravé. Impuissant. Et ils s'amusaient de ce spectacle. S'en délectaient. Ils ne vivaient que pour cela. Infliger peur et torture aux autres être humains.

Le temps avait continué à passer. Ne ralentissant jamais sa course effrénée. Lui avait l'impression que le temps se jouait de lui. Et qu'au contraire, les secondes étaient des siècles entiers. Son corps était fatigué. Usé. Il avait la sensation d'avoir pris 60 ans d'un seul coup. Tout avait été fait dans ce but. La pièce. La nourriture. La diète. Les passages à tabac. La torture psychologique. Faire grandir la peur un peu plus chaque seconde en lui. Il était de plus en plus faible. Il s'épuisait. Il s'en rendait compte. Il sentait son propre corps défaillir. Eux aussi. Ils savaient. Ils pouvaient sentir la peur comme un animal flairant sa proie. Tout ceci n'était pour eux qu'un immense jeu lugubre. Mais terriblement divertissant. Et ils sentaient, comme des trappeurs chassant leur proie, qu'ils arrivaient à la fin de leur traque. La proie ne pouvait pas gagner. Elle mourrait d'épuisement.
Ils n'avaient d'ailleurs plus envoyé Jaïma aujourd'hui. Il savait au fond de lui ce que cela signifiait. Il savait qu'il ne résisterait plus longtemps. Il ne pourrait pas. Il ne pourrait plus. Bientôt. Cette vérité lui nouait la gorge. Il ne parvenait pas encore à se l'avouer. Il se mit une nouvelle fois à pleurer. Silencieusement. Les mâchoires serrées. La fin était proche. Sa fin. Et il ne pouvait plus rien faire pour empêcher cela.


****


Le soleil amorçait son ascension dans le ciel. Une nouvelle fois. Annonçant une nouvelle journée. Un autre jour. Un jour de plus. Enfermé entre ces quatre murs. Combien cela faisait-il au final ? Il ne savait pas. Il ne les dénombrait plus. Il avait perdu le compte. Il lui sembla cependant qu'il n'avait plus revu Jaïma depuis longtemps. Ses blessures étaient douloureuses. Mais n'avaient plus besoin d'être soigné. Cela s'avérait désormais inutile. Il craquerait bien assez tôt. Bien avant que ses blessures ne le tuent. Elles étaient déjà mal en point. Et cela n'allait faire qu'empirer. Ou peut-être lui était-il arrivé quelque chose. Peut-être était-elle… Il ne voulait pas y penser. Elle était à peine plus âgée que lui. Ils ne pouvaient quand même pas.. Non. Il ne voulait pas y penser. Il n'osait pas y penser. Il allait forcément la revoir.
La porte s'ouvrit alors. Et il eut un regain d'espoir. De courte durée. Ce n'était pas elle.
Il n'avait désormais plus la force de lutter. De se débattre. Il était resté assis. Recroquevillé dans le coin habituel de la pièce. Les laissant venir. Espérant s'enfoncer dans le mur de ciment. Disparaître dans la couleur grisâtre du revêtement. Relevant ses bras vers son visage. Pour se protéger. Pour ne pas regarder. Pour ne pas les voir s'avancer. Comme un enfant qui croit qu'on ne le voit pas lorsqu'il se cache les yeux.
Ils l'avaient tout de même empoigné. Par-dessous les bras. Lui passant la chaîne et les bracelets qui enserreraient habituellement ses poignets. Le traînant jusqu'au centre de la pièce. Et ils recommençaient. Il connaissait désormais la routine par cœur. Se méfiant cependant du moment où ils passaient aux coups. Ne sachant jamais à quoi s'attendre. Ne sachant jamais quelle folie traverserait leurs esprits malsains et meurtriers. Il les redoutait véritablement, maintenant.
Ils avaient attaqué d'emblée. De front. Ne cherchant aucunement à le ménager. Ils lui avaient de nouveau parlé d'Ulrich. Prenant un plaisir à remuer le couteau dans la plaie. Un couteau psychologique. Qui s'avérait tout aussi redoutable qu'une lame aiguisée plantée dans son bras. Il savait qu'il ne pouvait rien faire pour son ami. Son meilleur ami. Il n'avait même pas été fichu de le protéger. De protéger son identité. Il était désespéré. À bout.

