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[One-Shot] Griphus

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 Auteur Message
Ikorih MessagePosté le: Mar 10 Mar 2015 20:04   Sujet du message: [One-Shot] Griphus Répondre en citant  
M.A.N.T.A (Ikorih)


Inscrit le: 20 Oct 2012
Messages: 1529
Localisation: Sûrement quelque part.
Spoiler



http://i.imgur.com/VJ7j3L3.png




Il ouvrit les yeux. Il ne sut si l’image qui s’imprimait dessus était un plafond ou le ciel. Il n’était pas assez réveillé pour ça. Mais tant pis.
L’instant d’après, il se relevait souplement, observant les alentours. Pas question de rester étendu par terre comme ça. Ce n’était pas confortable.
Il était en intérieur. La pièce était sombre, mais pas autant qu’elle aurait dû l’être, comme si une lumière d’une origine indéfinie l’éclairait. Elément intriguant, mais il avait trop l’habitude des jeux vidéo avec leurs éclairages particuliers qu’il n’y fit pas attention. Il continua à regarder. Ce sol de béton lui était familier. L’usine, autour de lui, le saluait gravement. Oui, c’était bien elle, leur vieille camarade ! Quelques tapis roulants dans un coin, des machines désarticulées et partiellement rouillées pour certaines. Un endroit paisiblement abandonné. Il ne savait pas si elle lui souhaitait la bienvenue ou si elle souhaitait le voir décamper, et il ne cherchait pas à le savoir. Lui essayait surtout de savoir ce qu’il y fichait.
Malgré l’impression de vivacité dynamique qu’avait donnée son réveil, Odd avait les idées en vrac, comme si une tornade lui avait secoué l’esprit. Pas la moindre idée de comment il était arrivé là, ni même de ce qui s’était passé un peu avant. Les brumes de sa mémoire lui voilaient les évènements. Il n’arrivait même plus à définir un point fixe jusqu’où elle pouvait le faire remonter. Il se souvenait du cours de maths de lundi dernier, avec Mme Meyer et les petits regards qu’il lançait à Sophie Florenceau. Ça, oui, il arrivait à replacer. Il arrivait même à retrouver un peu plus que ça, mais il ne savait pas exactement quand s’arrêtait le souvenir et où commençait l’extrapolation. Certains évènements étaient moins précis, il se demanda même s’il ne les renflouait pas de bribes de rêves pour leur donner une contenance. Ce flou semblait s’opacifier au fil du temps, mais puisque Odd ne savait même pas où il commençait…ça partait bien.
Il fit un second tour d’horizon de la salle, cherchant à apercevoir un signe de vie. C’était toujours plus rassurant qu’une salle vide et morte. Ou même un ami, pourquoi pas ? Son regard fouilla les moindre recoins, il se projeta dans un jeu de point and click comme il faisait parfois sur l’ordinateur. Sauf que ces jeux n’avaient jamais été ses préférés… Rien. Il avait beau chercher, rien.
Il résolut donc de donner de la voix. Après tout, qui disait vie disait oreilles (normalement hein) et capacité à l’entendre. A lui répondre. C’était ce dont il avait le plus besoin : des réponses.
-Hé, y a quelqu’un ? Jérémie !
L’appel de Jérémie avait été tout naturel. Après tout, si quelqu’un savait ce qui se passait, c’était lui. Toujours. Ou du moins, plus que les autres. Odd se tournait donc vers lui avec la vague impression d’être un naufragé à la recherche de sa bouée de sauvetage, ce qui n’était pas des plus plaisant. Naufragé dans la grande mer du flou mémoriel.
L’écho se perdit tout autour de lui, dispersé et s’affaiblissant, repoussé par les murs. Absorbé dans les ténèbres, qui n’étaient pas vraiment des ténèbres, mais tant pis. Le son ne revint pas, et ne lui ramena aucune réponse. Il était apparemment seul. Ou alors il avait juste réussi à alerter une éventuelle force maléfique de sa présence. Il ne lui aurait manqué que ça, parce que pour le moment, il était certes seul, perdu et amnésique, mais pas en danger.
-Génial…
Pas en danger…du moins pas à sa connaissance. Rien ne lui garantissait qu’il était en sécurité ici. Une légère appréhension lui serra l’estomac (organe le plus important chez lui, évidemment) et il fut tenté de ramasser quelque chose pour se défendre. Il dédaigna la barre de fer qui faisait trop cliché à son goût, et lui préféra un pied de biche.
Odd avait toujours manifesté une certaine motivation face à l’adversité, qui ne le laissa pas tomber : il se mit en marche pour tenter de trouver une explication à ce qu’il faisait là, son nouveau compagnon en main. Il ne ressentait aucune douleur particulière et n’avait pas l’impression d’être blessé, ce qui était encourageant. L’escalier sur sa gauche, partant de sous la mezzanine pour la rejoindre, lui sembla un bon point de départ à son exploration, aussi choisit-il de l’emprunter. Ses pas résonnaient, renforçant l’idée de solitude qui commençait à s’imposer à lui. Seul avec l’écho qui n’était pas foutu de lui ramener de la compagnie. Parfois dans les films, les héros avaient le sentiment qu’on les observait, dans des situations similaires. Odd n’avait pas cette impression, alors il se considérait à peu près en sécurité. Certes, c’était ridicule, mais au pire, il avait déjà pu affronter des spectres et il avait son pied de biche. Et il était trop insouciant pour réellement considérer le danger. Au moins avant d’y être confronté. La menace invisible ne le touchait pas. Son côté enfantin, peut-être…quoique les enfants étaient souvent les plus sujets aux peurs irrationnelles. Mais moins aux peurs rationnelles que la vie vous enseigne. Peut-être Odd était-il assez mature pour écarter les peurs irrationnelles et assez immature pour écarter les peurs rationnelles. Une combinaison théoriquement efficace. Restait à voir la pratique.
Il se dit que retourner au Supercalculateur pouvait être un début. Après tout, cette machine était la seule chose digne d’intérêt dans la vieille usine, et également le meilleur point de départ pour essayer de comprendre quelque chose à ce qui lui était arrivé.


