L'épisode 06 : Cruel Dilemme, me vient en tête avec le passage où Odd et Jérémie voient depuis l'écran l'endroit où, d'après le flash de prémonition du premier, Yumi doit tomber dans la Mer Numérique. Le visuel est disponible dans la galerie du site de l'épisode correspondant.
En dehors de ceux qui ont été cités précédemment, je n'ai rien d'autre en tête malheureusement...
Voilà, c'était mon intervention de l'année sur ce forum o/ bon courage pour la suite, Immu !
XDD Merci Pikamaniaque pour me permettre de reposter la suite !
Bon, ça fait un moment que je donne pas de nouvelles et à force de me noyer sous les cours/stages/devoirs/et autres projets, je commence à douter de ma capacité à un jour parvenir à finir cette fic... Désolé pour tous ceux qui me suivent, je suis un vrai boulet et ça va avoir du mal à changer =(...
Quoi qu'il en soit, voici la tant attendue (oupa) suite de New Wave, avec le Chapitre 24 ! J'espère que vous apprécierez cette version relue et corrigée o/
Spoiler
Chapitre 24 :
Épisode 123 : Miss Puck_
Aelita serrait entre ses doigts le petit bout de papier que venait de lui remettre le proviseur en personne, le cœur battant la chamade, ses pas raisonnant le long de l'interminable couloir austère dans lequel elle déambulait, le regard fixé sur les portes qu'elle croisait. Elle n'avait pas l'habitude de s'aventurer dans cette partie du lycée, peu fréquentée par les élèves, et cela avait quelque chose de légèrement intimidant.
Ce mystérieux document qu'elle semblait conserver avec fébrilité n'était autre, à un juger le sceau officiel de l'établissement, clairement discernable à l'encre rouge en bas de page, que l'autorisation lui permettant enfin, après près d'une bonne heure de négociation de créer son groupe de musique. Aux termes d'une minutieuse vérification des bulletins de la jeune fille et d'une mûre réflexion, le proviseur Delmas avait fini par consentir à le lui remettre quelques minutes plus tôt, lui arrachant le plus large sourire qu'il lui eut jamais été donné d'arborer au cours des derniers mois.
Alors qu'elle revérifiait le numéro de la salle allouée par le proviseur pour ses répétitions, elle ne put s'empêcher de se faire la réflexion que le père de Sissi avait eu l'air singulièrement épuisé au cours de leur entretien. Il n'avait, en effet, même pas cherché à dissimuler ses traits tirés et ses cheveux lui avaient parue plus grisonnants que jamais, comme s'il avait pris plusieurs années d'un coup. Au fond d'elle-même, elle ne pouvait s'empêcher de se demander ce qui avait pu perturber à ce point un homme aussi intègre et à même de régler les problèmes que Monsieur Delmas.
Son cœur rata un battement alors que ses yeux s'arrêtaient sur le petit numéro en lettre écaillé inscrit sur la porte devant laquelle elle venait de s'arrêter, muette d'excitation. « A23 », c'était ici !
Ses inquiétudes s'envolèrent aussitôt de son esprit et, légèrement tremblante, elle sortit de sa poche la clef que Nicole Weber lui avait remise après qu'elle lui eut présenté l'attestation signée du proviseur. Un cliquetis retentit alors qu'elle déverrouillait la serrure et la porte coulissa, dévoilant une pièce tellement plongée dans la pénombre qu'il était impossible d'y voir à plus de deux mètres.
Prudente, Aelita s'avança avant d'étouffer un juron. Son orteil venait de heurter le coin d'un boîte en carton que quelqu'un avait visiblement cru bon de laisser en plein milieu de l'entrée.
Sautillant à moitié, elle se dirigea vers la première fenêtre venue et l'ouvrit d'un geste vif, toussotant sous l'effet de la couche de poussière qu'elle venait de déplacer par ce geste. Un rideau de lumière illumina la salle alors qu'elle ouvrait les volets en grand dans le but de l'aérer, et la jeune fille put enfin distinguer à quoi elle ressemblait.
Exigüe, les murs nus dont la peinture commençait à s'écailler, elle semblait ne pas avoir servi depuis des lustres ! Quelques cartons recouverts de poussières trainaient au sol et il n'y avait pour seul ameublement que deux tables qui avait du servir de bureaux dans une salle de classe autrefois, au vu de leur aspect vétuste.
- Eh ben, je suppose qu'ils n'avaient pas mieux à me filer… soupira la jeune fille en époussetant quelque peu les tables grinçantes, bon… Au boulot !
Aelita entreprit de déposer avec précaution son sac -plus volumineux que d'habitude- sur le premier bureau avant d'en sortir son ordinateur portable qu'elle ouvrit rapidement, l'allumant d'un geste machinal.
Elle en extirpa également la vieille table de mixage du collège, qu'elle avait récupéré dans la réserve de l'établissement juste avant de se rendre dans la pièce, et la posa sur la table adjacente.
Elle batailla quelques instants avant d'enfin réussir à dénicher l'unique prise électrique de la pièce, dissimulée derrière une pile de cartons qui semblaient avoir pris l'humidité, sur laquelle elle brancha l'appareil. Une vague de nostalgie l'envahie alors qu'elle contemplait ses vieux CD de Mixage, restés au fond de son sac. Il lui semblait que cela faisait des siècles qu'elle n'avait plus touché de platines et elle ce n'était qu'à présent, face à ces disques poussiéreux, qu'elle se rendait compte du manque qu'elle avait pu éprouver durant tout ce temps.
Avec un petit sourire au coin des lèvres, elle plaça la première compilation qui lui passa sous la main dans le lecteur de la table de mixage, laissant la musique s'élever dans la pièce et ses doigts courir sur les platines, modulant instinctivement la mélodie, les sonorités, entrainant avec elles ses pensées.
Mathieu regarda, d'un air de reproche, Odd porter sa cigarette à ses lèvres, inspirant une grande bouffée de fumée nauséabonde avant de la recracher avec délice par les narines, un air de profonde relaxation sur son beau visage aux traits marqués.
- Sérieusement, tu vas te détruire les poumons un jour… tempêta le jeune homme aux yeux bleus d'un ton bougon tandis que son ami esquissait un demi-sourire.
Ils étaient tous deux adossés contre les grilles séparant Kadic de la ville, suivant distraitement des yeux les rares voitures qui empruntaient la rue adjacente par moment. Un beau soleil brillait au dessus de l'établissement, comme pour célébrer la fin du mois de mars, et bon nombre d'internes avaient choisi de profiter de leur week-end pour sortir un peu ne ville, profitant de la clémence de la météo.
- Eva est toujours fourrée avec William depuis que Stéphanie lui a dévoilé le rallumage du Supercalculateur, non ? fit remarqué Mathieu d'un ton détaché, le regard posé sur l'américaine assise contre la murette un peu plus loin, en grande conversation avec le beau brun ténébreux.
Odd ne répondit pas tout de suite, se contentant d'aspirer une nouvelle bouffée de sa cigarette.
- Je ne suis pas jaloux si c'est ce que tu veux savoir, répliqua-t-il enfin après avoir expiré la fumée bruyamment, je pense que Willy a besoin de ça, après le sale coup qu'il vient de se recevoir… J'ose à peine imaginer ce que j'aurais pensé à la place de Yumi si Eva avait su pour le Supercalculateur et ne m'aurait rien raconté ! Si ma copine peut l'aider à se remettre du choc, alors ça me va.
Mathieu eut un sourire incertain. L'empathie de son ami lui paraissait un peu trop démesurée pour être sincère et il devinait que, derrière ces belles paroles, Odd souffrait de la distance qui s'instaurait petit à petit entre lui et sa blonde américaine.
Conscient qu'il s'était aventuré sur une pente dangereuse, le Lyokô-guerrier en herbe préféra changer de sujet.
- C'était quoi son apparence à William ? questionna-t-il en baissant la voix, sur Lyokô je veux dire… A bien y réfléchir, je n'ai pu voir que vos avatars à toi, Aelita et Eva puisque Yumi est trop âgée pour se virtualiser et nous aide une fois sur deux… Sans compter ton compagnon de chambre qui nous ignore superbement !
Odd réprima une grimace. Il aurait préféré que Mathieu évite de lui parler d'Ulrich. En effet, depuis la fameuse réunion des ex-Lyokô-Guerrier au Kiwi Bleu qui avait marqué le départ de Jérémie, les échanges entre les deux anciens amis s'étaient retrouvés réduits au strict nécessaire. La plupart du temps, les deux jeunes garçons préféraient envahir la chambre de leur petite-amie respective plutôt que d'avoir à supporter l'ambiance pesante de leur propre dortoir.
Au fond de lui, Odd était beaucoup plus blessé face à l'attitude d'Ulrich vis-à-vis du rallumage du Supercalculateur que face à celle d'Eva envers William. Il avait espéré au début qu'avec le temps son compagnon de chambre finirait par revenir sur sa décision, mais force avait été de constater que le rallumage du Supercalculateur n'avait pas eu l'effet escompté sur son ancien ami. Pire encore, celui-ci semblait cette fois-ci avoir définitivement tiré un trait sur sa vie de héros passée : c'était comme si Odd partageait sa chambre avec un étranger désormais, et cela l'attristait au plus haut point.
- Honnêtement, j'ai à peine entraperçu William le jour de sa première virtualisation, finit-il par répondre histoire de chasser les souvenirs moroses qui commençaient à affluer dans sa tête, il était déjà sous le contrôle de XANA à ce moment et, lorsque je l'ai revu, le programme avait déjà totalement modifié son apparence virtuelle ! Ce que je peux dire c'est qu'il avait une sorte d'énorme épée pour arme dans les deux cas. Yumi avait une apparence de geïsha au début, avant que Jérémie ne modifie nos avatars pour nous permettre de lutter contre William-XANA… Après c'était une sorte de ninja.
Odd s'interrompit soudain. Parler de Jérémie n'était guère plus facile qu'évoquer Ulrich. Les semaines passant, la présence de l'ancien petit-ami d'Aelita avait commencé à lui manquer, mine de rien. Il avait bien tenté de le joindre sur son portable par moments mais s'était résigné à la dernière seconde à chaque fois. Il était sûr que, de toute manière, s'il était allé jusqu'au bout, le jeune homme aux lunettes n'aurait même pas daigné décrocher !
Au final, cela faisait des semaines qu'il n'avait plus aucune nouvelle de l'ancien compagnon de chambre de Mathieu, et Aelita, depuis qu'elle sortait avec Thomas, n'avait plus fait aucun effort pour le contacter. Il avait préféré ne pas insister, laissant la jeune fille à son bonheur nouveau.
Conscient d'avoir de nouveau gaffé, Mathieu préféra se taire, et un silence gêné s'installa entre les deux adolescents.
Fort heureusement, Eva ne tarda pas à rompre l'ambiance pesante en les rejoignant, son portable à la main, un air maussade sur le visage. William, derrière elle, enfourchait son scooter et disparaissait au coin de la rue, sans même leur accorder un regard.
- Aelita voudrait nous voir, fit-elle après avoir refusé un baiser de son petit-ami, louchant sur sa cigarette encore à la main, elle vient de m'envoyer un SMS, elle nous attend dans la salle A23, dans les vieux bâtiments du lycée.
- Bon, je ferais mieux de vous laisser dans ce cas, obtempéra Mathieu d'un air déçu, je vais…
- Toi aussi; Aelita veut te voir, l'interrompit l'américaine, visiblement contrariée, elle dit qu'elle a besoin de nous trois pour son nouveau groupe de musique !
Le jeune homme écarquilla les yeux sous l'effet de la surprise. Dans un groupe de musique ? Lui !
Ulrich rouvrit le clapet de son téléphone portable pour la énième fois de la journée, avant de le refermer de nouveau, une moue dépitée sur le visage. Il avait beau faire, Sissi, sa petite-amie, refusait de répondre à ses messages. Cela n'était pas la première fois cependant… En fait, cela avait commencé depuis ce fameux jour où elle s'était finalement décidée à lire la lettre de sa mère destinée à Mademoiselle Soprano. Il avait cru comprendre que quelque chose d'important s'était passé par la suite entre la jeune fille, son père et l'amante de ce dernier. Depuis, pour une raison qu'il ignorait, l'adolescente se montrait plus distante que jamais avec lui.
Le jeune homme soupira, appuyant sa tête contre le mur de sa chambre, profitant du contact glacé du poster derrière sa nuque pour sa rafraichir les idées. Cette situation était d'autant plus frustrante que les rares fois où il avait pu passer du temps avec elle depuis cette incident, Sissi s'était montré distraite, comme si son corps s'était bien retrouvée en face de lui mais son esprit à des kilomètres de distance. De plus, elle lui paraissait de plus en plus pâle à mesure que les jours filaient et les cernes se faisaient de plus en plus prononcés sous ses yeux.
Il n'était pas aveugle : il comprenait bien que quelque chose tracassait sa petite-amie ! Il n'était pas le seul par ailleurs : l'ensemble des élèves de Première L avait bien remarqué que la star incontestée du lycée depuis des années n'était pas dans son état normal, son éclat ternissant à vue d'œil. Les rumeurs n'avaient pas tardé à courir sur son dos, au grand damne d'Ulrich qui avait du s'énerver plus d'une fois face à ses camarades de classe, faisant jouer ses muscles afin de les calmer. Le résultat avait été pire encore cependant puisque, dés le lendemain, un article de Milly et Tamiya était paru dans les Échos de Kadic, annonçant la rupture proche entre Ulrich et Sissi et expliquant du même coup l'attitude déprimée de l'adolescente.
Ulrich avait fini par baisser les bras, se contentant de se ronger les ongles sans pouvoir agir pour celle qu'il aimait, plus frustré que jamais. Si au moins il avait eu ne serait-ce qu'une petite idée du contenu de cette fameuse lettre qui avait tout déclenché…
N'y tenant plus, Ulrich sauta du lit et quitta sa chambre, marchant à vive allure le long des couloirs déserts. Il ne supportait plus de rester ainsi inactif : il avait besoin de se changer les idées !
Descendant une volée de marches, tournant à un embranchement, il laissa ses pas le guider instinctivement en direction de la bibliothèque du lycée, la tête bourdonnante de pensées.
La pièce, inondée de soleil en raison de ses hautes fenêtres, n'était peuplée que de quelques courageux internes alignés sur l'une des grandes tables disposées au centre, bien décidés à venir à bout de leurs devoirs afin d'éviter les habituels précipitations de dernière minute du dimanche soir. D'autres révisaient tranquillement dans leur coin ou feuilletaient distraitement quelques ouvrages, pourtant le regard d'Ulrich ne fut attiré que par une seule personne.
Assise à sa place habituelle sur le rebord d'une des fenêtres de la pièce, ses longs cheveux d'un noir de jet dissimulant son visage et reflétant les éclats du soleil, Yumi était penchée sur un livre ouvert, visiblement complexe, une feuille de brouillon noircie de notes posée par-dessus et un crayon entre ses longs doigts fins et pâles.
Après une fraction de seconde d'hésitation, le jeune homme se décida finalement à contourner la table pour rejoindre l'adolescente qui releva la tête à son approche. Son regard se durcit et elle replongea le nez dans son travail presque aussitôt, faisant mine de griffonner une nouvelle idée sur le papier. Ulrich ne se laissa pas défaire pour autant –il en avait vu d'autre avec la japonaise- et se hissa à son tour sur le rebord de la fenêtre, s'installant face à Yumi, séparé d'elle par le livre.
- Tu bosses au lycée un Samedi en début d'après-midi ? interrogea-t-il d'un ton narquois alors que l'adolescente rayait une phrase, irritée.
- Certains comptent réussir leurs études ici, contrairement à d'autres… répondit-elle froidement sans prendre la peine de relever la tête, la vraie question serait plutôt de savoir ce que toi tu fais ici ? T'es pas avec ta pimbêche de petite amie aujourd'hui… ?
- La « pimbêche », comme tu dis, est occupée ailleurs, rétorqua-t-il sans relever la réplique cinglante, omettant volontairement le fait qu'elle refusait de répondre à ses messages, excuse-moi si je te dérange Yumi, mais j'ai appris pour William et je voulais juste savoir… Comment tu allais ?
La japonaise ne put se retenir. Elle redressa la tête si brusquement que sa main dérapa sur sa feuille de brouillon, froissant légèrement le papier au passage. Elle ne s'en soucia cependant pas, se contentant de détailler Ulrich d'un œil soupçonneux. Cela faisait des semaines, voire des mois qu'ils ne se parlaient plus tous les deux… Pourquoi s'intéressait-il à elle aussi subitement ? Il devait se sentir seul maintenant que sa brune n'était plus dans les parages…
Pourtant, la jeune fille eut beau sonder jusqu'aux tréfonds des yeux couleur chocolat de son vis-à-vis, elle ne parvint à y déceler aucune forme d'arrière-pensée. Rien qu'une troublante sincérité et une inquiétude qui n'avait rien de feinte.
Sous le coup de la surprise, Yumi ne parvint pas à trouver quoi répondre, restant interdite, la bouche pincée face à son ex-petit-ami. Interprétant son silence comme un signe de mauvais augure, Ulrich crut bon de se justifier.
- C'était dans les Échos de Kadic il y a quelques jours… Et puis honnêtement je crois que personne au lycée n'a pas entendu ton engueulade avec cette Stéphanie. Tu avais vraiment l'air mal, et vu qu'à chaque fois que je te croise dans les couloirs tu es seule, je me demandais… Bref, je suis bien placé pour savoir à quel point c'est dur une rupture.
- C'est… Très gentil à toi, parvint finalement à articuler la japonaise avec une politesse forcée, détournant le regard, un peu trop même… Mais ça me touche. Merci.
- Pas de quoi, répondit-il avec un petit sourire gêné, alors, comment tu te sens en ce moment ?
Yumi hésita encore quelques instants avant de se laisser aller, soupirant un grand coup.
- J'ai connu mieux, fit-elle en retenant une grimace, je suis constamment sur les nerfs, et j'enchaine les sales notes du coup… C'est pour ça que je viens travailler ici un samedi plutôt que de bosser chez moi à vrai dire, pour répondre à ta première question. Dans ma chambre je me morfonds trop pour me concentrer…
Ulrich eut un pauvre sourire compatissant. Lui-même n'avait guère été dans un meilleur état au début de l'année lorsqu'elle et lui avaient rompu !
- Qu'est-ce qui s'est passé ? s'enquit-il, curieux, la dernière fois que je vous ai vu tous les deux ensemble ça semblait solide, non ?
La japonaise dut faire un effort considérable pour ne pas lui répliquer de façon cinglante. Elle se sentait trop seule et trop déprimée ces derniers temps pour rejeter une main charitable -même celle d'un garçon aussi insensible que celui qui lui avait brisé le cœur ! Et puis, il fallait qu'elle parle, que les mots sortent… C'était la seule solution pour soulager un peu ce poids qui pesait sur sa poitrine.
- C'est à cause… De Lyokô, finit-elle par lâcher, baissant la voix, Stéphanie lui a avoué pour le rallumage du Supercalculateur et il a très mal pris le fait que je le tienne à l'écart… Vraiment très mal. Et en un sens je ne peux que lui donner raison, j'ai été stupide de ne pas tenir compte des sentiments de la personne que j'aimais… Une fois de plus !
Yumi avait lâché cette dernière phrase avec amertume sans le vouloir et Ulrich ne put s'empêcher de ressentir un petit pincement au cœur.
- Tu voulais le protéger, rien de plus, lança-t-il maladroitement en se grattant la nuque, laisse-lui le temps de se remettre, ça finira bien par s'arranger !
- Je ne pense pas, soupira Yumi en refermant son bouquin, renonçant à travailler, ça fait trop longtemps que je le fais souffrir inutilement. Je commence à me dire que je ne suis tout simplement pas faite pour être en couple !
Elle eut un petit rire sinistre qui ne parvint qu'à accroitre le sentiment de culpabilité dans la poitrine d'Ulrich.
- Ne dit pas ça ! rétorqua-t-il d'un air de reproche, le responsable, ce n'est rien de plus que ce Supercalculateur de malheur, une fois de plus… Il ne ressort rien de bon de ce machin, tu devrais arrêter de t'impliquer dans toute cette histoire, comme moi ! Ça t'éviterait bien des ennuis je pense.
Yumi marqua une pause avant de répondre, le regard perdu vers l'extérieur, nimbé de souvenirs.
- Tu penses vraiment ce que tu dis, Ulrich ? murmura-t-elle dans un souffle nostalgique.
Le jeune homme, prit de court, ne trouva pas quoi répondre et laissa à son interlocutrice le loisir de poursuivre, les yeux clos, le visage impassible :
- Je pensais la même chose que toi il n'y a pas si longtemps, c'est vrai, continua-t-elle, cependant, à force de me retrouver dans cette salle, avec Aelita et les autres, à force d'en discuter et de voir de nouveau toutes ces choses auxquelles je pensais ne plus jamais être confrontée, j'ai fini par me souvenir… Je me suis rappelé de tous ces moments qu'on a partagés ensemble –tous les cinq je veux dire- pour le pire comme pour le meilleur ! Je me suis souvenue que sans Lyokô, je n'aurais jamais rencontré les personnes qui allaient devenir les êtres les plus chers à mon cœur, je n'aurais pas mûri comme je l'ai fait et je n'aurais pas pu connaitre d'aussi beaux moments… Je me suis souvenue des liens qui nous unissaient tous à l'époque. Est-ce que tu t'en souviens, Ulrich ? A quel point on était proches tous les cinq ?
Au loin, Ulrich eut l'impression d'entendre les éclats de rire de leur groupe passé. Un déferlante de vagues souvenirs venaient de l'envahir, gagnant en netteté à chaque nouveau mot de la japonaise. Pour la première fois depuis des mois, il eut l'impression d'être de nouveau le même Ulrich qu'au collège… Comment le temps avait-il put le changer à ce point ?
Cependant, dés que la voix de la japonaise se fut interrompue, toutes ces sensations s'estompèrent, comme un beau rêve dont il venait de se réveiller.
- Ça… Ça se passe bien alors ? questionna-t-il, troublé, sur… Lyokô et le reste ?
Yumi évita de répondre. Elle ne voulait pas inquiéter Ulrich plus que de raison : il avait choisi volontairement de s'éloigner du Supercalculateur et de tout ce qui y était lié, elle se devait de respecter ce choix, ne serait-ce qu'en souvenir du temps passé avec lui.
- Ça faisait longtemps n'empêche, fit-elle avec un sourire, qu'on n'avait plus discuté comme ça tous les deux je veux dire…
Ulrich opina du chef. Il se rendait compte à présent à quel point son ancienne meilleure amie lui avait manquée en un sens.
- Tu sais, tout ce que je t'ai dit ce jour-là, osa-t-il enfin lancer sans parvenir pour autant à la regarder en face, le jour où tu m'as surpris en train de m'engueuler avec mon père au téléphone à cause du divorce… Je ne le pensais pas. Je t'ai balancé beaucoup de choses sous le coup de la colère et je m'en veux terriblement aujourd'hui. Si je pouvais revenir en arrière...
- Je comprends très bien, lui assura la japonaise d'un ton apaisant, je n'ai pas été tendre non plus avec toi ce jour-là alors disons qu'on est quitte ! La vérité c'est que même si ça n'a pas marché entre nous et que ça fait un moment qu'on n'a plus discuté, je t'apprécie beaucoup Ulrich.
En lançant ces quelques mots, la japonaise se rendit compte à quel point ils étaient sincères. Le rallumage du Supercalculateur avait fini par ramener à la surface des souvenirs et d'anciens sentiments enfouis, plus tenaces qu'elle ne l'aurait cru. Une amitié aussi forte que celle qui les avait unis face à XANA par le passé n'était pas si facile à effacer que cela au final…
- Je… Je t'aime bien aussi Yumi, ça n'a pas changé depuis la Cinquième, avoua le jeune homme, visiblement gêné, en temps qu'ami bien sûr ! Tu comptes beaucoup pour moi malgré tout ce qu'on a pu traverser et, honnêtement, ça m'a fait du bien de discuter un peu avec toi aujourd'hui… Si tu as envie qu'on parle à l'avenir, n'hésite pas à m'appeler, OK ?
La japonaise acquiesça timidement. Était-ce elle où le ciel était-il subitement devenu plus bleu à l'extérieur ? Ses pupilles d'obsidiennes croisèrent celles, chocolat, de celui qu'elle avait aimé et dont l'amitié avait un jour compté plus que tout au monde. Il était étrange de voir à quel point sa rupture subite avec William leur avait permis à tous les deux de se retrouver tels qu'ils étaient, comme si rien –ou presque- n'avait changé depuis le collège.
Pour combien de temps ce nouveau semblant d'équilibre amical que tous deux venaient d'instaurer allait-il duré ? Elle l'ignorait mais elle comptait bien en profiter !
- Un groupe de musique ?
Eva dévisageait Aelita avec un air de franche incrédulité. Les deux jeunes filles, ainsi qu'Odd et Mathieu, s'étaient entassés comme ils pouvaient à l'intérieur du minuscule local, s'asseyant sur les cartons éparpillés un peu partout, le visage tourné vers leur meneuse aux cheveux roses, qui semblait rayonner.
- Je sais que la pièce que m'a laissée le proviseur pour les répet' ne paye pas de mine mais bon… fit cette dernière avec un grand sourire, ça pourrait être une bonne chose de prendre le temps de se détendre de temps à autre entre les cours et… Le reste.
Personne n'eut besoin de la questionner quant à ce qu'elle entendait par « le reste ». Pour tous, l'image du Supercalculateur luisant faiblement dans la pénombre venait de s'afficher au creux de leur esprit, sa lueur verdâtre menaçante dansant devant leurs yeux.
- C'est une super idée, Aelita, approuva Odd, sincère, tu as toujours été douée pour les mix et je t'ai entendue chanter pendant les cours de musique au collège : t'assure grave ! Tu pourrais faire des concerts d'enfer pour le bal de l'école ou ce genre d'événement !
- Pas toute seule, répliqua-t-elle en rosissant sous l'effet du compliment, en fait, j'espérais que vous puissiez m'aider tous les trois… Odd, tu jouais de la guitare électrique au collège, non ? Et toi aussi tu jouais de la musique Eva en Amérique si je ne me trompe pas ?
La jeune fille aux cheveux blonds approuva d'un signe de tête. Il était vrai qu'elle avait été férue de musique en son temps et que, depuis son arrivée à Kadic, cela lui manquait cruellement. Les étudiants français étaient si ennuyeux par rapport à ses anciens camarades… Ils ne savaient pas prendre du bon temps comme elle et ses amies à l'époque !
- C'était de la basse moi, pas de la guitare, corrigea-t-elle, et un peu de batterie aussi. A part ça je dois bien reconnaitre que je commence un peu à rouiller… Ça me ferait du bien de m'y remettre !
- Idem, lança Odd en se redressant brusquement, les yeux pleins d'étoiles, on t'aidera avec plaisir à former ton groupe, princesse !
Parler ainsi de musique lui avait rappelé de vieux souvenirs à l'époque où, encore en Quatrième, lui, Ulrich et Yumi avaient tenté de former un groupe de Pop Rock. Malgré l'aval du proviseur, le projet n'avait guère tenu longtemps, leur batteur étant à l'époque un des meilleurs amis –ou plutôt larbins- de Sissi qui se faisait une joie de leur mettre des bâtons dans les roues à la moindre occasion, dans le simple but d'attirer l'attention sur elle. Ils s'étaient dissous avant même de jouer leur premier concert face au collège et, au fond de lui, Odd l'avait toujours regretté.