Il était maintenant sûr de ne plus revoir Jaïma. Ils avaient réussi. Ils l'avaient brisé. Il ne tenait plus qu'à un fil. Il céderait dans peu de temps. Ils l'avaient bien compris. Ils n'avaient plus besoin qu'il vive. Ils n'avaient plus besoin de le soigner. Ils n'avaient jamais prévu de le laisser en vie. Il ne sortirait jamais d'ici. Il ne reverrait jamais la lumière du jour. Cette cellule serait son tombeau. Cette terrible vérité s'imposait maintenant à lui. Et l'accablait. Lui nouait le bide. Il allait mourir. Il se sentait perdre pied. Suffoquer. Étouffer. Il tenta de s'apaiser. De garder son calme. De faire le vide. Pour essayer de tenir. Encore un peu.
Il se souvient, à nouveau. Il se souvient d'une berceuse que jouait sa mère quand il était petit. Pour l'apaiser. Pour l'endormir. Il s'était mis à faire des cauchemars. À cause de l'école. Tout se passait bien, pourtant. Les deux premières années de maternelle l'avaient épanoui au contact des autres enfants. Il était copain avec tout le monde. Tout le monde l'aimait bien. Et il aimait tout le monde en retour. Ça n'était pas important que l'on soit grand ou petit. Que l'on soit habillé en jaune ou en bleu. Lui préférait de toute façon le violet. Mais tout avait brusquement changé. Sa classe avait déménagée chez les grands du primaire. Il fallait faire de la place pour les plus petits. Lui était content. Il allait se retrouver dans la cours des grands une année plus tôt. Il était impatient. Il était heureux. Mais les autres enfants eux avaient changé. Peut-être était-ce au contact des grands. Il fallait se faire sa place. S'imposer. L'école était soudainement devenue un endroit lui rappelant la jungle. Certains suivaient la loi du plus fort. Et n'hésitait pas à écraser les plus faibles pour se faire admirer. Pour faire rigoler. Lui était encore dans son petit monde de douceur et de rêverie enfantin. Un monde de bisounours. Il n'avait pas imaginé que les autres enfants pouvaient se métamorphoser au point de devenir complètement différents de ce qu'ils avaient été quelques mois auparavant. Il n'avait pas imaginé qu'il fallait être méchant pour se faire sa place. Lui se contentait de rester lui-même. Il ne comprenait pas pourquoi soudain on s'en prenait à lui. Son caractère était un peu exubérant et énergique. Mais sans une once de méchanceté. Il aimait tout le monde. Et il pensait que tout le monde l'aimait. Mais tout le monde ne l'aimait pas. Il y avait de méchant enfant. Ils s'étaient moqués. Ils avaient rigolé. Du violet qu'il aimait. Ils disaient que ce n'était pas une couleur de garçon. Il n'avait brusquement plus eut de copain. Et personne ne l'aimait plus. Il n'avait pas compris pourquoi. Il n'avait jamais rien fait de mal à qui que ce soit. Il partageait toujours les jouets de la classe. Parfois même son goûter. Il jouait avec tout le monde et laissait tout le monde participer. Mais voilà que soudain, tout avait changé. On s'en prenait à lui gratuitement. Ses camarades étaient devenus moqueurs. Agressifs. Violents. Dans les mots. Parfois dans les actes. Lui ne voulait pas suivre cette loi du plus fort. Il voulait rester lui-même. Rester gentil. Avec tout le monde. Rigoler. S'amuser. Mais cela ne rentrait pas dans les règles. Dans le cadre. Alors les autres en avaient profité. Lui tombant dessus toujours à plusieurs. Il n'avait que de rares moments de répit. L'école était devenue une jungle. Dans laquelle il n'avait pas sa place. Cruel reflet de la société.
C'était difficile au début. Mais il avait survécu. La berceuse de sa mère lui faisait du bien. Il l'a lui réclamait tous les soirs. Il avait fini par se construire sa carapace. Son armure. Se créant un personnage. Puis il s'était replié derrière. Exacerbant certains de ses traits de personnalité pour se protéger. Il avait développé sa répartie. Et s'était mis à faire des choses incroyables. Des choses de casse-cou. Pour plus ou moins se faire accepter. Imposer le respect. Chacun à Kadic savait qui était Odd Della-Robia. Au fond il n'était pas aussi inconscient qu'il le paraissait. Ni aussi méchant. On l'avait simplement blessé et abusé. Alors il se fichait de blesser ou d'abuser qui que ce soit. Parfois même ses propres amis. Il se rendait compte toujours trop tard qu'il était allé trop loin. Mais cela ne l'empêchait pas de recommencer. Il n'y pouvait rien. C'est ce qu'il était devenu. C'est ce qu'on l'avait poussé à devenir. Il doutait qu'il existe un quelconque moyen pour lui de revenir en arrière.
La berceuse. Sa mère avait tenté un jour de l'apprendre à l'une de ses sœurs. Celle-ci voulait savoir jouer aussi bien que le faisait sa mère. Mais cette abrutie ne parvenait pas à rester concentrée pour jouer plus de dix notes d'affilées. Elle n'arriverait jamais à la cheville de sa mère, de toute façon. Il n'y avait qu'elle pour savoir jouer ce qui l'apaisait. Il porta ses mains à sa bouche. Louise. Pardon. Pardon. Il se dit à cet instant qu'il méritait sûrement ce qui lui arrivait. Après toutes ses blagues débiles, toutes ces vannes stupides. Tous ses coups bas et ses coups en douce. Ses remarques cinglantes et blessantes. C'était pas de la méchanceté, pourtant. Au fond, les blagues, c'était surtout de l'ennui. Et pour le reste, son instinct de survie. Mais le Karma avait fait son tour. Il devait avoir vu les choses autrement. Et décidé finalement de le faire payer.


« A l'aide ! »

Il s'était mis à crier. D'un coup. Dans un élan de désespoir. Il ne pensait pas vraiment que quelqu'un pouvait l'entendre là où il était. On aurait déjà entendu ses cris, sinon. Ses cris de douleur sous la torture incessante. La peur l'avait prise. D'un coup, d'un seul. Elle lui tordait les boyaux comme jamais. Plus forte que la douleur de son corps meurtri. Elle lui arrachait des cris incessant d'appel vers le monde extérieur. Elle le faisait hurler. Hurler de désespoir. Debout au milieu de la pièce, sous le seul halo de lumière pénétrant l'intérieur lugubre. Il hurlait à pleins poumons malgré ses blessures, malgré la douleur. Il pleuvait, au dehors. Il recevait de ses gouttes de pluies, au travers de la grille. Ou était-ce ses propres larmes ? Il décida de ne pas vérifier. Il avait trop peur de se briser.

«  A l'aide ! »

Il ne pouvait pourtant pas s'arrêter. Il ne pouvait pas ne pas essayer. Au moins une fois. Une fois de plus.

« A l'aide ! »

Il entendit sa voix dérailler. Il sentit sa gorge se nouer. Quelque chose semblait la bloquer. Il essaya de le repousser. Déglutissant profondément. Essayant d'avaler la peur. De ravaler ses sanglots. Il ne fallait pas craquer. Ne pas craquer sous le silence assourdissant qui lui répondait. Sa voix échouait contre les murs, résonnait dans toute la pièce. Il prit conscience qu'il était en plein monologue. Rien ne lui répondrait, au dehors.

