Non, vous ne rêvez pas, Ikorih se transfère aussi sur la section "Fictions et Textes" Je suis capable d'écrire sur autre chose que CL!
Bluffés hein? (a)
Je vais donc vous présenter cet OS de ma composition, tiré de la série "La Compagnie Noire". Pour ceux n'ayant pas lu au moins "Elle est les ténèbres II" et en train de lire la série (ou qui prévoient de le faire), ça vous spoile énormément
Pour la petite histoire, la scène se situe au début de "l'Eau Dort I", et le flash-back relate la fin de "Elle est les Ténèbres".
C'est principalement un OS de présentation de mon personnage préféré, toutefois.
Bref, maintenant je me tais et je vous laisse lire
Spoiler
Une silhouette noire déambulait dans les corridors du palais. On l’appelait la Protectrice, et elle dirigeait une des plus grandes cités du monde.
C’était une silhouette vaguement féminine, vêtue intégralement de cuir noir. Le noir était une de ses couleurs favorites. Il amplifiait l’aura terrifiante qui émanait d’elle. Donnait l’impression qu’elle allait absorber jusqu’à votre âme. Elle portait un masque qui dissimulait ses traits, mais rien que dans sa démarche et ses contours, on sentait qu’elle était très belle. Et qu’elle savait ce qu’elle faisait, où elle allait. Rien ne pouvait plus la stopper, et rien ne le ferait jamais.
Sur l’épaule de la Protectrice, un corbeau était posé, en croassant doucement. Le palais en était rempli. Parce que la mystérieuse créature cachée sous le cuir et le masque les adorait et s’en servait souvent et à volonté. En tant qu’espions. Ils étaient très utiles comme espions. Rapides, et passe-partout, personne ne s’en méfiait. Leur seul défaut était d’avoir parfois du mal à relayer une information et d’avoir du mal à comprendre les ordres. Elle maintenait sur eux une emprise plus inébranlable que la pierre des Dandha Presh, les lointaines montagnes. L’affection qu’elle leur témoignait restait inexplicable, cependant, car la Protectrice n’aimait personne. Et ils n’étaient que de simples serviteurs. De simples serviteurs stupides. Mais en groupe, ils formaient un vortex impressionnant, mais arrivaient aussi à veiller sur leur maîtresse correctement, parfois. Peut-être qu’elle les aimait bien parce qu’ils avaient été sa seule compagnie pendant des années, ces quinze ans d’errance.
Si, par le plus grand des hasards, quelqu’un avait examiné le cou de la Protectrice, à supposer qu’il parvienne à y avoir accès, il y aurait distingué une très, très fine trace. Comme une marque d’une ancienne blessure. Comme si elle avait été décapitée, puis qu’on avait recousu la tête à son corps. Mais bien entendu, c’était impossible. Personne n’aurait survécu à une telle opération. Et malgré le treillis de sortilèges de protections qui l’entouraient, la Protectrice était humaine. Bien que des doutes se profilent encore à ce sujet. Elle était une magicienne trop puissante aux yeux de certains, qui la qualifiaient volontiers de démon sorti droit des portes de l’enfer. Mais jamais devant elle, bien entendu. Tous la craignaient.
Elle traînait derrière elle, tel un sinistre boulet, de nombreux siècles. Mais aucun ne se voyait. Du moins, pas avant qu’elle n’ait ouvert la bouche. Parce que la Protectrice avait une manie assez déstabilisante et terrifiante pour son entourage.
« Alors comme ça, ils seraient de retour en ville ? »
La voix d’une petite fille curieuse apprenant que de proches parents à elle revenaient d’un long voyage entama le ballet. Pourtant, il n’y avait personne d’autre dans le coin, et sûrement pas une petite fille joyeuse. La suite des évènements, toutefois, allait continuer de perturber.
« Impossible. Ils sont tous morts. »
Cette fois, c’était la voix d’une sorte de médecin légiste, pragmatique et raisonnable. Plus rien de commun avec la précédente oratrice. Pourtant, il n’y avait personne, toujours, que la Protectrice.
« Ce n’est pas la première fois. Ils se relèvent toujours. »
Un vieux grincement de vieille dame superstitieuse.
