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[Fanfic] Code Alpha 2.0 - Rainy Days [Chapitre 10]

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 Auteur Message
LixyParadox MessagePosté le: Dim 13 Mai 2018 11:50   Sujet du message: [Fanfic] Code Alpha 2.0 - Rainy Days [Chapitre 10] Répondre en citant  
[Frelion]


Inscrit le: 06 Jan 2013
Messages: 91
Localisation: Perdue
Bonjour, ça fait longtemps !

Spoiler


Code Alpha 2.0 - Rainy Days

Code Alpha 1.0 Ancienne version: 1.0 - 2.0



Lexique
Ier Prologue - C'était dangereux mais...
IIème Prologue - Le Temps des Monstres
Chapitre 01 - Quelque chose s'est brisé
Chapitre 02 - Rentrée des classes
Chapitre 03 - La tache de sang
Chapitre 04 - Drôle(s) de rancard(s)
Chapitre 05 - Confessions d'un être supérieur
Chapitre 06 - Ombre et l'Autre
Chapitre 07 - Le froid de l'océan
Chapitre 08 - Une promesse en chocolat
Chapitre 09 -
Chapitre 10 -
Chapitre 11 -
Chapitre 12 -
Chapitre 13 -
Chapitre 14 -
Chapitre 15 -
Chapitre 16 -
Épilogue -


______________________________


Ier Prologue : C'était dangereux mais...


Journal de Melvin, unique page remplie

Je me demande parfois si les premières semaines de mon année de seconde n'étaient pas un rêve. Elles étaient tellement... tellement étranges, tellement particulières. Après tout, la seule preuve que j'ai de leur existence, ce sont mes souvenirs et ceux des autres. Le problème c'est qu'on se parle de moins en moins désormais... Chacun est parti dans son coin et me voilà tout seul, comme avant. Dire que j'avais cru que je m'étais enfin fait un groupe d'amis... Enfin bref, je m'écarte du sujet. L'important, c'est ce qui s'est passé. Pour être sûr de ne rien oublier, j'ai décidé d'écrire tout ce dont je me souviens dans ce cahier.

Tout a commencé quand... c'est un peu compliqué de dire quand est-ce que tout a commencé. Peut-être dès qu'Antoine et Jean se sont retrouvés à devoir faire des travaux d'intérêts généraux pour le lycée ensemble. Ou peut-être est-ce quand Ambre est rentrée en scène. C'est un peu difficile pour moi de bien mettre le doigt sur un début précis, parce que je n'ai pas tout de suite prit part à tout ça.

Essayons tout d'abord de bien présenter le contexte. Oui, bonne idée. Antoine et moi étions dans la même classe depuis la sixième. C'est mon meilleur et seul ami. Ou plutôt... c'était. Il était très intelligent, mais m'écoutait rarement quand je parlais. Il pouvait être très antipathique, tout comme il pouvait être... oui, non généralement, il était très antipathique. Il était hautain et arrogant, croyait toujours tout savoir mieux que tout le monde. Pourquoi est-ce que je traînais avec lui si je le décris d'une manière aussi négative ? Parce qu'il a pas eu une vie facile, et je pense qu'il s'est lui même enfermé dans cette carapace. Au fond de lui, c'est quelqu'un de bien, et peut-être qu'un jour, il le sera aussi à l'extérieur. Et puis... si Antoine n'avait pas été là, j'aurais été vraiment tout seul tout ce temps.

Jean était un gars de notre classe. Il aimait bien se moquer de nous, un peu comme tout le monde. Non pas pour être méchant, mais... justement pour faire comme tout le monde. Je ne lui en veux pas. Bon d'accord, sur le coup, je lui en voulais beaucoup, mais avec ce qui s'est passé ensuite... Non, chaque chose en son temps. Quant à Ambre, c'était une fille adorable d'une autre classe, très timide et rejetée à cause de ça. Je dois avouer qu'elle était mignonne... très mignonne. Oui bon, je l'avoue j'ai été un peu amoureux d'elle, mais c'est normal à l'adolescence de ressentir une forte attirance pour quelqu'un de temps en temps... Elle était gentille, mais pas dans le sens négatif du terme. Bon, après c'est devenu compliqué entre nous et de toute façon, je n'aurai jamais eu la moindre chance avec elle. Moi je suis gros, roux et repoussant. Qui voudrait de quelqu'un comme ça ? Euh... je crois que je m'écarte du sujet.

Comme je l'ai dit plus haut, Antoine et Jean se sont retrouvés à faire des travaux d'intérêt généraux pour le lycée après s'être presque battus en classe. Et bizarrement après ça, les deux garçons et Ambre se mirent à traîner ensemble. Il n'y avait aucune raison apparente à ce rapprochement et je me suis senti délaissé. Et trahi aussi. Je suis resté tard sur une aire de jeu, assis sur un banc avec ma console de jeu portable, presque en larmes. Je dis presque parce que je n'ai pas pleuré, mais j'étais quand même vachement triste. Et puis Steve et ses gorilles sont venus. Steve c'est... oh, et il ne vaut pas la peine que je parle de lui ici, c'est juste un abruti. Bref à partir de là... mes souvenirs sont flous. Très flous.

Jusque là, tout semble normal. La vie d'un lycéen mal dans sa peau. Mais à partir de maintenant, le fun commence. Et l'aventure. Et le danger. Et la peur. Et beaucoup de peur.

D'après ce que j'ai compris, j'ai été possédé par une intelligence artificielle nommée XANA, qui m'a donné des super-pouvoirs et a tenté de tuer mes amis via mon corps. Ça fait pas très réaliste comme ça, même moi j'ai encore du mal à y croire. Une chose était sûre, j'avais bel et bien essayer de tuer mes amis. Un vieux type du nom d'Ulrich nous expliqua que cette IA cherchait à nous tuer pour... j'ai toujours pas compris pourquoi d'ailleurs, je crois qu'Ulrich avait refusé de nous expliquer ce point précis... il est un peu tard pour lui demander maintenant... Bref, le seul moyen de stopper cet adversaire, c'était de se rendre dans un monde virtuel pour désactiver des tours. Comme dans un jeu vidéo. Je vous avais bien dit que c'était génial !

Mais là, c'est vraiment devenu compliqué pour tout le monde. Ambre et Jean, qui avaient failli mourir de mes mains, étaient terrorisés. Ils voulaient plus prendre part à ça et se sont tirés. Antoine a fait son Antoine et s'est tiré lui aussi. Il ne restait plus que le vieux Ulrich et moi et j'étais bien décidé à ne pas me barrer ! Ouais, j'ai bien dû rentrer chez moi après, mais c'était une façon de parler. Toujours était-il que je voulais pas recommencer à essayer de tuer des gens. C'était... terrifiant comme idée. Je crois que j'en dormais pas de la nuit.

D'après Ulrich, X.A.N.A nous voyait tous comme des menaces et n'arrêteraient pas tant qu'il ne nous aurait pas tous tué. Il me demanda de revenir le lendemain pour m'entraîner sur le monde virtuel. Quand j'y retournai, une autre nana était avec lui, une certaine Mélissa, une « vieille amie à lui ». Ambre décida de revenir aussi, mais elle refusait de me parler, me tenant responsable de ce qui s'était passé. Antoine, lui, continua à rester chez lui, en travaillant apparemment sur comment détruire X.A.N.A.

Il y eut enfin la deuxième attaque que nous attendions tous. Alors que je me rendais à l'usine, je tombai sur Jean qui souhaitai nous rejoindre. Enfin, il voulait surtout rejoindre Ambre mais bon... passons. Ce fut un véritable carnage. Les deux adultes, Ulrich et Mélissa, perdirent la vie. Un type qui voulait nous tuer aussi, un certain William. Jean fut blessé à la jambe. Heureusement, Antoine eut le temps de mettre son plan à exécution. La victoire, si on pouvait appeler ça comme ça, était dans nos mains.