- Attends une minute Aelita, fit soudain Mathieu, hésitant, je veux bien pour Odd et Eva mais en ce qui me concerne je n'ai jamais été capable de me servir d'une simple flûte et j'avais toujours les pires notes en musique au collège… Je ne pense pas pouvoir t'être utile !
La jeune fille balaya la remarque d'un geste de la main.
- Mais tu as un talent fou en dessin –ne nie pas c'est la vérité ! répliqua-t-elle alors que le jeune homme rougissait à son tour, je me disais que tu pourrais te charger de mettre au point le logo du groupe, pour des affiches par exemple ! Et je suis sûr que tu saurais très bien t'occuper de tout ce qui est communiqués officiels, au cas où on voudrait passer une annonce dans les Echos de Kadic.
- Je…
Mathieu se tut un instant, hésitant. Du temps où il était élève à Sainte Bénédicte, il ne s'était jamais mêlé à une telle activité de groupe, et encore moins après son coming-out involontaire. D'aussi loin dont il se souvenait, il s'était toujours senti à part, exclu de ce genre d'association suscitant pourtant un véritable engouement pour la plupart de ses camarades. Pour cette raison, l'idée de changer la donne à Kadic lui paraissait des plus effrayantes. Il mettrait après tout les pieds en terrain totalement inconnu et risquait de vite se sentir submergé, voire isolé. Pourtant, le fait qu'Aelita ait pensé à lui malgré ses talents de musiciens médiocres le touchait d'une certaine façon.
- On pourrait te donner un coup de main, Eva et moi, suggéra Odd, conscient du trouble intérieur de son ami, sans prendre en compte la grimace de l'intéressée, elle gère en infographie et en retouche d'images : ça pourrait donner un bon rendu ! T'en penses quoi ?
Mathieu promena son regard d'Odd à sa petite amie, en passant par Aelita. Mis à part l'air pincé de l'américaine, tous avaient l'air de sincèrement tenir à son adhésion dans le groupe. Une bouffée de chaleur remonta de son bas-ventre jusqu'à ses joues : comment était-il sensé réagir dans une situation pareille, où pour la première fois il se sentait réellement entouré d'amis sincères ?
- Bon… D'accord, parvint-il finalement à bafouiller, gêné, je verrai ce que je peux faire…
- Génial ! approuva Aelita avec un sourire radieux, il ne nous reste plus qu'à planifier les séances de répétition, mettre au point les chansons qu'on veut interpréter -voire en créer nous-même s'il le faut ! Et puis…
- Tu vas un peu vite en besogne, princesse ! l'interrompit Odd en pouffant de rire, lui balançant un petit coup de poing amical, avant tout ça on devrait penser au nom du groupe, vous ne croyez pas ?
Un silence empli de réflexion s'installa sur la pièce. Le jeune homme au béret avait raison : aucun d'entre eux n'avait encore pensé à ce point, pourtant crucial, de la formation du groupe.
- Les Aelita's Players ? suggéra Mathieu sans conviction, s'attirant un éclat de rire moqueur de la part d'Eva.
- Je préférerais éviter de me mettre en avant, objecta la jeune fille aux cheveux roses en se grattant la tête, je ne serai pas la seule membre du groupe ! Pourquoi pas plutôt…
- Les Lyokô-Warriors ! rugit subitement Odd faisant sursauter tout le monde, ça en jetterait trop !
Eva émit un grognement peu convaincue.
- Autant directement écrire une chanson révélant l'existence du Supercalculateur si on choisit de s'appeler comme ça ! raya-t-elle, s'attirant une moue boudeuse de la part de son petit-ami, ton idée est à jeter,
Honey
!
- Tu n'as qu'à proposer mieux dans ce cas ! répliqua Odd en lui tirant la langue, taquin.
Le silence retomba sur le groupe, à peine rompu par le bourdonnement d'une mouche, entrée dans la pièce par une des fenêtres grandes ouvertes. Distraitement, Aelita la suivit des yeux se poser sur son sac. C'est alors que ses pupilles vertes s'attardèrent sur un petit détail pendouillant de sa sacoche au niveau de la fermeture éclair : une peluche en forme de lutin, seule trace de sa vie passée, et dont elle se servait comme strap décoratif depuis le rallumage du Supercalculateur, en guise de porte-bonheur. Mr. Pück…
Intrigué, Odd suivit son regard et son visage s'éclaira aussitôt, comme si une idée faramineuse venait de lui traverser l'esprit :
- Qu'est-ce que vous pensez de
Miss. Pück
? suggéra-t-il en se grattant le bouc, s'attirant le regard des autres, comme la peluche d'Aelita, mais au féminin ! En plus, avec ça, le logo du groupe est tout trouvé, non ?
- C'est vrai que ça pourrait coller… réfléchit Eva tout haut en soulevant la petite peluche élimée entre ses doigts, ça correspond à Aelita et ça sonne plutôt bien !
- C'est toujours mieux que « Les Lyokô-Warriors », ironisa Mathieu en jetant un coup d'œil espiègle en direction d'Odd qui eut un gémissement plaintif, tu en penses quoi, Aelita ?
L'adolescente prit le temps de réfléchir, perdant son regard dans les orbes vides de Mr. Pück. Donner à leur groupe le nom de cette fameuse peluche sans laquelle elle ne se serait peut-être jamais souvenue de son père ni de son passé, de ce petit elfe si modeste qui symbolisant tant pour elle, à commencer par l'espoir de parvenir enfin un jour à tirer un trait sur le Supercalculateur et Lyokô… Plus que l'idée de donner un nom clinquant à quelque chose qui lui tenait à cœur, cela avait une véritable signification profonde pour elle.
- Très bien, finit-elle par approuver en ouvrant un document Word sur son PC, commençant à taper un titre : c'est décidé, notre groupe s'appellera donc Miss. Pück à l'unanimité !
A peine avait-elle finit de taper le dernier caractère, sous le regard satisfait de ses amis, qu'une sonnerie tonitruante s'éleva de l'ordinateur, leur vrillant les tympans.
- Qu'est-ce que c'est que ça, Aelita !? grimaça Odd en se bouchant les oreilles, les sourcils froncés.
La jeune fille s'était mise à pâlir, toute pensée liée à la musique subitement évanouie de son esprit face à la fenêtre d'alerte qui venait de s'ouvrir sur l'écran.
- Une intrusion dans Lyokô, par la Brèche ! murmura-t-elle, interdite, c'est pas vrai !
Reprenant subitement ses esprits, elle entreprit de pianoter rapidement sur le clavier, affichant un rapport du programme espion qu'elle avait pris soin de placer autours de la Faille lors de sa dernière plongée dans le monde virtuel.
- Il y a un nombre vraiment incroyable de monstres ! ragea-t-elle sous le regard paniqué de Mathieu, Odd et Eva, beaucoup trop par rapport à la dernière fois !
- Comment est-ce que c'est possible ? interrogea l'américaine, ses sourcils fins arqués en une expression inquiète.
- Je suppose que la Green Phoenix est parvenue à briser quelques protections supplémentaires et a décidé de passer en force cette fois-ci pour nous empêcher de contre-attaquer, jura l'adolescente aux cheveux roses, se redressant brusquement tout en rabattant le clapet du PC, dégainant son portable d'un geste fluide, je contacte Yumi ! Mathieu, essaye de joindre Stéphanie ! On se retrouve tous à l'usine, pas le temps de trainer !
Aelita se mordit le pouce tandis que ses trois compagnons se ruaient hors de la salle en direction de la chaufferie et que les premières tonalités commençaient à résonner à l'autre bout de son téléphone, anxieuse. A ce rythme là, le Cœur de Lyokô serait vite atteint par les monstres de la Green Phoenix et il serait alors inutile de songer à tenter de protéger le Projet Carthage de l'organisation !
Le portable de Yumi vrombit dans la poche de son jean, la faisant sursauter et la ramenant à la réalité de surcroit. S'arrachant à la contemplation des orbes chocolat d'Ulrich, elle dégaina le téléphone qu'elle décrocha aussitôt, chuchotant afin de ne pas se faire surprendre par les pions présents.
- Aelita ? Un souci ? fit-elle à voix basse s'attirant le regard intrigué du bel adolescent.
Un bref silence s'ensuivit durant lequel le visage de la japonaise, déjà d'ivoire, pâli encore plus.
- Bon très bien, j'arrive tout de suite ! finit-elle par lâcher en sautant du rebord de la fenêtre, faisant glisser ses affaires dans son sac au passage, pêle-mêle, je n'étais pas trop motivée pour bosser de toutes façons…
Elle jeta un sourire désolé en direction de son ami qui n'avait pas bougé, rengainant son téléphone d'une main.
- Je dois y aller, une urgence, s'excusa-t-elle en esquissant une légère courbette très « japonaise », merci pour tout !
- Pas de quoi, répliqua son vis-à-vis avec une petite moue dépitée, sauve-toi va, le monde t'attends !
La jeune fille n'attendit pas plus longtemps pour tourner les talons et disparaitre derrière la porte de la bibliothèque, suivie des yeux par un Ulrich à l'air sombre.
- Un de ces jours ça finira mal toute cette histoire avec Lyokô, chuchota-t-il plus pour lui-même qu'à l'intention de la japonaise, fait attention à toi, Yumi…
Perdu dans ses pensées, il ne remarqua pas la légère fissure qui venait d'apparaitre sur le carreau sur lequel l'adolescente s'était adossée un peu plus tôt, ignorant ce sinistre présage avec une insouciance qui, bien qu'il l'ignorait encore, n'allait pas tarder à le quitter.
Et voilà pour le chapitre du jour ! Un petit chapitre tranquille, certes, mais l'action reprend avec du lourd dés les chapitres suivants °A° ! D'ici là, je vous demande encore un peu de patience... En espérant pouvoir vous dire à très vite ![/spoil]
Je rejoins ce que dit Shaka concernant les Chronicles : non seulement ça ne serait jamais passé en adaptation télévisuelle, aussi géniale que la série de romans soit, et en plus les incohérences par rapport à la série d'origine sont quand même BEAUCOUP plus nombreuses que dans Evolution =(...
C'est ce qui m'étonne avec certains anti-Evolution d'ailleurs : la façon dont ils glorifient les Chronicles alors que William n'est jamais allé sur Lyokô dedans, que la plupart des monstres ne correspondent pas à leur version du dessin animé, qu'Aelita est rousse que les Tours activées clignotent en bleu, qu'on passe d'un territoire à l'autre en marchant, Aelita qui est allée à Kadic dans son enfance, etc... Franchement j'adore les Chronicles mais qu'on ne vienne pas me dire que c'est une suite plus fidèle à la série d'origine que Code Lyokô Evolution, aussi intéressante qu'elle soit XDD !
Et euh, j'ajoute aussi que tous les personnages secondaires qui vous manquent tellement auraient certes été faciles à recruter mais ça aurait fait quand même un certain nombre d'acteurs en plus à payer, tout ça pour les voir apparaitre dans des scènes relativement anecdotiques... Je comprends qu'ils puissent manquer mais bon, on peut comprendre les créateurs de CLE sur ce point je pense ! Ils se sont concentrés sur l'essentiel o/
Yop ! Encore l'éternel débat du CL VS CLE, hein *o* ? Je pense que je vais devoir aller contre tes arguments pour cette fois, désolé d'avance >_< !
Qu'on soit nostalgique de l'ancienne série c'est tout à fait normal, qu'on reproche à Evolution des incohérences telles les Tarentules tirant avec leur gueule plutôt que leurs canons, je suis d'accord ! Par contre je ne suis pas vraiment d'accord avec tes arguments =(...
Tu trouves ça incohérent de voir des acteurs jouer le rôle d'un personnage sans s'être imprégné de la série d'origine ? Soit, mais bon, ce n'est pas vraiment une nouveauté... Daniel Radcliffe n'avait jamais lu Harry Potter avait d'être retenu pour le rôle il me semble et, de plus, je crois me souvenir avoir lu quelque part que les acteurs ont regardé un certains nombres d'épisodes après avoir été sélectionnés justement ! Ne pas avoir été fan de la série autrefois ne les empêche pas de s'intégrer au personnage, d'autant plus qu'on ne peut pas vraiment leur reprocher leur interprétation je trouve o/ enfin bon, avis personnel...
Concernant l'absence des personnages secondaires que tu sembles qualifier de "MANQUE DE COHERENCE ENORME" baah... Ce sont des personnages secondaires quoi ! Ils n'ont jamais vraiment rien apporté à l'intrigue. Passe encore pour Milly et Tamiya ou Sissi dans les premières saisons mais honnêtement... Hervé et Nicolas... On peut s'en passer sans perdre la cohérence de la série tout de même, Jim suffit pour le comic relief ! L'absence de Kiwi est par ailleurs expliquée dans la série (et puis difficile de dresser un chien juste pour le rôle quoi) et Iroki est cité également. L'absence des personnages ne veut pas dire qu'ils n'existent pas, bien au contraire !
Pour Sissi d'ailleurs, on la voit quand même beaucoup moins dans la dernière saison et son histoire était par ailleurs bouclée à la fin de la saison 4 puisque nos héros acceptent de la traiter comme une amie ce qui lui enlève toute raison de continuer à pourchasser leur secret. De plus, cela faisait un moment qu'elle ne tournait plus autours d'Ulrich, alors pourquoi insister sur elle alors qu'il y avait possibilité de mettre en avant d'autres personnages comme Sam ou Laura, quand même plus intéressants ?
En ce qui concerne les scénaristes, je ne peux que supposer mais je pense que, 5 ans après la fin de CL, la plupart n'étaient pas disponibles, tout simplement ! Et puis c'est bien d'avoir un peu de sang neuf je suppose o/ on a eu quand même des histoires intéressantes dans Evolution ! On a quand même Sophie Decroisette (pour les deux premiers épisodes qui sont pourtant loin d'être les meilleurs) et Bruno Regeste de l'ancienne équipe sinon ! C'est déjà ça de pris !
Après je suis d'accord sur le fait que CLE soit plus un spin-off de la série qu'autre chose, mais il reste très appréciable et je trouve que, pour une équipe qui ne connaissait rien aux origines de la série, il y a un vrai soucis de cohérence ! Je pense notamment à toutes les petites allusions aux saisons précédentes comme Odd ayant déjà conduit le Skid, Aelita ayant été ramenée sur Terre par Jérémie, "je préfère ne pas en parler", etc... Il n'y a pas vraiment d'incohérence MAJEURE avec l'ancienne série, juste des petits détails qui font tiquer les fans les plus avertis, mais sinon je trouve l'ambiance originelle relativement respectée *__*
Bref, vous l'aurez compris je suis un fervent défenseur de CLE et de ses réussites *o* je ne dis pas que la série est parfaite mais je n'irais pas jusqu'à cracher dessus non plus, surtout pour quelques détails pour ça !
Après, tu soulèves le point intéressant de la saison 2. Si elle venait à voir le jour (ce dont je doute fortement malheureusement vue l'éconduite de Moonscoop =(...) il est clair que le retour d'ancien personnage serait plus que bienvenue, et notamment celui d'Iroki ! J'aimerais aussi beaucoup revoir l'Ermitage si possible, aux vues de l'excellent travail réalisé sur l'usine notamment.
Vala pour mes arguments~ j'vous laisse embrayer (en espérant ne pas relancer la guerre entre les Anti-CLE et les Pro-CLE =( !).
Yop ! Merci pour ton commentaire si rapide *o* pour une fois je vais répondre maintenant,quitte à éditer ce post plus tard pour un autre chapitre~
Waaah, sans te spoiler t'es plutôt perspicace pour certains points dans tes prédictions ! Serais-je si prévisible XDD ?
Edit de Zéphyr : Non, je suis juste trop fort
Sinon, content de voir que la scène sur Mélissa Delmas te plaise ! J'avais peur que ce ne soit un peu trop "engagé" pour Code Lyokô... C'est un sujet assez complexe à traiter >_< ! Content aussi que tu apprécies la Sissi un peu plus forte et mature qu'à l'accoutumé que j'ai essayé de montrer *__* je pense sincèrement que le personnage mérite une meilleur reconnaissance... Je lui avais d'ailleurs prévu un rôle bien plus important à la base avec son histoire qui serait un peu plus poussé que sur ces quelques chapitres, mais ma fiction est déjà trop longue, sans compter que j'ai un nombre assez astronomique de personnages à mettre en avant T__T du coup elle a été un peu laissée de côté par rapport à mes idées d'origine...
Concernant le "au grand damn" c'est ce qu'il me semblait aussi mais mes correcteurs orthographiques ne semblent pas d'accord avec moi alors j'ai un gros doute sur la question =( merci de relever ça en tout cas !
Wouhou ! Pas de trop de boulot ce week-end, donc ça veut dire nouveau chapitre pour le fofo *__* encore une fois, désolé pour mon manque de régularité >_< !
Merci pour ton commentaire Zéphyr X3 promis, j'arrête de me déprécier =( *veut pas se prendre une prise de Penchak Silat d'Ulrich* encore merci infiniment pour ta gentillesse et ton soutient >_< tes commentaires me font toujours plaisir ! Comme ceux des autres d'ailleurs *__*
Sur ce, j'embraye sur le chapitre, principalement centré sur Sissi, une fois n'est pas coutume ! Encore un chapitre et on quitte les Tranches-de-vie pour retourner dans l'histoire principale o/ bonne lecture d'ici là !
Spoiler
Chapitre 23 : Épisode 122 : Mélissa Delmas_
Mathieu regardait l'heure défiler d'un œil vitreux, son crayon courant habillement sur sa feuille de papier alors qu'il lui accordait à peine un regard distrait. La voix monocorde de son professeur d'histoire, Monsieur Fumet, ne suffisait pas à lui vider l'esprit cependant, encore tourmenté par les événements récents.
Depuis l'annonce de la mort de Madame Hertz, la semaine avait été riche en émotion. Le lendemain même de la cérémonie en l'honneur de l'ancienne professeure, c'était une Yumi hors de contrôle qui avait fusé à travers la cour en direction de Stéphanie. Cette dernière avait instinctivement tenté de s'éclipser mais en vain. Le petit groupe avait tout de suite compris que quelque chose clochait en constatant que les cheveux de la japonaise, habituellement noués en un chignon complexe, étaient défaits ce matin-là.
S'en était suivi la dispute la plus monumentale et la plus affreuse qu'ait jamais connue Kadic. La japonaise avait crié sur son amie sans interruption pendant une bonne dizaine de minutes à s'en écorcher la voix tandis que cette dernière se contentait de hocher la tête d'un air coupable, les larmes aux yeux.
Entre deux éclats de voix, Aelita, Mathieu et les autres, restés à bonne distance, avaient fini par comprendre que, la veille, Stéphanie avait tout avoué à William concernant le Supercalculateur et que, de fil en aiguille, cela avait provoqué la douloureuse rupture du couple.
Depuis cet incident, Yumi refusait catégoriquement d'adresser la parole à Stéphanie, l'évitant autant que nécessaire durant les cours, au grand damne de la jeune fille qui ne demandait qu'à se faire pardonner, sans trop savoir comme s'y prendre. Le mal était déjà fait et ne pouvait être réparé dans le cœur meurtri de la japonaise.
Aelita avait vainement tenté une approche auprès de William qui, toujours sous le choc de la nouvelle et rendu aigri par sa récente rupture, l'avait brutalement repoussée en prétextant qu'il avait besoin de temps pour réfléchir. La jeune fille, qui avait déjà bien assez à régler avec sa mère, celle-ci s'étant avérée profondément bouleversée par la mort de son amie, Suzanne Hertz, n'avait pas insisté.
L'ambiance au sein des Lyokô-Guerriers était donc plus tendue que jamais et, fort heureusement, le programme que leur meneuse aux cheveux roses avait installé durant le week-end afin de les avertir d'une éventuelle récidive de la Brèche de Lyokô n'avait donné aucun signe d'alarme au cours des derniers jours. Une chance selon Mathieu, qui pensait que leur équipe des plus divisées en cet instant précis n'aurait pas fait long feu face aux monstres de la Green Phoenix.
Mathieu accentua une ombre sur le dessin qu'il s'affairait à réaliser depuis le début de l'heure, trop distrait pour suivre le cours. Qu'allait-il se passer désormais ? Avec les derniers événements, il était évident que Yumi ne voudrait plus avoir affaire à eux et Aelita s'éloignait de plus en plus du groupe, obnubilée par sa nouvelle relation avec Thomas.
Le jeune homme fronça les sourcils en pensant au couple. Plus le temps passait et plus il commençait à se dire qu'Odd n'avait peut-être pas tord. Peut-être Aelita ne s'accrochait-elle à ce Thomas que dans le but de combler le vide laisser dans son cœur par Jérémie ? Peut-être ne s'agissait-il là que de sa façon de s'accrocher alors que son univers s'effondrait sur lui-même…
"Et si j'avais eu tord de la pousser vers lui ?" se dit-il avec appréhension en repensant au regard transi d'amour que la jeune fille aux cheveux roses destinait à son ancien compagnon de chambre avant qu'il ne quitte Kadic… Un regard qui était loin de celui qu'elle adressait à son actuel petit ami, c'était certain.
La sonnerie retentit, mettant fin au cours et ramenant Mathieu sur Terre. Alors que le professeur souhaitait une bonne fin de journée aux autres élèves qui se pressaient déjà vers la sortie, l'adolescent prit tout son temps pour ranger ses affaires, jetant au passage un coup d'œil d'ensemble à son dessin.
Le regard d'Angel lui répondit et son estomac se serra. Malgré tout le temps qui s'était écoulé, tous les liens qu'il avait forgés avec les kadiciens, le jeune homme restait omniprésent dans son cœur comme dans son esprit. Il n'était toujours pas prêt à tourner la page. Pas tant que celui-ci ne serrait pas libéré de l'emprise de la Green Phoenix.
Mathieu inspira profondément afin de calmer son cœur qui commençait à s'emballer. Cette seule et unique pensée était la dernière chose qui le poussait à ne pas tourner le dos à toute cette histoire de Supercalculateur depuis l'annonce de l'assassinat de l'ex-professeure Hertz. Il y puisait sa force et son courage, se forçant à ne pas prendre ses jambes à son cou et fuir, comme il en avait l'habitude. Cette fois-ci il était bien décidé à se battre pour ce qu'il désirait, quelles que puissent en être les conséquences !
Il pouvait l'affirmer très clairement désormais, il était prêt à mourir pour Angel s'il le fallait.
- Mademoiselle Delmas, je suis relativement pressée, fit la voix courroucée de Hyacinthe Soprano, j'ai cours dans moins de dix minutes avec vos camarades de Terminale et…
- Ça attendra ! l'interrompit la jeune fille avec une brusquerie qui ne lui était que peu coutumière, l'entrainant à travers les couloirs du bâtiment administratif de Kadic, le regard déterminé, ce que j'ai à vous dire importe bien plus qu'un simple cours de Philosophie, croyez-moi !
L'enseignante pinça les lèvres mais préféra ne pas relever la remarque, se contentant de suivre la fille de son amant de son habituel pas vif, ses talons claquant contre le carrelage des couloirs impeccables, vides à cette heure de la journée.
Cette adolescente ne lui avait posé que des problèmes depuis qu'elle et son père s'étaient finalement décidés à lui avouer leur liaison -elle n'en avait éprouvé aucune surprise cependant. A ses yeux, elle n'était jamais qu'un substitut, un corps étranger dans cette belle petite vie qui était la sienne ayant pris la place de sa mère bien-aimée... Comment Elisabeth aurait-elle pu l'apprécier ? Cela ne l'empêchait pas cependant d'être singulièrement agacée par les constantes brusqueries de l'adolescente, perturbant sa carrière ! Que pouvait-elle bien lui vouloir cette fois-ci ?
Avec un haussement de sourcil surpris à peine perceptible, Mademoiselle Soprano constata qu'Elisabeth l'entrainait jusqu'au bureau de son père dont la porte caractéristique, surmontée d'une plaque dorée indiquant « Proviseur » luisait faiblement à la lueur des néons.
Sissi toqua à la porte et entra sans laisser le temps à l'enseignante de réfléchir. Elle traversa la pièce de la secrétaire de son père, Nicole Weber, sans prêter la moindre attention aux cris indignés de cette dernière. Hyacinthe Soprano lui emboita le pas en adressant un sourire confus à la vieille femme, désormais inquiète. Elle venait seulement de remarquer le regard étrangement dur de la jeune fille, comme si elle venait de prendre une décision qui ne pouvait être autre que lourde de conséquences.
Nicole Weber soupira avant de se rassoir, croisant ses longs doigts secs sous son menton pointu, habituée à l'attitude de sans-gêne de la fille du proviseur. Il n'y avait rien qu'elle pouvait faire pour s'interposer de toute manière, elle avait fini par l'apprendre au fil des années.
L'adolescente franchit rapidement les quelques pas séparant la porte d'entrée de celle de la salle réservée au directeur de l'établissement et l'ouvrit sans la moindre hésitation, sans prendre la peine de s'annoncer.
D'un mouvement d'une rare brusquerie, elle poussa sa professeure de philosophie qui lâcha un glapissement de surprise à l'intérieur de la salle avant de refermer derrière elle, sous le regard incrédule de la secrétaire.
Jean-Pierre Delmas s'était levé de son bureau à l'entrée des deux femmes de sa vie, visiblement aussi surpris que Madame Weber par cette brusque interruption. L'ordinateur allumé à la surface du meuble de bois riche ronronnait doucement et une liasse de papier était posée face à lui, signe que sa fille l'interrompait en plein travail. Une large fenêtre permettait au soleil qui brillait fort ce jour-là de baigner toute la pièce de sa douce lumière, lui conférant un aspect chaleureux et agréable qui contrastait avec la froideur de l'ameublement d'un autre âge et de son occupant.
Jean-Pierre Delmas avait en effet tout pour paraitre imposant, avec sa haute et large silhouette, sa large moustache grisonnante, ses cheveux poivre et sel impeccablement coiffés et sa paire de lunettes strictes ne suffisant pas à masquer l'éclat de ses yeux d'un brun profond. Il se dégageait de lui une autorité et un charisme impressionnants, reconnus de tous à travers l'établissement.
- Sissi ! s'exclama-t-il de sa voix grave et profonde, mi-surprise mi-indignée, qu'est-ce que tout cela signifie ?
La jeune fille ne répondit pas, restant tournée vers la porte, inspirant profondément. Elle ne pouvait plus reculer désormais, il fallait qu'elle se lance, même si cela signifiait bouleverser sa vie à jamais.
Lentement, elle se retourna vers les deux adultes qui la fixaient d'un air exaspéré. La détermination, mêlée à la peur, était clairement lisibles au fond de ses deux prunelles d'obsidienne, savamment maquillées.
- Papa, Mademoiselle Soprano, il faut qu'on parle. Tous les trois.
- Tout cela devient grotesque ! s'exclama le proviseur en contournant son bureau pour se diriger à grand pas vers sa fille, cela fait des semaines que tu agis ainsi, te défiant du règlement et allant jusqu'à rendre la vie impossible à Hyacinthe –la jeune fille tressaillit en entendant son père nommer sa professeure par son prénom- il serait temps que tu grandisses un peu !
Pour toute réponse, Sissi dégaina son portable et pressa une touche, affichant avec automatisme la photo de la lettre dont elle ne pouvait détourner le regard depuis des jours.
- Qu'est-ce que… ?