http://i.imgur.com/TOhoZVK.png




Il monta un second escalier, un peu plus à droite sur la mezzanine, puis déboucha dans un couloir. Il y avait des fenêtres, qui donnaient sans doute sur le canal qui entourait l’usine. Il y jeta un vague regard, de ces regards ternis par l’habitude, avant de cligner des yeux sous le coup de la surprise. On ne voyait rien à travers. Pas de vue déprimante sur les eaux sales de la Seine, pas de triste aperçu des bâtiments de la ville. A la place, une sorte de rayonnement blanc, un peu comme de la lumière, saturait toute image. Pour autant, il n’était pas ébloui. Ses yeux ne le suppliaient pas de regarder ailleurs, aucune tache multicolore n’apparaissait dans son champ de vision, pas de douleur. Juste la lumière blanche. Presque apaisante. Il aurait pu relier à la lumière au bout du tunnel, mais ses neurones n’eurent pas envie de faire la connexion. Trop éloigné de la situation.
-T’y crois pas ! murmura-t-il pour lui-même.
Cette histoire commençait à devenir bizarre. D’aussi loin qu’il se souvienne, les vitres avaient toujours donné sur quelque chose, même si c’était l’eau laide de la Seine…alors certes, il n’était pas souvent passé par ici, mais il avait de bonnes raisons de penser que ce n’était pas exactement la vue habituelle. Il s’était passé quelque chose.
Par réflexe, il associa cette bizarrerie à XANA. Après tout, quel phénomène étrange ne trouvait pas sa source en lui ? XANA était la grande bizarrerie dans leurs existences banales. Il avait même réussi à leur créer une seconde existence de sauveurs du monde, il les avait entraînés dans un monde étrange et certainement pas en lien avec celui de collégiens normaux. Et depuis, il n’avait cessé de leur jouer de mauvais tours. Il eut une pensée pour la bulle virtuelle dans laquelle il les avait enfermés un jour, et se dit que ce n’était peut-être pas si différent. En tout cas, il se passait quelque chose de louche et il tenait à découvrir quoi. Ce constat raviva la nécessité de mettre la main sur le Supercalculateur, et sur les autres s’ils étaient là aussi. Mais pourquoi n’y seraient-ils pas ? Qu’est-ce qui pouvait justifier que lui soit ici et pas ses amis ? A moins que XANA n’ait voulu faire une victime isolée, mais s’il pouvait en tuer un, pourquoi ne pas s’en prendre à tout le groupe ?
Odd réfléchissait plus que d’habitude. Ça le surprenait. Peut-être était-il capable de suivre un raisonnement quand il était paumé tout seul dans un endroit inconnu et potentiellement hostile…c’était sans doute ce qu’on appelait l’instinct de survie. Quoique non. L’instinct s’opposait à la réflexion. Alors peut-être qu’il se décidait enfin à cogiter un peu. Ça devait bien lui arriver de temps en temps, non ?
Il colla son visage à la vitre blanchie par la lumière, tentant d’apercevoir quelque chose de l’autre côté. Mais rien. Il s’écrasa le nez sur le plexiglas, mais toujours rien. D’ailleurs, son nez ne protesta pas du tout. Aucune douleur ne remonta dans ses nerfs, rien ne vint agresser son cerveau en surchauffe. Etait-il embrumé à ce point ? Odd ne chercha pas à savoir pourquoi ni comment. Il constata à peine, même, parce qu’il ne resta pas longtemps collé à la vitre. Quelque chose vint le déranger.
Il entendit sa sonnerie de portable.
Avec un certain soulagement, il porta sa main à sa poche pour décrocher. Il avait été bête de ne pas penser plus tôt à s’en servir, heureusement que les autres étaient plus intelligents que lui ! Appelaient-ils Odd le Magnifique à la rescousse ? Ou le cherchaient-ils, inquiets ? Où pouvaient-ils être ? Il n’en savait rien, mais il entendait bien leur demander.
Il eut beau chercher, impossible de mettre la main sur l’appareil. Il fronça les sourcils. Comment c’était possible ? Mais ça n’empêcha pas la voix de Jérémie de résonner tout autour de lui. Peut-être avait-il appuyé sur un bouton par inadvertance ?...

Odd, tour activée !

Ah, alors il avait bien raison. XANA était derrière tout ça. Il se félicita de sa déduction. Pour une fois qu’il comprenait !
Bon, si Jérémie l’appelait, il devait déjà être en route vers ici…pas la peine de trop s’en faire de ce côté-là. Quand il serait à l’usine, tout irait pour le mieux. Les autres le rejoindraient sans aucun doute. Il pourrait les accueillir, bras croisés devant le monte-charge, avec un petit sourire provocateur : « Alors, vous en avez mis du temps ! »
Mais Odd devait trouver le monte-charge, pour ça. Et vite. Sinon il aurait juste l’air d’un imbécile perdu dans l’usine…
Il s’élança d’un côté arbitrairement choisi du couloir, sans plus se formaliser des vitres illuminées. Ce n’était pas la priorité. Cette lumière irréelle venue des fenêtres était omniprésente, pourtant il avait l’impression que les ténèbres s’épaississaient dans son esprit. Qu’est-ce que leur ennemi juré avait bien pu faire cette fois ? Parce que sa mémoire ne daignait toujours pas l’éclairer. Elle restait brouillée. Tout en courant, il tenta d’en recoller des morceaux. Le cours de maths, par exemple. Les petits regards à Sophie. Et puis ensuite ? La bouffe par exemple. Il pouvait essayer de s’en rappeler, de la bouffe ? C’était un de ses centres d’intérêt, si quelque chose était ancré, c’était bien ça….
Croissants le matin. Comme tous les jours. Non, cette fois c’était pain au chocolat, parce que l’administration avait voulu changer l’ordinaire ? Mh, n’était-ce pas ce dont il avait rêvé la nuit d’avant ? Ou peut-être celle encore avant ? La confusion revenait dans son esprit, au point qu’il trébucha sur un bout de métal qui traînait par terre et qu’il n’avait pas vu. Il s’étala, s’attendant à sentir la douleur enflammer ses paumes et ses genoux. Rien ne vint. Mais il n’avait pas le temps de se poser la question. Il ramassa son pied de biche, précieux camarade qui avait rejoint le sol avec un claquement métallique, et reprit son chemin.