Les événements nous avaient tous énormément changés. Et rapprochés, malgré tout. On décida de se souvent se réunir à l'usine, pour vérifier que tout allait bien. On ne pouvait pas être sûr que X.A.N.A avait bel et bien était détruit. Antoine était très distant et restait souvent dans son coin. D'après Jean, il s'était pris un râteau de la part d'Ambre et c'était pour ça qu'il faisait la gueule. Ambre semblait ne plus m'en vouloir, même si elle ne parlait qu'à son amoureux de toujours : Jean. Parler, c'est un bien grand mot. Il se roulait des pelles en permanence, ça en devenait gênant. Jean resta fidèle à lui même, mais en beaucoup plus sympa. Il rigolait beaucoup avec moi et essayait même de communiquer avec Antoine qui ne répondait généralement pas. J'avoue que j'étais totalement jaloux de sa relation avec Ambre. Bref. J'avais des amis. Ils étaient particuliers, mais nous avions vécu quelque chose de particulier.

Tout les jours au début, nous nous rendions à l'usine, mais comme je l'ai dit plus haut, rien à signaler. Puis ce fut une fois par semaine, le jeudi pour être exact. Nous traînions aussi ensemble le reste du temps, mais finalement, ce fut l'un des rares moments où nous étions tous ensemble. Et finalement, un système de tour de garde fut mis en place. Et la vie normale reprit son cours. Nous nous éloignèrent, prenant chacun un chemin différent. C'est un peu triste, mais c'était inévitable. Le groupe s'était formé dans l'urgence et par besoin, pas véritablement par affinités.

Voilà. Ça doit bien faire un an désormais. Je ne pense pas que je revivrai quoi que ce soit d'aussi intense dans ma vie. C'était dangereux mais... putain, qu'est ce que c'était bien !Je n'oublierai jamais les quelques jours où Ambre, Jean, Antoine et moi étions une équipe.


______________________________


IIème Prologue: Le Temps des Monstres


???



Quand il était petit, Antoine avait peur des monstres sous son lit. Personne ne venait le voir pour le rassurer. Il était seul, avec les bruits étranges de la nuit. Ses parents étaient morts. Il l'avaient abandonnés. Pourquoi ? Est-ce que... Est-ce que c'était parce qu'ils ne l'aimaient pas ? Sa tante en tout cas, le détestait. Il ne savait pas pourquoi... Il devait bien y avoir une raison à cette haine. Peut-être qu'il était responsable du départ de ses parents.

Il pleuvait ce jour là. Cela faisait une semaine que les nuages recrachaient leur fureur sur la ville, inondant les caniveaux. Était-ce là les prémices d'un nouveau déluge ? Un autre liquide s'était peu à peu mélangé avec l'eau omniprésente dans les rues. Celui était beaucoup plus sombre. Il avait une odeur pestilentiel, presque répugnante. Surtout, il était rouge vif.

Il pleuvait aussi dans le cœur des gens. Car ce jour là, le monde allait changer et prendre une tournure différente. Plus rien n'allait plus jamais être comme avant. Personne ne s'en rendait encore compte, mais comme lié par un inconscient collectif, tout le monde ressenti une profonde mélancolie.

Il pleuvait enfin sur les joues du jeune homme qui n'en était plus un. Pas des larmes de tristesse, non, des larmes de soulagement. Il s'en était sorti. Il était vivant. L'adolescent éclata alors d'un rire sinistre qui résonna dans l'immensité vide de l'usine. Antoine resta bien une dizaine de minutes immobile et hilare, face à ce super-calculateur qui avait causé tant de souffrances.

« J'ai gagné... » dit-il finalement avec un sourire.

Lui, le petit intello du fond de la classe qui était la risée de tous. Il leur avait prouvé, à tous, qu'il n'avait besoin de personne. Que plus qu'un génie, il était quelqu'un de tout simplement exceptionnel. Bien sûr, il avait eu des doutes. Bien sûr, il avait eu des moments de faiblesse. La mort de Melvin avait été un premier coup à encaisser. A ce moment là, il avait eu l'impression de perdre l'une des deux dernières choses qui le rattachait encore à l'humanité. Il perdit la deuxième juste après, lors de sa confrontation avec la chose qui prétendait être sa sœur. Pire encore, le destin lui même avait semblé s'acharner sur lui. Ses adversaires avaient toujours un coup d'avance sur lui, semblait toujours prédire ses mouvements. Il avait eu l'impression qu'une force supérieure souhaitait le voir perdre.

Et pourtant... Alors qu'il était plus bas que terre, il était revenu sur le champs de bataille avec la vivacité d'un phénix. Désormais insensible, intransigeant, dur comme de l'acier, il avait tué tous ses ennemis un par un, dont certains de ses propres mains. Mais... il en restait un à abattre. Celui qui était au cœur de la tornade.

« Hannibal ! J'ai remporté ton petit jeu ! Montre-toi désormais !

Une lumière pâle éclaira l'écran de l'ordinateur central. C'était son Adversaire qui se manifestait. Celui que ses parents n'avaient pas réussi à vaincre et qui s'était caché dans l'obscurité jusque là. Depuis quand observait-il les moindres faits et gestes d'Antoine ? Le jeu avait commencé bien avant cette rentrée de septembre...

H : Me voici Antoine. Effectivement, tu es le vainqueur.

- Est-ce que tu as peur ? Demanda le blondinet à l'écran.

Autrefois, c'était Antoine qui avait peur. Peur des autres, peur de lui-même. Maintenant, il rayonnait. Maintenant, il triomphait.

H : Non.

- Tu devrais.

Oui, tout le monde devrait le craindre. D'ailleurs, tout le monde allait apprendre à le craindre... Plus jamais quelqu'un ne le regarderait avec mépris.

H : Si je t'ai proposé ce défi, c'était pour une raison bien particulière.

Antoine éclata de rire à nouveau. Il reprit un air sérieux en quelques instants et déclara d'une voix glaciale :

- Peu m'importe.

H : Pardon ?

C'était jouissif de prendre par surprise ce "H" qui d'habitude en savait tant. Le blondinet prenait littéralement son pied.

- J'ai dit que cela m'importait peu. Je m'en fous de savoir pourquoi tout ça. Je n'ai eu besoin de personne pour en arriver là. Je n'ai pas besoin de tes révélations pour aller plus loin. D'ailleurs, je n'ai pas besoin de toi non plus !

Et il tapota sur son clavier à une vitesse folle, aussi folle que le ton de sa voix, aussi folle que la lueur qui brillait désormais dans ses yeux.

H : Que fais-tu ?

- J'ai adapté le virus que j'avais créer pour XANA ! Je vais te tuer ! Tu m'entends ?! Je vais te tuer ! TE TUER !

Hannibal n'eut pas le temps de réagir. Le virus était déjà lancé. Antoine était seul à présent, face à un écran qui ne lui répondrait plus. De toute façon, il avait toujours été seul. Et maintenant, il le serait pour toujours.

- Personne ne peut s'opposer à moi... » comprit-il finalement en contemplant l'écran désormais éteint.

Et il avait raison.

Tout ce que le petit Antoine voulait, c'était qu'on l'aime. Alors à force de recevoir de la haine de la part des autres, il commença à l'amasser et à s'en faire une armure. Une véritable cuirasse de colère. Et à force de craindre les monstres, il décida d'en devenir un. Bien sûr, les début furent difficiles. N'est pas un monstre qui veut. Mais Antoine était déterminé. Il avait toujours su qu'il était promit à de grandes choses et il avait raison ! Il était destiné à devenir la créature la plus terrifiante qui n'avait jamais été et à ce moment là, tout le monde retiendrait son souffle. Tout le monde comprendrait qu'il aurait fallu aller voir le petit Antoine, regarder sous son lit et le cajoler.