« Comme nous. Mais nous sommes plus résistantes qu’eux. Et plus puissantes. »
Cette fois, c’était une voix de femme autoritaire, sûre d’elle, et qui était peut-être la véritable voix de la Protectrice. Nul n’était jamais sûr.
Elle se replongea lentement dans ses souvenirs, cherchant à se rassurer et à s’assurer qu’ils ne viendraient plus jamais dans les pattes. Ou peut-être à jubiler un peu plus de leur sort. Et ensuite, le monde serait livré à elle.
Ils n’étaient que deux. Elle, enfermée, et ce jeune homme aux boucles d’or. Saule Cygne, il s’appelait. Elle savait, pour l’avoir observé pendant ses trois jours de captivité, qu’il était amoureux de sa sœur. Sa sœur à qui elle ressemblait diablement. Beaucoup de gens s’étaient déjà fait abuser. C’était un artifice mineur de sorcellerie que de l’hypnotiser un tant soit peu. Assez pour qu’il retire son bâillon et qu’elle puisse finir le boulot.
Ils avaient dû parler cinq ou dix minutes avant qu’elle ne réussisse à le convaincre d’ouvrir sa cage, avec des cohortes de promesses. Elle savait aussi bien flatter que menacer, et en l’occurrence, menacer n’était pas accessible. Elle ne portait pas sa tenue intégrale de cuir, à vrai dire, ce qui la rendait beaucoup moins impressionnante puisqu’elle n’avait pas son morion et qu’une cape brune à capuche, héritage du temps où elle se promenait avec sa boîte noire sous le bras, était accrochée dans son dos. Cette boîte noire contenait autrefois sa tête, raccommodée par la suite. Elle avait survécu à beaucoup de choses dont une infime partie auraient tué un être humain normal.
La jeune (l’était-elle, mystère, mais elle semblait l’être) fille avait le même visage que sa sœur, à peu de choses près. Les mêmes cheveux noirs aux épaules, la même peau blafarde, les mêmes yeux noirs. Avec un petit sourire, une fois sa liberté retrouvée et accueillie avec les honneurs nécessaires, elle sortit dans la pièce principale de la forteresse. Toute la Compagnie, pratiquement, était massée autour du trône d’une mystérieuse entité. La Compagnie Noire. Autrefois ses employés, puis ceux de sa sœur à sa décapitation, puis des rebelles, ils n’avaient cessé de changer de peau, fidèles à leurs codes. Ils avaient souvent frôlé la destruction, et à chaque fois, ils s’en étaient relevés. Sa sœur était là aussi, à côté de son cher Toubib. Ils étaient amants depuis un bon moment déjà, et elle avait assisté aux balbutiements de cette relation. D’ailleurs, c’était en s’aidant de Toubib que sa sœur, l’ancienne Dame de la tour, l’avait décapitée. Ah la salope.
C’était ainsi qu’elles s’invectivaient l’une l’autre, en général. L’affection ne régnait pas vraiment. Elles en étaient plutôt à se venger sans cesse l’une de l’autre, avec une hargne et une ardeur à chaque fois plus grande. Fourberies et coup bas n’étaient pas exclus.
Il fallait profiter de l’effet de surprise. Et vite. Car mine de rien, celle qui se faisait appeler « Madame » était bien assez puissante pour la renvoyer au tapis. Ses pouvoirs magiques étaient moins puissants qu’autrefois, mais toujours opérationnels et redoutables.
Elle n’eut pas à se concentrer beaucoup. Le séisme, aidé par ses soins, mis la moitié de la Compagnie KO, et elle endormit personnellement les plus dangereux. Pour éviter les mauvaises surprises. Ce serait assez embêtant que l’un d’entre eux se réveille et lui mette des bâtons dans les roues. Surtout sa sœur. Oh son horrible sœur. Saule Cygne, derrière elle, restait planté comme un piquet, abasourdi par le cataclysme déclenché en partie par lui, et sur ceux qui l’avaient accueilli comme un « frère de cœur ». Ceux qui n’étaient pas engagés, mais faisaient partie de la Compagnie. Une voix cassante d’un homme habitué à commander le réveilla
-Tu vas m’aider à les descendre.