http://i.imgur.com/uOJwXUV.png



Il ne reconnaissait pas les lieux. Il n’avait jamais été dans cette partie de l’usine auparavant, mais même l’ambiance lui semblait bizarre. Et toujours ces vitres. La pièce était déserte. Des morceaux de planche jonchaient le sol, sans qu’on sache comment ils étaient arrivés là. Une feuille était coincée en dessous. Curieux, espérant trouver un indice sur ce qu’il faisait là (ou peut-être bien désespéré, d’ailleurs), il s’accroupit, déblaya les débris pour dégager l’objet. En haut à droite, un grand « 10/20 » entouré. A gauche, son nom, sa classe. Au centre, le titre d’un contrôle de maths. Celui que Mme Meyer leur avait rendu ce jour-là, d’ailleurs ! Il avait été tellement content d’avoir la moyenne !
Mais qu’est-ce que son contrôle de maths pouvait venir faire dans un endroit pareil ?...
Il essaya d’en attraper le coin. La feuille se volatilisa, et il crut bien qu’il l’avait rêvée. Il se releva, le regard troublé.
-Qu’est-ce qui m’arrive, bon sang ? souffla-t-il.
Personne ne vint lui apporter la réponse. Pas étonnant, mais il aurait bien aimé. Ça lui aurait évité de réfléchir à quelque chose qui, il le sentait, le dépassait. A cet instant, il espérait vraiment que Jérémie le rappelle pour qu’il puisse lui demander. Jérémie, lui, aurait sans doute les réponses. Il espérait, du moins…parce que sinon, il voyait mal qui pouvait les lui donner. Franz Hopper ? Oui, le grand génie officiel avait peut-être quelque chose à voir là-dedans aussi…mais en règle générale, il agissait sur Lyoko, pas dans la réalité. Sauf quand il avait une info urgente à leur faire passer, comme avec Sissi. Mais il pouvait se contenter d’envoyer un message à Jérémie, non ? Et puis si lui se retrouvait perdu dans l’usine et amnésique, il voyait mal en quoi Franz Hopper pouvait considérer ça comme un message. Après, le vieux était peut-être un peu frappé. Il n’en savait rien. Et puis merde, ce n’était pas à lui d’avoir ces réflexions !
Sentant qu’il ne trouverait rien de plus ici, il choisit de rebrousser chemin, mais le décor semblait avoir changé par quelque tour de magie. Au lieu du couloir dont il venait, il avait désormais une salle sombre, pleine de casiers à moitié renversés, des feuilles de papier éparpillées sur le sol. Encore des feuilles ? Si c’étaient ses autres contrôles de maths de l’année… Un ordinateur renversé gisait sur par terre, l’unité centrale ouverte, l’écran désossé. L’endroit avait tout l’air d’un bureau où serait passée une tornade.
Mais qu’est-ce qu’une pièce pareille faisait dans l’usine ?
-Okay, alors là, ça craint…
La phrase lui avait échappé. Que les mots se montraient capricieux ! Incapables de se tenir tranquilles, ils sortaient voir le monde dès qu’ils le pouvaient, au moindre moment d’inattention. Mais ils étaient criants de vérité. Tout comme la petite note d’inquiétude qui les traversait, accord mineur dans la mélodie funeste. Il ne comprenait pas ce qui se passait. Il était presque sûr qu’il était revenu dans le couloir qu’il avait quitté, et pourtant il trouvait cette salle à la place. Avait-il perdu son sens de l’orientation ? Etait-il à ce point déboussolé ? Ou est-ce que l’endroit se moquait de lui.
Il comprit encore moins en remarquant la silhouette. Qui n’était pas là lorsqu’il était entré, il en était convaincu… Un peu comme s’il était sorti de nulle part, Jérémie était appuyé sur le bord de la table, rajustant ses lunettes, visiblement perdu lui aussi. Il vacilla, ses jambes firent mine de le lâcher. Odd se précipita pour le soutenir, sans réfléchir.
-Jérémie ! Hé, Jérémie, tout va bien ?
Le génie hocha la tête, reprenant lentement ses esprits. Il assimilait qu’il était ailleurs. Peut-être avait-il oublié aussi ce qui lui était arrivé ? Il regarda autour d’eux, puis son ami.
-Odd…où on est ? Comment on est arrivés là ?
-Je ne sais pas. Je me suis réveillé dans ce qui ressemblait à une salle de l’usine, mais je ne sais pas comment j’y suis arrivé. Et puis mon téléphone a sonné, mais je ne le trouvais pas, et ensuite j’ai entendu ta voix qui me disait que XANA attaquait, alors j’ai cherché le Supercalculateur, mais je ne reconnaissais rien, et puis ensuite je suis arrivé ici alors que je suis sûr d’être déjà passé et le décor semblait bizarre, les fenêtres ne donnent sur rien mais y a de la lumière qui en vient, et puis j’ai vu ma feuille du contrôle de maths se volatiliser sous mes yeux, et…et je ne sais pas, dis-moi que tu as une idée sur ce qu’on fait là et sur où sont les autres !
Les mots, quels farceurs. Quand il avait commencé à répondre à Jérémie, il était calme. Et puis ensuite, l’information avait dû totalement rejoindre son cerveau : Einstein ne savait pas ce qu’ils faisaient là. Alors que c’était toujours lui qui savait tout. Si Jérémie ne comprenait pas, qui pouvait le faire ? A partir du moment où cette réalité s’était imposée à lui, il s’était emballé, les mots étaient partis à tire d’aile, son souffle s’était accéléré : la panique arrivée, vive comme une bourrasque qui lui avait retourné l’âme. La locomotive infernale était lancée, sur les rails de la panique, et personne n’était aux commandes pour l’arrêter. Alors quoi ? Ils allaient rester perdus ici, Jérémie ne savait pas ? XANA devait déjà tramer dans l’ombre ses plans pour se débarrasser d’eux…
-Odd, calme-toi.
La voix de Jérémie agit en bouée. Elle l’amena à se focaliser sur quelque chose, sur quelqu’un, quelqu’un qui était peut-être son seul espoir de comprendre. Jérémie était la balise. Et il pouvait réfléchir pour deux. Alors il fallait lui faire confiance. L’idée que ce soit un clone créé par XANA ne l’effleura même pas. Il avait trop besoin de quelqu’un à qui se raccrocher pour savoir ce qui se passait, ce qu’il faisait là. Ce qu’ils faisaient là.
-Il faut qu’on arrive à se souvenir. Notre mémoire, c’est la clé. Tu comprends ? La tienne aussi est floue ?
Odd hocha la tête, lentement. Jérémie s’assit par terre, en tailleur au milieu des feuilles, et l’invita à faire de même. Le petit blond s’exécuta, posant son pied de biche à côté de lui. Puis le génie continua à parler, pesant chaque mot avec calme, lui donnant le poids nécessaire. Il ne devait pas en avoir trop, pour ne pas effrayer Odd, mais il lui en fallait quand même assez pour avoir l’air sérieux et en possession de la situation. Alors qu’il ne possédait rien. Mais ça, il ne fallait surtout pas le montrer, sinon son acolyte recommencerait à paniquer.
-S’agiter ne servirait à rien. On doit comprendre avant d’agir. Tu m’as l’air d’être là depuis plus longtemps que moi, alors tu as plus d’informations. Tu disais que tu avais entendu ma voix ? Raconte, s’il te plaît.
L’adolescent en violet se concentra, de son mieux. Il revit la scène dans ce couloir, son portable qui sonnait…oui, il fallait commencer par là. Non, peut-être un peu avant. Jérémie voulait sans doute avoir le plus de détails possibles. Et lui voulait les lui donner pour l’aider à comprendre. Parce que si Jérémie comprenait, alors Odd avait bon espoir que la situation s’améliore.
-J’étais arrivé dans un couloir, après m’être réveillé dans l’usine. Les vitres étaient un peu brillantes, comme si de la lumière arrivait de dehors mais que rien ne passait dans l’autre sens. Je ne pouvais rien voir. Comme si j’étais ébloui, mais sans douleur ni rien. Juste un genre de voile de lumière sur les vitres. Alors j’ai commencé à me dire qu’il y avait quelque chose de bizarre, et j’ai pensé automatiquement à XANA. Mais je ne savais pas exactement ce qu’il pouvait avoir fait. Ma mémoire était floue. Elle l’est encore d’ailleurs. Je ne sais pas définir à partir de quel moment j’ai perdu le fil…
Il s’interrompit, regardant si son interlocuteur était satisfait de ce début. Les yeux fermés, attentif au possible, Jérémie lui fit signe de continuer.
-Ensuite…j’ai entendu la sonnerie de mon portable, alors je me suis dit que c’était toi et que tu en savais sans doute plus. Ou alors c’était un des autres qui voulait me contacter. Alors je l’ai cherché pour décrocher, mais je ne le trouvais pas. Impossible de mettre la main dessus. Puis j’ai entendu ta voix.
-Tu m’as entendu alors que tu n’avais pas décroché ?
Jérémie relevait l’incohérence. Il cherchait la faille, parce que la faille serait peut-être ce qui lui permettrait d’emboîter les pièces du puzzle et de trouver la solution de l’énigme. Car c’était ça qu’ils affrontaient : une grande et vaste énigme à laquelle ils ne voyaient pas de réponse. Mais Jérémie aimait les énigmes. C’était l’occasion de faire chauffer ses neurones. De rappeler au monde qu’il était le génie. Et là, il devait être utile. Il attendit la réponse d’Odd.
-Je n’ai pas pu décrocher, non. Pas moyen de trouver mon téléphone. Je crois que je ne l’ai plus…
-Je vois…continue. Ma voix, donc.
Odd hocha la tête, réorienté dans le fil de son récit.
-Oui, confirma-t-il. Elle disait « Odd, tour activée ! »…
Le génie se concentra davantage, les mains sur les tempes. Il savait qu’il devait trouver une explication à ce qui se passait, sinon personne ne pourrait. C’était son boulot, de trouver des explications. Sa tête, c’était son seul atout. Il ne se souvenait pas avoir dit ça à Odd, mais il était aussi amnésique que lui. Il était pratiquement sûr que ce n’était pas le portable de son ami qui avait émis sa voix. Alors quoi ? Un haut-parleur caché ? Non…Jérémie préférait penser qu’il s’agissait de quelque chose qui était remonté dans la mémoire d’Odd. Après tout, il avait été le seul à l’entendre…mais ça ne prouvait rien.