Dès lors commencera une nouvelle ère.

Dès lors commencera le Temps des Monstres.


De toutes les conclusions que j'avais pu atteindre jusqu'à présent, celle là était décidément la pire. Alors que je regardais Antoine rire dans le noir, je réfléchissais à mes erreurs. Pourquoi est-ce que ça n'avait pas marché ? L'effet papillon était si dur à contrôler... Qu'avais-je fais pour provoquer cette fin ? J'avais l'impression que quoi que je fasse, l'issue en devenait de plus en plus sombre, de plus en plus terrifiante. Pourtant je ne perdais pas espoir.

«Je te sauverai Antoine. Je te sauverai des Monstres. Je te sauverai de toi-même. » murmurai-je dans le noir.

Et c'est reparti pour un tour...



______________________________


Chapitre 1 : Quelque chose s'est brisé


Ombre


Quelque chose au fond de moi s'est brisé. Je ne sais pas quoi. Je ne sais pas depuis combien de temps. Je sais juste que quelque chose s'est brisé.

Quand est-ce qu'on sait réellement ? Quand est-ce qu'on commence enfin à comprendre ? Est-ce que du jour au lendemain, on saute les pieds hors du lit en s'écriant : « Mais oui, mais c'est bien sûr ! » alors que tout devient clair dans notre esprit ? Où est-ce que ça va lentement, s'ancrant petit à petit au plus profond de nous même, sans que nous puissions nous en rendre compte. Et quand cette vérité s'impose à nous, il est trop tard. On ne peut plus l'oublier, même si on ne sait d'où elle vient. On tente d'ignorer son existence dans la vie de tout les jours, mais elle ne cesse de revenir nous hanter.

J'étais allongée sur le canapé poussiéreux et rempli de saleté de Jean, la tête posée sur le torse de ce dernier. J'entendais son cœur battre, ce genre de petites choses m'avaient toujours fascinée. La télévision était encore allumée, on s'était fait un marathon Doctor Who et ça avait duré toute la nuit. L'homme qui partageait mon quotidien avait fini par s'endormir, mais ce n'était pas mon cas. Il faisait encore sombre, il devait être quatre ou cinq heures du matin. Il pleuvait dehors. J'entendais les gouttes tapoter contre la vitre de la fenêtre. Ça me rappelait tant de souvenirs... Officiellement, j'étais Ambre Delmas, une jeune fille de bientôt 16 ans tout ce qu'il y avait de plus banal. Une fille ordinaire, rien de plus. Mais la réalité était bien plus complexe.

Reformulons tout ça sous la forme d'une question philosophique : y a t-il un quelconque mérite à être vivant ? La réponse est généralement non : personne n'a choisi de venir au monde ou fait quoi que ce soit dans cet objectif. Il arrive que certaines personnes gagne ce que j'ai appelé du mérite en s'accrochant à la vie, en refusant de la quitter. Dans mon cas, c'est même plus extrême : je suis venue dans ce monde par la seule force de ma volonté. Qu'étais-je à la base ? Une pensée ? Une idée ? Je n'étais même pas censée exister. L'univers n'avait pas de place pour moi, abomination sans nom. Alors j'ai regardé cet univers dans toute son immensité et je lui ai dit merde. Tout simplement merde. Tu ne veux pas de moi ? Et bien tant pis, parce qu'il faudra faire avec !

La pauvre idée que j'étais est devenue un songe. Le songe est devenu un espoir. L'espoir a prit forme, s'est approprié un nom. Si j'avais germé de la tête de cette Ambre, j'allais être son Ombre. Fidèle, la suivant partout où elle allait et la guidant à travers les obstacles qui allaient se dresser sur son chemin. Mais est-ce que mon ambition allait s'arrêter là ? Oh que non ! Devoir subir la compagnie de cette pré-adolescente insupportable était une véritable prison. J'avais besoin de plus, toujours plus, et ma soif de liberté ne pouvait s'arrêter.

Et finalement, l'opportunité de gagner mon autonomie me fut donnée. Et sans aucune hésitation, elle fut saisie. Ambre disparut à tout jamais. Quand je quittai cet étrange monde virtuel pour revenir dans son corps... enfin, mon corps, j'étais seule, pour la première fois de ma vie. Tout le monde quitta l'usine, j'avais la tête qui tournait et ne me sentait pas vraiment bien. Jean proposa de me ramener mais je refusai.

Il commença à pleuvoir. Une violente averse. Qu'est-ce qui n'allait pas ? Pourquoi je ne pouvais pas être heureuse ? Je venais d'accomplir ce pourquoi je m'étais si longtemps battue. Je venais de gagner ma liberté ! Personne ne me l'avait donné, j'avais dû l'arracher aux griffes du destin avec les miennes ! Alors pourquoi ne pouvais-je en tirer la moindre satisfaction ? C'est alors que je l'entendis. Ou plutôt, que je ne l'entendis pas. Le Silence. Immuable, Infini. Un vide que je pourrai qualifier d'éternel. Comment le décrire ? Comment l'expliquer ? J'avais vécu en colocation avec quelqu'un pendant toutes ces années, et je me retrouvais désormais toute seule. C'était tellement perturbant...

Je me souvenais avoir planifié des centaines de choses que je voulais faire après avoir gagné le « contrôle ». Je n'en fis aucune. Aux yeux de tous, je demeurais Ambre. J'essayais de ne pas croiser le regard de Melvin, car il était le seul à m'avoir déjà vue sur Lyoko, ni celui d'Antoine, tout simplement parce qu'il ne cessait d'essayer de me parler, d'attendre quelque chose de moi. Je n'avais qu'une envie, c'était de lui dire d'aller se faire foutre ailleurs, mais la gentille petite Ambre ne s'exprimait pas de cette manière. Je me contentais de converser le moins possible avec lui. Et heureusement notre groupe se fractura peu à peu et je demeurais uniquement avec Jean, qui accepta de m'héberger quand ma mère... enfin, celle d'Ambre me mit à la porte.

Foutue pluie qui me faisait repenser à tout ça... Je me levai en tachant de ne pas réveiller mon amant, et allais dans la cuisine me préparer un café. Je baillais en regardant l'heure en allumant la machine. Le bruit de la pluie m'était insupportable. Je me rendis compte que quelque chose de froid coulait sur ma joue droite. Une... une larme ? Mais pourquoi est-ce que je pleurerai ?

« Peut-être parce que tu vis dans un mensonge, me dit une voix désagréablement familière.

Personne d'autre que moi ne se trouvait dans cette pièce, c'était bien là le problème. Car la personne qui venait de me parler n'était autre que... moi. Enfin, en quelque sorte. C'était une représentation d'Ambre, un écho de son ancienne présence dans ce corps. Quelle ironie ! J'avais hanté Ambre pendant tant d'année, et désormais, c'était son fantôme qui me poursuivait. En l'apercevant, j'éclatais de rire.

- Ha ! Tu crois aux conneries que tu racontes ? Tu sais franchement à qui tu t'adresses ?

Bien sûr qu'elle le savait, vu qu'elle provenait de mon esprit... mais je ne voulais pas perdre la face contre elle. Il n'y a rien de pire que de perdre un argument face à soi-même. « Ambre » se rapprocha de moi, mangeant une pomme imaginaire qu'elle tenait dans sa main. Elle était belle, comme elle l'avait toujours été. Coquette à la perfection, à un point que même dans mes rêves les plus fou je ne pourrai atteindre.