« A l'aide.. »

Il manquait de vigueur, il manquait de panache. Sa voix aiguë s'était amoindrie. Le son n'était plus aussi vivace que les précédents. Il attribua cela à la fatigue. Il appelait déjà depuis un long moment, lui semblait-il. Non. Ce n'était pas ça. Cela ne pouvait faire si longtemps. Ils seraient déjà venus lui clouer le bec. Un coup d'œil vers la lourde porte métallique. La peur à nouveau. Que lui feraient-ils s'il les agaçait ? Il ferma les yeux. Il serra fort. Ses paupières. Elles devenaient gonflées. Elles lui faisaient mal. Elles le brûlaient. Il n'eut d'autre choix que de les rouvrir. Laissant échapper de fines perles salées. Il sentait son visage le piquer. Les écorchures. Les plaies ouvertes.
La vérité se rappela à lui, brusquement. Rien ne l'aiderait au dehors.

« A L'AIDE ! »

Il laissa une fois encore libre court à son désespoir. Un ultime cri vers le néant. Ricochant sur les murs. Ne lui renvoyant que le silence.
Et soudain, un coup sourd, au loin. Puis la porte, tout près. Ses deux bourreaux. Les mêmes, inlassablement.

« Tu vas la fermer ta gueule ! »

Le premier avait hurlé toute sa haine sur le blondinet. Il recula vivement. Mais l'armoire à glace fut près de lui en un instant. Le petit garçon qu'il était face à lui laissa échapper un gémissement. De trouille. De crainte. L'agresseur l'empoigna par le cou, le faisant reculer, contre le mur du fond. Il le leva de terre.

« Personne ne peut t'entendre ici, petite merde. »

Il lui avait craché ses mots sur le visage. Le petit garçon luttait pour respirer. Il tenta de se débattre un court instant. Vainement. Il abandonna bien vite. Il avait mal. Le visage de son bourreau n'était qu'à quelques centimètres du sien. Il ne pouvait y poser les yeux. Il ne pouvait soutenir son regard. Il tourna la tête sur le côté. Ferma les yeux. Le laissant continuer.

« Personne ne te trouvera jamais ici, tu m'entends ? Personne ! Jamais ! »

Il luttait. Il luttait pour ne pas laisser ses mots l'atteindre. C'était brutal. C'était cruel. Il gémissait de plus belle. Les mots, pourtant, s'insinuaient. Dans ses oreilles. Jusqu'à ses tympans. Jusqu'à son cerveau. Il luttait. Il luttait pour ne pas les laisser prendre un sens. Pour ne pas les laisser raisonner librement à l'intérieur de sa tête. Il serrait toujours ses paupières. Comme des barrières qui empêcheraient les agressions de l'atteindre. Refuge vain. Il serrait. Il serrait. De plus belle. Il sentit la main se resserrer un peu plus autour de son cou. Il serra encore plus fort. Mais les mots parvenaient à lui, inlassablement.

« Regarde-moi. »

Non. Il ne voulait pas. Non. Il ne fallait pas. Surtout pas. Il ne voulait pas se retrouver face à ses yeux. Ses yeux inquisiteurs, ses yeux de fous. Dans lesquels brillaient sans cesse la fureur, la haine, le plaisir de faire mal, de briser, d'écraser. Ses yeux. Ses yeux de fous. Ils lui faisaient peur. Oui. Il l'emplissait d'une immense crainte. Sans limite. Il ne voulait pas regarder. Non. Il ne fallait pas.

« Regarde-moi ! »

Il avait de nouveau hurlé. Le petit garçon gémit une fois de plus. De trouille. Il haletait. Il porta ses mains à son cou. Il ne pouvait plus tenir. Il se sentait devenir violet. Comme son sweat. Qui ne l'était plus vraiment, maintenant. Peut-être. Peut-être que s'il ouvrait les yeux, l'autre allait le lâcher. Peut-être. Peut-être n'aurait-il pas à croiser son regard furieux. Il ouvrit, alors. Sa tête tournée sur le côté ne lui permettait que de voir le sol et les murs sombres. L'autre plaça sa main libre sur son petit front. Le faisant violemment tourner la tête. L'obligeant à le regarder. Un son s'échappa de sa bouche. Il ne put le contrôler. Plus fort qu'un gémissement. Presque un cri. Il se retrouvait face à la fureur. L'autre approcha un peu plus son regard. Perçant. Déchirant.

« Tu es seul, ici. Et tu mourras seul, ici. Personne ne te retrouvera. Jamais. Tes appels sont aussi futiles et vains que ton existence.»

Il avait articulé soigneusement chacun de ces mots. Chacune de ces syllabes. Parlant doucement. Presque... calmement. Contrastant d'une façon saisissante avec ses précédentes paroles. Il arborait maintenant un sourire. Un large sourire. Un sourire lugubre, un sourire de fou, un sourire macabre. Un sourire sadique. Un sourire hanteur. Un sourire de cauchemar. Il le laissa violemment retomber. Le petit garçon toussa. Portant ses mains à sa gorge douloureuse. Il cracha. Un goût de fer dans la bouche. Sur le sol, du sang. Il luttait pour retrouver sa respiration. Chaque bouffée d'air avalé lui brûlait atrocement la trachée.

« Maintenant, que je n'entende plus un seul son sortir de cette cellule, ou je te pends par les pieds et te cogne à coup de chaîne. »