http://i.imgur.com/P7znRjq.png



Il sursauta soudain. Un bruit. Celui que l’ordinateur produisait en sélectionnant les cartes des Lyokoguerriers alors qu’il s’apprêtait à les transférer. Trois fois.

Eh, dépêchez-vous, Odd ne tiendra pas longtemps contre le spectre !

-Tu as entendu ? demanda Jérémie, fébrile.
Une bribe. Un morceau du puzzle. Il ne devait pas le laisser filer. Il pria pour que sa mémoire le conserve bien entier. Il pria pour que son intelligence arrive à l’emboîter avec les autres morceaux manquants. Et puis il croisa le regard incompréhensif de Odd qui lui demanda :
-Quoi ?
-Mais, c’était ma voix ! insista Jérémie, convaincu qu’il était.
Odd le fixa comme s’il avait perdu les pédales.
-Non, j’ai rien entendu…
-Merde, grogna Jérémie. Pourtant…juste avant, il y a eu un son du Supercalculateur, quand je vous transfère. Et puis je me suis entendu dire « Eh, dépêchez-vous, Odd ne tiendra pas longtemps contre le spectre ! ».
Le génie observa son ami, espérant que ça réveillerait quelque chose dans sa mémoire. Peut-être que cette pièce s’emboîtait avec une de celles qui manquaient ? Le ventre à patte le fixa un moment, avant de murmurer :
-Mais…j’ai aucun souvenir d’un spectre, moi…
Merde. Ça ne lui disait rien. Jérémie eut envie de frapper du poing sur quelque chose tant il était frustré. Il fallait à tout prix qu’il botte le cul à l’esprit de son ami. Sinon ils ne trouveraient pas la clé.
-On a aucun souvenir de rien, Odd. C’est notre meilleure piste. On dirait presque un début de scénario, regarde, ça se suit ! s’écria Jérémie en relevant brusquement la tête. Regarde. Regarde. Regarde. D’abord, tu reçois un coup de fil et je te dis qu’il y a une tour activée. Et puis je virtualise les autres (le bruit s’est entendu trois fois !) pour la désactiver. Toi, tu restes pour affronter le spectre…
Dans sa reconstitution des faits, Jérémie s’était levé, avait commencé à marcher dans la pièce comme un possédé, le regard illuminé : il avait une ébauche. Il ne savait pas comment il l’avait trouvée, ni ce qu’il allait en faire, mais il suivait désespérément ce fil rouge car c’était la seule chose qu’il ait à portée de main. Les pièces s’encastraient. Enfin elles commençaient à le faire. Odd le regardait avec les grands yeux d’un enfant à qui on raconte une histoire. Sauf que là, c’était leur histoire. Allaient-ils réussir à trouver la suite ? Ils l’espéraient ardemment.
-Il manque un maillon, s’agaça Jérémie. Comment on passe de toi affrontant un spectre à nous qui nous réveillons ici sans savoir pourquoi, et amnésiques ? Odd, essaie de te rappeler. Tout peut s’illuminer d’une minute à l’autre…tu as la clé, j’en suis sûr.
Le blondinet réfléchit.
-Mon contrôle de maths, tu crois qu’il a une importance ?
Jérémie se gratta la tête.
-Je l’avais presque oublié. Alors…peut-être que c’est un souvenir qui est remonté à la surface. Mais je ne vois pas pourquoi tes souvenirs traînent ici matérialisés…rah, c’est pas normal. Je sais pas comment ça se fait. Mais c’est pas normal. Odd, essaie de trouver le chaînon manquant, s’il te plaît. Je t’en prie.
Odd essaya. Il essaya vraiment de se rappeler. Pendant dix minutes, il se raccrocha aux idées émises par Jérémie, il fit jouer son imagination, mais aucun souvenir ne remonta. Il avait un peu honte de ne rien pouvoir faire pour assister son ami. Il aurait tellement voulu lui ramener un autre élément de réponse ! Frustré, Jérémie soupira :
-Bon. Continuons à explorer. Peut-être qu’on retrouvera quelqu’un d’autre qui aura une pièce du puzzle en plus…
Oui, les autres…où étaient-ils ? si Jérémie était arrivé, alors les autres pouvaient tout à fait être là. Peut-être bien. Déjà sur les lieux ? Ou alors ils apparaitraient plus tard. A supposer qu’ils apparaissent…mais pourquoi eux seraient-ils les seuls à être amenés là ? Deux seuls amnésiques…
Odd se releva à son tour, et ils jetèrent un regard vers la porte. Partir par ici ? Pourquoi pas. Après tout, il fallait bien aller quelque part. Ils erraient sans objectif concret, juste en priant pour tomber sur la bonne réponse au fil de leurs errances. Il étaient bien pitoyables, songea Jérémie. Ils s’avancèrent vers le battant, appréhendant un peu ce qu’ils trouveraient derrière. Jérémie fut le premier à l’ouvrir, sous le regard anxieux de son ami. Sa main n’était pas moite lorsqu’il serra la poignée, et le froid d’acier qu’elle dégageait ne l’affecta pas.