Il allait émettre des objections relatives à la charge de travail nécessaire, mais, toujours avec cette voix, la Protectrice, qui aimait donner l’impression de lire dans les pensées pour mieux terrifier son entourage, rétorqua
-Je vais les faire léviter. Les autres ne sont pas dangereux. Ils fuiront.
Vaincu, l’autre n’eut plus le choix. On avait pas le choix, avec elle. Elle qui était juste assez folle pour inspirer une terreur grandissante et être imprévisible, sans perdre ses pouvoirs magiques et sa fourberie.
Tel un chapelet de saucisses volantes, les membres les plus importants de la Compagnie, tels que Murgen, le porte étendard, ou Toubib et Madame, respectivement capitaine et lieutenant, descendirent l’escalier, soulevés par les pouvoirs de la sorcière. Elle ferma la marche à pas lents, bras tendus devant elle, se préparant à une longue descente capable à elle seule de vous essouffler, le tout en étant plongée dans une légère concentration. C’était son sort favori, plus besoin de se focaliser entièrement sur sa cible.
Elle eut un rire, à la fois cristallin et malveillant, qui résonna dans les lieux. Et tout en s’enfonçant dans les ténèbres, elle commença à parler en envoyant quelques boules de lumière servir de torches volantes pour escorter le convoi, effleurant les parois de leurs petits halos lumineux.
-Vous voyez ? Volesprit revient toujours. Comment espériez-vous lutter contre des siècles de survie et de malice ? Vous deviez imaginer que me décapiter suffirait ? Et puis que me capturer quinze ans après suffirait à me rendre inoffensive ? Et toi, ma chère sœur, tu aurais dû le savoir. Tu aurais aussi dû savoir mieux choisir tes gardes. Tu me connais, voyons. Ta sottise te mènera à ta perte, et tu le sais. Vous me connaissiez tous. Vous saviez tous que je vous doublerais le moment venu. Et maintenant, il est venu. Il va falloir dire bonne nuit aux profondeurs de la terre…
Un nouveau rire. Elle s’amusait comme une petite folle. D’ailleurs, elle l’était. Elle aimait élaborer des plans pour nuire, et avoir le plaisir de les voir se réaliser. Elle agissait sur des coups de tête, mais ses actions étaient redoutables. Mieux valait qu’elle ne s’intéresse pas à vous. Cette dernière phrase rappelait étrangement ce qu’on murmurait des années plus tôt au sujet de sa sœur, la toute puissante Dame de la Tour.
Après de nombreux pas, ils pénétrèrent enfin dans une grotte glacée, parée d’une douce lueur bleutée. Une fine poudreuse craquante parsemait le sol, et une sorte de pesanteur régnait, comme si s’endormir pouvait vous être fatal. Cet endroit semblait aussi en dehors du temps, comme si on pouvait y ignorer les siècles et les millénaires. Volesprit indiqua à Cygne de ne toucher à aucun des corps qui parsemaient l’endroit. Car il y avait des…cadavres ? des vieillards, prostrés sur le sol, enfermés là pour d’obscures raisons bien des années plus tôt. Ils semblaient morts. Peut-être l’étaient-ils. Sûrement. Comment aurait-il pu en être autrement ?
Les corps furent difficiles à emmener, et la tâche prit beaucoup de temps, mais ils parvinrent à atteindre un emplacement à peu près libre pour déposer leur fardeau. L’enchanteresse en bondissait presque de joie. Ses plus grands ennemis, laissés sous clé au fond d’une plaine perdue parsemée d’ombres tueuses, dans un endroit loin de tout, où personne ne les retrouverait jamais. Avec de petits gloussements semi-déments, elle disposait vivement les soldats dans les coins, sans prendre garde au regard un brin triste de Saule quand il vit son vieil ami Cordy Mather se faire poser, à la mode sac à patates. Ils s’entendaient bien, et avaient même déserté l’armée ensemble, autrefois. Qu’aurait-il dit s’il avait vu son camarade tourner casaque simplement à cause d’un béguin contrarié pour Madame ?