La voix du proviseur s'étrangla dans sa gorge, il blêmissait à vue d'œil. Mademoiselle Soprano mit plus de temps à comprendre ce que leur montrait la jeune fille. Cependant, lorsque, enfin, elle réalisa de quoi il s'agissait, son visage habituellement ferme et implacable sembla se décomposer et elle vacilla sur place. Pour la première fois, c'était de la peur qui était lisible dans ses yeux. Une peur véritable et paralysante.
- Je veux des explications, lâcha le plus calmement possible Sissi, impassible, maintenant.
Elle s'était visualisée mentalement cette confrontation dans sa tête pendant des jours avant d'enfin se décider à confronter son père et sa maîtresse. Elle était prête à faire face à la situation, contrairement aux adultes concernés.
- Sissi, lâcha Jean-Pierre Delmas d'une voix blanche étrange qu'elle ne lui avait jamais entendue, où as-tu vu cette… ?
- Cette lettre ? Ça n'a pas d'importance, l'interrompit-elle en soutenant son regard, sans ciller, mais apparemment tu étais au courant de son existence, à en juger ta réaction… Qu'as-tu à dire à son sujet dans ce cas, je t'écoute ?
Le proviseur ne parvint pas à regarder en face sa fille plus longtemps et détourna les yeux, visiblement troublé. Derrière lui, Mademoiselle Soprano semblait au bord de la nausée et restait silencieuse, ses bras serrés contre sa poitrine dans une attitude angoissée. Elle avait enfoncé ses ongles dans ses coudes avec tant de force que ses jointures en devenaient blanches.
Pourtant, Sissi ne parvenait à tirer aucune satisfaction du trouble qu'elle avait réussi à inspirer à cette femme qu'elle haïssait de tout son être. Son esprit était vide de toute pensée et de tout sentiment désormais. Tout ce qu'elle désirait en cet instant précis, c'était des réponses.
- Tu en as parlé à quelqu'un ? reprit très rapidement son père comme pour détourner la conversation, de cette lettre… ?
- Ce n'est pas la réponse à la question que je t'ai posée, protesta tout aussi évasivement la jeune fille, d'un ton plus froid que jamais.
- Sissi, toute cette affaire ne te regarde pas ! s'emporta soudain Jean-Pierre Delmas, le visage tordu en une étrange expression mêlant la peur et la colère, je suis ton père ! Réponds à mes…
- Ça suffit Jean-Pierre…
Les deux Delmas se retournèrent avec surprise vers Mademoiselle Soprano. Celle-ci s'était adressée à son amant d'un ton étrange, à mi-chemin entre la supplication et le désespoir. Elle semblait avoir pris vingt ans de plus en cet instant, fixant ses pieds chaussés de talons avec honte.
- Nous nous doutions que nous ne pourrions dissimuler la vérité pour toujours, reprit-elle de cette même voix éraillée et si profondément triste qu'elle parvenait même à faire vaciller les barrières que s'était bâtie Sissi en prévision de cette discussion, ta fille a le droit de savoir…
Un silence pesant se posa sur la pièce alors que Jean-Pierre Delmas refermait la bouche en fixant à son tour le sol, bouleversé. Elisabeth mit un moment avant de parvenir à reprendre la parole, un trémolo dont elle se serrait volontiers passé dans sa voix .
- Alors c'est vrai… fit-elle en sentait sa force la quitter peu à peu, tout ce que ma mère a écrit dans cette lettre à votre attention Hyacinthe… Vous l'avez bel et bien tuée ?
Le silence qui lui répondit valait plus que toutes les réponses possibles. Sous le choc, Sissi vacilla. Elle sentit à peine son téléphone glisser de sa main et atterrir sur le sol avec un bruit sourd, tandis que des larmes brouillaient sa vision.
- Je me souviens… souffla-t-elle en plaquant sa main contre son cœur qui menaçait de se briser à tout instant, vous m'aviez dit que votre précédent travail, avant que mon père ne vous embauche, était infirmière dans l'hôpital de la Ville de la Tour de Fer. Vous me l'aviez dit le jour où mon père vous a présenté à moi… Je n'ai pas fait le lien tout de suite, comme une idiote… En réalité, vous étiez en charge de ma mère lorsqu'elle était malade, n'est-ce pas ?
Hyacinthe Soprano approuva d'un air grave, incapable de parler. Jean-Pierre Delmas s'était glissé à ses côtés et avait glissé ses doigts entre les siens, dans une attitude protectrice et rassurante. Sissi ne parvint même pas à s'en offusquer.
- Il faut que tu nous écoutes ma chérie, parvint enfin à articuler le proviseur d'un air inquiet, fixant la porte dans le dos de sa fille de crainte que Nicole Weber ne surprenne leur conversation, nous nous sommes rencontrés, Hyacinthe et moi, alors que ta mère était en phase terminale. De fil en aiguille nous nous sommes rapprochés et… Nous avons fini par tomber amoureux.
Un hoquet plaintif échappa à Sissi qui pleurait véritablement cette fois, affaissée sur elle-même, le visage ravagé par la douleur.
- Mais nous n'avons cédé à aucun moment, reprit très vite Jean-Pierre Delmas, jamais je n'ai cherché à tromper ta mère et jamais Hyacinthe n'a voulu exprimer ses sentiments. Nous avons préférer enfouir notre amour au fond de notre cœur, par respect pour ta mère. Seulement Mélissa n'était pas aveugle…
- Ta mère était une femme intelligente... poursuivit à la place de son amant la professeure de philosophie, s'attirant un regard empli de haine de la part de la jeune fille.
-Comment osez-vous parler d'elle… ? siffla-t-elle entre deux sanglots, folle de rage.
Mais Hyacinthe n'y prit pas garde, se forçant à continuer malgré son bouleversement faisant écho à celui de l'adolescente qui lui faisait face.
- ...Elle a très vite compris qu'il se passait quelque chose entre moi et ton père. Et elle avait conscience d'être la seule personne à encore empêcher les deux êtres que nous étions à s'aimer. Elle ne pouvait plus supporter d'être une charge pour son mari. C'est du moins ce qu'elle a écrit dans cette lettre m'étant destinée, comme tu as pu le lire par toi-même.
Sissi ne répondit pas. Que pouvait-elle répondre ? Elle savait déjà tout cela… Elle le savait pour avoir lut et relut cette ultime lettre de sa mère, jusqu'à ce que le moindre mot la composant soit gravé à jamais dans son cerveau. Elle savait où tout cela menait.
- C'est pour cela… parvint-elle enfin à dire en ravalant ses pleurs, c'est pour cela qu'elle vous a demandé de l'euthanasier n'est-ce pas ?
C'était enfin sorti. Elle avait enfin réussi à dire ce que son cœur refusait d'admettre depuis des jours. Hyacinthe Soprano était la seule responsable de la mort de sa mère, à sa propre demande. Tout cela lui paraissait encore plus inconcevable maintenant que ces terribles mots avaient été formulés à haute voix. Tout autours d'eux, le spectre de Mélissa Delmas semblait résonner à même les murs, les plongeant dans une angoisse épaisse et poisseuse, compressant leurs poitrines et les étouffant peu à peu. Sissi se sentit suffoquée, terrassée par l'effroyable réalité.
- Ta mère souffrait, fit l'enseignante d'un ton désespérée alors que des larmes commençaient à couler à leur tour sur ses joues, elle n'en avait plus pour longtemps à vivre et aucun remède n'était possible. Elle a préféré libérer son mari en mettant fin à ses jours plutôt que de continuer à être un poids pour lui, selon ses propres mots. Pendant longtemps j'ai refusé, par éthique, mais elle insistait tellement et avec tant d'ardeur que j'ai fini par en parler à ton père.
- Nous avons alors eu une longue discussion, tous les trois, acheva Jean-Pierre Delmas en enlaçant sa maîtresse qui ne semblait plus capable de tenir debout, écrasée par le poids des révélations qu'elle venait de fournir, et, la mort dans l'âme, nous avons finalement cédé. Ta mère est partie avec le sourire, alors que Hyacinthe lui administrait une dose de ses calmants légèrement supérieure à la normale. Une dose fatale. Hyacinthe a démissionné quelques jours plus tard, elle ne parvenait plus à supporter de devoir arpenter ces couloirs où elle se sentait comme une meurtrière, et je lui ai offert un poste ici. Tu connais toute la vérité désormais.
Sissi resta siilencieuse, perdue dans un flot de pensées contradictoires. Elle ne savait pas comment réagir face à un tel secret. Elle s'était attendue à ressentir une haine plus virulente encore à l'égard de Mademoiselle Soprano en apprenant la vérité mais, pour une curieuse raison, tout ce que cette femme lui inspirait désormais, c'était de la pitié. Savoir que sa mère avait accepté cette union entre son mari et son infirmière et était allée d'elle-même jusqu'à leur demander de lui ôter la vie pour les libérer et leur permettre de vivre pleinement leur amour l'avait profondément touchée.
Un petit rictus étira les lèvres pulpeuses de la jeune fille. Cela ressemblait tellement à Mélissa Delmas… Partir avec panache tout en pensant toujours au meilleur pour les autres, sans se soucier de son propre bien-être... Un trait de caractère que Sissi lui avait souvent reproché –et envié- dans sa jeunesse, se poussant à agir à l'opposé. L'image de cette femme si douce, aux longs cheveux de jais, s'afficha dans l'esprit de l'adolescente et la simple pensée de son sourire suffit à faire cesser ses larmes. Elle ne pensa même pas à démentir les dires de son père et de son amante. Mentir dans une telle situation ne leur aurait rien apporté, bien au contraire.
- D'accord, souffla la jeune fille en se laissant tomber au sol, incapable de tenir sur ses jambes plus longtemps, je comprends mieux pourquoi vous aviez si mal réagi lorsque je vous ai interpelée sur votre vision de l'éthique lors de votre premier cours, Mademoiselle Soprano…
Elle avait dit tout cela d'un ton ironique mêlé d'amertume, comme si tout cela n'avait plus aucune importance désormais. L'enseignante hocha la tête tristement. Ses remords et son désespoir paraissaient si sincères que Sissi renonça définitivement à s'énerver. La dimension qu'avait prise ce qui n'avait commencé que comme une innocente paranoïa envers la maîtresse de son père la dépassait complètement désormais, et il n'y avait plus de place pour une jalousie mal placée dans ses pensées.
- Et maintenant, qu'est-ce que vous comptez faire… ? se risqua-t-elle enfin à lâcher en fixant les motifs complexes décorant le sol, incapable de relever la tête vers les deux adultes, Mademoiselle Soprano risque la prison pour ce qu'elle a fait… Toi aussi papa.
- Sissi, tu… lança précipitamment son père avant de se faire interrompre d'un geste de l'adolescente.
Celle-ci avait glissé sa main jusqu'à son téléphone gisant au sol et l'avait rallumé.
- Ne vous inquiétez pas, je n'en ai parlé à personne -pour répondre à ta question de tout à l'heure papa, fit-elle avant de marquer une pause, songeuse, et je n'en parlerai pas. Jamais.
Et, sans rien ajouter de plus, elle pressa une touche de son écran tactile, supprimant définitivement la photo de la lettre compromettante. Elle venait de détruire la seule preuve à charge contre son père et son amante, capable de les accuser de l'homicide de sa mère. Malgré toute la peine que ce choix lui imposait, elle acceptait leur décision, à tous les trois.
Un profond soupir s'échappa de ses lèvres alors qu'une étrange sensation de vide enflait dans sa poitrine. Elle aurait préféré ne jamais aller jusqu'à fouiller le casier de sa professeure, si seulement elle avait su ce à quoi tout cela la conduirait… En agissant ainsi, elle avait conscience de devenir complice d'un meurtre, ni plus ni moins, au regard de la loi. Mais malgré cela, elle voulait suivre les dernières volontés de sa mère. Quel qu'en soit le prix.
- Vous devriez vous débarrasser vous aussi de cette lettre Mademoiselle Soprano, reprit-elle en se relevant, posant sa main sur la poignée de la porte, ce serait plus sage pour tout le monde. Je dois me rendre en cours à présent… Merci pour votre sincérité.
Jean-Pierre Delmas frissonna. L'espace d'un instant, en croisant le regard de sa fille, il avait cru reconnaitre celui de sa défunte femme. Une sensation de malaise naissant au creux de son estomac, il regarda la jeune femme qu'était devenue Sissi tourner les talons et sortir de son bureau avec superbe, sans rien ajouter de plus. Il eut soudain la très nette sensation que, suite à cette discussion, sa petite fille qu'il avait chéri pendant tant d'années ne serait plus jamais la même. Par leur égoïste décision, son ex-femme, son amante et lui-même venaient de la détruire à jamais.
Hyacinthe enfouit soudain son visage contre son torse en sanglotant, complètement sous le choc. Il l'étreignit distraitement, réprimant ses sentiments qui menaçaient de le faire s'effondrer à son tour. Eux-mêmes ne seraient plus jamais pareils après ce qu'ils avaient fait, il le savait bien… C'était un choix douloureux qu'ils avaient décidés d'assumer. Son seul et unique regret était de ne pas avoir été capable de préserver sa fille de cette affreuse réalité plus longtemps.
William se laissa glisser le long de l'arbre contre lequel il était adossé, fermant les yeux, profitant du soleil qui dardait ses rayons sur le parc de Kadic. Lentement, les muscles de son visage se détendirent et il laissa ses pensées dériver. Mademoiselle Soprano, leur professeure de philosophie, ne s'était pas montrée dans leur classe et un surveillant avait fini par leur annoncer qu'elle était incapable d'assurer son cours aujourd'hui pour raison personnelle, les libérant enfin.
La plupart des Terminale L s'étaient aussitôt rendus au foyer des élèves dans le but de profiter pleinement de ces deux heures de libre inespérées, tandis que lui avait préféré s'isoler. Comme il l'avait précisé à Aelita Stones (ou Hopper ou Schaeffer, il ne savait plus comment l'appeler) il avait besoin de réfléchir suite à ce que cette Stéphanie lui avait avoué, bien contre son gré.
Il n'en connaissait pas les détails –il ne voulait pas les connaitre- mais le Supercalculateur avait été rallumé. Et d'autres innocents, tels que lui et Eva à l'époque, avaient été impliqués. Restait à savoir ce que lui, dans tout cela, devait faire.
Lors de leur confrontation avec la Green Phoenix, un an plus tôt, les Lyokô-Guerriers l'avaient volontairement tenu à l'écart, de crainte de le voir retomber du côté de XANA comme cela avait été le cas lors de sa première plongée dans le monde virtuel. Ainsi, il n'avait jamais eu l'occasion de se venger de l'entité maléfique qui lui avait fait perdre des mois de sa vie en le maintenant captif, et qui était toujours responsable de la plupart de ses cauchemars. Il était clair que, malgré le temps qui s'était écoulé, il n'était pas et ne serait jamais accepté parmi le petit groupe, à commencer par Yumi –la pensée de la jeune japonaise avec qui il venait de rompre lui arracha une grimace- et maintenant que son ennemi juré n'était plus, il ne voyait pas l'intérêt de risquer sa vie une fois de plus. N'avait-il pas assez à gérer tout seul, tourmenté par toute cette horrible histoire comme il l'était depuis des mois ?
Il n'avait pu s'empêcher cependant d'aborder la question avec Xavier de Rhimé, le psychologue scolaire (tout en restant le plus évasif possible bien entendu), et la réponse de celui-ci avait été on ne pouvait plus claire. Si William voulait un jour parvenir à surmonter ses angoisses et ses cauchemars, il lui fallait aller au devant de la cause. Ce qui impliquait pour lui rejoindre de nouveau le camp des Lyokô-guerriers dans leur lutte, dont il ne savait au final que peu de chose.
Un soupir de dépit s'échappa de ses lèvres entrouvertes. Il avait beau passer ses nuits, profitant de ses insomnies chroniques, à réfléchir à la question, il ne parvenait toujours pas à se résoudre à s'approcher de nouveau du Supercalculateur. Cela impliquait trop de choses pour lui, y comprit se retrouver confronter à Yumi de nouveau !
La jeune japonaise l'avait ignoré avec superbe après leur rupture, s'asseyant le plus loin possible de lui en cours et l'évitant autant qu'elle le pouvait. Elle était redevenue le masque d'ivoire qu'elle était lors de leur première rencontre et rien ne semblait pouvoir la dérider. Si elle avait définitivement perdu sa confiance en se refusant à lui avouer la vérité quant au rallumage du Supercalculateur, lui avait rompu les liens qu'il avait si difficilement tissés avec elle depuis la Troisième. Sa relation si belle, si magique avec elle ne lui semblait plus qu'un lointain souvenir désormais. Tout comme ses sentiments. Il avait trop donné de sa personne dans cette histoire et n'avait pas assez reçu en retour pour préserver leur flamme fragile et vacillante. Tout était terminé désormais, et il n'en éprouvait ni tristesse, ni soulagement. Rien qu'une profonde indifférence bien pire encore que la colère qui l'avait poussé à rompre avec l'élue de son cœur depuis tant d'années.
Un bruissement d'herbe non loin de lui lui fit relever la tête. Un jeune homme s'avançait vers lui avec un petit sourire en coin, ses yeux d'un gris très clair brillant sous son étrange béret violet. Pendu à son bras, se trouvait Eva, qui le contemplait avec un air grave, son habituelle barrette en forme de note de musique dégageant son front.
- Eva voulait te parler, fit le jeune homme que William finit par reconnaitre. Il ne fréquentait plus Odd depuis tellement de temps qu'il ne l'avait pas tout de suite identifié, perdu dans ses pensées, je te file juste ça en attendant si tu veux te détendre !
Le jeune homme tout de violet vêtu lui jeta une cigarette qu'il attrapa de justesse avant de s'en allumer une lui-même et de s'éloigner après avoir salué sa petite amie d'un léger baiser. La jeune fille aux yeux translucides s'avança vers William qui ne broncha pas, se contentant de dégainer son briquet pour allumer le mince tube de papier, inspirant une grande bouffée de tabac, se laissant griser par la sensation formidable que produisait la nicotine sur son cerveau. Au moins parviendrait-il à chasser ses problèmes de son esprit pour un temps avec cela…
- Comment tu te sens ? lui demanda l'américaine de son léger accent en s'agenouillant près de lui, je suppose que ce que Stéphanie t'as avoué a du te… Perturber.
- C'est le moins qu'on puisse dire, grogna le jeune homme en recrachant la fumée de sa cigarette avec délice, qu'est-ce que tu fais là, tu ne devrais pas avoir cours ?
- Non, les Premières ES ont étude à cette heure, répliqua la jeune fille sans sourciller, mais revenons à nos affaires… Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant ?
William eut un mauvais rictus.
- Je n'ai pas trop envie d'en parler Eva, écoute…
- Pourtant il le faut bien, rétorqua l'interpelée, ses yeux étincelant derrière ses mèches blondes, il faut que tu parles avec quelqu'un sinon ça va te dévorer de l'intérieur, comme le souvenir de XANA l'a déjà fait auparavant…
William ne répondit rien, prenant le temps de tirer une nouvelle fois sur la cigarette d'Odd.
- Pourquoi est-ce que tu ne m'as rien dit ? questionna-t-il gravement au bout d'un moment, avec tout ce dont on discutait ces dernières semaines sur nos cauchemars et tout ça, pourquoi tu ne m'as pas dit que vous aviez repris du service ?
Eva le regarda porter de nouveau le filtre à ses lèvres, cherchant sa réponse avec soin.
- C'était à Yumi de faire ça, je ne pouvais pas faire autrement que de respecter sa décision de te tenir à l'écart… Odd m'a de suite mise dans le secret et cela m'a tellement bouleversée que je n'ai pas pu dormir pendant des nuits entières. Je pensais sans cesse à XANA et à ce que la Green Phoenix préparait, cela frisait l'obsession et sans Odd, j'aurais peut-être fini par devenir folle… Je voulais qu'au moins un de nous deux ait la conscience tranquille, tu comprends ?
Une fois de plus, William resta silencieux. Eva se laissa aller un moment à perdre son regard dans les volutes de fumées s'envolant de l'extrémité roussie de sa cigarette. Enfin elle reprit la parole, son regard d'un bleu translucide fixé vers le ciel dégagé.
- Ils ne comprennent pas, tu sais… Aucun d'eux ne peut comprendre ce que ça faisait d'être sous son contrôle, frissonna-t-elle en penchant sa tête contre son épaule, le faisant légèrement tressaillir, pas plus qu'ils ne peuvent comprendre l'importance qu'a toute cette histoire à nos yeux. Ils se battent pour un monde meilleur, mais nous, nous nous battons seulement pour nous William. Pour réparer l'affront qui nous a été fait et nous venger comme il se doit. N'est-ce pas… ?
Le jeune homme ne dit rien mais son approbation se lisait dans ses yeux. Personne n'arrivait mieux à le cerner qu'Eva, peu importait la situation. Yumi n'avait jamais été capable de comprendre ce désir de revanche qui le hantait, et la jeune américaine n'avait pas mis plus de cinq minutes pour cela. Le triste sort qu'ils avaient tous deux partagé les rapprochait d'une bien sinistre façon…
Avec une moue dédaigneuse, William jeta sa cigarette éteinte d'une pichenette au loin sur le sentier . Elle avait raison, jamais il ne pourrait trouver la paix s'il ne parvenait pas à mettre une fin lui-même à toute cette histoire. Le souvenir de XANA continuerait à le hanter tant qu'il saurait que le Supercalculateur était allumé, et d'autant plus s'il ne faisait rien pour arrêter cela.
- Très bien… finit-il par admettre, arrachant un petit sourire triste à sa confidente, parle-moi des raisons qui vous ont poussé à rallumer cette horreur…
Aelita sortit de cours alors que la cloche annonçant la pause de midi résonnait, son sac sur l'épaule et sa main dans celle de Thomas. Elle suivit un instant de ses yeux d'un vert profond Mathieu se diriger vers les escaliers alors que son petit ami l'entrainait dans un couloir, à part.
Elle se laissa embrasser sans broncher, profitant de l'étreinte tiède du jeune homme, glissant ses doigts dans son dos. La pause de midi était leur moment câlin favori depuis qu'ils sortaient ensemble. Il y avait peu d'élèves et d'enseignants dans les couloirs à cette heure, la plupart se trouvant au réfectoire, ce qui leur offrait une tranquillité toute relative. Jérémie, à l'époque, n'avait jamais manifesté le moindre désir de se retrouver seul à seul avec elle entre les cours et le côté entreprenant de Thomas la changeait donc agréablement.
- Quelque chose ne va pas ? questionna finalement le jeune homme en se détachant d'elle, un froncement de sourcil inquiet barrant son beau visage.
- Qu'est-ce qui te fait dire ça ? s'étonna l'adolescente en rougissant légèrement, percée à jour –elle ne cessait de penser à l'affaire de William et à la Brèche de Lyokô depuis quelques temps.
- Ta façon d'embrasser, sourit son petit-ami en lui caressant la joue, on dirait que tu es distraite… Dis-moi tout, tu penses encore à ce qui est arrivé à Madame Hertz ?
- Oui, en partie, répondit Aelita en toute honnêteté, j'ai quelques ennuis avec mes amis aussi… Pour tout te dire j'aurais bien besoin de me détendre un peu en ce moment !
Un sourire taquin étira les lèvres du jeune homme. Il était là pour cela après tout : l'aider à se détendre ! Plongeant soudain sur son cou, il se mit à la chatouiller de baisers lui arrachant de petits rires, manquant de la faire tomber par terre au passage.
- Arrête, idiot ! pouffa-t-elle en faisant semblant de le repousser, j'essaye d'être sérieuse !
Thomas cessa ses assauts et releva ses yeux noirs vers elle, une petite moue déçue au coin des lèvres.
- Tu sais quoi ? déclara-t-il en se campant face à elle, tu devrais te trouver un véritable passe-temps, un truc pour te vider l'esprit ! Moi j'ai mes heures de sport mais toi, à part participer au concours de robotique de Madame Collins, qu'est-ce que tu aimes vraiment faire ?
Surprise, la jeune fille ouvrit la bouche sans trouver quoi répondre. Sa passion ? Elle n'avait jamais véritablement cherché à s'en trouver une… Lyokô l'avait obnubilée pendant une bonne partie de sa scolarité et Jérémie était du genre à se montrer envahissant lorsqu'ils étaient ensembles… Elle n'avait jamais véritablement eu l'occasion de s'exprimer en dehors du domaine informatique.
Puis, soudain, ses yeux s'illuminèrent. En réalité, il y avait bien une chose qui lui plaisait. Une chose à laquelle elle n'avait plus eu l'occasion de toucher depuis un bon moment désormais, notamment à cause de sa recherche de sa mère et de la Green Phoenix l'année passée.
- La musique, souffla-t-elle avec un petit sourire, j'aimais bien mixer au collège…
- Ah oui, je me souviens ! s'exclama Thomas, ravi, tu avais même été sélectionnée pour jouer lors de la première partie du concert des Subdigitals en ville en Troisième, non ? Je me souviens que je t'avais trouvé éblouissante à ce moment là… Tu jouais vraiment bien !
Aelita rosit légèrement alors qu'une vague de souvenirs remontaient dans sa mémoire. La sensation extraordinaire qu'elle avait éprouvée lorsque ses doigts avaient, pour la première fois, effleuré la table de mixage que William lui avait présentée lors de son année de Quatrième, à l'époque où elle n'avait toujours aucun souvenir de sa vie humaine passée. Les cris de joies de ses camarades lorsqu'elle avait pour la première fois animé le bal du collège, ses heures passées avec Odd à écouter remix sur remix et à se perfectionner, sans que Jérémie n'en sache rien, l'audition que les Subdigitals –son groupe préféré de l'époque, comme bon nombre de kadiciens- avaient organisée au collège et à laquelle elle avait bien failli ne pas participer…
Un sourire lui échappa tandis qu'elle se souvenait que sa première véritable montée sur scène, dont Thomas parlait, avait bien failli ne jamais avoir lieu en raison d'une attaque intempestive de XANA. Un petit Retour vers le Passé (encore pleinement opérationnel à l'époque) lui avait cependant permis d'avoir droit à son heure de gloire, aux côtés du groupe le plus adulé de tout Kadic !
Le visage d'Aelita s'assombrit tout à coup. Maintenant qu'elle y repensait, Jérémie n'avait jamais été réellement emballé par sa passion. Préférant vaquer à ses programmes plutôt que d'assister à ses concerts et qualifiant son penchant pour la musique d' « inutile » à tout bout de champ… Peut-être avait-elle fini par taire ce qui l'intéressait réellement par amour pour lui ? Il était tellement important pour elle à l'époque qu'elle était prête à tout pour le garder auprès de lui, quitte à mettre une croix sur sa passion.
- Tu as raison ! finit-elle par affirmer après un baiser de remerciement envers son petit-ami, je ferais mieux de me remettre à la musique ! Maintenant que tu le dis, c'est vrai que ça me manque de ne pas avoir une table de mixage sous les doigts !
Thomas laissa échapper un petit rire avant de l'embrasser de nouveau tendrement. Aelita se sentit pousser des ailes alors que sa langue taquinait celle de son petit ami. Avec lui, elle avait l'impression de revivre, de pouvoir enfin être celle qu'elle avait tant réprimée, par amour pour Jérémie. Elle pouvait enfin être elle-même.
Vala vala, en espérant que ça vous ait plu ! A bientôt pour le Chapitre 24~ (j'espère !).
Ça me fait un peu rire que ça coince pour certains le fait que Tyron soit le beau-père d'Aelita désormais XD ! J'veux dire, dans les grandes lignes c'est le même principe que ce qui s'est passé dans la série de romans (que tout le monde semble préférer pourtant) et dans plusieurs fanfictions encensées par la critique ! Mais bizarrement quand c'est du CLE ça dérange XD...