http://i.imgur.com/1nBYC38.png



Ils débouchèrent dans la chaufferie de Kadic. Ce qu’ils y faisaient ? Aucune idée. Chacun l’illustra à sa manière :
-C’est n’importe quoi.
-L’espace a l’air bouleversé, par ici…
Jérémie prit le temps d’encaisser ses propres mots. Puis il reprit la parole. Il venait, après tout, d’admettre que les lieux étaient perturbés. Que la réalité leur faisait défaut.
-Odd ? articula-t-il.
-Oui ?
Jérémie, la main encore sur la poignée, tourna la tête vers son camarade, un air grave sur le visage.
-J’ai bien l’impression qu’on est pas dans le monde réel.
Odd ne lut pas le début de peur dans ses yeux. Il lui rendit son regard, espérant que Jérémie saurait quoi faire. Les interrogations sortirent malgré elles, impossible à rattraper. Presque la panique.
-Mais on est où, alors ?! T’as bien une théorie, non ?
Jérémie savait qu’il devait calmer son camarade. C’était primordial. Et pour éviter l’anarchie, il fallait continuer à réfléchir, se donner un objectif, se raccrocher au fil rouge qu’ils reconstituaient petit à petit. Brin par brin. C’était le seul moyen de conserver leur calme. Et le génie savait que son compagnon d’infortune pouvait céder à la panique beaucoup plus vite que lui. Il décida d’émettre une hypothèse.
-Je ne sais pas trop. Peut-être une bulle virtuelle…
Silence. Il n’aurait peut-être pas dû avouer qu’il ne savait pas. L’ombre qui passa dans les yeux d’Odd le lui confirma. Alors il prit les devants et continua à réfléchir à voix haute. Partager ses réflexions, ou du moins les extérioriser, ça l’aidait à rester calme lui aussi.
-Mais pour que j’y sois, j’aurai dû me virtualiser, murmura Jérémie. Et je ne pense pas que ça ait été le cas. Toi non plus tu n’as pas été virtualisé Odd. J’en suis sûr.
Oui, une affirmation ! Il devait reprendre de l’assurance, sinon personne n’en aurait.
Pensif, il prit encore quelques instants, figé sur le seuil, pour réfléchir. C’était primordial. Pas la peine d’avancer tant qu’il n’avait pas fini de décoder cet élément. Ce serait brûler les étapes. Il devait rester méthodique, sinon ils cèderaient au chaos. Avait-il encore quelque chose à tirer de cette découverte ? Quelques secondes s’étirèrent. Non, ça devait être bon. Maintenant ils pouvaient y aller.
-On doit trouver ce qui s’est passé, énonça-t-il, toujours pour rassurer Odd.
Puis il s’avança résolument dans la chaufferie. Il fit mine, en tout cas, d’être résolu. Il espérait qu’on ne verrait pas ses jambes trembler, il ignorait si c’était la peur ou l’excitation du défi intellectuel. Il préférait ne pas le savoir.
Le freluquet le suivit, mais au bout de quelques pas, son regard fut accroché par le sol. Le sol qui n’était plus tout à fait normal. Il s’arrêta, hypnotisé. Jérémie mit quelques instants à s’en apercevoir et à se retourner vers lui. Il n’avait été alerté que par le son de ce bon vieux pied de biche tombant par terre, échappant aux doigts de son ami.
-Odd ? lança-t-il, comme un harpon pour l’ancrer à la réalité.
L’autre ne l’entendit pas. Il était entièrement concentré sur ce qu’il voyait. Comme à travers une vitre, il suivait des yeux son duel avec le spectre de XANA, anonyme silhouette. Et de toute évidence, il ne s’en tirait pas tellement bien. C’était comme un portail vers un autre monde, ou un autre temps. Mais il avait le sentiment d’avoir un indice pour Jérémie, alors il n’en perdait pas une miette. De toute façon, il n’entendait plus Jérémie. Il devait comprendre. Après le son, les fragments semblaient se manifester par l’image.