- Oh oui, c'est vrai, je m'adresse à la terrible Ombre, celle qui n'a aucune limite, qui fait ce qu'elle veut...

D'un seul coup, elle se retrouva en face de moi, son visage pratiquement collé au mien. Je reculai par surprise et me retrouvai contre le mur. Son visage était déformé par une expression de haine à la limite du sadisme. Elle eut un sourire ressemblant plus à une grimace et mettant tout mes sens en alerte.

- Alors dit moi, usurpatrice, pourquoi fais-tu semblant d'être Ambre ? Pourquoi essaies-tu de l'imiter ainsi ?

Ce n'était plus des larmes, mais des gouttes de sueurs qui coulaient doucement sur mes joues.

- C'est parce que... c'est parce que ce serait bizarre de me comporter ainsi ! Les autres trouveraient ça louche !

Pourquoi m'étais-ce impossible de la contrôler ? Cette « Ambre bis » faisait partie de moi après tout, aucune autre personnalité n'était venue au monde dans ce corps. Alors pourquoi passait-elle son temps à me rappeler toutes ces choses... que je voulais oublier ? Était-elle... l'incarnation de mes regrets ? Non, impossible, je n'en avais aucun !

- C'est ça, essaie de te rassurer là dessus ma jolie. Imagine la tête de Jean quand il apprendra la vérité.

Merde... C'est vrai qu'elle pouvait lire dans mes pensées.

- Il... Il n'a pas besoin de le savoir.

- Comment dois-on t'appeler déjà ? Ah oui. Meurtrière.

Son visage changea à nouveau et ses traits s'adoucirent, exprimant désormais un mélange de surprise et de tristesse.

- Ombre, je... commença t-elle.

Elle imitait la véritable Ambre au moment de sa chute. Au moment de sa mort. Sa mort que j'avais provoquée. Il ne fallait pas que je l'écoute. J'étais heureuse d'avoir enfin put me débarrasser d'Ambre. Avant, j'étais prisonnière, l'oublier serait oublier pourquoi je m'étais battu jusque là. Je ne devais pas me laisser faire. Je la repoussais mais mes bras passaient à travers elle. Sa forme redevint brusquement monstrueuse. Elle me plaqua au sol avec une facilité déconcertante et commença à m'étrangler lentement.

- Qu'est-ce que tu comptes faire, Ombre ? Me pousser dans le vide ?

- Tu... n'es pas réelle... essayai-je de prononcer.

La douleur, pourtant, l'était.

- Pardon ? Je n'ai pas bien entendu, me répondit-elle avec une voix faussement narquoise.

- TU. N'ES. PAS. RÉELLE, hurlai-je de toute mes forces.

Et finalement elle lâcha prise. Je lui jetai un coup d'œil. Elle me regardait, toujours avec un sourire que je ne pourrais décrire que de mauvais. Elle ouvrit la bouche et déclara tranquillement :

- C'est vrai, je ne suis pas réelle. Et toi non plus d'ailleurs. »

Et aussitôt ces paroles dites, elle disparut, comme si elle n'avait jamais été là. Pourtant, je savais qu'elle était toujours quelque part dans ma tête, à guetter de la moindre faiblesse à sa portée pour continuer à me torturer avec. Je me relevai, essoufflée. Cela devenait de plus en plus rude de combattre cette pseudo-Ambre.

« Qu'est ce qui s'est passé ici ? Pourquoi t'as crié ?

C'était Jean, en t-shirt et caleçon qui venait d'arriver sur les lieux. Il fallait admettre que ma bataille contre moi même avait provoqué un sacré désordre, et que j'avais été loin d'être discrète. Un paquet de céréales s'était déversé sur le sol, ainsi qu'une bouteille de lait. Jean m'aida à me relever, toujours avec une expression de profonde surprise sur le visage. J'étais moi même assez confuse par ce qui venait de se passer, je n'avais pas le courage de lui d'inventer une excuse plus pertinente que : « j'ai trébuché ». J'avais besoin de prendre l'air, je ne pouvais pas rester avec lui et sa bouche béante d'incompréhension. J'allais m'habiller et faire un tour dehors, ça allait me faire le plus grand bien ! En me voyant enfiler mes vêtements, le grand ténébreux demanda avec une voix enroué :

- Mais... où-est ce que tu vas ?

- Simplement faire des courses, il y a plus de lait, non ? »

Je l'embrassai sur la joue, le laissant toujours aussi dubitatif en plein milieu du carnage que j'avais provoqué. Ne l'écoutant pas lorsqu'il me fit une réflexion sur les horaires d'ouvertures des magasins, je me précipitai vers la sortie. En quelques instants, j'étais dehors, sous cette pluie que je détestais tant. Jean était bien gentil, et j'étais sûre de beaucoup l'aimer mais... lui aimait Ambre. C'était d'elle qu'il était tombé amoureux, pas de moi. Je n'étais qu'une copie de cette fille qui l'avait séduite... Non, je ne devais pas laisser ce genre d'idées néfastes me remplirent le cerveau. Mais peut-être que...

« Peut-être que ce jour là, ce n'est pas Ambre qui a disparu. Peut-être que c'est toi. » ricana la voix dans ma tête.

Je ne devais pas l'écouter... mais d'un autre côté... La Ombre que j'étais il y a un an était morte, ça ne faisait aucun doute. Celle qui était prête à tout, celle qui voulait hurler à pleine voix qu'elle existait, celle qui aurait tout fait pour rester fidèle à elle même. Je m'assis sur un banc. C'était la rentrée des classes aujourd'hui, mais je ne pensais sans doute pas m'y rendre. J'allais faire comme tout les jours et vivre dans cette monotonie avec Jean et sa petite sœur. Sans passé, sans futur, sans rien.

Il pleuvait beaucoup. Il commença à pleuvoir sur mes joues. La rue était pratiquement vide, mais quelqu'un se dirigeait vers moi. Dans la brume on aurait dit... Ambre ? C'était impossible, elle était encore perdue sur Lyoko ! Après quelques secondes, je remarquai que la personne avait de long cheveux bleus... Quelle idée stupide de croire que c'était ma « moitié »... je devenais vraiment parano.

En tout cas, cette nouvelle arrivante s'arrêta juste devant moi. Elle était trempée, tout comme moi, mais si je grelottais de froid, elle, semblait rester insensible à ces intempéries. Elle pencha la tête sur le côté en me regardant.

« Quoi ? T'as un problème ? »

Elle ouvrit la bouche, comme si elle voulait dire quelque chose, mais se ressaisit. C'était quoi, une mendiante ? Franchement, est-ce que j'avais l'air d'avoir de l'argent ?! C'est alors que contrairement à toutes mes attentes et avec une rapidité fulgurante, elle me donna un coup de poing dans le ventre d'une force incroyable qui me projeta en arrière de quelques mètres. Encore sous le coup de la surprise, je me relevais. C'était... c'était pas possible, elle était toute frêle ! Comment pouvait elle avoir une telle puissance dans les bras ? Encore endolorie, je m'écriai :

« Mais ça va pas bien ? Si c'est la baston que tu cherches tu vas pas être déçue ma vieille ! »

Je savais toujours me défendre. Je n'étais pas prête d'oublié l'une des choses qui m'avait permis de m'en sortir jusque là. J'avais réussi à faire face à Melvin lorsqu'il était possédé par X.A.N.A., c'était pas une pauvre ado qui allait me chercher des noises. Elle allait voir ce qu'elle allait voir.

« Ombre, je vais te demander de me suivre. S'il te plaît. » dit-elle soudainement, avec une voix creuse, comme si c'était une récitation.