M'enfin bon, je ralote mais j'suis quand même content de voir tous ces commentaires positifs pour une fois X3 ! Moi j'ai bien aimé ce retournement de situation en tout cas *o*, on dira que je n'en attendais pas moins des scénaristes !
Certes ce final manque de monstres mais il n'en est pas moins explosif pour autant : voir nos héros fuirent un Cortex en train de s'effondrer sur lui-même c'était quand même assez intense et le jeu d'acteur -parfait à mon goût- de Mélanie Tran dans cet épisode ne faisait qu'ajouter à la crédibilité de la chose ! J'vous jure que j'ai presque eu peur quand je ne les ai pas vu réapparaitre dans les scanners lors de mon premier visionnage XDD ! Bref, ça prouve qu'on a pas forcément besoin que ça pète de partout pour avoir un bon épisode ('fin j'trouve !) !
En somme, j'ai trouvé que c'était un bon épisode de clôture ! Pas aussi explosif qu'on aurait pu l'attendre mais avec son lot de révélations et d'action, et une fin intéressante pour le moins qui laisse largement de la place pour une saison 2... Reste plus qu'à croiser les doigts, chers Lyokô-fans qui partagez ma passion pour cette nouvelle série X3 ! (Les autres, vous pouvez espérer aussi en priant pour une amélioration par ailleurs hein o/)
Bon, je ne sais pas si c'est une bonne idée de me lancer dans le débat mais je commence à être singulièrement agacé, tout point de vue personnel sur Code Lyokô Evolution mis à part, par l'attitude pseudo-élitiste, voire arrogantes de certains membres =(.
Que vous n'appréciez pas cet épisode et exposiez vos arguments est une chose, que vous spoliez totalement le plaisir de ceux qui aiment regarder CLE en les laminant du début à la fin à la moindre minuscule remarque positive en est une autre. C'est même un tantinet frustrant pour ainsi dire, et ça fait un moment que ça dure donc je pense qu'il est temps que j'pousse une petite gueulante o/.
Si vous n'aimez pas Code Lyokô Evolution, dites-le et exposez vos arguments, mais ne venez pas ruiner le plaisir de chacun en vous prenant pour les détenteurs suprêmes de la vérité en raison de votre "maturité" et en les rabaissant simplement pour leur point de vue. Chacun ses goûts, on n'y peut rien !
Car oui, chers amis, vouloir imposer son point de vue à tout prix quitte à gâcher le plaisir d'un fandom tout entier ce n'est pas de la maturité, loin de là. On est ici sur un forum de fans, fait pour échanger et partager sur une série qui devrait nous réunir, pas pour se flinguer dés que nos avis divergent.
Pour résumé, trouver des faiblesses scénaristiques à un épisode : oui, insulter copieusement tout membre ayant apprécié cet épisode malgré ses défauts, même en y mettant les formes : non (et non, ajouter un petit "nous sommes ouverts au débat" à la fin pour faire bonne mesure ne suffit pas~).
Bref, je terminerais mon coup de gueule en résumant la situation de mon point de vue : les anti-CLE, vous allez trop loin dans vos attaques, apprenez à vous discipliner un peu. 'y a des choses qui ne se disent pas quoi >_<. Je ne me permettrais jamais de vous dire que vous avez de la semoule en guise de cerveau simplement parce que vous n'aimez pas un épisode par exemple, donc un peu de respect mutuel serait le bienvenu !
Je suis capable de comprendre ce que vous n'appréciez pas chez CLE et je respecte votre opinion, alors tâchez -si possible- de faire un effort de votre côté, ne serait-ce que pour préserver la bonne ambiance d'antan du forum qui a tendance à manquer ces derniers temps je trouve...
(Je parle pas juste pour toi hein, Icer... T'es juste celui sur qui c'est tombé et t'es pas le pire, mais parfois ras-le-bol quoi !)
Il n'y a pas de soucis mon chou, j'ai bien précisé qu'il s'agit de troll comme je le fais si bien, mais j'avoue que celui-ci était volontairement aggravé pour provoquer des réactions adverses (Qui se faisaient attendre, tu en conviendra). D'ailleurs, beau pavé, c'est ce que j'attendais, alors sans rancune <3 EDIT : okay~ pour une fois que j'me lâche XD...
Pour revenir à l'épisode, j'ai aussi trouvé que la voix de William-XANA sonnait bizarrement mais à la réflexion j'ai l'impression que c'est le même effet qui a été utilisé. Simplement, la voix de l'acteur est beaucoup plus profonde que celle de son équivalent Hongrois ou que celle du DA, ce qui créé un contraste assez fort. Tant pis ! C'est un détail minime...
Après je trouve le concept de l'épisode assez intéressant mais tout passe assez vite... Je suppose que le principal soucis de CLE tient au fait que les épisodes soient si cours. Autant ça passe en DA, autant avec des acteurs toute cette intrigue aurait facilement pu s'étendre sur un peu plus longtemps et peut-être apporter un peu plus de cohérence à l'ensemble.
Il n'empêche que j'ai bien aimé l'épisode *o* en temps que fan de Laura sans haïr les Lyokô-guerriers pour autant, je trouve que son attitude était justifiée, tout comme la réaction de ses camarades. Elle est allée très loin dans un désir de faire bien, mais également par arrogance quelque part. Laura est un personnage indépendant qui aime prendre les décisions d'elle-même, et c'est là tout le soucis.
William s'est laissé manipulé sur le moment, je peux le comprendre aussi. Ayant le même genre de tempérament impulsif, j'aurais été capable de faire le même type de c*nneries que lui à force d'être mis à l'écart (surtout si cela avait été par la fille qui j'aime quelques secondes auparavant, ça, Laura l'a parfaitement compris !).
Quant à savoir si les Lyokô-guerriers sont responsables de ce désastre ou pas... Tout dépend de quel point de vue on se pose ! Laura n'est pas entièrement à blâmer mais il est vrai que son attitude fouineuse et sa tendance à forcer la main aux autres ne joue pas en sa faveur. Je peux comprendre pourquoi les LG ne lui ont pas tout dit, ce qui a effectivement mené à sa décision hâtive d'attaquer le Cortex seule en mettant Willy en danger, sans mesurer pleinement les risques. La virer, ne pas la virer ? Tout est une question de contexte, mais ce n'était pas la première erreur de Laura et je pense surtout que les LG ont eu très peur pour le coup ! Après je dois admettre qu'elle va me manquer dans le groupe =( elle ajoutait un peu de piment !
Je mentionne également -même si je dois être le seul- que je trouve le nouveau mode d'attaque de la Méduse trop cool *o* ! Okay, c'est plus vulnérable mais c'est quand même relativement glauque de la voir enfoncer ses tentacules dans le dos de ce cher Willy. Et puis au moins l'attaque est plus directe que le coup du "j'enroule leeeeeentement mes tentacules autours de toi histoire que tu ais bieeeeen le temps de t'enfuir même si tu ne le feras pas parce que tu es un neuneu" (sans vouloir critiquer le DA <3 que j'aime toujours autant)~
Bref bref, peace les gens ! Apprenez à passer un peu de bon temps ensembles au lieu de vous foutre sur la gueule <3
Bon beh j'annonce ma demande d'inscription dans le salon de Yumi suite à l'insistante demande répétée d'une certaine personne à la poigne de fer bien connue de tous o/ ! Parce que bah... Yumi elle est japonaise donc vive le Japon, même si j'aime tous les persos~
Hey à tous ! Bon vu que j'vais m'faire lyncher par Icer si je poste pas de nouveau chapitre ici dans le week-end, comme je lui ai promis, je prends cinq minutes pour le faire avant d'aller me coucher après un harassant week-end à préparer mes partiels T___T
J'ai bien lu tous vos commentaires et ils me vont droit au cœur, ça me fait énormément plaisir de voir que vous êtes là pour lire mes stupidités toutes brouillonnes et leur trouver de la valeur X3 ! Je n'ai pas le temps de vous répondre un à un dans le détail ce soir mais je le ferais très prochainement, promis juré ! Encore merci pour votre soutient sans faille, alors que je passe la moitié de mon temps à vous faire faux bond =(...
Sans plus de cérémonie, j'enchaine avec la version remastérisée du chapitre 22 ! Enjoy o/
Spoiler
Chapitre 22 : Épisode 121 : Le Deuil d'une Enseignante_
Aelita se décolla des lèvres de son petit-ami avec un soupir de plaisir, un peu essoufflée. Le jeune homme lui sourit, plongeant ses pupilles dans le vert de jade de celles de l'adolescente. Ses mains caressaient doucement les mèches roses de la jeune fille dans son dos, raffermissant le contact de leur deux corps, collés l'un contre l'autre.
- On est au lycée, Thomas, rappela-t-elle avec un petit rire lorsqu'il fit mine de se pencher vers le creux de son cou, taquinant sa peau de ses lèvres, il vaudrait peut-être mieux en rester là tu ne crois pas… ?
Le jeune homme prit encore quelques minutes pour l'embrasser passionnément avant de se séparer d'elle avec une petite moue de regret, recoiffant ses cheveux bruns ébouriffés par leurs émois d'un geste déçu.
- D'accord, soupira-t-il sans détacher ses mains de celles de sa petite amie pour autant, profitant de chaque seconde, on se voit après les cours… Je t'aime mon ange !
- Je t'aime aussi, Thomas, rayonna l'adolescente en déposant un dernier baiser furtif sur ses lèvres fines avant d'enfin s'éloigner de lui à contrecœur.
Légère, elle s'extirpa de leur cachette située derrière le petit abri de pierres vétustes entourant l'unique distributeur de boissons du lycée, réputé pour son fonctionnement des plus aléatoires. Ancien point de repère de son petit groupe d'amis au collège, il avait été délaissé au fil du temps et demeurait un coin de rendez-vous parfait pour les amoureux transis en quête d'intimité, à leur image.
Le goût des lèvres de son petit ami persistant sur les siennes, Aelita se dirigea en flânant vers les bâtiments du réfectoire. Odd et Eva avaient déjà fini leur petit déjeuner et se tenaient non loin de la porte, le regard rivé sur le dernier numéro des échos de Kadic.
Plongée dans son état de semi-euphorie, l'adolescente aux cheveux roses mit quelques temps avant de remarquer le visage atterré des deux adolescents, visiblement sous l'effet d'un choc profond. Une sensation d'inquiétude vint brusquement se lover au creux de son estomac, chassant toutes traces de ses baisers futiles : quelque chose n'allait pas.
Son sourire se fanant peu à peu, Aelita constata bien vite que le petit couple n'étaient pas les seuls à arborer cette mine défaite. En effet, nombre de lycéens semblaient littéralement absorbés par le journal de l'école, le regard vide et effaré. A bien y faire attention, la cour elle-même paraissait particulièrement silencieuse pour l'heure matinale et seuls quelques murmures angoissés, accompagnés par le vent fort qui soufflait sur Kadic, parvenaient à troubler la pesante quiétude ambiante.
- Hey, fit Aelita en rejoignant Odd et Eva qui lui adressèrent à peine un regard, qu'est-ce qui se passe ? D'habitude les articles des Échos de Kadic ne suscitent pas un tel intérêt ! Je sais que Milly et Tamiya ne sont pas très douées pour le journalisme mais de là à tirer une mine de six pieds de long devant leurs articles…
Elle avait lancé cela sur le ton de la plaisanterie mais la mine grave de ses deux amis lui fit bien vite comprendre qu'une simple blague ne suffirait pas à détendre l'atmosphère. Même Odd, habituellement le premier à rire aux éclats face au moindre calembour, ne s'était pas déridé d'un pouce.
- Aelita, il faut que tu lises ça… souffla-t-il d'une voix sourde qui ne lui était pas coutumière, c'est…
Sans parvenir à rien ajouter de plus, il tendit le journal aux couleurs bigarrées à son amie qui commençait réellement à prendre peur. Eva en profita pour se blottir contre son torse, comme en quête de réconfort.
L'adolescente projeta son regard vert émeraude en direction de l'article que lui désignait le jeune homme au béret. C'était un minuscule carré de texte à l'apparence étonnamment formel pour une production des pétillantes Milly et Tamiya. Il semblait avoir été ajouté à la dernière seconde, entre deux articles sur les Ceb-digitals et la nourriture servie à l'internat.
A mesure qu'elle lisait, son expression curieuse se métamorphosa en un air plus profondément choqué encore que celui de ses camarades. Ébranlée, elle ne fut même pas capable d'achever sa lecture tant ses mains s'étaient mises à trembler sous l'effet de la surprise.
Elle tendit de nouveau précipitamment le journal à Odd au moment où un Mathieu débraillé et apparemment mal réveillé se dirigeait vers eux.
- Salut, bailla le nouvel arrivant en s'étirant de tout son long, vous allez b… ?
Le reste de sa phrase s'étouffa dans sa bouche alors qu'il croisait le regard d'Aelita, incrédule. Celui-ci était désormais embué de larmes difficilement contenues et la douleur qu'on pouvait y lire était des plus saisissantes, presque physique.
- Qu'est-ce que… ? trouva-t-il à peine à bredouiller alors que la jeune fille tentait de dissimuler son trouble tant bien que mal, cachant vainement ses yeux derrière ses mèches de cheveux roses.
- C'est Madame Hertz… souffla Aelita d'une voix éraillée étrangement tremblante, oh je suis bête, tu ne l'as pas connue toi… Elle a été remplacée par Madame Collins depuis cette année, notre prof de SVT tu sais, je t'en ai parlé hier. Elle…
- Elle a été retrouvée morte hier soir, poursuivit Odd à sa place, couvrant le début de sanglot de la jeune fille, apparemment, elle aurait été assassinée…
Mathieu écarquilla les yeux de stupeur. Sonnée par les paroles de son ami, Aelita se réfugia dans ses bras, enfouissant son visage contre son torse. Eva ne prit même pas la peine de protester, contrairement à son habitude. Elle se contenta de hocher la tête d'un air triste tout en tendant le numéro des Echos de Kadic à Mathieu, tombé au sol. Elle ne comprenait que trop bien la différence qu'il y avait entre lire une telle nouvelle et l'entendre prononcée dans des termes aussi crus.
- On l'a retrouvée gisante dans une marre de sang… frissonna Mathieu en parcourant l'article des yeux, suffisamment bas pour qu'Aelita ne puisse pas l'entendre, c'est atroce !
- Oui, et ce n'est pas tout, regarde un peu la rue où elle a été retrouvée, indiqua Eva en arquant ses fins sourcils, oubliant momentanément d'être antipathique, c'est tout près de chez Aelita et sa mère ! A mon avis elle allait leur rendre visite… Elle était lié au projet Carthage tu sais ?
- Je sais, Aelita m'a raconté ça… répondit Mathieu distraitement, essayant de lire entre les lignes, elle m'a aussi dit qu'elle avait surpris une conversation entre elle et sa mère il y a peu à propos de quelque chose que sa mère souhaiterait retrouver… Tu crois que… ?
- Oui ! fit Eva sans détour, d'un air grave, alors qu'Aelita se détachait enfin de son petit ami, je pense qu'elle avait du découvrir quelque chose à ce sujet… Et ça n'a pas du plaire à la Green Phoenix ! Tout est surement lié…
La jeune fille aux cheveux roses s'était rapprochée des deux adolescents de façon imperceptible, le visage grave et le regard encore un peu embué. La colère y avait remplacé le chagrin en un instant, comme une violente bourrasque aurait chassé un nuage de pluie d'un ciel chargé.
- Quand je pense que je l'ai vue pas plus tard que la semaine dernière, frissonna-t-elle avec horreur, ma mère va être terrassée par la nouvelle… Il faut que je lui téléphone !
Alors qu'Aelita s'éloignait, son BlackBerry à la main, l'air toujours aussi ébranlé, une jeune collégienne aux épais cheveux rouges s'avança vers leur petit groupe, précédée par une autre adolescente noire aux vêtements flashy et aux cheveux noués en deux très courtes couettes. Mathieu reconnut Milly, la jeune rédactrice en chef des Échos de Kadic qui l'avait interrogé lors de son arrivée à l'internat, ainsi que sa meilleure amie Tamiya. Toutes deux paraissaient relativement calmes pour une fois. Il fallait croire que la nouvelle qu'elles avaient colportée ne les laissait pas indifférentes elles non plus !
- Salut vous trois, fit Tamiya d'un air sombre, vous avez lu l'article ?
Il était inutile de préciser lequel. Les trois adolescents opinèrent du chef. Mathieu se sentait horriblement mal à l'aise dans cette atmosphère pesante et endeuillée. Après tout, il ne connaissait pas cette ancienne enseignante et les rares fois où ses camarades l'avaient mentionnée, cela avait été en des termes assez brutaux, la qualifiant de femme sévère et autoritaire. Il n'aurait jamais pensé que l'annonce de sa mort puisse avoir un tel effet sur l'ensemble du collège-lycée !
- On revient de chez le proviseur, lâcha Milly avec tristesse, on voulait lui demander si on pouvait organiser un petit truc pour honorer la mémoire de Madame Hertz cet aprem'. Elle a quand même fait partie du lycée pendant des années et on est tous passés au moins une fois dans sa classe, à l'exception de ceux qui sont arrivés cette année bien sûr ! Je pense que c'est important…
- C'est une très bonne idée, Milly, approuva Odd gravement, qu'a répondu le proviseur ?
- Lui-même avait l'air assez secoué par la nouvelle je crois, on n'a pas eu besoin d'insister beaucoup, répondit la jeune fille, ce sera cette aprem' à partir de quatorze heures au gymnase… Ceux qui veulent dire quelque chose pourront prononcer un discours devant tout le monde et les profs aussi vont parler, en plus de la traditionnelle minute de silence.
- Faites passer le message, d'accord ? acheva Tamiya alors qu'Aelita revenait vers eux, plus dépitée que jamais, ah ! Avant que j'oublie : le X reçoit tous les élèves qui désirent parler de cette affaire dans son bureau. Histoire de gérer le traumatisme, tout ça... Bon, à tout à l'heure !
Et sans rien ajouter, les deux journalistes en herbe s'éloignèrent, le dos rond, en direction d'un autre groupe d'élèves penchés sur le journal à qui faire passer la nouvelle.
- Ma mère était sous le choc, lâcha Aelita avec un soupir triste, il fallait s'y attendre… J'ai préféré ne pas m'étendre, mais après ce qui vient de se passer, je commence à me demander s'il ne serait pas plus sage de lui parler de la Green Phoenix… Je veux dire, c'est assez évident qu'ils sont impliqués dans cette affaire, non ?
- On n'en sait rien, répliqua Eva d'un ton calculateur, et puis elle risque plus de nous empêcher d'agir qu'autre chose… Après ce qui vient d'arriver à Madame Hertz, tu penses sincèrement que ta mère nous laissera continuer nos petites escapades sur Lyokô sans rien dire ? Il vaut mieux se taire pour le moment…
Aelita se massa le front d'un air fatigué. Annoncer à sa mère la mort de sa meilleure amie avait été plus qu'éprouvant pour elle, et elle avait du mal à conserver ses idées en place.
- Très bien… admit-elle sans chercher à discuter pour une fois, les cours ne vont pas tarder à commencer… On ferrait mieux de se rendre en classe, ça ne sert à rien de rester là à déprimer et à se torturer l'esprit !
Les adolescents approuvèrent. Même Mathieu, que l'enchainement des événements avait empêché d'aller petit-déjeuner, ne protesta pas et emboita le pas de la jeune fille aux cheveux roses vers le bâtiment des sciences, tandis qu'Odd et Eva s'éloignaient vers les salles principales, leurs mains étroitement nouées dans une attitude réconfortante.
L'adolescent aux yeux bleu ciel les regarda disparaitre derrières les arcades de l'établissement, morose. Il avait beau ne pas partager pleinement leur peine, il devait bien admettre que la nouvelle de la mort d'un des principaux protagonistes de toute cette histoire liée à la Green Phoenix l'avait ébranlé. La seule différence tenait au fait que lui n'avait personne à qui tenir la main lorsqu'il se sentait seul et perdu comme en cet instant…
Il n'osait pas l'admettre, mais toute cette histoire commençait à lui faire peur. Peut-être avait-il vu trop grand, aveuglé par cet amour inconcevable qu'il éprouvait pour Angel, en cherchant à s'attaquer à une organisation si dangereuse qu'elle n'hésitait pas à supprimer ceux qui se dressaient sur leur chemin et à enlever des innocents ? Pourrait-il prétendre avoir la force de continuer encore longtemps, ou la peur s'apprêtait-elle à surpasser ses sentiments amoureux dopant son courage ?
Une seule chose était certaine : la découverte du corps sanguinolent de cette enseignante en plein cœur de la Ville de la Tour de Fer venait de le propulser de plein pied dans une réalité autrement plus effrayante que celle dans laquelle il avait cru évoluer jusqu'à présent.
Elisabeth Delmas rejeta une mèche de ses cheveux de jais en arrière. Son regard d'ébène, étrangement lointain, était rivé en direction de l'écran de son téléphone portable. La seconde sonnerie annonçant le début des cours finit de retentir à travers la cage d'escalier dans laquelle elle s'était réfugiée. Elle aurait du être en cours d'anglais à cette heure mais ses jambes refusaient de bouger, comme si toute volonté d'aller de l'avant s'était envolée de sa personne, la laissant seule et démunie, comme paralysée.
Tout se bousculait dans sa tête depuis qu'elle avait forcé le casier de Hyacinthe Soprano, alias leur nouvelle professeure de philosophie, alias la nouvelle maîtresse de son père, et qu'elle avait découvert cette mystérieuse lettre de sa mère au milieu de ses affaires.
Elle avait passé plusieurs jours à regarder son portable fixement de la sorte, sans oser afficher la photo du carré de papier qu'elle avait prise sur le vif à ce moment précis, tétanisée à l'idée de ce qu'elle pourrait y découvrir. Cela s'était traduit par une irascibilité plus marquée que jamais en cours de philosophie pour la réputée pimbêche de service, qui commençait à singulièrement surprendre ses camarades.
Ulrich avait été de loin le plus inquiet de tous. L'attitude de sa petite amie commençait à friser l'obsession et, voyant qu'il était incapable d'être d'un quelconque secours, il avait fini par se résigner à lui conseiller d'aller voir le psychologue scolaire en dernier recours, après une ultime crise de nerf de la part de la jeune fille.
Cette proposition avait agit comme un électrochoc sur Sissi qui, ne tenant pas à s'abaisser à aller parler au « X », comme les élèves surnommaient de façon moqueuse Xavier De Rhimé, le psychologue en question, avait fini par se lancer. Le soir même ayant suivi son altercation avec Ulrich, elle s'était précipitée sur son téléphone et, en retenant sa respiration, avait affiché la photo de la lettre.
Depuis, elle paraissait plus effacée que jamais, séchant cours sur cours et allant même jusqu'à se cacher pour éviter son petit ami. Nul ne doutait que, quel qu'ait pu être le contenu de la lettre en question, il avait suffit à bouleverser profondément Sissi.
Lasse, celle-ci parcourut des yeux pour la millième fois l'écriture douce et penchée de sa mère, le cerveau embrumé dans un épais brouillard qui ne l'avait pas quitté depuis qu'elle l'avait déchiffrée pour la première fois.
Elle ne parvenait pas à comprendre, ou plutôt, son esprit refusait de comprendre ce qu'elle lisait ! Admettre l'authenticité de dires de cette lettre aurait suffit à faire s'effondrer tout son fragile univers…
Dans l'instant présent, elle était bien incapable de dire où elle en était et encore moins ce qu'elle devait faire. Ce qu'elle venait de découvrir sur la nouvelle amante de son père dépassait de loin tout ce qu'elle avait pu imaginer jusqu'à présent. Sissi se sentait perdue désormais. Perdue et désespérément seule ! Et le pire de tout cela était de n'avoir personne à qui parler de ses tourments…
La jeune fille enfouit sa tête entre ses bras, laissant pendre son portable par son strap retenu d'un cheveu au bout de ses longs doigts fins. En cet instant précis elle n'avait qu'une seule envie : disparaitre. Disparaitre afin que les tracas de sa vie s'évanouissent avec elle, la libérant de ce fardeau écrasant qu'elle n'avait pas l'habitude de supporter. Elle se sentait si fragile sous le poids de sa découverte, prête à se briser à la moindre faiblesse de sa part !
- J'ai fini par te trouver…
La jeune fille tressaillit en entendant la voix grave aux intonations familières au dessus d'elle. Lentement, elle releva la tête pour croiser le regard chocolat d'Ulrich, appuyé contre la rambarde de l'escalier.
- Tu t'isoles pour évacuer le stress maintenant, ma jolie ? lança-t-il avec un petit sourire, où est passée la Sissi forte et pleine d'entrain que je connaissais ?
- Fiche-moi la paix… souffla-t-elle en ravalant les larmes qui avaient commencé à poindre au creux de ses yeux, qu'elle n'avait même pas pris la peine de maquiller ce matin.
Ulrich haussa les épaules avant de descendre les quelques marches le séparant de sa petite amie, s'accroupissant à son niveau. Celle-ci détourna la tête en soupirant, glissant au passage subrepticement son portable au fond de son grand sac blanc crème.
Le jeune homme s'en aperçut mais choisit de ne rien dire, se contentant de glisser délicatement ses doigts dans les cheveux courts et soyeux de sa bien aimée. Celle-ci frissonna sous le contact chaud de son petit ami et ferma les yeux, le laissant guider sa tête jusqu'à ses lèvres qu'elle embrassa tristement. Une minuscule portion du poids qui pesait sur sa poitrine depuis qu'elle avait lu cette lettre mystérieuse s'envola alors que leur salive respective se mêlait au sein de leur tendre baiser. Pendant une fraction de seconde, Sissi ne pensa plus à Madame Soprano, se concentrant exclusivement sur le contact tiède et doux des lèvres d'Ulrich contre les siennes.
Mais lorsqu'ils se séparèrent, toute la pression retomba d'un coup sur ses épaules et elle se sentit vaciller, sonnée.
Ulrich en profita pour l'attirer contre elle, la serrant dans une étreinte délicate et rassurante. Peu lui importait de sécher les cours lorsque sa petite-amie avait besoin de lui.
- C'est si affreux que ça… ? murmura-t-il d'un ton inquiet alors que Sissi se laissait aller entre ses bras musculeux, la lettre de ta mère à Soprano ? Je me doute bien que ce n'est pas l'annonce de la mort de Madame Hertz qui te met dans cet état…
En effet, la nouvelle était passée totalement au dessus de la tête de la jeune fille tant un simple meurtre semblait dérisoire face à ce qu'elle avait appris, et refusait désormais d'admettre.
Elle renifla bruyamment, ravalant ses larmes qui menaçaient à tout moment de ressurgir. L'heure n'était plus aux pleurs désormais.
- Je ne peux rien te dire Ulrich… souffla l'adolescente, c'est tellement… C'est trop dingue pour être vrai, je n'arrive toujours pas à y croire !
Le jeune homme ne trouva rien à répondre. Il était déconcerté par le comportement de sa petite amie depuis quelque temps. Il ne l'avait jamais vu dans un tel état de nerf. Même le jour où sa mère était morte, elle ne s'était pas montrée aussi désemparée… Qu'avait-elle bien pu découvrir dans la lettre de leur enseignante ?
- Si ça te travaille à ce point… finit-il par prononcer en choisissant soigneusement ses mots, histoire d'éviter qu'elle ne se braque de nouveau, peut-être devrais-tu arrêter de faire tes coups en douce et… Confronter directement Madame Soprano !