http://i.imgur.com/Wcddaaa.png



-Odd !
Jérémie l’attrapa par le bras, brisant le moment. Peut-être un peu trop tôt. Il aurait fallu que la suite apparût… Arraché à un rêve, l’autre le regarda d’un air hébété. Il avait sa tête de quand il se réveillait difficilement le matin. Non, pas tout à fait. Son regard se faisait un peu vitreux. Jérémie sentit une bouffée de panique l’envahir à ce constat. Qu’est-ce qui venait d’arriver à Odd ? Qu’est-ce qu’il avait bien pu regarder sur ce foutu carrelage qui l’avait changé en zombie ? Il devait le savoir, et pour ça, il fallait qu’Odd parle.
-Odd, qu’est-ce qui s’est passé ? insista la tête pensante.
Regard éteint. Jérémie crut bien que son ami ne lui répondrait pas. Mais si. D’une voix ensommeillée, un peu abrutie. Toutefois, il répondait.
-Jérémie…le sol, il me montrait. Je me suis vu en train d’affronter le spectre.
Une petite pièce du puzzle. Le génie l’observa de son esprit vif, essayant de la rattacher au morceau d’image dont ils disposaient. Ils progressaient, il en était certain. Jérémie récapitula une fois encore les évènements, pour leur donner plus de vie, pour s’assurer qu’ils n’étaient pas factices, pour se convaincre lui-même au fond.
-Je t’appelle pour la tour. Je virtualise les autres. Tu affrontes le spectre…comment ça se passait, Odd ? Comment ?
Jérémie replongeait dans son état de fébrilité intellectuelle. Il savait que quelque chose se mettait en place, que la théorie prenait de l’importance. Il était de plus en plus proche de la vérité. Il fallait continuer. Encore un petit effort. Si Odd arrivait à l’aiguiller correctement, si les images qu’il avait vues étaient les bonnes…
-Je crois que je perdais.
Odd ne pouvait pas le laisser tomber maintenant. Il n’avait même pas l’air totalement sûr de ce qu’il avait vu. Jérémie sentait que son esprit s’éloignait petit à petit, et cela l’effrayait parce qu’il ne comprenait pas ce phénomène. Cet endroit affectait sérieusement sa conception du monde. L’espace bizarre, l’amnésie, et maintenant Odd qui se changeait en légume ?
-Comment ça, tu crois ? Odd, secoue-toi un peu, il faut qu’on comprenne ce que XANA a trafiqué pour qu’on se retrouve là !
Jérémie fixa Odd avec une once de désespoir, qu’il cacha vite. La panique n’était pas la solution, et pourtant elle grimpait. Et il revit dans ses yeux une ombre étrange, comme s’il s’apprêtait à s’endormir sur place. Et la panique grimpa encore. Il l’attrapa par le bras, prêt à tout pour obtenir une réaction plus vivante. Il fallait qu’Odd se reprenne. Qu’il lutte, quoi qui soit en train de se passer en lui. Jérémie espérait désespérément. Et c’est alors qu’il vit la main de son camarade. Elle palissait à vue d’œil, ou plutôt, elle s’estompait. Lentement mais sûrement. C’était Jérémie qui pâlissait, à présent. La panique était lancée. Encore un phénomène surnaturel bizarre. La rationalité du surnommé Einstein en prenait un coup. Une sorte d’ouragan irréel balayait sa conception du monde. Il n’avait aucun moyen d’expliquer ce qui arrivait à Odd. Oui il avait réussi à trouver une explication, un début de morceau d’ébauche de mémoire, mais maintenant ?
-Odd. Regarde ça.
Un silence horrifié pesa, lourd, si lourd. Incapables dans un premier temps de détacher leurs regards de ce phénomène, ils finirent par s’observer l’un l’autre. Ils lurent de la peur, de l’incompréhension, de l’angoisse, une crainte sourde et hurlante de l’inconnu. La panique dansait au fond de leurs pupilles et les étreignait de lourdes chaines. Ils avaient peur que tout ça soit vain. Que leur quête de mémoire ne veuille plus rien dire, parce que de toute façon ils étaient toujours incapables de sortir d’ici et de savoir ce qu’ils y faisaient. Les fragments qu’ils avaient réunis ne les aidaient pas à savoir pourquoi Odd s’effaçait lentement. Ecrasante vérité.
-Jérémie, qu’est-ce qui m’arrive ? finit par murmurer Odd.
Et on sentit la peur dans sa voix. Elle n’avait plus besoin de se cacher : les deux la ressentaient également. Alors pourquoi perdre de l’énergie à tenter de rester calmes ?
-Odd, tu…tu disparais, articula Jérémie, hébété.
Il venait ainsi de donner corps à la réalité, si toutefois c’était bien la réalité qui les oppressait. Les mots donnèrent un caractère très définitif à la scène. Ils jetèrent un silence étrangement calme. Presque comme s’ils étaient en train d’accepter ce qui se passait, et laissaient le surnaturel dicter sa loi. De toute façon, pouvaient-ils lutter ? Si les évènements les dépassaient, si même reconstituer le puzzle ne suffisait pas, à quoi bon ?


http://i.imgur.com/hzARhUz.png



Cette fois, ce fut Odd qui empoigna Jérémie, à présent réveillé. Il refusa le premier de céder au désespoir.
-Jérémie ! On doit comprendre ce qui se passe, à tout prix ! Et y a qu’une seule chose à faire pour le savoir, c’est terminer l’histoire ! J’affronte le spectre, je suis en train de perdre, et après ?! Comment les autres ont désactivé la tour ? Souviens-toi, merde !
Jérémie planta ses pupilles dans celles de son partenaire d’infortune. Il y lut de la révolte contre le destin. S’apitoyer sur son sort était inutile. Mieux valait continuer à se battre pour découvrir ce qui leur était arrivé, pour tenter d’y changer quelque chose. Le génie sembla récupérer un peu de son énergie, de sa hargne de vivre, de sa volonté de s’accrocher jusqu’au bout. Et il força la main à sa mémoire. Il l’attrapa par le col et la secoua jusqu’à ce qu’elle lui révèle la fin de l’histoire, de leur histoire à eux. Allait-elle parler ? Elle détenait la clé ! Il fallait que la réponse surgisse maintenant, éclatante de vérité, sinon Odd allait disparaître sans que Jérémie puisse l’arrêter ! Et il était hors de question qu’il laisse faire ça.

Jérémie ? Tu m’entends ? On va arriver à la tour !