Il lui avait asséné un grand coup de pied. Par-dessous. En plein dans le ventre. L'estomac. Les viscères. Il l'avait vu arriver. Sa botte. Noire. Comme tout le reste l'était. Il avait vu une ombre bouger. Il avait tenté de l'éviter. À quatre pattes, tel un chien. Il avait tenté de s'échapper. Plus loin. Dans un coin. Vainement. Énième coup gratuit. Ixième douleur ravivée.
Ils étaient finalement partis. Il les avait vu s'éloigner. De ses yeux embués. Depuis le sol froid et dur où il était tombé. Il avait distingué leurs pas s'en aller. La lourde porte métallique se refermer. Claquer.
Il aurait voulu s'y engouffrer. Se glisser dans leur dos. Se faufiler. Leur échapper. Il était maintenant trop faible. Trop blessé. Trop meurtri. Pour espérer tenter une quelconque sortie. Un regret. Il avait pensé pouvoir tenir. Se disant qu'on viendrait forcément le chercher. Il avait été arrogant. Il s'était surestimé. Une fois de plus. Une habitude.
Il doutait maintenant. Il doutait de pouvoir un jour revoir la lumière du jour, autrement que filtrée par cette grille. Il doutait qu'on le trouve suffisamment tôt pour espérer le sauver. Il doutait même qu'on le retrouve tout court. Peut-être était-ce pour le mieux. Il était déjà bien amoché. Et cela n'allait pas s'arrêter. Il le savait. Rien ne détournerait ses ravisseurs de leur but. Ils allaient cogner. Toujours plus. Toujours plus fort. Il serait sûrement défiguré. Il n'était déjà sûrement plus beau à regarder.
Les mots. Les mots que son bourreau lui avait craché à la figure quelques instants plus tôt. Les mots qu'il avait tenté de parer grâce à ses paupières soigneusement fermées. Ils s'insinuaient, maintenant. Faisant leur chemin jusqu'à sa conscience. Germant au sein de son esprit. Il les entendait en échos. Un écho assourdissant. La voix tourbillonnait. Se mélangeait. Résonnait. Dans son esprit. Pareil à une grotte obscure, ou un puits sans fond. Les échos se firent plus puissants. Plus menaçant. Il luttait.
Un murmure.

« Non.. »

Un gémissement.

« Non... »

Un cri perçant.

« Non non non non non ! »

Il se replia. Sur lui-même. Sur le sol. Il se pelotonna sur le ciment dur et froid. Il se fit aussi petit que possible. Il aurait voulu disparaître. À cet instant précis. Il aurait voulu effacer son existence entière. Devenir néant. Devenir poussière. Cesser de souffrir. Cesser de vivre, pour ne plus rien ressentir.
Il sursauta. Il revoyait ses yeux. Ses yeux perçants, brûlants. Ils lui donnaient l'impression de l'observer sans cesse. Un frisson. Il jeta un regard circulaire dans la pénombre. Puis vers le plafond. Il s'attendait presque à les voir scintiller dans la nuit. Il ferma les siens. Les rouvrit. Il trembla. Son sourire, à présent. Lacérant. Mortifiant. Il le voyait s'agrandir, s'étirer. Pareil à un gouffre béant qui pourrait l'avaler tout entier. Il entendait maintenant leurs rires. S'élever. S'intensifier. Résonner. En écho. Incessant. Il ne dormirait pas cette nuit.
Il finit par trouver sa position confortable. Le poids de son corps et le froid émanant du sol ayant anesthésié son hémicorps droit. Cette chaleur glacée lui faisait du bien. Apaisait ses douleurs. Comme une poche de glace. Sa joue marquée d'une ecchymose bleue-violette était maintenant indolore. Son bras orné de multiples brûlures de cigarette ne le lançait presque pas. Les nombreux hématomes de son flanc semblaient disparaître. Ses poignets rouges sang égratignés et violacés comme envolés. Il était bien. Au milieu de son interminable damnation. Au milieu de sa tragique malédiction.
Il se souvient, à nouveau. Une dernière fois. Les visages. Il se sentait à bout de force. Mais les visages lui donnaient un peu de courage. L'aidaient à se rappeler pourquoi il devait endurer tout cela. Pour les protéger. Eux. Ces visages qu'il aimait. Ces gens qui l'entouraient. Rendaient son existence moins morose. C'était pour eux. Pour ces visages. Pour ces gens. Pour ces souvenirs. Pour leurs vies. Il s'en souvenait de ces visages. Ils l'apaisaient. Dessinaient même un petit sourire sur son visage meurtri.
Puis il s'endormit.

C'était arrivé. Finalement. Il n'était pas tout puissant. Il avait fini par craquer. Il avait fini par les trahir tous. Les condamnant à un avenir incertain. Probablement plus horrible que X.A.N.A. Qui aurait pu croire après tout, que la menace qui les prendrait tous viendrait d'ailleurs ? Il pleurait. Ne s'arrêtant plus. Ne se préoccupant pas de l'image faible qu'il leur renvoyait. Cela n'avait plus d'importance. Ils l'avaient d'ailleurs brisé il y a bien longtemps. Il pleurait sa peur. Sa douleur. Son désespoir. Sa haine. De lui-même.

« Eh bah voilà, c'était pas si compliqué. »

Un dernier coup pour la route. Puis ils partirent, gorges déployées par le rire, le laissant là. Suspendu comme un linge. Ou comme un porc. Un porc à l'abattoir.
Ils avaient fini par lui casser le nez. À mesure que les coups de poings s'étaient abattus. Il l'avait senti à la façon dont la douleur avait soudain faire fureur. Irradiant, de toute part.
Il savait qu'il n'en avait plus pour longtemps. Ses dernières blessures n'avaient pas guéries. Elles étaient même entrain de s'infecter. Il le savait. Il le sentait. À l'odeur infâme qu'elles dégageaient. Une odeur purulente, pullulante. Émanant de son corps. Il allait pourrir. De l'intérieur. Cocasse. N'était-il pas déjà un être pourri ? Pourri par les mensonges, les jeux, les supercheries. Non, ce n'était pas ce qu'il était, au fond. Mais il avait fini par s'en convaincre. Ils avaient fini par l'en convaincre. Il n'était que vice. Il n'était que tromperie. Profiteur et usurpateur.
Les doux visages de ses souvenirs avaient disparu. Sa mère. Ses sœurs. Kiwi. Et ses amis. Il les voyait s'envoler. S'effacer. Il aurait voulu les retenir. Il aurait voulu partir avec eux. S'élever. Virevolter. S'échapper par la grille. Au loin. Loin de sa prison. Loin de sa cage. Porté par le souffle léger du vent. Ne devenir qu'une idée. Qu'une image. Qu'un souvenir. Ne plus avoir de corps. Celui dont il était prisonnier. Qui le faisait tant souffrir. Son corps qui emprisonnait son âme. Sa conscience. Le corps qui n'est qu'une entrave à la liberté de son esprit. Le corps qui n'est que le tombeau de son âme. Descartes. Socrate. Comment savait-il cela ? Il délirait.