Le regard que lui lança Sissi en disait long sur ce qu'elle pensait de cette idée. Comment Ulrich pouvait-il envisager une telle chose ? Parler face à face avec la femme qui lui avait voler son père était littéralement inconcevable pour elle, d'autant plus après ce qu'elle avait découvert –ou cru découvrir du moins- sur son compte ! Et puis elle n'avait jamais été du genre à faire face à ses problèmes… Du temps du collège elle agissait déjà ainsi : toujours à contourner, tourner ses tracas dans tous les sens par mille et unes ruses afin d'échapper à la réalité et à la moindre contrainte, quitte à blesser les personnes de son entourage. C'était ainsi qu'elle s'était retrouvée éloignée pendant des années de la bande d'Ulrich, qu'elle souhaitait secrètement rejoindre au fond de son cœur, et qu'elle avait fini par rendre la vie impossible à celui qui deviendrait au final son petit ami par pure crainte de faire face à ses sentiments. Elle n'avait aucune raison de changer aujourd'hui.
- Réfléchis un peu, essaya de nouveau Ulrich alors que la jeune fille tentait de se dégager de son étreinte, piquée au vif, tu ne vas pas pouvoir éviter la confrontation avec cette femme toute ta vie. Maintenant que tu as effectivement découvert quelque chose sur elle qui te perturbe tellement que tu refuses de m'en parler, tu devrais au moins aller lui parler à elle ! Ou bien à ton père au moins ; c'est la seule solution pour que tu te libères de ce poids.
Sissi ne répondit pas, se contentant de lâcher un soupir las. Au fond d'elle-même, elle savait bien qui d'Ulrich ou de son entêtement avait raison. La situation ne pouvait plus durer. Il fallait qu'elle agisse avant de devenir folle. Cependant cela la terrifiait ; et si ce qu'elle avait découvert s'avérait exact au final ? Qu'allait-elle bien pouvoir faire ? En choisissant d'en parler à Madame Soprano ou à son père, elle risquait d'empirer la situation et de faire basculer son univers à jamais et cela, Ulrich n'avait aucun moyen de le savoir.
- Tu… Tu as raison, finit-elle cependant par capituler lorsque son beau brun plongea ses prunelles chocolat dans les siennes, j'en ai assez de fuir constamment, cela ne m'a jamais rien apporté… Il faut que je leur parle. A tous les deux !
Stéphanie se sentait particulièrement mal à l'aise. La sonnerie de quatorze heures annonçant l'hommage réservé à Suzanne Hertz, l'ancienne professeure de SVT retrouvée morte la veille, avait retenti il y avait peu et l'ensemble de la classe de Terminale L avait pris la direction du gymnase, avançant dans un silence religieux.
Yumi marchait devant, le regard rivé au sol, son visage d'ivoire aussi impassible qu'à l'accoutumée, quelques mèches de cheveux rebelles dépassant de son chignon fouettant l'air sous l'effet de la bourrasque qui faisait rage sur Kadic. Seuls ses amis et son petit-ami, William, auraient pu deviner, derrière la neutralité de son expression, à quel point la nouvelle de l'assassinat de son ancienne professeure l'avait ébranlée. Elle n'était pas la seule par ailleurs. Même les élèves les plus perturbateurs de la classe s'étaient révélés étonnamment calmes tout au long de la matinée.
Il fallait bien admettre que, derrière son intransigeance apparente, Madame Hertz avait eu l'étoffe d'une enseignante remarquable : toujours à l'écoute de ses élèves si besoin était, ainsi que constamment prête à les pousser jusque dans leurs derniers retranchements afin de les forcer à montrer leur plein potentiel. Les plaisanteries qu'elle avait échangées avec les plus anciens de Kadic résonnaient dans leur mémoire tel un requiem ce jour-là. Tous semblaient entendre encore sa voix éraillée mais étonnamment passionnée leur compter un cours de cette manière, si vivante, dont elle seule avait le secret… Elle avait été un pilier de l'établissement Kadic et, avec elle, c'était une partie de l'âme du lycée qui semblait s'être envolée.
Seule Stéphanie restait étrangère à ce deuil silencieux, marchant en retrait des autres élèves. Elle était certes touchée par l'attention que tous portaient à leur ancienne enseignante, mais elle-même n'avait jamais eu affaire à elle et ne savait d'elle que ce que Yumi avait bien voulu lui dire, principalement au sujet de son implication dans le Projet Carthage et dans la protection de Waldo Schaeffer, et de sa fille par la suite.
De ce qu'elle avait put entendre, Susan Steinback avait agi toute sa vie comme une femme d'honneur au courage incroyable, dont la loyauté à toute épreuve avait été d'un véritable secours à Aelita et à sa famille. Cependant, ce respect qu'elle lui portait à travers les histoires qu'on lui avait contées ne suffisait pas à lui faire partager le deuil dans lequel le reste de Kadic s'était plongé, et seule une étrange sensation de malaise persistait au creux de sa poitrine.
La haute silhouette du gymnase autour duquel tout un attroupement d'adolescents était déjà présent se dessinait désormais au loin et les rares murmures qui persistaient se turent aussitôt.
Stéphanie sentit soudain un mouvement dans son dos, ce qui lui fit tourner le regard. Profitant de l'attitude éperdue de ses condisciples, William s'était faufilé hors de la file et se dirigeait à grands pas vers le foyer tout proche, à l'insu total des autres élèves. L'adolescente fronça les sourcils. Pourquoi préférait-il s'isoler plutôt que d'assister à l'éloge funèbre de son ancienne professeure ?
Elle hésita un instant, pensive. Devait-elle prévenir Yumi ? Son amie semblait tellement perturbée par les événements qu'elle n'avait même pas remarqué l'escapade de son ténébreux petit copain… Peut-être valait-il mieux ne pas en rajouter ?
Décidée, Stéphanie se glissa à son tour hors du rang et courut le plus silencieusement possible jusqu'au pilier du préau le plus proche afin de se dissimuler derrière, le souffle court. Les portes du gymnase s'étaient ouvertes entre-temps et le groupe d'élèves avait commencé à s'y engouffrer, sans remarquer la disparition d'une nouvelle élève au passage.
Cette dernière attendit encore quelques minutes que tous soient entrés avant d'enfin jaillir de sa cachette et se diriger vers la petite porte bleue délavée menant au foyer, dans lequel William avait déjà disparu.
Le plus discrètement possible, elle se glissa à l'intérieur de la pièce envahie par les canapés rouges vifs et les divers jeux ayant pour but la distraction des collégiens et des lycéens. Par chance, Sissi, la gérante du foyer, avait renoncé depuis bien longtemps à verrouiller la salle entre les cours.
Stéphanie ne tarda pas à repérer William. Le jeune homme s'était allongé de tout son long sur le canapé faisant face à la télévision éteinte. Il avait les yeux clos et ses cheveux bruns emmêlés tombaient sur son front tandis que sa poitrine musclée se soulevait au rythme lent et régulier de sa respiration. Il semblait dormir.
Silencieusement, l'adolescente aux yeux violets s'avança vers lui et s'assit le plus délicatement possible sur l'accoudoir du fauteuil sur lequel il était allongé. William ne broncha pas, gardant les yeux fermés.
- Salut, fit Stéphanie avec un petit sourire timide, tu...Tu ne viens pas à l'éloge funèbre de Madame Hertz ? Presque tout le monde y est…
Le jeune homme n'eut aucune réaction supplémentaire,à l'exception d'un léger soupir qui s'échappa de ses lèvres entrouvertes, témoignant de son agacement. Il aurait clairement préféré se retrouver seul en cet instant précis plutôt qu'en compagnie de la nouvelle amie collante de sa copine.
Stéphanie ne renonça pas et resta assise, contemplant le petit ami de Yumi feindre le sommeil. Elle devait bien avouer que sa première véritable amie depuis des années avait du goût en matière de mecs : William était indubitablement séduisant. Avec sa barbe de trois jours qui commençait à pointer, ses cheveux sombres, son visage carré et ses vêtements de « bad boy » tendus contre son corps qu'on devinait musclé, il avait du séduire plus d'une jeune fille !
- Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu ne portais pas cette Madame Hertz dans ton cœur ou quoi ? tenta-t-elle de plaisanter avant de se rendre compte, un peu tard, du côté morbide de sa vanne.
- Ce n'est pas ça…
William avait finit par ouvrir la bouche mais ses paupières restaient closes, comme pour dresser une barrière entre lui et la réalité. Désireuse d'en savoir plus, Stéphanie choisit de rester silencieuse afin de le pousser à s'ouvrir de lui-même. Quelques minutes s'écoulèrent avant que, frustré, le jeune homme ne reprenne la parole.
- C'est trop suspect toute cette histoire ! Madame Hertz qui se fait assassiner… Yumi qui se montre de plus en plus distante, il y a forcément un truc qui cloche !
Le cœur de Stéphanie manqua un battement. Avait-elle bien compris ce que William tentait d'insinuer ? Commençait-il réellement à soupçonner quelque chose à propos du Supercalculateur… ?
- Q-Qu'est ce que tu veux dire ? lâcha-t-elle d'une voix qui se voulait indifférente, tu penses que Yumi...?
- Elle me cache un truc, c'est évident ! s'énerva le jeune homme en ouvrant brusquement les yeux, renonçant à conserver son calme, elle pense vraiment que je suis incapable de voir que quelque chose ne va pas ? Et sa façon de m'éviter en ce moment… J'ai d'abord cru qu'elle voyait quelqu'un d'autre, mais avec la mort de madame Hertz…
Ainsi c'était pour cette raison qu'il n'était pas venu assister à la cérémonie ? Il voulait profiter de ce moment de calme pour réfléchir…
- Je ne comprends pas, quel est le rapport entre ton ancienne professeure et cette chose que te cacherait Yumi ? lança Stéphanie, évasive, qui voyait pourtant parfaitement où était le rapport. Seulement, William n'était pas sensé savoir qu'elle était au courant de toute l'histoire liée au Supercalculateur…
Le jeune homme lui lança un bref coup d'œil soupçonneux avant de se renfoncer contre les coussins rouges molletonnés du sofa.
- Ça concerne un vieux truc entre nous, tu ne comprendrais pas, marmonna-t-il entre ses dents.
« Je comprends beaucoup mieux que tu ne le penses », ne put s'empêcher de penser Stéphanie avec une certaine ironie.
Toujours était-il que voir le jeune homme à ce point torturé par les cachotteries de sa petite amie l'avait touché plus qu'elle ne voulait bien l'admettre. A le voir ainsi éperdu sur ce canapé, seul au milieu du foyer désert et en proie à ses doutes, elle commençait à se demander si Yumi avait pris la bonne décision en choisissant de cacher la vérité à son petit ami ?
- Admettons, fit-elle en lui poussant les jambes afin de se dégager une place sur le canapé sur laquelle elle se laissa rapidement tomber avec satisfaction, si elle te cachait effectivement ce… Truc que je ne peux pas comprendre. Tu ne penses pas que ce serait pour te protéger ou quelque chose du genre ?
Elle avait balancé cela du ton le plus détaché dont elle était capble, mais cela n'empêcha pas William de se redresser brusquement sur le canapé, la dévisageant subitement de son regard d'ébène de plus en plus soupçonneux.
- Pourquoi est-ce que tu me dis ça… ? questionna-t-il froidement sans détacher ses yeux des siens, la faisant ciller, on dirait… Que tu en sais plus que moi à ce sujet !
- Quoi ? Pas du tout ! répliqua Stéphanie sans parvenir à s'empêcher de détourner le regard, Yumi et moi on n'est amies que depuis peu… Si elle te cache q
uelque chose à toi, tu te doutes bien qu'elle ne m'en a pas fait part !
Mais le rougissement intempestif qui venait d'apparaitre au niveau de ses joues démentait honteusement ce qu'elle venait d'affirmer. William se leva brusquement du canapé, dominant une Stéphanie qui commençait à prendre conscience qu'elle était allée trop loin de toute sa hauteur, le regard étincelant.
- Qu'est-ce que tu sais exactement, Minerve… ? lança-t-il d'une voix plus froide qu'un glacier. En cet instant précis, son attitude avait véritablement de quoi faire frémir et Stéphanie se surprit à se recroqueviller sur le canapé.
- R-Rien je t'ai dit ! s'entêta l'adolescente, cogitant à toute allure, j'essayais simplement de te dire que tu te prenais trop la tête !
Mais William n'était plus dupe. Dans un brusque accès de colère, il enfonça avec violence son poing dans le mur le plus proche, arrachant un cri apeuré à sa camarade de classe. Jamais elle ne l'avait vu dans un tel état de rage et de violence… Elle commençait seulement à entrapercevoir qui pouvait être vraiment le petit ami de Yumi et cela la confortait dans son idée qu'elle s'était montrée bien imprudente. Jamais elle n'aurait du s'avancer sur une pente aussi glissante en abordant, même de façon évasive, le secret de la japonaise !
- William, s'il-te-plait… bredouilla-t-elle sans oser quitter le canapé, tétanisée, je ne peux rien te dire…
Le jeune homme se retourna vers elle lentement en lui lançant un regard si sombre que l'adolescente eut un hoquet de surprise. Sans crier gare, il se précipita brusquement sur elle et lui empoigna le poignet avec force, lui arrachant un nouveau glapissement effrayé.
-Lâche-moi ! cria-t-elle en espérant vainement que quelqu'un l'entende en dehors de foyer, pour qui tu te prends !? Espèce de malade !
Elle avait balancé cette réplique sous l'action de l'adrénaline, sans se rendre compte de l'effet qu'elle pourrait produire sur le jeune homme, déjà en état de véritable crise de nerf.
Épouvantée, elle arrêta de se débattre face aux tremblements de colère incontrôlables de William. Celui-ci avait levé sa main libre en l'air et semblait prêt à la frapper !
- LE SUPERCALCULATEUR A ÉTÉ RALLUMÉ ! hurla-t-elle en fermant les yeux en l'attente du choc, ET YUMI EST AU COURANT !
Tous les autres élèves étaient partis au gymnase : elle n'avait aucune échappatoire ! Que pouvait-elle faire d'autre que d'avouer la vérité ? Tremblante, elle attendit le coup en représailles. Cependant, à sa grande surprise, elle sentit la prise sur son poignet se desserrer à la place.
Se risquant à ouvrir un œil, elle constata avec stupeur que William venait brusquement de s'affaisser au sol, agenouillé devant elle, la libérant au passage. Sa colère s'était transformée en un profond bouleversement. Stéphanie n'osa pas bouger, tétanisée face à son changement subit d'attitude.
- Alors c'était ça…? souffla le jeune homme d'une voix incrédule, à peine audible. On aurait dit qu'il avait le souffle coupé sous l'effet du choc.
L'adolescente aux yeux violets ne trouva rien à répondre. Elle venait de commettre une erreur épouvantable en parlant à William du rallumage du Supercalculateur, tout cela à cause de sa trop grande sensibilité ! Comment allait réagir Yumi en apprenant qu'elle l'avait ainsi trahie ?
- William, je suis désolée, se risqua à lâcher Stéphanie dans un souffle rauque, Yumi ne voulait pas t'en parler… Elle pensait que tu avais trop de problèmes en ce moment pour supporter l'annonce du retour à Lyokô et tout ça…
- Ben voyons, grimaça William, cynique, elle en parle à une fille qu'elle connait à peine mais moi, son petit ami, elle préfère me tenir à l'écart… Elle doit penser que je suis trop faible pour encaisser le choc !
- C'est plus compliqué que ça, et tu le sais ! protesta Stéphanie que le tournant que commençait à prendre la conversation inquiétait de plus en plus, Yumi tient à toi, c'est pour ça qu'elle ne voulait pas t'impliquer ! Et pour tout te dire, je suis en grande partie responsable du rallumage du Supercalculateur et j'ai tout découvert toute seule… Elle n'a rien eu besoin de me dire !
Inutile d'entrer dans les détails concernant l'enlèvement d'Angel et l'implication de Mathieu, William avait été suffisamment perturbé par la nouvelle sans en rajouter. Celui-ci ne répondit pas, visiblement en proie à des tourments trop profonds pour écouter ce qu'elle avait à dire. Lui, dont XANA hantait chaque nuit depuis des années. Comment pouvait-il bien réagir à une annonce telle que le remise en marche de la cause de tous ses ennuis ?
- Qui d'autre sait… ? souffla-t-il d'un air désespéré mais sans réplique.
Stéphanie ne prit même plus la peine d'hésiter avant de répondre :
- En dehors de moi et Yumi : Aelita, Odd, sa copine, Ulrich et Jérémie… C'est d'ailleurs pour ça qu'il a quitté Kadic. Un de mes amis en Première, Mathieu, est également au courant…
Elle s'interrompit face à la lueur glacée qui venait d'apparaitre au fond des yeux de charbon de son interlocuteur bouleversé. C'était trop d'un seul coup pour lui.
- Laisse-moi… parvint-il à lâcher au bout de plusieurs longues minutes de lutte intérieur.
- William…
- LAISSE-MOI JE T'AI DIT !
Il avait hurlé cette fois, pointant son regard empli de folie dans sa direction. Stéphanie n'insista pas. Elle se leva précipitamment du canapé et courut jusqu'à la porte du foyer qu'elle ouvrit à la volée avant de sortir sous le préau et de la claquer derrière elle, laissant William seul avec ses démons.
Désespérée, elle se laissa glisser le long du panneau tandis que des cris de douleurs retentissaient de l'autre côté de la cloison, diffus mais bien réels. Ceux-ci transpercèrent la jeune fille de part en part, telle une lance enduite de poison. Son cœur lui faisait mal dans sa poitrine et elle avait l'impression qu'elle allait se mettre à pleurer à tout instant.
- Quelle conne ! rugit-elle en se tenant la tête entre ses mains, t'as bien merdé pour le coup ma vieille…
Elle ne s'était pas dit un seul instant que William pourrait être singulièrement perturbé par la remise en route du Supercalculateur ou, pire encore, par le fait que sa petite-amie elle-même n'avait pas jugé bon de lui en faire part. Tout était allé trop vite, elle n'avait même pas eu l'occasion de dissimuler quoi que ce fut…
A l'intérieur du foyer, William venait de violemment envoyer valser tous les objets à sa portée, dévastant littéralement la pièce. Cela n'avait que très peu contribué à calmer ses nerfs, mis à rude épreuve. Tout prenait subitement son sens dans son esprit… L'attitude distante de Yumi et d'Eva de ces derniers jours, le subit rapprochement de cette Stéphanie Minerve avec sa petite-amie, la mort de Madame Hertz… Tout était une fois de plus lié à ce maudit Supercalculateur et aux monstruosités qu'il entrainait !
Il se sentait perdu. Perdu et complètement abandonné. Une bile amère avait envahi son palais et ses mains tremblaient alors qu'il se tenait là, immobile au milieu du foyer sans dessus dessous, ses traits défigurés par la rage et l'incompréhension. Au final, rien n'avait bien changé depuis cette fameuse année de Seconde qui avait fait basculer sa vie. L'attitude de ceux qu'il avait un jour cru pouvoir considérer comme des camarades, des frères, était toujours aussi suspicieuse et distante. Son passage dans le camp de XANA n'avait toujours pas été pardonné –ou du moins le jugeait-on trop faible pour pouvoir racheter ses fautes !
Même Yumi, la seule personne à lui avoir jamais accordé son pardon et à jamais avoir tenté de le comprendre, celle qui avait été un rayon de soleil dans sa vie depuis leur toute première rencontre, l'avait au final un fois de plus rejeté en un sens.
Avec un frisson d'horreur, il se rendit compte que son visage –son magnifique visage de délicate poupée de porcelaine asiatique- ne lui inspirait plus qu'un profond dégout. Il avait l'impression que penser à Yumi plus longtemps allait finir par le faire vomir…
Nauséeux, il se laissa tomber sur le premier canapé retourné sur sa route, abattu. Que devait-il faire maintenant ? Comment pouvait-il gérer un tel déluge d'informations ? Il ne savait plus quoi penser… Cette fois-ci ses cauchemars étaient devenus réels et ce n'était certainement pas une séance avec le « X » qui allait arranger ses problèmes…
Yumi était allongée sur son futon, la tête entre les bras, dans la pénombre de sa pièce. Elle et son jeune frère, Hiroki, avaient refusé de manger ce soir-là et s'étaient très vite dirigés vers leur chambre respective, sans échanger le moindre mot. Les parents Ishiyama avaient préféré ne pas intervenir, conscients du violent choc émotionnel que la mort de leur ancienne professeure avait pu leur causer.
Pourtant, c'était un tout autre tracas qui tourmentait la jeune japonaise. Dans sa tête, ne cessait de repasser les images de la discussion qu'elle avait eue avec ses amis après l'éloge funèbre de Madame Hertz –un moment poignant d'une rare intensité où bon nombre d'élèves n'avaient pu s'empêcher de fondre en larmes et où même les professeurs s'étaient montrés étonnamment bouleversés. Il était évident que la Green Phoenix avait quelque chose à voir avec ce meurtre, d'autant plus en prenant en compte la conversation qu'avait surprise Aelita entre sa mère et la vieille femme. Tous ces faits avaient mis sa détermination à rude épreuve.
Comment pouvait-elle accepter de laisser les autres défier l'organisation maléfique maintenant que la menace était devenue si réelle ? Elle-même était terrifiée par les conséquences que leur entêtement pouvait entrainer pour chacun d'entre eux désormais.
Elle ne pouvait s'empêcher de se dire qu'elle s'en voudrait toute sa vie si les prochaines victimes devaient être ses parents ou son frère… Et si William se trouvait à son tour impliqué, pourrait-elle jamais se le pardonner ?
Naturellement, ses pensées tortueuses dérivèrent vers son petit ami. Il n'avait pas été présent lors de la cérémonie, pas plus que Stéphanie à bien y repenser… Il ne s'était pas montré par la suite aux cours suivants et la jeune fille aux yeux mauves avait semblé sur le point de lui dire quelque chose au moment de la sonnerie annonçant la fin de la journée, avant de se raviser et de s'éloigner précipitamment. Avait-elle raison de s'inquiéter ou devenait-elle trop paranoïaque ? Après tout, ce n'était pas la première fois que William séchait les cours. Cela dit, elle avait un mouvais pressentiment…
Se décidant à l'appeler, elle tendit une main paresseuse jusqu'à son portable, posé un peu plus loin sur le sol, et fit défiler les numéros de son répertoire. Cependant, à sa grande surprise, le téléphone se mit à vrombir de lui-même avant qu'elle ait eu le temps de sélectionner le numéro de son bien-aimé. C'était pourtant bel et bien William qui l'appelait !
Le cœur battant la chamade, elle pressa l'icône pour décrocher, portant le combiné à son oreille. Pourquoi se sentait-elle si angoissée tout à coup ?
- Allô, mon amour ? questionna-t-elle d'une voix inquiète, comment tu vas ? Je m'apprêtais justement à t'appeler figure-toi, j'étais inquiète de ne pas te voir à la cérémonie… Qu'est-ce qui… ?
- Je sais tout.
Un frisson glacé parcourut la jeune femme qui écarquilla ses yeux en amande de stupeur. Le ton était sans équivoque : elle n'avait pas besoin de demander plus de précisions à son petit ami.
- Quoi… ? Tu…? balbutia-t-elle sans parvenir à trouver ses mots. C'était comme si une énorme boule venait subitement de lui obstruer la gorge, l'empêchant de parler.
- Stéphanie m'a tout dit à propos du rallumage du Supercalculateur, poursuivit William à l'autre bout du fil. Yumi fut terrifié par l'intonation étonnamment calme qu'il employait.
- Écoute, si je ne t'en ai pas parlé, c'était pour te protéger ! lâcha-t-elle précipitamment, William je ne voulais pas…
- Je me moque de tes excuses.
Un silence pesant s'installa. Yumi avait l'impression que son cœur cherchait à tout prix à s'échapper de sa poitrine et ses mains étaient si moites que son téléphone menaçait de glisser au sol à la moindre défaillance de sa part.
- J'ai réalisé quelque chose Yumi, reprit subitement la voix de William à travers l'appareil, toujours aussi glaciale, tu es loin de me connaitre aussi bien que je le pensais. En fait, j'ai l'impression que malgré tout le progrès accompli entre nous au cours des dernières années, nous en sommes finalement restés au même point tous les deux.
La jeune japonaise était perdue. De quoi parlait-il ? Pourquoi abordait-il le passé alors qu'il venait d'apprendre une chose aussi grave ?
- Je peux te pardonner beaucoup de choses, poursuivit son petit-ami sans lui laisser l'occasion de répliquer, mais pas ça. Pas le fait de m'avoir caché une nouvelle aussi importante pour moi. Tu m'as infiniment déçu pour le coup. Je regrette, mais je ne pense pas parvenir à digérer un jour une telle chose...
- Qu'est-ce que tu veux dire… ? lâcha Yumi d'une voix tremblante en portant une main à sa bouche, sous le choc, William je… Je voulais juste… Tu étais tellement perturbé par ces cauchemars…
- Tout est fini Yumi, j'ai assez attendu que tu m'ouvres ton cœur comme ça.
La japonaise resta sans voix face à la déclaration. Que venait-il de se passer ? Son cerveau ne parvenait pas à analyser les mots que son petit-ami avait prononcés.
Puis brusquement, ce fut comme si le sol s'effondrait sous ses pieds, comme si une quelconque force supérieure venait de lui arracher une partie de son âme avec un rare sadisme. Yumi sentit les larmes couler sur ses joues d'ivoire alors que l'idée se frayait petit à petit une place dans son cerveau. William venait de rompre avec elle.
- William, non, il faut qu'on en discute tous les deux, tu ne peux pas… !
- Adieu, Yumi, fit la voix de son bien-aimé plus lointaine que jamais à ses oreilles, comme dans un souffle.
- NON WILLIAM, JE T'INTERDIS DE RACCROCHER TU M'ENTENDS ! Will…
Mais la tonalité caractéristique signalant que son interlocuteur avait coupé la communication résonnait déjà, tel le glas mettant définitivement fin à leur relation.
Dans un sursaut de désespoir, la japonaise saisit, tremblante, le numéro du jeune homme avant de porter de nouveau le téléphone à son oreille mais elle fut automatiquement basculée sur le répondeur. William avait déjà bloqué son numéro…
Ce fut le moment où l'univers de Yumi implosa. Éprise d'une rage folle, elle arracha littéralement de son chignon les baguettes offertes par celui qu'elle avait aimé, s'arrachant au passage quelques cheveux sans y prendre garde, avant de les lancer de toutes ses forces à l'autre bout de la pièce.
Ses longs cheveux d'un noir soyeux étaient retombés sur son front et ses yeux pleuraient à chaudes larmes désormais, lui conférant une allure un peu folle. Plus rien n'avait d'importance désormais. Le Projet Carthage, la Green Phoenix, la mort de Madame Hertz, ses études auxquelles elle s'accrochait tant… Tout lui semblait si dérisoire face à la rupture qu'elle venait d'essuyer.
La seule personne qui avait su l'aimer telle qu'elle était et la soutenir était partie désormais, la laissait aussi seule et désemparée qu'au premier jour.