Aelita. La voix d’Aelita. Elle frappa Jérémie comme la foudre, il la chercha des yeux, mais ne vit rien. Sa présence l’aura tellement aidé ! Elle aurait peut-être compris ce qui se passait…ou alors aurait été aussi perdue que lui. Mais Odd n’avait pas l’air de l’avoir entendue. Alors ça ne pouvait signifier qu’une seule chose. Elle venait des tréfonds de sa mémoire, comme les bruits de tout à l’heure. Il avait juste à creuser un peu, tenter de revoir la scène…elle était toute proche. Il pouvait presque l’apercevoir. Odd l’interrogea du regard, et le génie se souvint. Enfin, il se souvenait. Le puzzle se complétait. La mémoire revenait. Il savait. D’un air grave, il fixa Odd.
-Odd…je viens d’avoir la dernière scène. Aelita m’appelle depuis Lyoko. Mais je ne peux pas lui répondre, parce que le spectre vient de débouler.
-Je n’ai pas réussi à le retenir, alors ? murmura Odd, qui s’en doutait déjà un peu. Et la tour alors ? Elle allait la désactiver ?
L’espoir. Tour désactivée signifiait forcément arrangement de leur condition. Peut-être que c’était à cause de cette tour qu’ils étaient là. Si Aelita la désactivait, ils reviendraient peut-être à leur état normal ? A un endroit normal ? Jérémie se concentra pour ne pas perdre le fil. Il avait la réponse, il devait juste la donner à Odd.
-Ils y arrivaient. Mais la suite demeure floue.
Oui. Non. Non, un flou ! Le flou revenait, alors qu’il ne manquait presque rien ! Jérémie faillit hurler de frustration. Il touchait la solution du doigt et elle trouvait encore le moyen de lui échapper. Puzzle maudit. Il ferma les yeux, courant après le petit souvenir qui lui manquait. Que s’était-il passé après l’arrivée du spectre ? C’était le dernier bout de l’histoire, à ne pas en douter ! Si même cette ultime illumination ne suffisait pas à les éclairer…c’était trop injuste. Il ne fallait pas que ça s’arrête là. Mais il fut arraché à sa colère par la voix d’Odd, calme et paisible dans cette ambiance chaotique.
-Je vois…
Les blonds se fixèrent une énième fois. Un regard plein d’intensité. Résolution, acceptation, détermination d’un côté. Désespoir et frustration de l’autre. Jérémie lâcha Odd. Odd lâcha Jérémie, puis se recula d’un pas. Il s’estompait encore un peu. Un peu trop. On aurait presque dit un fantôme à présent. Il ébaucha même un sourire.
-Belle énigme que XANA nous pose, tu ne crois pas ? Mais je crois que je ne verrai pas la fin. Je m’efface, Jérémie. Et je ne sais pas où l’on va, quand on s’efface.
Et le génie comprit ce qui allait se passer. Son sang ne fit qu’un tour. Il refusa. Il n’acceptait pas. Odd ne pouvait pas lui faire ça. Jamais. Ils étaient dans la merde ensemble jusqu’au bout. Il ne pouvait pas lui faire ça. Il ne pouvait pas. Impossible.
-Odd, t’as pas le droit de me laisser tomber ! s’insurgea Jérémie, qui se précipitait pour le retenir.
Mais un peu tard. Odd termina de disparaître, un petit air à la fois mystérieux et mélancolique sur le visage. Sa dernière sortie était trop belle pour qu’il la rate en se mettant à hurler de désespoir. C’était une question de fierté personnelle. Et puis sa curiosité lui demandait vraiment de ne pas lutter et d’aller voir ce qui l’attendait. Il avait toujours aimé l’inconnu et le risque, alors là il était servi.
Et il s’effaça. On crut bien voir qu’il ébauchait une révérence, dans ses ultimes moments d’opacité.



http://i.imgur.com/72zMvTu.png



Jérémie était seul. Il commençait à comprendre. La disparition d’Odd, arrivé avant lui, était peut-être le dernier morceau du puzzle qu’il s’acharnait à compléter depuis qu’il était arrivé. Depuis qu’ils étaient arrivés. Il réalisait que peut-être, savoir la vérité n’était pas souhaitable. Et d’après ses estimations, il ne tarderait pas à disparaître à son tour. Mais il était satisfait, au fond, parce qu’il avait à présent la quasi-certitude que les autres allaient bien. Et pour preuve : ils n’étaient pas encore apparus. En plus, lui-même se sentait gagné par la sérénité qu’Odd avait affichée. Peut-être son ami avait-il eu le privilège de voir le puzzle en entier avant de partir. Rien que pour cette raison, Jérémie attendait avec impatience l’issue inévitable. Il voulait vraiment comprendre. Savoir si ses théories étaient justes, fausses, où il s’était trompé. Ce que signifiaient les éléments oubliés. Ce mystère était le plus grand qu’il ait eu à affronter, réalisa-t-il, et ça lui fit prendre conscience de la nature même de ce qu’il affrontait. De où il était. Enfin presque.
Jérémie était face au plus grand mystère que l’on avait à affronter.

Tour désactivée.

La voix d’Aelita, apaisante, soulagée. Qu’est-ce qu’elle faisait du bien à entendre. Il baissa les yeux sur ses doigts. Les vit s’estomper. Et il réalisa alors avec une grimace que, quand bien même elle allait bien, il ne la reverrait sans doute plus. Il eut un pincement au cœur. Mais la sérénité revint. Il avait entendu Aelita. Et il savait qu’aucune voix ne lui aurait fait plus plaisir. Aelita aussi avait été irrationnelle. C’était un rêve fou qu’il poursuivait depuis des années, et il était satisfait du résultat.
A présent, c’était l’heure. Il se leva, alla symboliquement se placer au même endroit qu’Odd un peu plus tôt. Il leva les yeux vers le néon triste qui s’accrochait au plafond et éclairait la pièce. Il ne fut pas ébloui. Bientôt, la lumière envahit tout son champ de vision.
Et Jérémie Belpois s’effaça.
_________________
"Prouve-moi que tu avais raison, Jérémie, dans tout le mal que tu as causé."
Oblitération, chapitre 13

http://i39.servimg.com/u/f39/17/09/92/95/signat10.png
Et je remercie quand même un(e) anonyme qui refusait qu'on associe son nom à ce pack Razz

http://i81.servimg.com/u/f81/17/09/92/95/userba11.png


Dernière édition par Ikorih le Lun 16 Mar 2015 10:48; édité 3 fois
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*Odd Della Robbia* MessagePosté le: Mer 11 Mar 2015 18:24   Sujet du message: Répondre en citant  
[Kongre]


Inscrit le: 14 Sep 2008
Messages: 1329
Localisation: Sur le territoire Banquise entrain de faire de l'overboard
intéressant ce One shot.
je me doute que nos blonds sont morts au griffes du spectre et errent dans une sorte de purgatoire cherchant à comprendre ce qui est arriver.

_________________
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Belgarel MessagePosté le: Ven 13 Mar 2015 11:15   Sujet du message: Répondre en citant  
[Manta]


Inscrit le: 20 Aoû 2010
Messages: 534
Ce qui frappe, dans ce texte, c'est le soin apporté aux décors. Un environnement surréaliste, plaqué de jeux vidéos (point&clicks, Half-Life) et d'éclairages surréalistes (ténèbres qui n'en sont pas, vitres blanches) : le lieu est moins réel que…symbolique ? Onirique ? Subconscient ? Virtuel ?
L'intrépidité de Odd renforce ce sentiment d'irréalité. Puis son insensibilité congénitale à la douleur. Ouais, en fait, c'est carrément virtuel. Faut dire : entre the Stanley Parable, Antichamber, Arkham Asylyum, tes références vidéoludiques démontrent une culture geek exemplaire Mr. Green

Rapidement, ça vire au kafkaïen, avec des couloirs à la Antichamber, des souvenirs qui surgissent là où il faut pas…bref, anxiogène à souhait.

Si je devais résumer l'ambiance en un mot : cyber-fantastique. Classe, non ? Cool
Ceci était un authentique compliment.