Il luttait pour respirer. Il devait faire attention. Il fallait ménager son nez. Ne pas inspirer. Pas trop profondément. Ne pas déloger un petit morceau d'os qui pourrait venir se bloquer. Dans sa cloison nasale presque entièrement broyée. Dans sa trachée enflammée. Dans ses poumons épuisés. Bloquant définitivement tout passage. Il se mit à haleter par la bouche. Tel un chien.
Un chien. C'était bel et bien ce qu'il était. Ce qu'il avait été. Ce qu'il continuerait d'être jusque dans la mort. Chien. Kiwi. Non. Ce n'était pas cela. C'était bien trop méchant pour le chien. Le sien valait bien mieux que lui. Au moins fidèle et aimable. « Tel chien, tel maître. » Pas sur ces points là. S'il y avait un au-delà, il irait d'ailleurs sûrement en enfer. Pas qu'il y croyait réellement. Il n'y avait jamais vraiment songé, à vrai dire. Mais l'idée ne lui semblait plus si absurde que ça. Depuis la découverte du supercalculateur, de Lyoko, de X.A.N.A, tout lui semblait possible.
Il sentait son cœur ralentir. Il n'en pouvait plus. Il était épuisé. Il n'était plus qu'à demi-conscient. Son souffle se faisait de plus en plus court. Ses inspirations, moins profondes. Ses mouvements respiratoires, de plus en plus douloureux, à mesure que sa cage thoracique se soulevait. Il devait bien avoir trois ou quatre côtes cassées. Des ecchymoses recouvraient son visage. Des égratignures le parsemait de toute part. Il parvenait à peine à ouvrir son œil gauche œdématié par les coups. Le nez explosé en une cascade inarrêtable de sang. Les lèvres coupées et boursouflées. Il avait la mâchoire fêlée. Il était méconnaissable.
Il eut soudain envie de tousser. Il sentit alors un liquide chaud s'échouer dans sa bouche. Sur ses lèvres. Un goût de fer. Il passa sa langue pour les essuyer. Puis ravala sa salive. Du sang. Il toussa à nouveau. Le liquide afflua en grande quantité. Il le dissémina sur le reste de ses vêtements. Le contour de sa bouche. Ses lèvres maintenant pâles. Il cracha le reste. Hémorragie interne. Il allait se noyer. S'asphyxier. Il était foutu.
Il n'avait jamais imaginé mourir ainsi. Il n'avait jamais imaginé sa mort pour ainsi dire. Bien sûr il l'avait frôlée à plusieurs reprises ces dernières années. Il pensait avoir une vie, courte ou longue, peu lui importait. Mais une vie remplie. Il pensait connaître l'amour véritable. Vaincre X.A.N.A. Venir à bout de sa scolarité. Voir même être diplômé. Avoir un grand métier. Ou devenir tout simplement artiste. Avant d'en finir. Avant de tirer sa dernière révérence. Il aurait voulu avoir une mort héroïque. Ou utile. Faire don de son corps à la science. Ou sauver quelqu'un. Une grande sortie de scène. Il aurait aussi voulu se trouver. Savoir qui il était. Réellement. Ne pas jouer toute sa vie. Un rôle. Une comédie. Porter un masque. Se cacher derrière sa personnalité. Derrière ses vannes, son humour foireux. Il aurait aimé savoir s'ouvrir aux autres. Pouvoir s'ouvrir aux autres. Réellement. Sans fard. Sans masque. Avoir une vie simple. Vraie. Tranquille. Il n'avait pas imaginé jouer au héro toute sa vie. Il aurait voulu la remplir d'autres choses. Trouver sa place au milieu du chaos qu'avait toujours représenté pour lui la société. Être normal. Être lui-même.

Il était fatigué. Il ne savait pas depuis combien de temps ils étaient parti. Il ressentait les secondes en éternité. Il avait mal. Il avait peur. Il avait froid. Il s'en voulait, se détestait, se dégoûtait. Mais il était surtout fatigué. Une fatigue éreintante. Intenable. Pénible. Comme si à chaque fois qu'il était sur le point de s'endormir, de glisser vers la quiétude, de s'abandonner à la douceur, on le réveillait pour l'en empêcher. Sa mort était lente. Douloureuse. Il n'en pouvait plus. La tête calée sur son bras gauche. Pour garder un semblant de dignité. Les yeux mi-clos. Les paupières lourdes. Se fermant par intermittence. Sa vision était éblouie sous le soleil. À moitié floue. Les poignets écorchés. À vif. En sang sous l'effet des chaînes. Son épiderme presque entièrement arraché. Brûlé par les frottements du métal sous les ballottements des coups. Les extrémités saillantes des bracelets métalliques s'enfonçant progressivement dans sa peau. Ses chairs à nu. Ses bras en tension sous le poids de son corps. Ils lui faisaient tellement mal qu'il ne les ressentait quasiment plus. Comme si cette partie de son corps avait simplement disparue.
Il sentit soudain quelque chose se passer. Dans son corps. Il ne su exactement ce que c'était. Il percevait néanmoins que le processus s'accélérait. Sa peur se fit un instant plus grande. La fin était là. Toute proche. D'ici quelques minutes. Il s'agita brièvement. Essayant de se redresser. De reprendre pied. De secouer ses chaînes. De les faire craquer. De se libérer. Comme un dernier réflexe de survie qui aurait subsisté. Ayant attendu ce dernier moment pour se manifester. Vainement. Il ne réussit qu'à raviver quelques douleurs endormies. Sur ses poignets. Dans ses bras.
Il s'était arrêté de bouger. Sa respiration s'était, elle, accélérée. Il était à bout de force. Le moindre effort l'épuisait. Il se contenta donc de respirer. Et de vider son esprit. De ne plus penser. De laisser les choses arriver. Il ne pouvait rien pour changer ce qui allait suivre. À quoi bon lutter quand on se sait pris et indélivrable. L'angoisse de mort laissa alors peu à peu place à l'accalmie. D'ici quelques instants, son cauchemar prendrait fin. Ses dernières souffrances seraient bientôt éteintes avec lui. Il n'aurait plus mal. Ne ressentirait plus jamais aucune douleur. Ne ressentirait plus jamais rien du tout. Cette pensée le réconfortait. Il n'avait pas peur de la mort. Celle-ci serai bientôt sa délivrance.
Il releva alors la tête vers le puits lumineux. Une dernière fois. Il ne voulait pas s'éteindre dans la pénombre. Il voulait voir une dernière fois le ciel. Mais il fut aveuglé. Les rayons ardents du soleil lui brûlaient les yeux. Il ne détourna pourtant pas le regard. Ce serai bientôt fini, de toute façon. Il sentit les larmes coulées, une dernière fois. Il hurla de terreur et de douleur, une dernière fois. Puis son cœur lâcha. Et il sombra dans l'inconscience en une poignée de seconde. Le nez cassé, la gueule en sang.