Toubib et Madame, justement, furent les derniers à toucher terre. Elle les appuya contre un mur, inclinés l’un vers l’autre, allant même jusqu’à joindre leurs mains dans son ballet de vengeance. Cette petite note d’humour sarcastiquement noir la mettait en joie. Elle vérifia une nouvelle fois les sortilèges de sommeil, pour s’assurer que le sort de stase présent les figerait tous avant qu’ils ne puissent se lever pour partir. Ce sort, elle en avait été victime elle-même plus tôt, des années plus tôt, dans une autre région du monde, et ne pensait pas que les faibles humains puissent également s’en sortir aussi bien conservés et entiers. Elle venait donc d’éliminer de la partie ses plus puissants ennemis. Ne lui restait plus qu’à s’emparer du pouvoir dans la ville de Taglios, la plus importante, d’où elle dominerait le Sud. Peut-être qu’à l’occasion, elle se lancerait dans la conquête du Nord, si la lubie lui en venait. Le Nord, pays de ses origines, de l’ancien empire de la Dame. Mais le Sud lui avait mieux souri jusqu’à présent.
Repartant par où elle était venue, la tête pleine de projets, laissant la glace figer lentement ceux qu’on appellerait les Captifs, elle repartit d’un éclat de rire qui résonna sur les stalactites.
Un serviteur qui passait par là n’eut pas l’audace de montrer à la Protectrice à quel point son comportement était étrange. C’eut été risquer de devenir un petit tas de cendre. De fait, elle venait d’éclater de rire dans le couloir. Avec plusieurs voix différentes à la fois. Le corbeau, dérangé par ce bruit soudain, ébouriffa ses plumes, mais ne moufeta pas plus que ça. Il avait une certaine immunité, mais ne tenait pas à la tester plus avant.
Volesprit gagna le balcon, son noir ami toujours cramponné à elle, et observa la ville de derrière son masque, un léger vent chaud fouettant son morion qui lui protégeait le visage. Dans ces bâtiments, là dans la ville, se cachaient des petits malins qui croyaient pouvoir bafouer son autorité et faisaient croire que la Compagnie Noire revenait. Il était plus que temps de les remettre un peu en place. On ne réveillait pas impunément les vieux spectres. Les résurrectionnistes de l’époque « post Dominateur » l’avaient appris en la ramenant, elle, ses maîtres et les neuf autres Asservis, à la vie.
L’oiseau sautilla jusqu’à son avant-bras d’où elle le lança vers le ciel de Taglios, accompagné par ces paroles
-Va, mon noir ami, et trouve ces petits plaisantins. Cela fait trop longtemps qu’ils s’agitent en croyant être à l’abri. Va, trouve, et ramène moi tout ce que tu auras appris. A eux, tu leur ramènera le bois pour créer leur propre bûcher.
Elle sourit en le suivant du regard. Cette petite plongée mentale dans son plus grand triomphe la mettait de bonne humeur pour la suite des évènements.
Je peux comprendre que certaines références et évènements soient inconnus à ceux qui n'ont pas lu la série, au pire, demandez des explications _________________
"Prouve-moi que tu avais raison, Jérémie, dans tout le mal que tu as causé."
Oblitération, chapitre 13
Et je remercie quand même un(e) anonyme qui refusait qu'on associe son nom à ce pack
Posté le: Mer 03 Juil 2013 22:09 Sujet du message:
Inscrit le: 13 Mar 2013 Messages: 309 Localisation: Rennes
Alors, un OS sans réponse ? C'est normal, je crois qu'ici, personne ne connaît la Compagnie Noire. Je suis dans le même cas. Mais suite à un affreux chantage affectif, je commente !
Alors, déjà, je peux pas trop parler du respect du caractère. Mais, ça me semble correct.
En tout cas, c'est bien écrit, je me suis laissée porter par le récit (parfois entrecouper de "Qu'est-ce qu'elle raconte là ?". Mais bon, quelques explications sur l'histoire m'ont aider, donc j'ai pu apprécier ce texte à sa (presque) juste valeur.
Il est légèrement triste, et dramatique. Une ambiance sombre, des souvenirs sombres.
Sinon, j'ai adoré la fin, c'est à la fois doux et ... pas doux. On voit la confiance en elle qu'elle a, et le sourire, je l'aime bien.
Alors, voilà sur ce, je vous laisse avec un dernier truc !
Spoiler
Ikorih a écrit:
héritage du temps où elle se promenait avec sa boîte noire sous le bras
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