Co... comment m'avait-elle appelé ?! « Ombre »... ? Mais... personne ne connaissait mon existence, sauf Melvin, et il ne me considérait que comme un avatar d'Ambre ! Alors que mon agresseuse se rapprochait dangereusement de moi, je compris que quelque chose ne tournait définitivement pas rond. Tout mes sens étaient en alerte. Vu la force dont elle avait témoigné, je n'avais strictement aucune chance. Je me mis à courir, aussi vite que je le pouvais, une voix moqueuse résonnant dans mon crâne, répétant encore et encore :

« Tu vois ? Je te l'avais dit ! »


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Dernière édition par LixyParadox le Sam 27 Nov 2021 11:04; édité 13 fois
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Minho MessagePosté le: Mer 23 Mai 2018 10:19   Sujet du message: Répondre en citant  
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Remarque préliminaire : Une fois n'est pas coutume, ce commentaire abordera plus la question de ton univers, ta décision de revenir une nouvelle fois, que l'intrigue en elle-même. Mais promis, je reviendrai très vite pour parler plus en profondeur du scénario, cela ne me semblait juste pas en adéquation avec tout ce que j'avais déjà à dire pour aujourd'hui Wink

Définir une fanfiction est une tâche compliquée car il existe un très grand nombre d'écrits d’un caractère très divers, de manière qu’on a du mal finalement à définir le terme, le style de ces univers plus ou moins attractifs selon les goûts de chacun.
Le constat que pose les lecteurs de ce forum est assez déstabilisant pour les critiques au vu de sa diversité mais malgré les difficultés, il y a eu des tentatives de circonscrire le genre (fan)fictionnel en ces lieux.
On va trouver certains commentaires qui vont se concentrer (exclusivement) sur le contenu, les rouages qui, une fois enclenchés, font tourner correctement cette vaste machinerie qu'est l'intrigue. Dans ces conceptions, la fanfiction apparaît parfois trop simplement comme un genre qui parle d’amour et d’aventure. Ceci est beaucoup trop restrictif car il y a des récits qui ne parlent ni d’amour, ni d’aventure et qui sont quand même des fanfictions autonomes.
Certains ont pensé à établir une typologie de la fanfiction basée sur le statut des personnages romanesques, de DA, desquels serait dérivé l'écrit en question. On peut dire que c’est à la rigueur possible jusqu’au moment où les auteurs n'utilisent pas les pinceaux des Nouveaux Romanciers. A partir de ces derniers où le personnage s’effrite, cela n’est plus possible de se baser sur les seuls protagonistes pour cerner un récit.
Certains ont essayé d’établir une typologie basée sur les formes. Là encore, cela ne parait pas satisfaisant puisque les formes que peut épouser la fanfiction sont extrêmement nombreuses (écrit poétique, fleuve, d4rk,…). Là encore, on a des types d’énonciation qui sont bien différents (à la première personne, 3ème personne, 2ème personne même dans certains cas,…).
Outre le fait que tous les types d’énonciations sont possible, l'auteur peut singer l’énonciation des autres genres, c’est-à-dire qu’il peut raconter comme un historien, un diariste, un commissaire de police, etc. La fanfiction a un côté caméléon, ce que tu représentes à merveille selon moi car Code Alpha est un patchwork d'émotions : on rit, on pleure, on frissonne... en particulier devant le personnage de Steve qui est particulièrement réussi (c'est dit très simplement mais c'est véridique, je suis passé par tout un tas de sensations plus ou ou moins agréables à la lecture. Cela n'est pas donné à tout le monde de provoquer chez le lecteur de la joie, du dégoût, de manière aussi puissante en tout cas).

Quand on regarde l’histoire littéraire du forum, on se rend compte que Code Alpha a eu tendance à se développer aux périodes où les autres écrits avaient tendance à se désagréger, avec des auteurs moins présents dans le coin ou une inspiration moins grande néanmoins. Toi, tu mélanges tout sur ton topic. Ta fanfiction va parodier tout un tas de genres (le drame côtoie la comédie grossière qui côtoie elle-même la science-fiction), tu va romaniser toutes ces tendances littéraires, tu vas les intégrer à ton œuvre. Tu vas mélanger tous ces genres, parfois inconsciemment sans nul doute, en dénonçant leurs conventions, leurs formes, leurs langages convenus. Tu emmènes ton lecteur là où on ne t'attend pas forcément. Il y a de l'action, du monologue intérieur, des adultes qui se joignent à la valse des adolescents, du scolaire terrifiant quoique parfois reposant, du journal intime, etc. Au fur et à mesure, ta fanfiction va éliminer certaines touches (l'humour se fait plus rare au fur et à mesure que les enjeux augmentent) et tu vas en profiter pour intégrer les autres rebondissements de force, parfois de manière trop brutale (comme la mort qui tombe à la fin du chapitre, l'exécution froide qui débarque sans que le lecteur n'y soit préparé). Tu vas successivement reprendre les thèmes et les procédés du thriller, du roman réaliste, de la satire qui se veut critique et moqueuse de son sujet. Pour ce dernier point, je pense particulièrement à tes personnages (Antoine en tête) que tu ne manques pas de juger sévèrement à la moindre occasion Et c'est ce que j'aime le plus chez toi, tes protagonistes sont tous des antihéros, mais tu ne tombes pas pour autant dans le travers d'en faire tous des psychopathes. Leurs parcours et leurs choix restent totalement cohérents avec leur âge, leur background et les dérives propres à l'adolescence sont correctement abordées selon moi.

Par contre, force est de constater que le critique qui veut analyser Code Alpha dans sa globalité est confronté à plusieurs problèmes :
- Il n’y a pas vraiment de règle formelle : ta fanfiction a un côté hors-la-loi, par opposition à la main de fer de certains qui en font un genre très codifié.
- Les origines de ton intrigue principale sont floues et discutées : quand est-ce que tout ça apparaît vraiment ? Est-ce qu’il faut considérer certaines formes qui semblent précéder la première version comme de simples erreurs du passé ? Dois-je lire ce que tu présentes comme "moins bon" en sachant que je vais être certainement spoilé sur quelque chose qui s'annonce meilleur ? C’est difficile à dire.
- L’objet principal du scénario et tes propres intérêts/envies ont énormément évolué avec le temps, ce qui ajoute à la difficulté à mon sens de te cerner amplement en tant qu'auteur.
- Les moyens employés et le ton de ton récit sont extrêmement variables.
- C’est le seul texte qui semble en permanence inachevé au sens où c’est un texte qui est encore extrêmement vivant, un topic qu’on continue à explorer avec plus ou moins de surprises à la clé.

C’est une tentative de cerner ton travail très discutable et pauvre, j'en suis bien conscient. Si elle est si pauvre, c’est parce qu’il est peut-être impossible de définir vraiment Code Alpha. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, les commentaires se sont succédé mais il faut croire que chacun vit de manière inédite l'expérience immersive que tu nous proposes. Le plus étonnant, c’est que Code Alpha va aller jusqu’à intégrer les critiques qui lui sont faites, en se renouvelant sur d'autres topics et en étendant le sous-forum un peu plus. Ta diégèse intègre donc une palette considérable de genres et va jusqu’à intégrer les critiques qu’on lui adresse, ce qui est honorable quand on constate que la tendance est plutôt à ne jamais se remettre en question.