 « And you feel like an ocean, being warmed by the sun. »

Il revint à lui, ouvrant brusquement les yeux. La pénombre. Il ne distinguait rien d'autre. Il sentit son cœur s'accélérer. La peur. De nouveau. Fugace. Un frisson. Un bruit. Étrange..
Il se releva d'un bon. Haletant. Dégoulinant.



C'était le ronflement d'Ulrich.



Tout ceci n'était qu'un rêve.

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Dernière édition par BloodyDarkDay le Dim 01 Jan 2017 04:29; édité 2 fois
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Minho MessagePosté le: Sam 31 Déc 2016 10:06   Sujet du message: Répondre en citant  
[Blok]


Inscrit le: 29 Jan 2016
Messages: 109
BloodyDarkDay a écrit:
Il s'agit de l'enlèvement et de la torture d'un de nos héros par de mystérieux individus. Je préviens qu'il y a des éléments "susceptibles de heurter la sensibilité des plus jeunes".


On m'a appelé ? Bon ok, ça s'adresse aussi à Ikorih et Draynes, les adeptes du sadisme à l'état pur.

BloodyDarkDay a écrit:
Cette fois le thème est un peu moins dans le vu et revu. Enfin je pense. J'avoue ne pas avoir lu tous les OS de la section.


Odd kidnappé et mutilé de partout, ça te parle Lhetho ? Mr. Green Blague à part, personne n'a exploité ce thème de cette manière. De toute façon, à partir du moment où tu prends la plume, ça devient vite très personnel. Avant de passer au commentaire plus détaillé, voilà quelques fautes que j'ai repérées.

Spoiler


Il y en a peut-être d'autres mais, en général, ce n'est pas si mal. Quittons les joies de la langue française et passons directement à des choses plus intéressantes comme... le style, je suis vraiment sous le charme. Tu as l'art de plonger le lecteur à 100% dans le récit et ce n'est pas donné à tout le monde. Pour être honnête, c'est l'OS qui m'a fait le plus vibrer depuis un bon moment. Bon, entre fans d'Odd, je voyais venir que ça allait être lui dont il allait être question rien que par ton avatar ! J'apprécie aussi le thème de la captivité, mentale et physique d'ailleurs, donc ça ne pouvait que me plaire à priori. Néanmoins, je peux affirmer que tu as du talent et je ne pense pas que beaucoup de gens peuvent me contredire sur ce point.

Passons au contenu. Je trouve les remises en question d'Odd, que ce soit au niveau de sa vie scolaire ou d'aventurier, très pertinentes hormis un point qui m'a légèrement fait tiquer : l'aspect familial. Dans ton texte, tu idéalises un peu trop la relation qu'il entretient avec ses parents, l'animé nous a prouvés qu'elle était loin d'être parfaite... ou un peu trop selon le point de vue adopté. Ça m'a étonné qu'il soit "nostalgique" à ce point-là mais ça peut sans doute se justifier par les circonstances. Quand on est loin de ses proches et sur le point de mourir, je peux comprendre qu'on occulte les défauts qui nous semblaient insupportables quand on les avait en face de nous. Mais ce n'est qu'un détail car l'important ça reste la description de la descente aux enfers du protagoniste. Je trouve que tu as assez bien tenu les promesses de l'introduction, c'est inédit et l'ambiance devient oppressante à souhait.

Pour ce qui est des musiques proposées, je trouve le concept assez intéressant et je risque même de te le piquer un jour ou l'autre ! La première chanson était assez fascinante, reflet de l'aliénation mentale qui se met en place, du moins c'est comme ça que je l'ai interprété. Sans oublier le fameux désir de fuir loin de la situation cauchemardesque... La deuxième, plus surprenante vu le cadre de l'intrigue, m'a bien plu également car elle est complètement en accord avec la personnalité colorée de notre excentrique préféré tout en collant assez bien avec les souvenirs évoqués, ceux qui s'échappent peu à peu d'un Odd plus souffrant que jamais. J'en profite pour signaler que tu es une experte pour décrire les sentiments tout en utilisant parfaitement bien le champ lexical de la douleur. Pour ce qui est des Beatles... Je suis fan mais le rythme m'a dérangé durant ma lecture – c'était tout de suite moins intense – donc c'est la seule vidéo que j'ai coupée avant la fin. Il reste deux sons proposés et un seul constat de mon côté : trop larmoyants à mon goût. C'est un pari risqué de proposer un accompagnement musical mais, dans mon cas, je dois avouer que l'expérience était plutôt agréable. J'ai donc tout naturellement ajouté Run et Young Blood à ma playlist !