Un rictus amer fendit ses lèvres alors qu'elle se recroquevillait sur elle-même en position fœtale, comme pour tenter d'atténuer vainement la douleur qui pulsait désormais au niveau de sa poitrine. D'abord Ulrich, ensuite William ? N'arriverait-elle donc jamais à faire les choses correctement ? Resterait-elle à jamais cette insupportable briseuse de cœur, incapable de prendre en considération les sentiments des autres ? Elle ne s'était jamais autant haïe qu'en l'instant présent. Depuis des années, elle accumulait erreur sur erreur, et le prix était cher payé à chaque fois…
Tous ses sens, toutes ses pensées s'étaient éclipsés désormais pour ne plus laisser place qu'à cette abominable douleur au creux de son ventre, là où William venait d'arracher une parcelle de son âme. Elle avait à présent deux trous béants au sein de son cœur et cela était plus que ce qu'elle ne pourrait jamais supporter.
A présent, Lyokô était loin de l'univers virtuel paradisiaque qu'elle s'était figuré lors de première plongée dans l'ordinateur, des années auparavant. Ce n'était plus qu'une malédiction semant la mort et détruisant les liens les plus forts sur son chemin.
Voilà ! Un chapitre plein d'émotions donc, j'espère qu'il vous aura plu ! Pas de section dessin pour cette fois, mais je vous rappelle que vous pouvez visiter mon DeviantArt si vous le souhaité afin d'y découvrir mes créations relatives à la série... Bonne semaine à tous ![/list]
Bon, je réagis tardivement mais je réagis au final de ta grandiose fanfiction... Et quel final ! Je savais que tu arriverais à nous bouleverser de ta plume experte et je n'ai pas été déçu, loin de là !
J'ai été proprement stupéfait par la façon dont tu es parvenu à entremêler espoir et désespoir dans cet ultime chapitre. Je pense que c'est le premier où le titre de ta fiction prend tout son sens et où on a envie de se battre aux côtés de nos héros, c'était vraiment très impressionnant !
La mort d'Hussinger et du Phénix Doré aura été à leur hauteur, je pouvais presque voir la Tour Eiffel s'effondrer sur eux devant moi tant la scène était intense ! C'était superbe, chapeau bas !
Aelita qui, enfin, a droit à son rôle clef dans l'histoire. La Aelita qu'on aime et qui est prête à tout pour se battre était enfin de retour et, franchement, j'ai adoré son attitude du début à la fin. Elle aura été impressionnante et sa détermination m'aura vraiment touché au plus haut point !
Quelque part, je pense que je savais que chacun des personnages principaux d'origine allait mourir l'un après l'autre, mais la façon dont tu as mis ça en œuvre était superbement orchestrée ! Noter leurs dates de naissance et de décès était un excellent choix, bien que bouleversant pour le pauvre lecteur malmené que j'étais ! Et pourtant, malgré le sacrifice final d'Aelita et de Jérémie, c'est un puissant message d'espoir qu'ils parviennent à nous transmettre... Juste... Waouh quoi ! Je peine à trouver mes mots pour cette scène finale !
Le retour d'Anthéa à la raison, je dois admettre que je n'y croyais plus ! Je pensais qu'elle aurait droit à une fin atroce, restant à jamais le monstre qu'elle était devenue, et pourtant tu as su la sublimer sur la fin, la sauver quelque part dans cet espoir qui illumine soudain ta fanfiction et sa mort aura de loin été la plus belle qui puisse lui arriver, même si elle n'aura pas suffit à sauver sa fille... Au final, tous les Schaeffer sont morts pour le reste de l'humanité, et c'était digne d'eux et de leur grandeur !
L'épilogue laisse un goût amer en bouche cependant, mais c'était à prévoir. Tout ne pouvait pas se finir pour le mieux dans le meilleur des mondes, pas après tout ça... En bref, un final tragique, mais magnifique !
Ta fanfiction était une véritable oeuvre d'art, et j'ai adoré la suivre du début à la fin ! Mes plus sincères félicitations pour ce dernier chapitre, parfait en tout point ! J'attends tes prochaines œuvres avec impatience et te tire une nouvelle fois mon chapeau. Bravo, sincèrement !
(Un commentaire un peu court, certes, mais j'en avais tellement plein la vue que c'est dur de tout analyser dans le détail XD en bref c'était parfait, rien à redire et merci pour cette fiction formidable !)
Yop ! Je viens de finir ton chapitre, et je commente, comme à mon habitude o/ !
Tout est très bien écrit, comme d'habitude ! Je passe rapidement sur les divers combats : tu montres avec brio l'horreur de cette guerre et la perte d'espoir progressive des habitants de la Terre au fur et à mesure que le conflit avance par le biais de tes personnages.
Au stade où on en est, je pense qu'espérer un Happy End serait puéril =( mais bon, tu peux encore nous surprendre o/ !
Le Phénix Doré. En apprendre un peu sur son passé au début du chapitre était très intéressant j'ai trouvé, on le comprendrait presque, même s'il est clair qu'il a sombré dans la folie la plus totale avec le temps. Il suffit de voir ce qu'il a fait subir à Anthéa. Cette dernière, par ailleurs, semble réagir à l'allusion de sa vie passée, ne serait-ce que légèrement. Peut-être Odd, dans un sursaut d'espoir, parviendra-t-il à lui faire reprendre pied ? Redevenir celle qu'elle était ? Si c'est le cas il y a fort à parier qu'elle ne se pardonnera jamais ses agissements en temps que Nastasia. En tout cas, la relation qui l'unit au Phénix Doré est vraiment bien retransmise et intéressante !
J'aime bien le concept selon lequel Léo' est relié directement au canon. C'est divinement glauque et ça laisse nos héros face à un dilemme intéressant. Mourra-t-il ? Avec tes suspens à répétitions, rien n'est moins sûr =P !
Kiichi manque un peu de compassion envers Jérémie je trouve. Certes, on est en période de crise mais parfois on a plus l'impression d'avoir affaire à un robot qu'un être humain, et je trouve ça un poil dommage. En fait, si je devais soulever un seul point négatif de ta fic, c'est que tes personnages manquent parfois un peu d'humanité. Ou, tout du moins, ils ne correspondent pas à ceux auxquels le lecteur lambda peut s'identifier, ce qui entraine une certaine distance avec l'horreur du conflit. Cela se ressent d'autant plus maintenant qu'il ne reste plus que trois des anciens Lyokô-guerriers ! Après, ton style d'écriture grandiose rattrape largement ce léger défaut, mais je tenais à te faire part de mon point de vue à ce sujet o/ !
Le passage de la destruction du Japon avec le compte à rebours est vraiment poignant et angoissant, bien joué. Pourquoi ce pays en premier T___T ? C'est trop triste ! Hum... Nan franchement, passage exceptionnel !
Chirac se décide un peu vite à anéantir l'humanité quand même. Je peux comprendre qu'à ses yeux il n'y ait plus d'espoir mais je pense que se battre jusqu'au bout aurait été plus digne, quelque part =( enfin ce n'est que mon avis ! Toujours est-il que la fin du chapitre est vraiment dure à lire, dans le sens que le désespoir sous-jacent est particulièrement bien retranscrit. Bien joué encore une fois !
Seul VRAI bémol à ce chapitre à mon sens : l'inutilité croissante d'Aelita XD... Fais-la crever, ça ira plus vite à ce stade ! Hum...
Ah ! Et le combat des vieux, ça promet d'être épique ça par contre XDD ! Voir Hussinger au cœur de l'action pour une fois ça fait plaisir quand même ! Son arme lui correspond bien je trouve.
Bref, superbe avant-dernier chapitre, digne du niveau général de ta fic exceptionnelle *__* j'attends un final grandiose alors ne nous déçois pas =P ! Bon courage d'ici là ! Et surprends-nous o/ !
Waaah, merci encore une fois pour ton commentaire Zéphyr *__* ça me fait toujours plaisir de sentir que mes chapitres plaisent X3 !
Vui j'avoue que la censure finale était peut-être pas tout à fait nécessaire... Déjà, j'ai bien calmé le jeu par rapport à la version d'origine de ce chapitre : les Lyokô-guerriers étaient beaucoup plus grossiers à la base XD !
J'me suis assez éclaté sur le combat Mathieu VS Eva je dois dire ! Content qu'il t'ait plu~ je trouve ça dommage de devoir limiter Stéphanie à ce genre d'intervention pour l'instant personnellement mais si ça te plait tout va bien o/ !
Oui Eva fait peur XD c'est le but ! Mais après son dessin date un peu par rapport à celui de Jérémie. A mon avis si tu la trouves mieux réussie que sa première version c'est surtout parce qu'il y a environ deux ans d'écart entre les deux dessins ! Encore heureux que j'ai progressé en dessin depuis =( surtout que ça fait un peu partie de mes études T__T...
Merci pour le compliment sur la colo X3 j'ai voulu essayer quelque chose d'un peu différent... Et si Jérémie te plait comme ça, attends un peu de voir Odd XDD !
Bref, sur ce je passe directement au chapitre 21 histoire de ne pas perdre de temps o/ ! Action !
Spoiler
Chapitre 21 :
Épisode 120 : La Signification du Signe_
Mathieu contempla, éberlué, les sphères lumineuses rougeoyantes crachées par la Faille tomber tout droit dans sa direction. Il eut à peine le temps d'esquisser un mouvement de recul que celles-ci s'écrasaient à quelques mètres de lui, s'évaporant en une nuée de poussière numérique. De la fumée virtuelle, s'extirpèrent trois créatures hideuses de forme cubique, apparemment taillées à même une sorte de roc d'une écœurante couleur beige, montées sur pattes, et dont chaque face était occupée en son centre par un énorme globe oculaire.
Eva, qui s'était mise en position défensive d'instinct, fronça ses sourcils virtuels. Au lieu de l'habituel symbole de XANA, chacun de ces yeux était désormais rempli de l'étrange signe qu'elle avait remarqué lors de leur dernière plongée sur Lyokô. Les Kankrelats n'étaient donc pas les seuls affectés par ce phénomène…
- C'est quoi ces horreur !? fit Mathieu, plus tendu que jamais, oubliant momentanément sa querelle avec la jeune américaine, c'est au moins trois fois plus gros que les cafards géants de la dernière fois !
- Ce sont des Kubes, rétorqua Eva d'un ton agacé, tu ferais mieux de te préparer à te battre au lieu de poser des questions inutiles…
- Et toi d'arrêter de parler sans savoir ! répliqua la voix numérisée de Yumi dans le ciel, légèrement irritée, ce sont des Blocks, pas des Kubes ! Et je vous signale au passage qu'Aelita et Odd sont aux prises avec des Krabes de leur côté. Vous allez devoir vous débrouiller tous seuls pour le coup !
La jeune fille s'apprêtait à s'insurger contre la japonaise lorsqu'un laser lui frôla brusquement la joue, la forçant à se focaliser sur le combat. Les Blocks avaient commencé à les canarder et les deux adolescents durent vite battre en retraite, se réfugiant derrière une légère surélévation du terrain de justesse.
- Shit, jura Eva en jetant un coup d'œil derrière leur abri de fortune, Yumi, combien est-ce qu'il nous reste de Points de Vie à tous les deux après notre combat ?
- Trente pour toi et seulement quinze pour Mathieu, répondit aussitôt l'intéressée à travers le micro, évitez à tout prix de vous faire toucher ! Attendez… Aelita me dit quelque chose… !
Un léger silence s'ensuivit, seulement rompu par les tirs des monstres en fond sonore, ricochant à la surface des blocs sombres du territoire.
Mathieu tenta vainement de passer sa main au dessus de sa cachette afin d'absorber un laser perdu mais du y renoncer rapidement lorsque l'un d'entre eux manqua de lui faucher un doigt au passage. Agacé, il ne put retenir un juron. S'il ne parvenait pas à attraper au moins un rayon, il allait s'avérer aussi inutile que la dernière fois !
Soudain, la voix de Yumi s'éleva de nouveau au creux des tympans des deux adolescents virtualisés, un léger timbre paniqué la nuançant :
- Eva, Mathieu ! Il faut à tout prix que vous empêchiez les Blocks d'atteindre le cœur de Lyokô ! C'est ça leur objectif !
- Le cœur… ?
Le jeune homme aux oreilles de lapin jeta un rapide coup d'œil en direction de l'immense demi-sphère effondrée au centre de Lyokô. Il ne comprenait pas. Quel était le lien entre le cœur de l'univers virtuel et ces monstres ? Eva fut plus vive cependant.
- Attends, s'ils parviennent à détruire le cœur, ne me dit pas que… ?
- Oui, confirma Yumi avant même que la Lyokô-guerrière ait achevé sa phrase, si le cœur est détruit, non seulement vous serez piégés à jamais dans l'ordinateur mais en plus le Projet Carthage se retrouvera complètement sans défense au beau milieu du réseau informatique mondial ! Et là, ce sera un jeu d'enfant pour la Green Phoenix de le récupérer…!
Un frisson d'effroi parcourut les deux adolescents qui échangèrent un regard interdit. Tout à coup, cette simple mission de reconnaissance venait de prendre une toute autre dimension !
Odd plongea à terre, évitant de justesse une pluie de lasers. Sans reprendre son souffle, il effectua une roulade parfaite et pointa sa patte en direction de son assaillant, se concentrant. La fléchette en jaillit instantanément, fusant vers la carapace du monstre sur laquelle elle ricocha pitoyablement. L'homme-chat étouffa un cri de rage. A quelques centimètres sur le côté près il aurait pu atteindre sa cible !
- Tu es sérieuse Aelita ? s'écria-t-il en se redressant, recommençant à courir, esquivant les tirs de justesse, la Green Phoenix veut vraiment détruire Lyokô pour avoir accès au Projet Carthage !? Mais depuis quand tu sais ça ?
- Je suis vraiment désolée ! cria-t-elle d'un ton coupable en effectuant un pas de côté pour éviter un laser à son tour, en fait j'aurais pu comprendre ça beaucoup plus tôt, mais entre cette histoire avec Jérémie et ma rencontre avec Thomas j'ai… J'ai complètement oublié d'y repenser !
L'elfe virtuelle s'interrompit une fraction de seconde, la paume levée, se concentrant légèrement. Aussitôt, une sphère d'énergie rose vif se dessina dans sa main, crépitant légèrement. Sphère qu'elle jeta presque aussitôt de toutes ses forces en direction du Krabe lui faisant face. Ce dernier l'esquiva sans problème cependant, en ployant légèrement ses pinces gigantesques.
- En fait, ça semble logique, poursuivit-elle en suivant des yeux sa boule d'énergie qui s'évanouit dans les airs quelques mètres plus loin, dépitée, je vous avais déjà fait remarquer que les Kankrelats se dirigeaient vers le cœur de Lyokô la dernière fois si tu te souviens. Or, on sait que le seul et unique but de la Green Phoenix c'est de mettre la main sur le programme militaire mis au point par mon père. On sait aussi que Lyokô a été en partie conçu dans le but de protéger ET emprisonner ce même programme ! Quel meilleur moyen d'y accéder que de détruire sa protection ?
- Ça expliquerait pourquoi ils ont créé la Faille et nous envoient ces monstres, raisonna Odd en évitant lestement une nouvelle salve de tirs avant de riposter furieusement à coup de Flèches Lasers, sans résultat, mais je ne comprends toujours pas comment ils ont pu recréer les monstres de XANA !
Aelita resta silencieuse, incapable de lui donner une réponse satisfaisante. Elle se sentait idiote. Comment avait-elle put ne pas faire le lien plus tôt entre l'envoie des monstres sur Lyokô par la Green Phoenix et le Projet Carthage ? S'était-elle à ce point laissée aller ces dernières semaines… ?
« Au moins Thomas me fait du bien », se fit-elle remarquer à elle-même tout en déclenchant ses ailes de nouveau, s'élevant dans les airs dans un flash lumineux, « il faut que je me reprenne ! ».
Évitant gracieusement les tirs des deux Krabes qui l'avaient suivie de leurs yeux vitreux, tel un ange virtuel, elle offrit une superbe diversion à Odd qui en profita pour se jeter sous les pattes de l'adversaire le plus proche, poings levés, en hurlant :
- Flèches Lasers !
Cette fois-ci les encoches s'enfoncèrent directement à travers l'abdomen de la créature qui chuinta d'agonie avant d'exploser violemment en une myriade de particules.
Soufflé à terre par la puissance de l'explosion, Odd n'eut cependant pas le temps d'éviter la patte du second Krabe qui se planta avec violence dans son ventre, le transperçant de part en part.
L'adolescent eut tout juste le temps d'ouvrir la bouche de surprise avant de disparaitre derrière un nuage de pixels blancs, sa barre de points de vie tombée à zéro sur le coup. Aelita en profita cependant pour lancer une nouvelle sphère d'énergie en plein dans la carapace du Krabe qui se retrouva un instant auréolé d'une lumière rose grésillante avant d'imploser à son tour, vaincu.
- Eh merde, souffla-t-elle de frustration en se posant à terre, repliant ses ailes dans son dos, à l'endroit précis où son ami venait de disparaitre.
Sur Terre, au cœur de la vieille usine en apparence désaffectée sur le lac, la porte d'un des scanners s'ouvrit en coulissant dans un panache de vapeur sur un jeune homme blond pourvu d'un étrange béret violet et aux yeux d'un gris perlé.
Odd s'extirpa de l'habitacle en laissant échapper un soupir douloureux, une main plaquée contre son estomac. La vache, ce que cela faisait mal !
- Quel con... soupira-t-il en faisant mine de se diriger vers le monte-charge.
Cependant, à mi-chemin, ses jambes lâchèrent soudain sous son poids et il s'effondra au sol, le souffle court, et le cœur battant à cent à l'heure.
- Putain… ! jura-t-il en se tenant les côtes, terrassé par la douleur.
Il dut attendre une bonne minute avant que les vagues nauséeuses ne s'estompent et que son rythme cardiaque reprenne une allure plus acceptable, choqué, cloitré au sol. Que lui arrivait-il ? A l'exception du jour de sa première virtualisation peut-être, il ne se souvenait pas qu'une rematérialisation forcée lui ait jamais fait aussi mal ! Avait-il perdu l'habitude au fil des années ?
« Pourtant ça allait la dernière fois » pensa-t-il en se redressant lentement, étouffant un grimace de douleur, « c'est autre chose on dirait… ».
Brusquement, une pensée le saisit. Et si Aelita avait raison ? Et si, à son âge, les virtualisations devenaient nocives pour son organisme ?
- Ça ne peut plus continuer comme ça, éructa Eva en se risquant à jeter un coup d'œil par-dessus son abri, il faut qu'on tente une percée Mathieu !
En face d'eux, l'un des trois Blocks continuait à les canarder sans répit tandis que ses deux comparses s'étaient élancés en direction de la demi-sphère au centre du territoire, leurs courtes pattes difformes émettant un désagréable couinement sur leur passage.
- Je veux bien, mais comment ? répliqua ledit Mathieu d'un air désespéré, on n'a presque plus de Points de Vie ! Si on sort c'est le retour sur Terre assuré, sans compter que mon arme est totalement déchargée et qu'avec la cadence de tir de cette bestiole, je n'arriverai jamais à absorber le moindre laser…
Eva étouffa un soupir exaspéré. Elle détestait cette situation ! Non seulement elle était incapable de se battre mais, en plus, elle devait se coltiner un boulet comme équipier…
Soudain, elle écarquilla les yeux. Un éclair lucide venait de lui traverser l'esprit. Et si… ?
- Mathieu ! fit-elle d'un ton bref en se ré-accroupissant derrière le bloc les dissimulant, ton arme, elle peut absorber n'importe quelle attaque si j'ai bien compris ?
- Je suppose, répondit-il en haussant un sourcil intrigué, en tout cas ça a marché la dernière fois avec le tir du Kankrelat et avec tes…Oh !
Une lueur de compréhension illumina ses iris virtuels. Il venait de saisir où elle voulait en venir !
- Bien, t'es moins lent à la détente que ce que je pensais, opina Eva avec un rictus moqueur faisant fulminer le jeune homme. Ça ne me plait pas vraiment de devoir me reposer sur toi, mais on n'a pas trop le choix là…
Un nouvelle salve de tirs retentit, les interrompant momentanément. Eva se renfrogna, ils n'avaient plus le temps de lambiner en discussions… Il fallait agir !
- Bon écoute, chuchota-t-elle en s'éloignant de quelques pas de Mathieu, je te tire dessus à trois… Tiens-toi prêt et surtout ne rate pas ton coup !
Le jeune homme déglutit en levant les bras en l'air, ses deux sphères pointées en direction de la rockeuse virtuelle qui entamait le décompte sur ses doigts, la bouche entrouverte, prête à faire jaillir les notes de musiques colorées. Il n'avait pas le droit à l'erreur !
Aelita fusait à toute allure à la surface de Lyokô, ses ailes grandes ouvertes déployées dans son dos, une boule d'énergie rose dans chaque main, balayant le territoire en contrebas de son regard d'un vert limpide.
Un mouvement au nord de la sphère centrale attira son attention et elle plongea aussitôt, n'attendant pas une seconde de plus pour tirer.
La sphère crépitant d'énergie vint faucher le Block visé d'un coup et il implosa aussitôt sous le choc, vaincu. Cependant, en raison de la détonation, Aelita faillit manquer la salve de tirs lancée en riposte dans sa direction par le Krabe l'accompagnant.
Elle plongea en piqué afin de l'éviter mais sa cheville reçut malgré tout un impact, semant sur son passage une trainée d'étincelles bleues.
Jurant, l'adolescente virevolta, rasant le sol en trainant sa seconde sphère d'énergie contre le sol dénué du texture de Lyokô, l'illuminant de rose.
- Champ de force ! hurla-t-elle en effectuant de justesse un salto avant dans les airs, passant juste au dessus de la carapace de la créature afin d'y planter ladite sphère qui le recouvrit aussitôt entièrement, le désintégrant instantanément à son tour.
- Et de deux de moins, lâcha la jeune fille en reprenant de l'altitude.
La Green Phoenix avait vraiment mis le paquet pour ce second assaut ! Une chance qu'elle et les autres se soient retrouvés sur place au bon moment… !
Avec ces deux derniers monstres de détruits cela plaçait son tableau de chasse à quatre, en excluant les Krabes qu'elle avait combattus avec Odd. Elle avait également réussi à minimiser les dégâts grâce à ses ailes, mais pour combien de temps encore ? D'autant plus qu'elle n'avait aucune idée du nombre de monstres envoyés par la Green Phoenix restants !
« Accrochez vous encore un peu Eva, Mathieu » pensa-t-elle en activant un nouveau « Champ de force » dans sa main, « j'arrive ! ».
Une série de cris surhumains résonnèrent derrière l'abri de fortune du jeune homme à la capuche aux oreilles de lapins et de sa comparse, à la grande surprise du Block les tenant en joue, suivi d'un ensemble de flashs lumineux de toutes les couleurs. Un instant plus tard, Mathieu jaillissait de derrière sa cachette, les poings levés, en criant comme un dément, les segments de ses armes illuminés de rouge.
Incapable d'analyser correctement la situation qui s'offrait à lui, le Block ne put que recevoir de plein fouet les notes explosives d'Eva. La plupart s'écrasèrent sur la partie rocailleuse de sa tête cubique mais un des tirs finit par atteindre son œil central, le transperçant de part en part.
Il n'eut que le temps d'émettre un faible grésillement de surprise avant d'exploser sur place tandis qu'Eva le dépassait en courant, précédée par un Mathieu gonflé à bloc. Il allait montrer de quoi il était capable, maintenant qu'il commençait à maîtriser ses caractéristiques virtuelles !
Brusquement, l'un des deux Blocks que les deux adolescents coursaient fit pivoter sa tête cubique à cent-quatre-vingt degrés, pointant dans leur direction son seul œil illuminé de rouge, avant de cracher dans leur direction un violent laser.
Eva se projeta sur le côté afin de l'éviter tandis que Mathieu eut tout juste le temps de lever son poignet pour absorber le rayon. Son arme se referma avec un petit "clac" sonore sur la sphère d'énergie rouge. Parfait, s'il continuait comme cela il n'allait pas se retrouver à sec avant un moment !
D'un bond prodigieux, l'américaine sauta au dessus du Block, rebondissant sur sa tête plate afin de se propulser plusieurs mètres derrière lui, juste devant le second monstre qui s'arrêta net, surpris.
- Hey, Eva ! lança Mathieu en relâchant le laser à peine emmagasiné d'une simple impulsion mentale en direction de leurs assaillants, manquant sa cible de peu, c'est moi où tous ces monstres se ressemblent ? Je veux dire, les Kankrelats et ce truc… Au final tout ce qu'ils peuvent faire c'est envoyer des lasers que je peux absorber !
Exaspérée, la jeune fille préféra l'ignorer et cracher un nouveau jet musical en direction de la créature géométrique lui faisant face qui l'esquiva de justesse en se penchant légèrement sur le côté, manquant de perdre l'équilibre.
Mathieu fronça les sourcils mais ne fit pas cas de l'attitude dédaigneuse de l'américaine. Après tout, leur petit différent au sujet d'Odd n'avait été que reporté par la bataille…
- Rejet ! cria-t-il sans trop savoir pourquoi en pointant une nouvelle fois une de ses sphères métallisées en direction du Block.
Trois notes de musiques explosives en jaillirent aussitôt tandis qu'autant de segments reprenaient une teinte bleue à sa surface. Toutes trois atteignirent le monstre sur les angles, le laissant complètement intact.
- Il faut que tu touches son œil ! s'énerva Eva tandis que la créature qu'elle venait de rater répliquait en la mitraillant de lasers, c'est pas vrai, il faut vraiment tout t'expliquer !
Rageur, Mathieu ne répliqua pas et se contenta de foncer en direction du monstre, esquivant de justesse les lasers en dérapant sur le sol du territoire, tirant deux nouvelles notes d'Eva à sa surface, ratant leur cible de peu une nouvelle fois.
- Arrête de gaspiller les munitions que JE t'ai donné ! soupira la rockeuse virtuelle avec dédain tapant un peu plus sur ses nerfs, je te préviens : une fois à sec tu te démerdes !
- La ferme… ! répliqua-t-il presque machinalement en vidant le chargeur de sa sphère droite sur son Block, de rage.
Il se rendit compte de la puérilité de son attitude lorsqu'il constata que la plupart des tirs venaient de passer cette fois-ci carrément au dessus du monstre qui, comme pour le narguer, riposta aussitôt en le canardant.
D'instinct, Mathieu se jeta à terre, les lasers frôlant de justesse ses oreilles de lapin au passage.
- N'esquive pas les tirs, absorbe-les si tu veux te rendre utile !
- Tu commences à me courir sur le système Eva…
Pour toute réponse, la jeune fille poussa un nouveau cri offensif. La note violette qui fut expulsée de sa bouche par l'onde sonore se ficha tout droit dans l'œil du Block dont elle se chargeait, le faisant imploser sur le coup.
Énervé par le succès de l'agaçante américaine, Mathieu se redressa, jaugeant son adversaire du regard, prêt à tirer. La créature semblait faire de même, aux aguets, attendant le bon moment pour décocher son laser.
L'adolescent se focalisa sur sa cible : l'énorme œil au centre de sa face plate. Selon les dires d'Eva, il n'avait qu'à atteindre ce globe hideux pour en finir avec le monstre. La sphère à son poignet gauche était encore illuminée de rouge pour trois segments sur sept, ce qui lui laissait largement l'occasion de le toucher. Il n'avait pas à s'en faire !
Soudain, alors qu'il se préparait à tirer, Mathieu se figea, interloqué. Son cerveau venait d'analyser le symbole qui se dessinait au centre de l'œil du Block. Un étrange symbole stylisé constitué d'un disque central, surplombé d'un arc de cercle et de deux formes en arabesque sur le côté… Un symbole qui n'évoquait rien aux autres mais qui venait soudain de lui rappeler une forme très particulière. Cet arc surplombant un cercle semblable à une auréole, ces motifs en tourbillon sur les côtés rappelant des ailes… Il y avait dans ce schéma en apparence complexe quelque chose qui rappelait un ange, à n'en pas douter ! Ou plutôt…
- Angel... souffla-t-il, déconcerté.