Pour finir, je vais parler du nœud de tout ça selon moi, ce qui suscite sans aucun doute l'intérêt de ceux qui te lisent : le cas Ambre/Ombre. Ce mythe du double connait un très grand succès dans la littérature occidentale car cette thématique double offre beaucoup de possibilités, notamment du PDV du moi, dont les possibilités sont prolongées. Ombre est une sorte de deuxième « moi » qui va rentrer en conflit avec le « moi » original. A l’époque du Romantisme, le double va exprimer une crise de l’identité, ce qui est toujours le cas chez Maupassant (on peut le voir dans sa nouvelle "Le Horla"). Répercussion large dans la littérature qui suivra cette période, et encore aujourd'hui d'ailleurs. Outre les possibilités prolongées du « moi », le double est aussi une figure essentiellement narcissique qui permet d’incarner ses envies les plus secrètes : Ombre peut permettre à Ambre de réussir là où le « moi » original échoue. C’est une figure de la transgression qui permet au « moi » double d’assouvir ses pulsions. Si l'on prend l'exemple de Stevenson, Hyde permet au Docteur Jekyll d'effectuer toutes les recherches que la société victorienne de l’époque, particulièrement stricte, lui interdit de faire.

Le double altère toujours le « moi » original : il a un impact dessus. Presque dans tous les cas, un conflit mortel est mené entre le « moi » original et le « moi » transgressif. Le double essaie d’accaparer la place du « moi » originel (il veut l’expulser) et cela se vérifie dans ton intrigue. L’être originel ne peut se libérer qu’en tuant le double ; mais paradoxe car tuer le double, c’est au fond se tuer soi-même. Ré-identification de l’un et de l’autre au moment de la mort. C’est le prix à payer pour retrouver son intégrité... pas vrai Ambre ? Est-ce cela qui l'attend ? Le retour d'une fillette brisée par sa nature profonde ? L'avenir nous le dira !
Enfin, cette forme du double va aussi entraîner certaines particularités narratives : la dualité s’inscrit dans la matérialité du texte. C’est un thème que le fantastique va beaucoup exploiter. Renouvellement de la narration, il y a deux points de vue sur ce que vit Ambre/Ombre mais aussi deux versions à Code Alpha, un hasard ?

Au plaisir de lire la suite, bravo pour ta persévérance !
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LixyParadox MessagePosté le: Mar 17 Juil 2018 14:13   Sujet du message: Répondre en citant  
[Frelion]


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Chapitre 2 : Rentrée des classes


Melvin



J'émergeais doucement en ouvrant les yeux. Le bruit désagréable d'enfants qui ricanaient m'avait tiré hors de ma torpeur. C'était Luc et Martin, mes deux affreux petits frères jumeaux avec qui je partageais ma chambre depuis... depuis leur naissance. Tous les matin, c'était la même chose, ils étaient debout une heure avant moi et foutaient le bordel. Aujourd'hui n'avait pas fait exception, il était cinq heures et demi du matin...

« Mais fermez-là...

- Hey, Grovin est réveillé ! Gloussa Luc. »

Ils étaient indissociables. Luc avait juste les cheveux plus courts que Martin. Et ils étaient tellement, mais alors tellement pourris gâtés ! Alors que moi, à leur âge, je n'avais le droit à rien, eux faisaient tout ce qu'ils voulaient.

« C'est pas possible de dormir au moins une demi-heure de plus ? Les suppliai-je.

- Grovin a besoin de beaucoup de sommeil.

- C'est pour être capable de bouger tout son gras ! »

Bon, ça ne servait à rien de rester davantage avec eux. Je savais pertinemment que ça n'était que des enfants mais c'était loin de tout excuser dans leur comportement. Je quittai la chambre en évitant les coussins qu'ils tentèrent de me lancer à la figure et courrait me réfugier dans le salon. Il faisait encore nuit, et un croissant de Lune brillait dans le ciel. On ne voyait pas d'étoiles, il y avait trop de gros nuages noirs qui les camouflaient. Aujourd'hui allait être une journée sinistre. Nous étions début septembre, et c'était la rentrée.

Personne n'aimait la rentrée. Enfin, pas grand monde, mais il devait bien y avoir des exceptions. Cependant, la plupart du temps, les gens avaient quelque chose à retrouver au lycée. Des amis, des amours, de la rigolade ou d'autres trucs du genre. Pas moi. Depuis la fin de notre « bande » qui n'avait duré que quelques semaines, je n'avais pratiquement plus adressé la parole à qui que ce soit qui ne soit pas un pote d'internet vivant loin ou un membre de ma famille.

J'étais invisible. Personne ne faisait attention à moi. J'aurais pu mourir ou disparaître, les gens ne sauraient même pas qui j'étais à la base. C'en était presque drôle tellement c'était pathétique. La question que j'étais en droit de me poser était : « pourquoi continuer ? » La réponse était simple : parce que je n'avais pas le courage de mettre fin à cette souffrance qui me tenait au quotidien. Et dire que... et dire que j'avais vraiment cru que tout ça prenait un sens l'année dernière, avec Antoine, Ambre et Jean, affrontant des intelligences artificielles maléfiques ! Mais tout ça c'était terminé. Ça avait été tellement rapide... tellement effrayant et tellement incroyable. Je savais que personne ne me croirait jamais. Les seules personnes à avoir partagé cette expérience étaient séparées de moi, j'allais donc devoir garder tout ça pour moi, dans un coin de ma tête.

C'était aussi une des raisons qui me faisaient continuer : le fait de savoir que dans ce monde d'adulte vide de magie et de rêve, des choses aussi surprenantes pouvaient survenir. Maintenant j'étais prêt à croire en tout. Des extra-terrestres ? Pourquoi pas ? Voyage dans le temps ? Sans doute ! Tout était possible, et j'étais l'une des rares personnes à en être consciente. Et c'était ma fierté, mon privilège, d'avoir été séparé de ce scepticisme qui nous habitait tous. C'était ça au final qui me rendais tellement supérieur à tout les autres gens de mon âge, qui avaient beau avoir une vie sociale, des petites copines et un avenir radieux.

Mais... c'est bien beau d'avoir cette connaissance, et de pouvoir me considérer comme supérieur. N'empêche que moi aussi je voulais avoir une vie sociale, une petite copine et un avenir radieux. Il semblerait qu'on ne pouvait pas tout avoir, malheureusement... Je n'avais aucun talent dans quoi que ce soit, je n'étais pas particulièrement intelligent, je me serais même décris comme tout juste dans la moyenne et niveau physique... j'étais gros et roux. Un combo qui n'était pas très populaire.

« Toi aussi, tu as du mal à dormir ?

C'était Lucie, ma sœur aîné. Tout comme moi, elle avait hérité de la part de nos petits frères d'un surnom assez horrible : la Folle. Sauf que dans son cas, ils n'avaient pas tout à fait tort. Lucie était vraiment particulière. Et elle avait bel et bien un trouble mental diagnostiqué, avec des cachets à prendre tous les soirs. Je comprenais pas trop ce qu'elle avait, mais je savais qu'elle avait fait beaucoup de mal à toute la famille lors de ses « crises ». Désormais, avec ses calmants, elle était assez amorphe et donnait tout le temps l'impression d'être dans les vapes. Ou complètement drogué. Elle allait à Kadic aussi, mais j'évitais de lui parler là-bas. Ma réputation était déjà assez basse comme ça.

- Ah, c'est toi. Ouais.

- Tu stresses pour aujourd'hui ? Me demanda t-elle.

- Non, mentis-je. Je ne voulais pas en parler avec elle.

- Tu as de la chance.

- Bon, je... je vais préparer le petit déjeuner, expliquai-je en m'éloignant.

- Je vais t'aider.

Lucie était pleine de bonne volonté mais... Elle n'apportait pas vraiment beaucoup de bonnes choses aux gens qui s'approchaient d'elle. Je préférais sincèrement garder mes distances.