Spoiler

Alors là franchement, cette phrase devrait être interdite, vraiment trop utilisée par le passé. C'est un classique du cinéma et de la littérature, extrêmement frustrant quand il s'applique à toute l'histoire. Fin décevante pour les amateurs du dark side, évidemment *Odd Della Robbia* se réjouira de ce twist final, mais cette dernière ligne a le mérite de t'éviter les questions des lecteurs sur le fameux kidnapping. Moi qui me réjouissais à l'idée que les nombreuses interrogations allaient demeurer en suspens suite à la mort du personnage principal... Malgré tout, tu auras compris que j'ai vraiment apprécié ce one-shot. Certains ont sans doute pâli devant sa longueur (RIP la limite de caractères) en estimant peut-être que la thématique ne devait pas être développée à ce point mais je l'ai dévoré... et j'en redemande ! Je suis certain que tu nous feras le plaisir de partager d'autres textes et je ne doute pas une seule seconde que tu vas nous faire voyager à nouveau. Force est de constater que le forum se vide mais qu'il y aura bel et bien une génération d'auteurs prêts à se surpasser pour faire vivre la section une année de plus.
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BloodyDarkDay MessagePosté le: Dim 01 Jan 2017 01:42   Sujet du message: Répondre en citant  
[Kankrelat]


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Localisation: Great Inagua, 1716.
Bonjour Minho,

Tout d'abord je te remercie d'avoir pris le temps de rédiger cet avis.

Minho a écrit:
Odd kidnappé et mutilé de partout, ça te parle Lhetho ? Mr. Green


Oui, bon, j'avais dis "un peu moins" Mr. Green

Bref, trêve de plaisanterie. Je dois dire que je suis affligée par mes fautes d'orthographe... Des fautes principalement d'inattention en plus, qui malgré plusieurs relectures auront réussi à m'échapper.


Minho a écrit:
Dans ton texte, tu idéalises un peu trop la relation qu'il entretient avec ses parents, l'animé nous a prouvés qu'elle était loin d'être parfaite...


Pour ce point, en effet, je le justifierais par le contexte. Il se rend compte qu'au final cette relation n'était pas si terrible malgré de la mésentente. Certes, il n'en était pas content mais pour des raisons futiles finalement, qui sont soulignées par ses amis dans l'animé, notamment par Ulrich qui lui propose d'échanger avec ses parents s'il veut, laissant entendre qu'il exagère quand même un peu.

Minho a écrit:
Pour ce qui est des musiques proposées, je trouve le concept assez intéressant et je risque même de te le piquer un jour ou l'autre !


Fais-toi plaisir, je t'en pris Smile
J'avais quelques doutes par rapport à ce concept, j'avais peur que ça alourdisse ou ne coupe la lecture (le temps que les pages s'ouvrent, etc). J'attendais donc un retour là dessus et je suis ravie que ça t'ai plu, si en plus je t'ai donné l'envie d'agrémenter ta playlist, je suis comblée. Concernant les Beatles, ce n'est pas la musique que je voulais mettre à la base, mais cette dernière s'est retrouvée supprimée de YouTube et le seul lien que j'ai retrouvé proposait aussi un lien de téléchargement pas forcément hyper légal, donc je me suis dis que sur le forum ça faisait pas top top. Donc il a fallu que je retrouve une chanson du même nom parce que j'avais écris la fin du passage autour de la musique. Mais en effet It's Getting Better d'Imaginary Future collait beaucoup mieux.

Concernant le choix du personnage, certes mon avatar me trahi (Mr. Green), mais mon choix s'est surtout porté sur Odd parce que lorsque j'ai eu l'idée de ce thème, Odd était pour moi le personnage le plus simple à mettre en scène. Ce qui m'amène à la fameuse phrase.


Spoiler


Pour finir, je te remercie pour ton avis et tous les points positifs soulignés, qui sont motivant et me font prendre confiance dans ce que j'écris.

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Icer MessagePosté le: Mer 04 Jan 2017 20:00   Sujet du message: Répondre en citant  
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Hellowww

D'abord, désolé de pas avoir répondu à ton MP demandant de l'aide pour le double post, en général c'est fait très vite mais là j'étais en vacances ! Heureusement tu as reçu du renfort entre temps.
Theoph69, j'ai supprimé ton post pour que le récit reste d'une traite, je t'ai envoyé le contenu par MP pour que tu puisses le reprendre quand tu feras un commentaire global.

Mon commentaire de reprise de l'année sera finalement très modeste. Minho a fait un excellent taff, ce Blok a un bon œil. Si je ne suis personnellement pas un grand adepte du thème choisi, et que je suis du genre à privilégier l'action et les dialogues aux descriptifs internes, tu as incontestablement du talent et ce One-shot ne peut que nous inciter à te pousser à continuer sur cette voie.

Toutefois, pour rebondir et approfondir la remarque de Minho sur la chute... au-delà du fait que cela esquive certaines questions - c'est regrettable mais la lecture du One-shot suffit à comprendre que l'intrigue politique n'est pas l'objectif premier, il y a une faille assez béante : Qui est capable d'atteindre un tel niveau de ressenti dans les rêves ? Si je me base sur ma propre expérience, c'est impossible. On ressent à peine les choses et les évènements semblent se succéder la plupart du temps à toute vitesse sans qu'on ait vraiment le temps d'y réfléchir. Une discussion avec d'autres membres du Pôle Fanfiction n'a fait que renforcer mon point de vue. On peut toujours en débattre, je ne suis pas un expert du sujet mais j'ai quand même l'impression que cette chute n'est pas du tout adaptée à pareil texte ! Neutral

Bon courage pour la suite en tout cas Wink

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« Les incertitudes, je veux en faire des Icertitudes... »

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BloodyDarkDay MessagePosté le: Ven 06 Jan 2017 11:11   Sujet du message: Répondre en citant  
[Kankrelat]


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Hey,

No soucis! Je m'en suis doutée en fait, et il est vrai que j'ai pas forcément choisis le meilleur moment pour poster non plus.