Sous l'effet de la surprise, il baissa sa garde une fraction de seconde. C'était le moment qu'attendait le Block. Celui-ci pivota brusquement sur lui-même, présentant une nouvelle face à Mathieu, en tout point identique à la précédente, mais dont le globe oculaire central s'illuminait désormais d'un bleu glacé.
- Mathieu !
La voix d'Aelita qui fonçait dans leur direction, toutes ailes déployées, ramena le jeune homme à la réalité juste à temps. Dans un état de semi-réflexe, il projeta la paume de sa main devant lui au moment précis où un rayon azur tirant sur le blanc jaillissait de l'œil du monstre cubique. Tout allait bien, il allait réussir à absorber l'attaque, comme d'habitude…
Néanmoins, à sa grande surprise, l'étrange laser bleuté l'atteignit de plein fouet, le couvrant de la tête au pied d'une étrange gangue aux reflets d'argents, qui aurait pu rappeler de la glace par sa forme s'il s'en était dégagé la moindre sensation de froid.
Tout devint blanc et Mathieu eut à peine le temps d'entendre un bruit d'explosion avant de sentir son corps numérique s'effacer sous les pixels, pour la deuxième fois de sa vie.
Sur Terre, son visage anxieux éclairé par l'étrange lueur verte émanant du poste de contrôle de Supercalculateur, Stéphanie observa, avec incrédulité, la carte de l'avatar numérique de son ami se décharger à l'écran, signe de sa dévirtualisation.
- Hein !? Mais qu'est-ce qui vient de se passer ? fit-elle par-dessus l'épaule de Yumi, qui ne pouvait qu'observer le spectacle, impuissante, Mathieu venait de déclencher son arme, non ? Il aurait du absorber le tir comme d'habitude si j'ai bien compris !
- C'était un rayon gelant je crois, expliqua lentement la japonaise en faisant défiler l'historique d'une pression sur les flèches directionnelles, on dirait bien que notre novice ne peut absorber que les lasers classiques…
Stéphanie étouffa un juron.
- Je me doutais bien qu'ils avaient quelques trucs en plus ces monstres ! Eva aurait pu l'avertir sérieusement… Quelle garce !
Un grognement plaintif dans leur dos fit tourner la tête aux deux jeunes filles. Odd s'était adossé contre le mur du fond de la salle, le visage blême et la main crispée sur son ventre. Il n'avait pas l'air bien en point depuis son retour forcé dans les scanners, même si son état nauséeux s'atténuait progressivement au fil du temps.
Yumi hésita un instant, indécise. Depuis son poste, elle n'avait pas perdu une miette de l'échange virulent entre Eva et ce Mathieu qu'elle connaissait à peine. Aussi ne pouvait-elle s'empêcher de se demander si elle devait faire part des doutes de l'américaine à son ancien ami du collège, ou au contraire les lui dissimuler. Elle sentait bien que toute cette histoire risquait de compliquer sérieusement les choses entre les trois adolescents et surtout d'endommager la cohésion de l'équipe, ce qu'il était préférable d'éviter !
Néanmoins, ce qui la préoccupait le plus étaient les derniers dires de Mathieu. Tout comme Eva, elle avait très bien compris que « l'ami » que le jeune homme prétendait vouloir sauver de la Green Phoenix comptait beaucoup plus que ce qu'il voulait bien admettre à ses yeux, et cela remettait entièrement en cause son point de vue ! Comment lui faire confiance maintenant qu'elle connaissait les véritables motifs concernant l'intégration de l'adolescent dans leur groupe ?
Avec un froncement de sourcils, la jeune fille se rendit soudain compte qu'elle était moins choquée par le coming-out spontané du nouveau venu que par lesdites raisons… Quoi qu'il en était, elle allait devoir se forcer à avoir une petit conversation avec Stéphanie (si ce n'était avec le principal concerné directement), histoire d'en avoir le cœur net.
Ce fut sur ces dernières pensées silencieuses que la porte du monte-charge coulissa soudainement dans un concert de chuintements, libérant un Mathieu plus livide que jamais qui semblait tenir difficilement sur ses jambes.
Stéphanie se précipita presque aussitôt pour l'épauler et le porter à moitié jusqu'au coin où se trouvait Odd, ce dernier adressant au jeune homme un regard inquiet.
Celui-ci grimaça en se laissant glisser à côté de lui, tous les muscles de son corps endoloris et avec la furieuse impression que l'ensemble de ses organes s'étaient déplacés. Au moins n'avait-il pas vomi cette fois-ci, c'était déjà un progrès…
- Désolé, souffla-t-il finalement après avoir repris légèrement son souffle, comment ça se présente sur Lyokô ?
- Ne t'inquiète pas, Aelita a eu le dernier Block au moment où celui-ci t'a touché, récapitula placidement Yumi, les yeux toujours rivés à la surface de l'écran principal, occupé aux trois quarts par une gigantesque représentation en fils de fer du territoire à la surface de laquelle deux petits points, jaune et vert respectivement, se déplaçaient, Eva et elle attendent juste un peu de voir si la Faille ne récidive pas avant de rentrer... Je pense qu'on a eu chaud pour cette fois ! Je lance le programme de rematérialisation…
Mathieu se laissa retomber contre le mur, soulagé, ses yeux clos en raison de la migraine qui commençait à poindre sous son crâne. Au moins son sacrifice avait-il servi à quelque chose…
Soudain, la raison pour laquelle il s'était laissé distraire lui revint à l'esprit et il ouvrit brusquement les paupières, surexcité, se relevant d'un coup. Des étoiles dansèrent devant son champ de vision et il chancela mais n'y prit pas garde, trop obnubilé par ce qu'il avait à dire.
- Les filles, Odd… Je crois que je sais ce que représente le symbole qui vous intriguait sur les monstres la dernière fois !
Trois paires d'yeux surpris se tournèrent vers lui, interrogateurs. Mathieu prit quelques instants pour se calmer avant de reprendre, d'un air grave.
- C'est un ange ! expliqua-t-il, monopolisant l'attention, la sphère au centre représente la tête, les arabesques sur le côté, les ailes et le petit croissant au dessus, l'auréole ! Si on n'y pense pas on ne le remarque pas mais en fait c'est assez ressemblant.
Yumi pianota un instant sur les touches du clavier et, l'instant d'après, la capture d'écran du symbole en question réalisée par Odd quelques semaines plus tôt apparue, permettant à tous de vérifier l'hypothèse de Mathieu.
- Maintenant que tu le dis c'est vrai… souffla, estomaqué, l'adolescent au béret violet en se décalant légèrement sur le côté afin de mieux voir, mais je ne vois toujours pas…
- Angel ! coupa Mathieu sans lui laisser le temps de réfléchir, c'est lui, j'en suis sûr !
- Attendez une minute… Qui ça ? questionna une Yumi un peu décontenancée par l'enchainement de pensées.
- Le mec de notre lycée qui a été enlevé par la Green Phoenix et qu'on cherche à libérer, Mathieu et moi, expliqua succinctement Stéphanie en s'adossant contre le dossier de la chaise montée sur rail, mais… Tu es sûr de ce que tu avances Mathieu ?
- Certain ! s'exclama-t-il tandis que la fatigue et la douleur provoquées par sa rematérialisation refluaient peu à peu sous le coup de l'adrénaline, je veux dire… Ça m'a sauté aux yeux quand j'ai vu ce Block, et ça expliquerait pas mal de choses en plus !
- Exact ! surenchérit une voix claire dans leur dos, attirant leur attention.
Aelita venait de faire coulisser la trappe menant à la salle des scanners et s'affairait à se hisser à l'intérieur de la pièce, précédée par un Eva à l'air légèrement nauséeuse. Apparemment Yumi avait profité du court moment que Mathieu s'était octroyé pour récupérer afin de rematérialiser les deux Lyokô-guerrières.
Le jeune homme cligna des yeux, surpris de revoir l'adolescente aux cheveux roses sans ses oreilles pointues et dans son corps de jeune femme. La transition entre le monde réel et virtuel était toujours aussi étourdissante pour lui !
- Si Mathieu a raison, je pense que le mode d'action de la Green Phoenix se fait de plus en plus clair, poursuivit la meneuse en hissant Eva à l'intérieur de la salle avant que celle-ci ne se dirige d'une démarche un poil trop titubante pour être honnête vers son petit ami, laissez-moi récapituler…
Elle inspira un grand coup avant de poursuivre, refoulant l'envie de vomir qui commençait à la gagner. Elle avait beau se forcer à faire bonne figure face au groupe, la matérialisation lui avait laissée une impression désagréable à elle aussi cette fois-ci. Il allait falloir qu'elle lance quelques tests depuis le Supercalculateur…
- Pour commencer on sait –enfin on suppose tout du moins- que la Green Phoenix a réussi à remonter l'ensemble de sa base de données pourtant supposée détruite par le Code Down, et à percer une brèche dans les défenses de Lyokô, entama-t-elle en énumérant sur ses doigts, concentrée, on sait aussi qu'elle nous envoie des monstres créés par XANA à la base afin de détruire l'intégralité du monde virtuel conçu par mon père et d'obtenir un accès direct à Carthage !
- ...Mais la signature numérique des monstres est différente de l'époque où ce XANA les envoyait, c'est ça ? poursuivit Stéphanie en produisant un effort de remémoration intense.
Aelita approuva d'un hochement de tête avant de continuer :
- Or, on sait aussi que la Green Phoenix a enlevé un jeune homme de notre âge prénommé Angel, que Mathieu et Stéphanie fréquentaient auparavant –elle prit bien soin de ne pas préciser les liens précis les unissant, ignorant que ceux-ci avaient été dévoilés quelques minutes plus tôt-, et ce pour une mystérieuse raison… Mais maintenant si on recoupe la théorie de Mathieu concernant le nouveau symbole des monstres et les autres données… !
Joignant le geste à la parole, elle croisa les doigts, le front plissé par une mine soucieuse.
- …Dans ce cas tout prend son sens ! acheva-t-elle plus sérieuse que jamais, son auditoire suspendu à ses lèvres. Que la Green Phoenix ait eu accès aux données des monstres de XANA n'est pas surprenant en soi, quand on sait que le programme multi-agent bogué de mon père s'était allié à eux l'année dernière. Il est logique de supposer qu'une trace numérique ait été conservée dans leur base de données… Cependant l'envoi de ces mêmes monstres dans le monde virtuel nécessite l'intervention d'un programme multi-agent en lui-même. Il serait impossible de les gérer avec précision depuis un simple ordinateur sans un intermédiaire numérique capable de prendre ses propres décisions face à une situation donnée, c'est une certitude. Et comme il était impensable de recréer quelque chose d'aussi instable et dangereux que XANA, je pense que la Green Phoenix a su trouver une toute autre alternative à ce problème…
- Attends une seconde !
Odd venait de se relever, les yeux écarquillé de stupeur, sous le regard surpris de sa petite amie. Il venait de comprendre où Aelita voulait en venir et cela ne lui plaisait pas le moins du monde.
- Tu n'es pas en train de nous dire que…?
- Malheureusement si, fit-elle tristement en passant une main dans ses longs cheveux roses, nerveusement, je pense qu'au lieu de recréer une forme d'intelligence artificielle pour envoyer et contrôler les monstres, la Green Phoenix a préféré se servir d'un véritable sujet intelligent cette fois-ci… Ils ont remplacé directement XANA par Angel !
Un silence glacé s'installa dans la pièce alors qu'Odd se laissait de nouveau tomber à terre, les jambes fauchées par la nouvelle. Eva fit mine de s'enlacer autours de lui mais il n'y prit pas garde, portant son regard en direction de Mathieu, assis un peu plus loin. Tout ce qui lui importait en cet instant précis était la réaction de son ami face à la nouvelle.
Celui-ci était désormais blême, figé sur place dans une attitude crispée. On l'aurait presque cru prêt à rendre son déjeuner tant il avait l'air mal en point, et cela n'avait rien à voir avec la dématérialisation cette fois-ci !
Inconsciemment, Odd ressentit brusquement le besoin d'enlacer le jeune homme pour le rassurer. De lui faire comprendre que tout allait bien se passer et qu'ils parviendraient à sauver Angel, quel que puisse être le prix à payer ! Il était prêt à tout en cet instant précis pour l'aider à ce sentir mieux.
L'attitude de son petit ami n'échappa pas à Eva qui se renfrogna, raffermissant sa prise autours de son bras. Pourquoi se souciait-il autant de Mathieu tout à coup… ?
- Mais… Comment c'est possible ? trouva enfin à dire Stéphanie après de longues minutes de silence tendu, je veux dire… Ils l'ont virtualisé lui aussi ? Et puis c'est un être conscient, non ? Il ne devrait pas se laisser faire comme ça !
Aelita prit le temps de soigneusement réfléchir avant de répondre, son cerveau cogitant ferme sous l'effet des dernières révélations. Tout cela était des plus inquiétants !
- Je pense qu'ils l'ont effectivement envoyé dans leur propre Supercalculateur, fit-elle finalement, le regard perdu dans le vide, songeur, peut-être pas sous une forme virtuelle comme nous mais au moins afin d'avoir accès à son esprit… Après tout un cerveau humain n'est rien de plus qu'une colossale banque de données, ils avaient tout à gagner à utiliser Angel plutôt qu'une simple IA ! Après, de là à savoir s'il est encore conscient où s'ils ont modifié quelque chose au moment de la virtualisation pour…
- Aelita !
Odd venait de l'interrompre brusquement, les yeux rivés sur Mathieu. Stéphanie suivit son regard et comprit presque aussitôt. Le jeune homme avait les yeux fixés sur le sol et semblait littéralement prêt à imploser sous la pression. Ses poings étaient serrés si fort sur ses genoux que leurs jointures paraissaient blanches et tremblaient légèrement sous l'effet de sa fureur et de sa peine contenues.
L'adolescente aux cheveux roses se sentit soudain extraordinairement coupable. Perdue dans ses explications, elle n'avait pas réfléchi à l'impact que celles-ci pourraient avoir sur Mathieu !
- Quelle idiote, jura-t-elle malgré elle en se frappant le front, énervée contre elle-même, excuse-moi Mathieu, je ne voulais pas…
- Ne gaspille pas ta salive Aelita.
Le jeune homme aux yeux bleus avait parlé d'une voix légèrement fêlée qui ne trompait personne. Malgré tous ses efforts pour paraitre fort, il était clair que la nouvelle avait sévèrement ébranlé Mathieu.
« Rien d'étonnant, songea Yumi, que l'explication d'Aelita avait passablement retournée également, s'il aime vraiment ce mec il est normal que ça lui face un choc… Si j'apprenais que William était prisonnier au sein d'un ordinateur sous je ne sais quel forme à l'état de simple programme, réduit à diriger d'autres programmes sous les ordres d'une quelconque organisation sans même pouvoir lutter, je ne réagirais pas différemment ! ».
Mathieu souffla un grand coup, tentant tant bien que mal d'évacuer la sensation oppressante qui lui enserrait l'estomac.
- Il faut qu'on les arrête… parvint-il enfin à lâcher au bout de plusieurs veines tentatives pour se calmer sous le regard incertain de ses camarades, la Green Phoenix… Ils ne peuvent pas faire ça aux gens et s'en tirer impunément ! C'est…
Une main douce s'apposa soudain sur son épaule, le faisant sursauter. Odd s'était rapproché de lui dans son dos et le fixait désormais de son regard gris profond, sous l'œil incendiaire de son américaine de petite amie. Pas une trace de doute n'y était lisible. Rien qu'une puissante compassion et détermination qui agit sur Mathieu comme un électrochoc.
- On les aura Mathieu. fit-il simplement sans détourner le regard, l'air sérieux comme jamais, et on libérera Angel de leur emprise, je t'en fais la promesse !
Aelita approuva d'un signe de tête grave derrière eux, sous les visages approbateurs de Stéphanie et de Yumi.
Seule Eva eut une moue boudeuse en se renfrognant dans son coin. Cet ensemble de belles paroles mièvres à souhait lui donnait la nausée... Comment son petit-ami pouvait-il être assez bête pour garantir une chose à ce point irréaliste ? Elle-même, qui n'était pas dans le groupe depuis si longtemps que cela, savait que cet Angel n'avait que très peu de chance de s'en sortir, à supposer que leur hypothèse fut juste…
Involontairement, son regard d'un turquoise très clair croisa celui, bleu et triste, de Mathieu. D'un coup, la jeune fille se sentie submergée par le flot d'émotions chamboulées lisibles en leur sein. Il était bouleversé, c'était évident. Eva ne put pas résister plus longtemps face à une telle détresse et céda soudain à son tour, soupirant face à sa propre faiblesse.
- Ouais, on fera de notre mieux en tout cas... marmonna-t-elle en levant légèrement le poing en l'air, un léger sourire qui se voulait encourageant sur ses lèvres.
Après tout, maintenant qu'elle avait la certitude que ce petit homo ne s'intéressait pas à son Odd, elle pouvait bien se permettre un petit élan de sympathie, non ?
La nuit était tombée depuis un moment désormais. Au sein d'une allée peu éclairée, une vieille femme marchait d'un pas étonnamment vif pour son âge, emmitouflée dans un lourd manteau sombre afin de se protéger du froid mordant amené par le vent qui soufflait fort ce soir-là. Elle serrait contre elle quelque chose de rectangulaire que l'obscurité ambiante dissimulait aux regards indiscrets. Au loin, résonnait le bruit de la circulation des quelques rares voitures à encore rouler en ville à cette heure tardive.
Passant sous un lampadaire grésillant, auréolé de moucherons, la femme d'âge mur pressa le pas, jetant un coup d'œil furtif autours d'elle au passage. Il fallait qu'elle se dépêche ! Plus elle trainait ainsi à découvert dans une ruelle aussi peu fréquentée et plus elle était en danger… D'autant plus après ce qu'elle venait de découvrir !
« Il faut que je le dise à Anthéa… Coûte que coûte ! » songea-t-elle avec anxiété en traversant la route d'une démarche sèche, « il faut qu'elle sache… ».
La femme s'immobilisa soudain, glacée. Face à elle, deux hautes silhouettes sombres venaient de se dresser, s'avançant lentement dans sa direction.
Le plus innocemment possible, elle fit volte-face afin de revenir sur ses pas… Pour se retrouver nez à nez avec un canon de révolver pointé droit sur sa tempe !
Un frisson de terreur la parcourut alors que l'homme qui la surplombait, le doigt sur la gâchette, émettait un petit rictus moqueur.
- Vous allez quelque part, Major Steinback ? questionna-t-il d'un ton mielleux tandis que ses deux comparses le rejoignait, encerclant la veille femme qui s'était instinctivement recroquevillée sur le précieux objet qu'elle transportait.
Celle-ci fit mine de ne pas paraitre surprise de se voir ainsi interpellée sous ce nom, qu'elle n'avait plus employé depuis des années. Inutile de jouer la comédie après tout, elle savait très bien qui étaient ces messieurs… Ou plutôt pour qui ils travaillaient !
- Elle est en vie n'est-ce pas ? fit-elle d'un ton précipité tandis qu'une sueur froide lui glaçait l'échine, pourquoi vous a-t-elle réunis de nouveau ? Quel est son but ?
Un sifflement moqueur s'éleva de la bouche de l'homme qui la tenait en joue.
- Plutôt futée pour une retraitée, commenta-t-il sans répondre en baissant légèrement le canon de son arme pour le pointer cette fois sur la poitrine de la femme, dommage que tes efforts s'arrêtent ici…
Elle ferma les yeux alors que l'homme pressait la gâchette, résignée. Le bruit de la détonation sembla résonner longtemps à ses oreilles, tel un écho lointain, tandis que la balle lui transperçait le cœur, déchirant les chairs et faisant gicler le sang. Elle avait échoué…
Alors que le souffle de la vie s'échappait de ses lèvres entrouvertes et qu'elle glissait à terre sur la chaussée, foudroyée, une ultime image s'imposa à ses prunelles, déjà vitreuses. Celle d'un petit groupe d'adolescents riant à pleine dents : un groupe de collégiens qu'elle avait bien connu auparavant... Un petit blond à lunettes à l'air coincé, une jeune fille aux traits asiatiques, un sportif a l'air renfrogné, un garçon au look excentrique tout de violet vêtu et, enfin, une adolescente a l'air candide et aux cheveux roses, dont les grands yeux verts semblaient la fixer avec innocence.
- Ae…Lita… murmura une dernière fois Suzanne Hertz avant de s'éteindre, seule au milieu de nulle part, son corps sans vie plongé dans la pénombre.
Lentement, une flaque écarlate se rependit sur le sol, imbibant le dossier qu'elle avait laissé tomber au passage dans une marre de sang.
Tadaaaa~ fin du chapitre 21 ! Je sais, je suis un horrible sadique, détestez-moi o/ !
Histoire de partir sur une note un peu plus positive, je vous propose deux nouvelles illustrations estivales de New Wave ! Cette fois-ci, ce sont Odd et Aelita qui sont à l'honneur o/ Enjoy !
Spoiler
Oui bon colo un peu dégueulasse mais j'suis allé vite et ça passait bien sur fond clair T__T ! J'espère qu'ils vous plaisent quand même ._.
Waouh O__O... Zéphyr et Café Noir, si je m'attendais à de tels commentaires !! Ça me touche vraiment énormément que vous ayez pris le temps de me donner votre avis à ce point >_< merci beaucoup ! Je ne pense pas mériter de tels éloges mais merci >w< !
Zéphyr --> Non Angel n'a pas un début de calvitie XDD le pauvre, a 16 ans quand même ! C'est juste que j'ai tendance à dessiner de très très grands fronts par moment, mon trait étant encore largement influencé par Code Lyokô. Sinon je suis content que mon style te plaise autant X3 ainsi que mes OC. Je dois avouer avoir une préférence pour Stéphanie moi aussi~ content aussi de voir que tu arrives à suivre l'histoire même sans avoir lu les romans. A la base, j'avais écris cette fiction dans l'optique de même un novice à l'univers de CL puisse la lire, donc ça me fait plaisir de voir que l'objectif a été atteint X3 !
Pour mon interprétation des personnages existants eh bien je dois avouer que j'ai toujours vu Aelita comme une fille très forte et Jérémie comme un grognon (exception faite de la saison 1) XD raison pour laquelle leur version de CLE ne me dérange pas d'ailleurs. Je regrette de ne pas avoir pu plus exploiter les personnages d'Ulrich et de Yumi par contre, et ne parlons pas de William T__T trop dur de gérer tout le monde !
Eva... Son cas est étrange parce que je souhaitais en faire un personnage centrale et que je l'appréciais beaucoup à la base ! Au final elle se retrouve à jouer les pimbêches... je suppose que le personnage s'est imposé à moi plus qu'autre chose XD !
Sissi parait plus attachante aussi parce que je lui avais prévu un rôle central également qui est finalement passé à la trappe, faute de pouvoir mettre au point toute son histoire sans dériver du scénar' de base.
Content de voir aussi que mes dessins te plaisent ! La plupart datent un peu à vrai dire donc je suis loin de tous les apprécier mais bon, ça fait plaisir de sentir que son boulot plait X3 merci encore pour tout !
Café Noir --> Mathieu avec un seul t pour le coup XD les gens ont du mal j'ai l'impression avec ça ! Content de voir que tu apprécies la façon dont je prends mon temps parce que vue la taille de ma fanfiction, va falloir t'accrocher avant d'en voir le bout XDD... Moi-même je ne pensais pas qu'elle me prendrait tant de temps alors que j'ai la fin en tête depuis des lustres !
Alors Mathieu te plait *o* ? J'suis content, j'avais peur d'avoir fait un personnge principal un peu trop effacé >_< ! Il faut que je travaille dessus encore un peu je pense...
Purée je suis surpris que mes couples te plaisent autant XD ! C'est rare de voir des fans de William/Yumi ou Ulrich/Sissi ! J'avais envie d'exploiter quelque chose de différent avec eux pour cette fois. Par contre en vrai j'ai beaucoup de mal à comprendre le sentiment amoureux donc ça me fait plaisir de voir que j'arrive quand même à transmettre des histoires touchantes X3 merci beaucoup !
Et promis, je vais me calmer sur l'auto-flagellation XD ! Même si je ne suis pas fana de mes créas' !
Une dernière fois, merci pour vos commentaires à tous les deux ! Ça me motive à continuer, vous ne pouvez pas savoir à quel point X3 !
Du coup j'enchaine directement sur le Chapitre 20, revu et corrigé de New Wave ! Bonne lecture~
Spoiler
Chapitre 20 :
Épisode 119 : Lapin VS Rockeuse_
Odd contemplait, fasciné, le spectacle qui se déroulait devant ses yeux. Flottant à plusieurs dizaines de mètres du sol instable de Lyokô, ses ailes écartées derrière son dos pulsant d'une étrange lueur rose, les yeux clos, Aelita se concentrait face à la Faille, les bras en croix, doigts tendus.
La Brèche en question semblait encore plus repoussante vue de près, semblable à une gigantesque plaie purulente recouvrant telle une énorme cloque tout un pan de la Voûte Céleste. Les quelques fichiers informatiques parsemant le ciel tels autant d'étoiles qui se risquaient à l'approcher mourait en grésillant en une fraction de seconde, littéralement carbonisés.
Cependant, sous l'injonction de d'Aelita, la Faille semblait avoir ralentit son écœurante pulsation, ne battant plus que faiblement, un halo tirant sur le blanc émanant de sa surface.
Tout autour, des dizaines de fichiers informatiques tourbillonnaient désormais dans un étrange ballet de chiffres et de codes complexes dont Odd ne saisissait rien, défilant devant l'elfe rose qui ne leur adressait pas même un regard, trop concentrée sur sa tâche pour se laisser distraire par le spectacle.
Malgré ses pouvoirs impressionnants en temps que Gardienne de Lyokô, analyser une portion de l'univers virtuel aussi importante sans interface intermédiaire était une tâche pour le moins éprouvante et on pouvait presque sentir sa barre d'énergie descendre à mesure qu'elle farfouillait à l'intérieur des programmes corrompus.
De temps à autres un nombre, une ligne de code s'illuminait de rouge à la surface des fichiers informatiques extraits de la Faille. Ils se décollaient alors subtilement, venant prendre place bien sagement devant Aelita.
Odd n'osait pas ouvrir la bouche, de peur de la déconcentrer. Le spectacle était pour le moins impressionnant ! S'il connaissait depuis longtemps l'influence que pouvait avoir son amie sur l'univers de Lyokô, l'ayant déjà vu créer ou supprimer d'un simple froncement de sourcil des pans entiers de décors, la voir ainsi en action avait toujours quelque chose de mystérieusement fascinant.
Une sorte d'étrange chant synthétisé à la limite de l'irréel, semblant surgir de nulle part, accompagnait l'étrange ballet des fichiers informatiques, évoquant un chœur d'ange.
Brusquement, Aelita rouvrit ses immenses yeux verts et l'opération s'interrompit, les fichiers informatiques implosant en une myriade de pixels d'argents. Seules restaient en face d'elle les nombreuses lignes de code solitaires rouges qu'elle en avait extraites, tourbillonnant lentement sur elles-mêmes, comme emprisonnées au sein d'une bulle invisible.