- C'est vraiment pas la peine. »

Elle hocha la tête, pour me signifier qu'elle avait comprit et s'éloigna. Une vingtaine de minutes plus tard, la maison s'était totalement réveillé. Luc et Martin courrait partout, poursuivit par mon beau-père désespéré tandis que ma mère buvait son café en lisant le journal sur sa tablette. J'avalais mes tartines le plus lentement possible, voulant repousser le plus loin possible le moment où j'allai devoir repartir à Kadic.

« Melvin, je t'ai déjà dit de prendre de la confiture allégée, me sortit sèchement ma mère.

- Maman, le médecin a dit que je n'étais plus en dans la courbe d'obésité...

- Et tu souhaites y retourner, c'est ça ? Libre à toi. Mais ne vient pas te plaindre après.

Par dépit, je m'emparai de la dite confiture.

- Ah, et cette année tu pourras essayer de passer plus de temps avec ta sœur tout de même. Elle m'a raconté que tu ne lui avais jamais adressé la parole au lycée.

Lucie devint rouge comme une pivoine. Je lui lançai un regard noir tandis qu'elle murmurait :

- Maman... Tu avais promis de ne rien dire...

- Quoi ? Vous êtes tous les deux asociaux, vous pourriez vous entre-aidez tout de même. Ah, vous êtes tellement des empotés comme votre père ! »

Le repas se termina avec comme seule animation la bataille de céréales entre Luc et Martin.

Lucie et moi attendions à l'arrêt de bus. Avant, elle venait rarement en cours et je n'avais pas à me la coltiner. Alors que là, elle allait me coller toute la journée si je ne faisais rien ! On s'était déjà moqué de moi parce que j'étais son frère, j'avais déjà beaucoup de tares à supporter tout seul, je ne pouvais pas porter les siennes en plus !

« Lucie, j'ai oublié mon porte-monnaie, je vais aller le chercher !

- Tu veux que je t'accompagnes ?

- Noooon, pas la peine ! Si je ne suis pas revenu à temps, prend le bus sans moi !

- Je te garderai une place alors, on ne sait jamais. »

Et je parti aussitôt dans la direction du lycée. Il allait falloir marcher vite, mais j'allais y arriver à temps.

Au bout d'une vingtaine de minutes, j'apercevais Kadic. J'allai voir à l'entrée parmi la foule d'élève ma classe afficher sur un tableau et rejoignais aussitôt la salle qui allait m'accueillir pendant dix mois. Ça n'allait pas sonner tout de suite mais contrairement aux autres, je n'avais aucune anecdote à raconter et de toute façon personne pour les écouter. Et puis, je ne pouvais pas prendre le risque de tomber sur Lucie. J'arrivai donc dans la salle B22, qui allait être la pièce dans laquelle la seule classe de première ES de l'établissement allait passer son quotidien. Il n'y avait pratiquement personne, à part un vieux professeur que je n'avais jamais vu et... Antoine ? Oui. Pas de doutes possible, c'était bien lui, assit tout seul à une table. Il avait sacrément changé ! Dans mes souvenirs, il n'avait jamais été quelqu'un de très soigné mais avait toujours gardé un je-ne-sais-quoi de noble dans sa posture. Chacun de ses faits et gestes étaient accomplis avec l'ultime conviction d'être un être exceptionnel. Rien qu'en le regardant, on pouvait sentir la fierté et l'égocentrisme qui débordait en lui. Le garçon que j'avais en face de moi était comme une sorte de fantôme de ce que je venais de décrire. Il portait une vieille chemise couverte de tâches de café et... d'autres choses. Ses lunettes étaient totalement rayés et son visage était recouvert d'une manière archaïque par une barbe de pré-adolescent s'approchant plus du duvet qu'autre chose. Et surtout, il était maigre. Terriblement maigre. Déjà qu'il n'était pas bien gros avant... Était-il devenu anorexique ? J'allais aussitôt vers lui.

« Antoine ? demandais-je, comme pour être sûr que c'était bien lui.

Il sursauta, il avait du être perdu dans ses pensées et me regarda avec méfiance. Il resta quelques instants à me jauger de la sorte, comme s'il ne me reconnaissait pas. Finalement, il tendit la main dans ma direction. Je mis à quelques temps à comprendre que c'était sa manière de me dire bonjour, et je fini par la serrer.

- Comment ça se fait que tu es en section économie sociale ? Tu m'as toujours dit vouloir aller en scientifique... l'interrogeai-je.

Je me souvenais de conversations interminable où seul lui parlait, et à chaque fois il m'expliquait à quel point seul la S valait le coup et était une filière digne de l'accueillir. Pouvait-il avoir à ce point ravaler toute sa fierté ?! Il se racla la gorge et répondit brièvement :

- Je... hum. N'avais plus les résultats suffisant.

C'était assez difficile à croire. Qu'il n'est pas eu la moyenne en sport, ça c'était totalement plausible, mais qu'il ai échoué dans les matières dites scientifique qui étaient pourtant son point fort, je n'aurais jamais cru ça possible. Enfin, j'étais tout de même content de le retrouver. Peut-être que tout allait redevenir comme avant... en mieux ! Il avait peut-être appris l'humilité au travers de ce qui l'avait rendu comme ça, et nous allions peut-être pouvoir enfin avoir une relation d'égal à égal. J'allais m'asseoir à côté de lui mais il posa subitement son sac sur le siège à côté du sien et me lança un regard noir remplis de mépris qui me fit ravaler toutes mes espérances, avant de s'écrier d'une voix aiguisé comme un couteau :

- Je t'ai autorisé à t'asseoir à côté de moi ? »

Le « moi » était teinté du même narcissisme qu'avant, mais en plus puissant. Je n'étais pas psychologue et ne possédais pas la capacité d'analyser les faits et gestes des gens pour en déduire leur personnalité, mais une évidence s'imposait tout de même : Antoine était encore pire. C'était pas logique. Ce qu'on avait vécu lui avait pas appris les valeurs fortes de l'amitié, comme dans les films ? Il fallait croire que non.

Après m'avoir prononcé ces mots, il sortit un carnet de sa poche et se commença à le griffonner en plaçant ses bras de manière à ce que je ne puisse pas le lire. Je restai devant lui, bouché bée , avant de m'énerver intérieurement. Très bien ! Il voulait pas de moi ? Tant pis pour lui, je n'avais pas besoin de lui non plus ! Je m'écartais de sa table, allait m'asseoir à un endroit opposé et sortais mes affaires. Avant que je ne m'en rende compte, j'étais au bord des larmes. Et ça m'énervait encore plus, car je me trouvais ridicule. Mais bon, je venais de me faire jeter par l'une des seules personnes que j'avais pu appeler « ami », c'était comme une trahison, un coup de poignard là où je pensais que jamais il n'y en aurait. Et surtout pas de la part d'Antoine... parce que malgré son ego surdimensionné... ben il s'était toujours inquiété pour moi quand on traînait ensemble. Quand j'étais malade et cloué au lit, il m'appelait en criant et en m'ordonnant de venir illico au lycée. Il m'avait craqué ma Nintendo DS GX. Il venait souvent squatter chez moi pour bidouiller des ordinateurs. Il m'ignorait pas comme la plupart des gens. Et c'était tout ce dont j'avais besoin, juste une personne qui reconnaisse mon existence. Tout ça venait de voler en éclats. Il m'avait comme tout le monde, renié.

« Excusez moi... puis-je m'asseoir à côté de vous ?