Ikorih a écrit:
Et y a qu’une seule chose à faire pour le savoir, c’est terminer l’histoire !
Ah, l'ironie Ikorienne dans toute sa splendeur Mr. Green
Hum, tu aurais pu faire Jérémie un peu plus intelligent, quand même. Parce que si même moi, j'ai pu relever la corrélation entre "compréhension" et "disparition progressive", il aurait pu se montrer plus méfiant.


Ikorih a écrit:
-J’ai bien l’impression qu’on est pas dans le monde réel.
Genius.
Pourtant, la palme avait failli être obtenue par "L'espace a l'air bouleversé, par ici."
À moins de redéfinir ce qu'on entend par réel, non, anéfé. On est dans le virtuel.
À noter que l'alternance des points de vue confirme que "Jérémie" et "Odd" existent tous deux autant l'un que l'autre.

Pourquoi les guillements ? Hypothèse 1 : Enfer Artificiel made in XANA. Odd perd, Jérémie se retrouve seul après son échec. Pour reprendre l'hypothèse de ODR Wink
Hypothèse 2 : Mémoire tampon. Suite à une virtualisation ratée (en mode Désincarnation), Jérémie et Odd se retrouvent dans la mémoire super-tampon du Supercalculateur. Le monde où ils se trouvent en attendant d'être effacés émane de leur propre subconscient en déliquescence ! \o/ Malheureusement, ça n'explique pas la causalité entre "reconstitution de l'histoire" et "translucidation de Odd"
Hypothèse 2.5 (recalibrée à la fin du texte) : Cette histoire arrive tout simplement à leurs consciences, qui restent dans la mémoire du Supercalculateur, mais ne sont plus reliées à leurs corps. Il est possible que cela suive un éventuel RVLP, qui ne les aurait pas ramenés contrairement à ce qu'espéraient les autres. Dans tous les cas, il s'agirait en effet d'une réminiscence (alors que l'hypothèse d'hallucinations mutuellement suggérées ne les a même pas traversés. Pourtant, vu l'endroit, ça serait logique !)
Hypothèse 3 : Deis Ira. Ou la théorie du Dieu Bourré. Et donc, dans le monde réel.


Sinon, juste parce que j'ai envie de te faire chier.
L'avant-dernière phrase est scientifiquement inexacte. Si tu deviens transparent, ta rétine aussi (sans parler de ta pupille) : donc les rayons lumineux la traversent de plus en plus, sont de moins en moins captés par ta vision. Donc tu deviens aveugle.
Na.


EDIT : Merde alors ! Post 500 ! Ça y est, je suis une Manta Sad
_________________
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Premier commandement : Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
Troisième commandement : Tout individu a droit à la vie
Quatrième commandement : Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude; l'esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes.
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Willismine MessagePosté le: Dim 15 Mar 2015 00:11   Sujet du message: Répondre en citant  
[Blok]


Inscrit le: 09 Avr 2014
Messages: 106
Localisation: Les deux mains dans le chocolat.
C'est un très joli OS, et à mon avis le meilleur de ce que j'ai lu de toi depuis cette chose vicieuse de Halloween que tu m'avais filée. Alors d'accord, il y a des passages lourds, ce que je ne soutiens pas, et des maladresses dans l'insistance, mais cette lenteur forcée permet de créer une atmosphère qui finit par charmer. Ça oppresse, ça angoisse et c'est pas mal du tout.

Les passages de pièces qui changent me font penser à pas mal de mangas et bien sûr à Game of Throne. Un petit côté onirique, cauchemardesque. Une attaque étrange. Je ne comprends pas bien comment Jérémie a été transféré mais tant pis. Ce fut un bon moment.
_________________
Willismine : nom égoïste. Vieux psychotrope interdit à la vente.
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Ma fiction : Les Voyageurs
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Lé siniaturre sé tro ouffe.
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Silius Italicus MessagePosté le: Lun 16 Mar 2015 19:45   Sujet du message: Répondre en citant  
[Krabe]


Inscrit le: 03 Fév 2015
Messages: 252
Localisation: à l'Est d'Eden
Bonoir cher Prince de glace,
c'est un intéressant petit bijou que vous livrez là à notre réflexion. Si le thème de l'espace entre les mondes n'est pas nouveau, il a une saveur particulière quand il est appliqué à l'univers de Code Lyokô. En effet comme l'a souligné l'éminent Belgarel plusieurs possibilités existent: mémoire tampon, bulle virtuel, rêve, purgatoire, mort, ou encore espace temps rémanent entre deux retours vers le passé.

Vous avez adopté un point de vue particulier pour cette narration, du moins comparé à vos autres récits. Tout d'abord avec l'usage du méta-texte, notamment avec la référence à la barre de fer, et de l'humour. Certes cela convient au personnage d'Odd, mais ce n'est pas dans vos habitudes, si l'on excepte certains textes d'anniversaires, et le point de vue adopté est plutôt éloigné du personnage. En fait, le début du texte est marqué par un narrateur extrêmement ironique. Ce décalage accroît bien entendu les effets d'incertitude, mais donne au lecteur une large longueur d'avance sur la compréhension des faits.

Evidemment ce décalage entre connaissance du lecteur et prise de conscience des personnages est à l'origine du caractère tragique de ce récit.

Autre point qui suscita l'étonnement, le caractère langoureux et hautement métaphorique de votre style. Certes vous appréciez la comparaison, mais ce n'est pas parce que l'on apprécie un artefact littéraire, qu'il fait pour autant parti des gammes dont l'on sait jouer et que l'on emploie couramment. De ce point de vue là votre texte constitue une variation des plus intéressantes par rapport à votre style habituel (quoique n'ayant pas encore lu Ground Blizzard, il est possible que j'aie un peu de retard dans la perception de votre style, ce dont je m'excuse).

La chute du texte est assez caractéristique de la puissance que vous savez susciter, quoique l'on vous sentît moins à l'aise avec le tragique qu'avec l'horreur.

Les pièces de puzzle étaient assez amusantes et en harmonie avec le côté recherche et enquête en plus de permettre un texte des plus aéré.

La mort d'Odd est un morceau d'anthologie: elle commence sur le mode tragique, se poursuit sur le mode comique, Odd restant « le magnifique », et se termine sur l'ironie du narrateur.

Pour clore ce commentaire, je me contenterais de vous demander qu'elle est votre rapport avec Sartre. Plus que des références de la culture populaire, j'ai eu l'impression de lire un texte placé sous cette figure tutélaire: obsession des mots, jusqu'à la nausée, thème du purgatoire partagé avec autrui. Même le style partageait une certaine affinité.

Au plaisir de vous lire à nouveau.
_________________
AMDG

Prophète repenti de Kane, vassal d'Anomander Rake, je m'en viens émigrer et m'installer en Lyoko.
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