Épuisée, la jeune fille se laissa lentement descendre jusqu'à toucher le sol, précédée par les lignes de code, la suivant avec grâce et volupté. Odd lui emboita le pas sur son Overwing, posant pied à terre au moment précis où Aelita rétractait ses ailes d'une simple impulsion mentale.
- Je dois créer… Un terminal… souffla-t-elle, à bout de force, en levant une de ses mains numériques vers une légère surélévation, non loin de là.
Elle ferma les yeux et le chant s'éleva de nouveau, plus ténu cette fois-ci. Presque aussitôt, les contours pixelisés de ce qui ressemblait à une console se dessinèrent sur l'emplacement visé avant de se laisser couvrir lentement d'une texture semblable à celle des blocs constituant le sol de l'univers virtuel, à ceci près que leur teinte semblait plus claire, inconsistante.
Enfin, elle abaissa la main et pour la seconde fois le chant s'interrompit. Un écran en hologramme translucide s'alluma en grésillant à la surface du terminal ainsi synthétisé et Aelita y projeta d'un mouvement brusque les lignes de code qui s'y incrustèrent aussitôt, reprenant la teinte blanchâtre qu'elles arboraient à l'origine, s'alignant docilement à sa surface.
- Ouf ! lâcha-t-elle enfin, laissant ses jambes se dérober sous son poids dans un soupir de soulagement, je pensais ne pas y arriver ! Je crois que je n'avais jamais poussé mes pouvoirs aussi loin… C'est épuisant de farfouiller dans les codes sources de façon virtuelle ! Si j'avais eu le choix, je l'aurais bien fait à l'abri derrière l'écran du Supercalculateur, mais bon…
- T'as assuré princesse, affirma Odd en lui administrant une petite tape sur l'épaule, accompagnée d'un de ses fameux sourires, sérieusement, je ne savais même pas que tu pouvais en faire autant ! Tu étais… Grandiose !
L'elfe rose eu une petite grimace.
- Disons que je ne ferais pas ça tous les jours, et que les améliorations de Jérémie y sont pour beaucoup, répliqua-t-elle en toute honnêteté, d'ordinaire j'aurais surement activé une Tour depuis le Supercalculateur histoire d'avoir accès aux données de la Faille, mais étant donné l'état de Lyokô je doute qu'il en reste une seule… Il faudra attendre le reboot complet du Supercalculateur pour pouvoir utiliser ce genre d'opération de nouveau !
Ragaillardie, elle se redressa, tournant sa tête en forme de cœur en direction de la Voûte Céleste, à la surface de laquelle la Faille continuait de pulser faiblement.
- J'ai terminé Yumi ! lança-t-elle tout en se positionnant en face du terminal, prépare-toi à réceptionner les données !
La voix déformée de la japonaise lui répondit par l'affirmative et Aelita commença à transférer l'ensemble des informations sur la mémoire du Supercalculateur, manipulant habillement les fenêtres à la surface de l'écran tactile d'une simple pression.
Odd, qui commençait à trouver le temps long, en profita pour s'assoir sur l'Overwing qui s’affaissa de quelques centimètres sous son poids, laissant sa queue pendre béatement sur le côté.
- Au fait Yumi, balança-t-il tandis qu'Aelita achevait la procédure, une barre de téléchargement s'affichant à la surface de l'écran, comment ça se passe du côté de Mathieu et d'Eva ?
Mathieu haletait, le corps parcourut d'étincelles. Eva l'avait pourchassé sur une bonne partie du territoire et ses Points de Vie étaient au plus bas. Malgré les capacités physiques hors du commun que lui conférait son corps virtuel, il devait bien reconnaitre que le rythme de l'américaine était un peu trop rapide pour lui !
Profitant d'une nouvelle rafale de notes de musiques explosives ayant littéralement fait volé en éclats les arbres de cristal du décor, il avait réussi à se réfugier entre deux surélévations de blocs, à l'abri du champ de vision de la rockeuse déchainée… Du moins pour l'instant !
- Tu comptes rester planquer encore longtemps !? résonna la voix de sa poursuiveuse à seulement quelques pas de lui, curieusement surexcitée, allez ! Viens prendre ta raclée qu'on en finisse !
« Saleté », ne put-il s'empêcher de penser avec un rictus hargneux tout en se recroquevillant de plus belle sur lui-même, veillant bien à ne pas faire dépasser ses oreilles de lapin, « et maintenant qu'est-ce que je fais ? ».
Riposter. Telle était la réponse qui lui paraissait la plus logique. Cependant il ne maîtrisait pas suffisamment correctement son étrange armement pour foncer tête baissée, il lui fallait réfléchir à une stratégie…
Priant pour que le bruit n'attire pas Eva, il pressa le bouton de la sphère à son poignet droit et, une nouvelle fois, les sept segments à sa surface s'illuminèrent de bleu. Il renouvela l'opération sur sa seconde arme et le phénomène se reproduisit presque instantanément. Parfait, cela confirmait la méthode d'activation…
« Bon, et maintenant… ? » songea-t-il alors que les pas d'Eva se rapprochaient de plus en plus de sa cachette, « la dernière fois, face au Kankrelat, la sphère s'est ouverte toute seule et a absorbé le laser… Alors peut-être qu'avec Eva… ? »
Saisit d'une brusque inspiration, il bondit soudain hors de son abri improvisé, agitant la main en direction de l'américaine.
- Heeey ! hurla-t-il, bien conscient que ce qu'il tentait de faire relevait du suicide, je suis là, regarde !
Folle de rage de voir son adversaire la narguer de façon aussi ostentatoire, la jeune fille fit aussitôt volte-face, ouvrant la bouche dans un concert de cris surhumains, le bombardant de jets de musique colorés.
Au prix d'un effort considérable, luttant contre son instinct qui lui hurlait de prendre la fuite, Mathieu parvint à se camper sur sa position avant de tendre ses bras droit devant lui, plissant ses yeux d'appréhension.
A la grande surprise des deux adolescents, les sphères métalliques se scindèrent subitement en deux, avalant d'une traite les notes multicolores qui tourbillonnèrent un instant au sein de la coque, avant de disparaitre à l'intérieur dans un petit « clac » sonore. Les armes venaient de se refermer sur les projectiles d'Eva !
- Quoi !? glapit l'américaine qui ne parvenait pas à en croire ses yeux, qu'est-ce que...?
Mathieu paraissait tout aussi surpris que son plan ait fonctionné. Il contemplait d'un air ahuri les deux sphères métallisées dont trois des segments bleus s'étaient désormais illuminés de rouge sur chacune. Il commençait à comprendre comment ses armes fonctionnaient désormais…
Un nouveau cri étrange déchira l'air le tirant de ses pensées, et Mathieu eut tout juste le temps de relever la tête pour voir une note d'un rouge sanguin lui frôler la joue, faisant voler une des oreilles de lapin de sa capuche sur son passage.
- Ne crois pas t'en tirer à si bon compte, ragea Eva qui s'avançait en courant vers lui désormais, le visage déformé par la colère, prend ça !
Trois jets de lumière de différentes nuances de vert jaillirent de sa bouche, fusant vers Mathieu à toute allure. Plus confiant désormais, celui-ci leva sa main droite et, de nouveau, la sphère s'ouvrit en un petit déclic, absorbant automatiquement les notes.
- Ah oui ? ricana-t-il alors que son arme se refermait, laissant désormais voir six segments rouges sur sept, j'aimerais bien voir…
Il n'eut pas le temps de terminer sa phrase qu'Eva sautait sur lui, lui administrant un coup de pied colossal en pleine face. Le jeune homme vola littéralement en l'air, s'écrasant plusieurs mètres plus loin dans une position des plus pitoyables. Pour la centième fois depuis qu'il avait été virtualisé sur Lyokô, l'adolescent remercia son corps virtuel de ne pas ressentir la douleur.
- Bon, c'est noté… souffla-t-il en se redressant avec difficulté, ne plus crâner comme un idiot…
De justesse, il parvint à contrer une énième note explosive, manquant de tomber à la renverse. Eva n'avait pas attendu qu'il récupère pour contre-attaquer.
- Ça ne sert à rien ! répliqua-t-il alors qu'elle criait de nouveau, propulsant trois nouveaux jets musicaux vers lui, je peux absorber tout ce que tu m'env…
Mais à sa grande surprise, au lieu de s'ouvrir de nouveau, la sphère qu'il avait levée en l'air se prit de plein fouet les trois rayons, des myriades d'étincelles explosant avec fracas à sa surface lui procurant une désagréable sensation de picotement le long du bras.
- C'est quoi ce bordel !? jura-t-il en constatant que l'ensemble des segments de son arme venait de virer de nouveau au bleu.
- Punaise, mais fait gaffe un peu, Mathieu ! Tu viens de perdre 5 Point de Vie, là ! tempêta la voix de Stéphanie en arrière-plan.
-Stéphanie, j'essaye d'enregistrer les données transmises par Aelita ; alors calme-toi un peu ! maugréa celle de Yumi en réponse, curieusement lointaine. Son amie avait du littéralement lui arracher le casque des oreilles !
Mathieu s'était remis à courir, son cerveau carburant à toute allure, canardé des tirs musicaux d'Eva, sur ses talons. Il lui fallait une idée et vite ! Sinon, au rythme où se déroulaient les choses, il n'allait pas faire long feu face à la Lyokô-guerrière expérimentée !
Le combat les avait tous deux rapprochés de la sphère centrale effondrée sur elle-même qui les surplombait désormais de sa masse imposante. Mathieu eut tout juste le temps de constater qu'il était curieux qu'un volume de cette dimension ne projette pas d'ombre sur eux avant qu'une nouvelle note colorée de jaune ne le frôle, lui ôtant rapidement toute envie de se pencher sur les mystères du monde virtuel. Pour le moment, il devait surtout trouver un moyen de se cacher !
Fort heureusement, le fait de devoir autant crier pour attaquer ralentissait Eva qui ne pouvait pas suivre le rythme du fuyard devant elle, et plusieurs dizaines de mètres les séparaient désormais, mais plus pour longtemps, il en avait peur.
C'est à ce moment-ci qu'il le vit. Quelques pas devant lui, se trouvait une sorte de puit béant formé par l'enfoncement de plusieurs blocs successifs dans le sol. Il n'hésita pas longtemps et s'y précipita, esquivant de justesse au passage un jet de notes de musique bleues qui manquèrent d'atteindre ses oreilles proéminentes, décidément peu pratiques. Cela n'allait certes pas lui permettre d'échapper à Eva mais il allait au moins pouvoir gagner un peu de temps pour réfléchir. Du moins jusqu'au moment où elle atteindrait son nouvel abri…
« Trouve une solution ! », réfléchit-il très vite en se triturant nerveusement les oreilles, « tes armes doivent bien avoir une autre utilité qu'absorber les attaques ! ».
Il interrompit le cours de ses pensées en posant son regard sur la sphère à son poignet gauche, dont trois segments étaient toujours illuminés de rouge. Bon, il avait saisi le principe… Chaque sphère avait une capacité de stockage limitée par les sept segments à leur surface et, si par hasard il absorbait un tir de trop, il y avait surcharge et il perdait des Points de Vie ainsi que tous les tirs emmagasinés… Voilà qui lui paraissait singulièrement peu avantageux !
« Si c'est le cas je dois pouvoir renvoyer les coups, c'est forcé ! » raisonna-t-il, plus pour se rassurer qu'autre chose, « reste à trouver comment ! ».
- Cesse donc de te cacher une bonne fois pour toute, et viens te battre ! retentit soudain la voix d'Eva au dessus de lui, le faisant sursauter.
Elle n'était plus loin désormais et le bruit de ses pas se rapprochait dangereusement. Elle ne se pressait pas, savourant chaque seconde précédant sa victoire imminente.
- Ça t'apprendra à tourner autours de mon Odd ! ne put-elle se retenir de cracher alors que le trou dans lequel Mathieu venait de se dissimuler n'était plus qu'à quelques mètres d'elle.
- Mais jamais elle se tait la blondasse ! éructa soudain la voix de Stéphanie dans le fond, dépêche-toi de lui faire morde la poussière à cette pimbêche, Mathieu !
- Shut up ! s'énerva à nouveau la pimbêche en question en tournant son regard empli de colère en direction du ciel parcouru de fichiers informatiques, c'est entre ton pote et moi cette histoire !
Mathieu réagit au quart de tour. Eva venait de baisser sa garde pendant une fraction de seconde, c'était le moment ou jamais d'en profiter ! D'un bond qui n'aurait certainement pas été possible sur Terre, il jaillit de son antre, sa main gauche pointée vers son adversaire. Ce fut comme un déclic dans son esprit, tout s'enchaina très vite. L'adolescente eut à peine le temps de se retourner, surprise, en direction de Mathieu que la sphère à son poignet s'ouvrait en un déclic métallique. D'un seul coup, une de ses propres notes explosives en jaillit à toute allure, fusant à travers le territoire. Elle ne put qu'ouvrir la bouche de surprise avant de se faire percuter de plein fouet par le rayon coloré, se faisant littéralement propulser en arrière sous la puissance de l'impact.
Mathieu avait l'air totalement déconcerté, fixant d'un air ahuri la sphère qui venait de se refermer à son poignet. Seuls deux segments sur sept étaient illuminés de rouge désormais. Il avait enfin compris comment son arme fonctionnait ! Non seulement elle était capable d'absorber les tirs ennemis, mais également de les stocker et de les renvoyer d'une simple injonction mentale !
« Une chance que j'ai vu juste ! » ne put-il s'empêcher de penser, subitement remotivé à bloc.
Au loin, Eva écumait de rage, se relevant difficilement, son ventre crachant des étincelles bleutées. Elle connaissant la puissance de ses attaques, le coup avait dû lui faire perdre au minimum une vingtaine de Points de Vie, si ce n'était plus ! Cette fois-ci c'était la guerre !
- You gonna pay for that, you fuckin' faggot ! s'exclama-t-elle en se ruant de nouveau vers lui, oubliant de parler français au passage sous le coup de la colère d'avoir été ainsi humiliée.
Mathieu réagit au quart de tour et une seconde fois une note de musique colorée jaillit de son arme, ratant Eva de peu qui, prévoyante, s'était jetée en avant de justesse pour l'esquiver. L'adolescente exécuta un magnifique roulé-boulé au sol avant de se redresser d'un coup, décochant un savant coup de pied sauté en direction du jeune homme-lapin qui vola en l'air, surpris par le coup.
- Tu t'attendais à ce que je te balance une note de musique peut-être ? ricana-t-elle alors qu'il s'écrasait un peu plus loin, manquant de s'empaler sur un arbre du décor, je ne suis pas assez stupide pour recharger ton arme et, contrairement à toi, je sais me battre au corps à corps !
Mathieu jura : elle avait vu juste ! Si elle ne l'attaquait pas avec ses cris, il était impuissant face à elle. Et il ne lui restait plus qu'une seule recharge qui plus était… Autant dire qu'il était mal parti !
Eva restait sur ses gardes quant à elle. Elle avait beau savoir qu'elle avait l'ascendant, la situation pouvait très bien se retourner contre elle si son opposant parvenait à l'atteindre avec son dernier coup, l'obligeant ainsi à riposter ! Elle devait bien reconnaitre qu'elle l'avait sous-estimé ou que, tout du moins, elle n'avait pas suffisamment bien évalué la possibilité qu'il puisse apprendre à maîtriser ses aptitudes de Lyokô-guerrier aussi rapidement !
- J'aimerais bien que tu m'expliques ce que je t'ai fait au juste ! balança Mathieu tout en veillant à garder ses distances, tentant de gagner du temps.
- Ne fait pas l'innocent ! éructa l'américaine, piquée au vif, je vois bien la façon dont tu regardes mon Odd ! A quel point tu passes du temps avec lui…
- Qu'est-ce que tu veux dire… ?
Mathieu venait de baisser les bras, déconcerté. Eva ne se gêna pas pour en profiter. Un simple cri surhumain résonna et l'adolescent n'eut pas le temps de voir la note explosive le faucher. Il s'écroula pour la énième fois au sol, mais n'eut pas le temps de se relever cette fois-ci. La petite amie d'Odd était déjà sur lui, le plaquant au sol de sa botte en cuir virtuel compensée, le dominant de toute sa hauteur, le regard plus froid que jamais.
- Tu as très bien compris ! siffla-t-elle en se penchant vers un Mathieu trop choqué pour répliquer, qui est-ce que tu crois tromper au juste ? Ça se voit comme le nez au milieu de la figure que tu es gay… Tes manières, ta façon de suivre mon mec des yeux, ton stupide embarras face à un mec un peux sexy... J'avais l'habitude d'en voir des pédales dans ton genre aux USA, et laisse-moi te dire que je ne suis pas du genre à les laisser tourner autours de mon copain sans réagir, pigé !?
Ce fut comme une douche glacée pour Mathieu. Eva était au courant. Elle savait pour son seul et unique secret malgré tous les efforts qu'il avait déployé pour le dissimuler depuis l'incident de Sainte Bénédicte.
Une affreuse idée lui traversa soudain l'esprit. Si la peste américaine avait été capable de deviner son homosexualité, c'était probablement le cas d'autres élèves à Kadic. Et si le scénario recommençait ? Et si cette haine qu'il avait connue il y avait seulement quelques mois de cela recommençait subitement ? Il ne pourrait le supporter…
Pendant un instant le regard doré si plein de cette même haine qu'Angel avait posé sur lui ce fameux soir où, sous l'effet de l'alcool, il l'avait embrassé, refit surface dans sa mémoire.
Mais soudain, pour la première fois se superposa à ce regard une paire d'iris d'un gris perlé pétillant et Mathieu se sentit étrangement apaisé.
Odd l'avait accepté tel qu'il était lui, sans se poser plus de questions que cela. Et il n'était pas le seul ! Aelita avait également tout fait pour protéger son secret en le soutenant du mieux qu'elle le pouvait, et Stéphanie n'avait pas hésiter à franchir les kilomètres qui les séparait et à quitter sa vie à Sainte Bénédicte pour lui apporter son soutien ! Il avait des amis désormais, de véritables amis sur qui il pouvait compter. C'était un sentiment étrange que de ne plus se sentir seul au monde et abandonné de tous. Il avait encore du mal à saisir toutes les nuances de cette amitié nouvelle, mais une chose était sûre désormais : il n'était plus seul !
Même s'il venait à lui arriver de croiser de nouveau la haine dans le regard de ses condisciples, il savait qu'il existait au moins quelques personnes pour lesquelles il ne serait jamais considéré comme une aberration de la nature. Non sans surprise, il se rendit compte que lui-même avait fini par ne plus se désigner comme une erreur, un être raté.
Et il n'allait plus laisser le plaisir aux autres de le malmener aussi facilement pour cette différence qu'il ne pouvait contrôler.
-TU PEUX RÉPÉTER, ESPÈCE DE SALOPE !? crachait la voix de Stéphanie, visiblement folle de rage, à travers le micro du Supercalculateur, étonnement distante à ses oreilles, TU CROIS VRAIMENT POUVOIR INSULTER MATHIEU COMME CA ET T'EN TIRER A BON COMPTE !? REVIENS UN PEU SUR TERRE QUE JE T'EXPLIQUE MA…
- Laisse Stéphanie…
Eva, qui s'apprêtait à répliquer furieusement, haussa un sourcil surpris. Toute trace de doute venait de disparaitre du regard de Mathieu, son bras gauche nonchalamment levé dans sa direction. Elle ne comprit que trop tard ce qu'il comptait faire et n'eut pas le temps de s'écarter. Le rayon musical coloré fusa de la sphère au poignet de Mathieu d'un seul coup, percutant violemment Eva qui se retrouva propulsée en arrière sous l'impact, laissant des étincelles bleutées sur son sillage.
- Qu'est-ce que…? Ragea-t-elle en se redressant sur un coude, furieuse.
Mathieu avait profité de sa déroute pour se relever et c'était désormais à lui de la toiser. Cependant, aucune colère n'était lisible sur son visage, curieusement lisse à la lumière du ciel numérique. Il arborait une expression neutre, ne laissant transparaitre aucune tristesse. Rien de plus que la détermination la plus pure et le plus simple… Une détermination différente de celle, presque maladive, qui l'animait par rapport à l'enlèvement d'Angel.
- Je me moque que tu n'apprécies pas ce que je suis, entama-t-il d'une voix monocorde. Un cri rageur d'Eva l'empêcha de poursuivre :
- Tu ne démens donc pas ! fulmina-t-elle après lui avoir balancé une note explosive qu'il évita aisément, tu es vraiment gay et tu t'intéresses à mon…
- Je ne veux rien à « ton » Odd ! trancha-t-il à son tour, une pointe d'agacement dans le ton de sa voix désormais, je l'aime beaucoup, c'est vrai, mais c'est seulement parce qu'il s'agit du seul garçon à m'avoir jamais accepté tel que je suis. C'est un type bien et il est avoir toi ! Jamais je ne trahirais sa confiance en essayant de m'immiscer dans votre couple, je tiens trop à son amitié pour quelque chose d'aussi futile ! Maintenant si tu n'es pas capable de comprendre ça, c'est ton problème…
Eva ne trouva rien à répondre, déconcertée. Elle ne s'était pas attendue à ce qu'un garçon en apparence aussi timide et renfermé que Mathieu puisse lui parler ainsi avec ses tripes de ce qu'il ressentait, et avec autant de facilité. Voir le chétif jeune homme se métamorphoser ainsi avait quelque chose de légèrement déroutant.
Même Stéphanie et Yumi –qui n'avait pas osé intervenir au cours de l'altercation même lorsqu'elle avait compris que tout cela avait dépassé le cadre du simple entrainement-, s'étaient tues sous le choc, tendant une oreille attentive.
- Je ne suis pas amoureux de ton petit-ami, poursuivit Mathieu, une infinie tristesse désormais lisible dans ses yeux, il y a un autre garçon qui compte plus que lui dans ma vie. Qui compte plus que toutes les personnes auxquelles je tiens et pour qui je serais prêt à tout sacrifier. Même si cela veut dire m'impliquer dans une histoire de monde virtuel abracadabrantesque ou devoir apprendre à me battre.
Une lueur de compréhension s'alluma soudain dans le regard de l'américaine. Elle venait de saisir où sous vis-à-vis voulait en venir.
- Attends, tu veux dire que la personne que tu aimes c'est ce type ? lâcha-t-elle d'un air ahuri qui produisait un contraste étrange avec son visage si séduisant, celui qui était dans ton lycée et que la Green Phoenix aurait enlev-…
Sa phrase fut soudain coupée par une violente détonation qui résonna à travers tout le territoire, faisant voler en éclat les derniers arbres de cristal présents à sa surface.
Mathieu et Eva restèrent interdits, levant lentement les yeux en direction de la Faille dont la membrane semblait désormais incandescente. L'adolescent fronça les sourcils. Il reconnaissait ce phénomène…
Une nouvelle pulsation ébranla brusquement l'énorme plaie, se propageant avec plus de violence encore à travers Lyokô. Mathieu perdit l'équilibre et s'affala de tout son long sur Eva qui n'eut que le temps de crier avant de se retrouver littéralement écrasée sous lui. Elle en aurait eu le souffle coupé si elle avait été capable de respirer sous sa forme virtuelle !
- Putain Mathieu, fais gaf-… !
Mais avant qu'elle ait eu le temps d'aller au bout de son reproche, une troisième pulsation l'interrompit de nouveau, leur vrillant les tympans à tous les deux. La Faille était si brulante désormais que la zébrure à sa surface en paraissait blanche. Un chuintement écœurant s'en échappa subitement.
- Ça recommence, lâcha le jeune homme aux oreilles de lapin en s'écartant d'Eva qui semblait ne pas en croire ses yeux.
Odd se réceptionna au sol comme un pro, esquivant de justesse l'Overwing qui fusa juste au dessus de sa tête en tourbillonnant avant de s'écraser violemment contre un bloc légèrement surélevé, explosant en une myriade de particules numériques.
- La vache… souffla-t-il de l'étrange voix fluette de son avatar virtuelle, Aelita, ça va ?
La jeune fille se laissa descendre vers lui, une ride inquiète barrant son front. Elle avait activé ses ailes juste à temps au moment de la pulsation mais le choc, allié à la proximité de la Faille, l'avait tout de même envoyée valser plusieurs dizaines de mètre plus loin !
- Ça va, assura-t-elle en se posant avec précaution sur le sol dépourvu de texture de Lyokô tout en jetant un regard navré au terminal qu'elle avait créé, réduit en charpies par le souffle de la détonation, Yumi, on a un problème ici ! Tu as pu récupérer toutes les données ?
- Tout va bien Aelita, le téléchargement était déjà terminé, désolée de ne pas t'avoir prévenue, répondit la japonaise à travers le micro de l'ordinateur, sans pour autant oser expliquer qu'elle avait été quelque peu distraite par l'altercation entre Mathieu et Eva, en tout cas il y a un message d'alarme qui vient de s'afficher à l'écran, qu'est-ce qui se passe au juste ?
- On dirait que la Green Phoenix essaye de nouveau de s'introduire sur Lyokô ! expliqua l'elfe rose, ses yeux d'un vert profond rivés sur la Faille incandescente, fais ton possible pour bloquer le passage ! Vite !
Mais il était trop tard. Une ultime pulsation ébranla la Voûte Céleste et, dans un râle rauque, s'extirpèrent une multitude de sphères rouges lumineuses qui s'éparpillèrent aux quatre coins du territoire, sous le regard terrifié des deux Lyokô-guerriers.
Odd suivit des yeux deux d'entre elles qui fusèrent dans leur direction avant de s'arrêter brusquement à leur niveau, leur forme se modifiant peu à peu, enflant et grossissant sans cesse.
Enfin, deux énormes créatures similaires à des crabes gigantesques, couverts de la tête au pied d'une carapace rougeâtre, posèrent leurs quatre gigantesques pinces aiguisées comme des lames de rasoir au sol, dans un grand bruit de ferraille. Accompagnés d'un chuintement mécanique, les deux monstres tournèrent leur crâne plat et imposant en direction des deux adolescents, immobiles de stupeur, vrillant leurs trois globes oculaires vides sur eux.
Face à ce spectacle cauchemardesque, Aelita ne trouva qu'une chose à dire, exprimant ainsi la pensée de tous :
- On est dans la m*** !
Voilà pour le 20ème chapitre de New Wave~ on doit être à peu de chose près à la moitié de ce que j'ai écrit jusqu'à présent ce qui constitue quand même une avancée non négligeable !
Vient maintenant la fameuse rubrique dessin ponctuant chacun de mes chapitres o/ ! Aujourd'hui, je vous propose un contenu inédit célébrant la fin de l'été avec nos deux râleurs préférés, j'ai nommé, Jérémie et Eva !
Spoiler
Voilà, c'est fini pour votre dose de New Wave du jour ! A bientôt pour le chapitre 21 !
Foxot --> Mmmh... Sans compter que William n'a alors été virtualisé qu'une fois, comme Jérémie à l'époque où il a été xanatifié. Certes c'était pour une plus longue durée mais il a été sous le contrôle de XANA presque tout le long donc pour le coup je suis d'accord, ceci peut s'expliquer par cela.
Cependant je me permets d'en profiter pour faire ressortir le fait que certaines des incohérences si vivement critiquées de CLE peuvent tout aussi facilement s'expliquer que celles de CL par moment =P !
Eunbi --> MERCI ! Enfin quelqu'un qui est d'accord avec moi *o* ! On peut ne pas aimer CLE, mais de là à la comparer à la pire série de tous les temps =(...
Quoi qu'il en soit essayons de ne pas trop dériver dans la fouille des incohérences de la série en général o/ on en aurait pour des jours et ce n'est pas le sujet XD !