Pour répondre au point central de ce com' qui concerne la chute du texte:
A la base, le récit était presque moitié moins développé et j'avais écris la chute à ce moment là. Puis, à force de le retravailler sur quelques détails, j'ai commencé à lui donner plus de profondeur, donc plus de détails, plus de description. Entre temps, j'ai aussi eu une vague idée pour un nouveau texte qui pourrait constituer la suite de celui-ci et expliquerait le "rêve". Du coup, il me fallait cette fin pour pouvoir rebondir dessus. Donc au final, je l'ai laissé tel quel et il est vrai que je n'ai pas davantage réfléchis à la vraisemblance. Je me suis basée sur ma propre expérience et certains de mes rêves se basant sur certaines de mes peurs ou des choses vécues dans la journée mais détournées pour souvent qu'elles deviennent le pire des scénario possibles, peuvent être très riches et organisés, malgré certains moments de flou et enchaînements sans lien. Reprenant cette idée pour l'appliquer à Odd, ce rêve pouvait être interprété comme étant le reflet d'une de ces plus grandes peurs: qu'un jour quelqu'un d'autre ne découvre l'existence du supercalculateur et souhaite s'en servir à des fins personnelles malhonnêtes. Maintenant que tu l'as souligné, oui effectivement, des rêves autant fournis, organisés et ressentis ça reste de l'ordre du très peu probable et c'est une fin un peu grosse si je laisse en l'état. Le fait que le récit soit autant développé et détaillé ne laisse pas non plus transparaître que ce qu'il vit n'est pas réel. Du coup, il est aussi de l'ordre du très peu probable que cela reste en l'état. Juste le temps que l'idée finisse de prendre forme et que je l'écrive (compter à nouveau un délai d'environ 4 mois et plus... Mr. Green ).

Merci à toi
Wink

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Silius Italicus MessagePosté le: Lun 06 Mar 2017 18:45   Sujet du message: Répondre en citant  
[Krabe]


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Bonsoir cher BloodyDarkDay,
le rêve serait-il comme un chemin inexploré du monde ?


Pour reprendre sur ce qui est visiblement le point le plus contesté, à savoir le caractère onirique de cette nouvelle, il semble bien que celle-ci tienne de l’expérience psychologique. Il s’agit moins de raconter une histoire que d’explorer un personnage soumis à certaines conditions. Comme il ne s’agit pas de développer une histoire, faire chuter l’ensemble dans le rêve, même si ça peut sembler être ou un lieu commun ou un manque de réalisme se justifie. Le point n’est pas de savoir si l’on peut rêver aussi intensément.
D’une part, la littérature, mais plus encore le cinéma regorgent de rêves dont le niveau de ressenti est similaire à celui de la veille. D’autre part, il y a de multiples exemples d’expériences mystiques où les pratiquants rêvent puissamment.

Enfin, préciser que c’est un rêve à deux avantages, au moins. Tout d’abord, cela évite d’avoir à se justifier plus avant sur la situation. D’autre part, cela coupe court à certaines interrogations. Par exemple, il est peu probable que les héros ne se servissent pas du retour vers le passé en cas de disparition de l’un des leurs.

Ajoutons que la perte de repère liée à torture, et au mode opératoire classique des interrogatoires, s’accorde assez bien avec les impressions de flous, notamment dans la temporalité, que laissent les rêves.

Au vu de ces éléments, quelque agaçante et improbable que soit cette chute, il n’y a pas de raison de ne la laisser.

In fine il s’agit d’un portrait psychologique d’Odd dans une situation-limite. L’avantage de ce genre de situation, c’est normalement de permettre de jeter bas les masques, tous ces visages que l’on porte en société, pour se protéger ou s’affirmer. Pour autant, il est paradoxal que cette mise à bas se fasse au moment où Odd porte plus que jamais un masque : celui de l’ignorant. Il joue. Il joue le rôle de l’ignorant interrogé. Rôle constant et paroxystique. Ce qui tend à laisser penser que jamais on ne sort du masque. Ainsi, si la reprise faite par le personnage de son évolution, depuis la maternelle jusqu’au collège laisse entrevoir que ce fond de gentillesse, d’innocence et d’amour qu’il s’efforçait de vivre, de mettre en action, de protéger, a en fait disparu : l’acteur est devenu le rôle. Il a ressenti ces tiraillements entre ces envies, ce qu’il est ou croît être, et ce qu’il pense que l’on attend de lui. Mais il n’a pas vu assez loin. Il avait poussé son humour, en avait fait un moyen non-violent d’éloigner les importuns. Sans pour autant voir qu’il blessait, qu’il faisait violence, trahissant ainsi ce qu’il voulait préserver.

Reste la famille : ce qui ressort, c’est le côté inconditionnel de l’amour maternel, et plus largement familial.

De manière intéressante, Odd dispose d’une impressionnante maîtrise et discipline de lui-même. Ceux à qui il pense le moins, ou le moins longuement et précisément sont ces amis proches. Ceux-là même sur lesquels il ne cesse d’être interrogé. Autrement dit, ceux à qui il ne devrait pouvoir s’empêcher de penser sous le flot des questions.
Dans le même ordre d’idée, il tient fort longtemps, et en fait, il n’est pas si évident que cela qu’il ait parlé à la fin.

Au niveau du style, votre écriture est plutôt vive, avec une large prédilection pour les phrases nominales. Il y a une tension dans votre plume. De cette tension jaillissent des images rarement filées ou exploitées, mais laissée là, brutes et suggestive. Paradoxalement, votre texte n’est pas très aéré. Il se présente par grande masses. Trop grande peut-être dans la mesure où elles rendent la lecture parfois délicate. Possiblement plus sur de grands écrans. Cela amène à deux réflexions.
D’une part, il se peut que vous ayez été trompée par votre outil de rédaction de texte. La plupart du temps, les lignes sur ce forum sont plus longues, acceptent bien plus de caractères que ne le font les lignes des traitements de textes. Ce qui peut rendre difficile l’évaluation de la lisibilité du texte. Recourir à l’indentation des paragraphes est une solution possible.
D’autre part, cette tendance à la sédimentation en grande masse peut être une réponse à la tension et au caractère bref de l’écriture. Comme une nécessité de contrepoids et d’équilibre. C’est en tout cas un point qui mérite de l’attention.
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