Je relevai la tête. Debout devant moi se tenait un jeune lycéen que je ne connaissais même pas de vue. Il était très propre sur lui, en chemise avec une cravate, ce qui lui donné un air extrêmement distingué, ce qui était rare pour des ados de notre âge. J'espérais qu'il ne subissait pas trop de moquerie à cause de ce choix vestimentaire plutôt singulier. Les ados étaient rudes entre eux. Il avait une petite barbe de trois jours, bien plus élégante que celle d'Antoine. Ses cheveux bruns étaient soigneusement peignée sur le côté et le clou du spectacle était un sourire honnête qui illuminait son visage.

- Hum. Oui, pas de soucis.

Son sourire s'élargit. C'était la première fois qu'un élève totalement inconnu m'adressait la parole de cette manière... Il avait perdu un pari avec ses amis ou quoi ?

- Je m'appelle Augustin ! Et vous ? Enfin, puis-je vous tutoyer ? me demanda t-il une fois assit. Quelle étrange personnage...

- Ben euh... oui... !

Je crois que jamais je n'aurais pensé entendre ce genre de phrases sortir de la bouche d'un de mes camarades. Et encore moi avec moi comme interlocuteur !

- Vous... pardon, tu, es un ancien dans ce lycée ?

Je hochai la tête, sans véritablement savoir où il voulait en venir, ni même quoi ressentir face à lui. Était-il en train de se moquer de moi, ou était-il sérieux ? L'expression qui animait son visage semblait franche et sincère, mais on ne pouvait jamais être sûr. J'avais déjà été victime de plusieurs canulars qui m'avaient laissé de sacré séquelles.

- Mes sœurs et moi-même sommes nouveau dans le secteur, et donc j'aurais aimé savoir...

Je l'interrompais aussitôt.

- Écoute, si tu cherches à te faire des potes, t'es mal tombé, parce que tu as en face de toi le plus gros asocial du bahut.

Il s'approcha de mon visage et devint tout à coup presque effrayant, quand il me dit avec sa voix joyeuse comme à chaque fois qu'il ouvrait la bouche :

- Voyons... il ne faut pas te sous-estimer, Melvin !

Co... comment savait-il mon prénom ? Mais d'où sortait ce mec complètement louche ?! Après ce cours instant de panique, je me rendit compte que mon identité était inscrite en lettre capitale sur mon carnet de correspondance. Il avait sans doute dû l'apercevoir. Sans doute.

- Enfin bref, je suppose que tu comptais déjeuner tout seul ce midi ? Pourquoi ne pas te joindre à nous ? Nous pourrons ainsi faire plus ample connaissance ! Ou peut-être vais-je un peu vite ? Navré, je ne suis pas très doué pour les relations humaines.

Il eut un petit sourire gêné. C'était mignon. Il était un peu comme moi en réalité, solitaire, et ne cherchait qu'à se faire des amis. Après tout pourquoi pas, même s'il était très bizarre, c'était toujours mieux que de manger mon repas tout seul dans un coin. J'allais répondre par l'affirmative quand le professeur se leva et tapa de toute ses forces avec un livre sur son bureau. C'était un enseignant assez étrange, il était trapu, avait d'immense cernes noires sous les yeux. Ses cheveux mi-noir mi-gris était totalement en bataille. Il devait avoir la cinquantaine à tout casser. La salle était remplis, tout les sièges étaient occupés (sauf celui à côté d'Antoine), le cours pouvait commencer.

- Je me présente, cher élèves... Je suis le professeur Guidon... je vous enseignerai les mathématiques, et je serais aussi votre professeur principal... Si vous avez un problème... je pourrais sans doute vous aider. Si vous êtes un problème... je saurais aussi vous aider... d'une autre manière... qu'on soit bien clair ? Pour ceux qui se demande pourquoi vous ne m'avez jamais vu à Kadic... c'est tout simplement parce que c'est ma première année ici. Des questions ?

Sa voix était assez désagréable, on avait la constante impression qu'il se raclait la gorge. En tout cas, il n'avait pas l'air commode. Il fit l'appel rapidement, et s'arrêta sur le prénom : « Violette Hopper ». Apparemment, elle était absente. Quoi de mieux pour se faire remarquer que d'être absente le jour de la rentrée ? Ah oui, être en retard le jour de la rentrée ! Car une vingtaine de minutes plus tard, alors que monsieur Guidon nous distribuait la paperasse administrative habituelle, la porte s'ouvrit, et ce fut comme une vision de rêve.

Une adolescente aux cheveux bleus rentra dans la salle. Je... je ne saurais correctement la décrire. Elle ressemblait à une poupée en porcelaine, j'avais l'impression qu'au moindre choc, elle se fracasserait en mille morceaux. Elle était juste parfaite physiquement, comme le genre de fille qu'on voyait dans les films, sauf que ces dernières subissaient des heures et des heures de maquillages puis de retouches post-production pour atteindre ce seuil. Violette, elle, l'atteignait sans rien, car elle ne semblait par porter le moindre maquillage. Et là était le contraste, le paradoxe de sa beauté, car ses vêtements n'étaient pas du tout en accord avec son immense charisme qui avait retenu l'attention de toute la classe. Elle portait un vieux jean troué trop grand pour elle et un t-shirt « I Love Kadic » datant d'il y a au moins une quinzaine d'année. Voir plus. Elle se tourna vers l'enseignant, et parla d'une voix si basse que je ne pu l'entendre.

« Très bien, va à ta place. » lui répondit-il.

Et qu'elle ne fut sa place... à côté d'Antoine... le bâtard... Mais je fus encore surpris, car lorsqu'elle s'assit à ses côté, ils s'échangèrent des regards et se murmurèrent mutuellement dans l'oreille. Il l'a connaissait ? Je venais de comprendre ! C'était pour ça qu'il avait refusé que je vienne à sa table ! Moi aussi j'aurais préféré cette bombe à lui, ça c'était compréhensible. En revanche le fait que cette Violette parle à un misanthrope comme Antoine... ça me dépassait totalement.

L'heure de cours se déroula rapidement, et midi arriva. Mon voisin me regarda avec son sourire habituel, comme pour me demander « c'est toujours d'accord pour qu'on mange ensemble ? » Ou alors j'interprétais un peu trop et il était juste extrêmement souriant en toute circonstance. Quoi qu'il en soit ce n'était peut-être pas une mauvaise idée de traîner avec lui. Il me semblait de meilleure fréquentation qu'Antoine, qui de toute façon m'avait déjà remplacé. Qu'est-ce qu'elle avait de plus que moi cette fille, à part une paire de seins ? Bref, je fis comprendre à Augustin que j'étais prêt à le suivre. Enfin, plutôt à le guider, car il ne connaissait pas du tout la structure.

Après avoir remplis notre plateau de légumes divers et peu attirants, nous nous installâmes à une table de la cantine. C'était un des moments qui m'angoissait le plus : devoir trouver une place. Quand le self était vide, je m'installais rapidement à une table tout seul. C'était pas agréable, mais au moins c'était rapide. Par contre, quand il était bondé (ce qui était souvent le cas), je devais errer dans l'allée centrale avec mon plateau pour trouver une place vide à une table de gens qui me laisseront tranquille. Je me retrouvais rapidement entouré par pleins de gens qui rigolaient entre eux. Et ça, c'était le pire : être seul dans une foule.

« Tout va bien Melvin ? Me demanda Augustin.

- Ouais... Bon... On se mets où ?

- Il y a une table vide juste là. Je te propose, si tu es d'accord, que nous nous y installions.

- Euh... ouais, bonne idée. »

Je m'étais trompé sur un point : au moins, en ce début d'année, j'allais pas être tout seul. Personne n'avait mangé avec moi depuis qu'Antoine avait arrêté de me parler. Augustin avait l'air sympa, cependant je m'faisais pas trop d'illusion : tôt ou tard, il comprendrait que j'étais le gars craignos du lycée avec qui il fallait pas être vu. Ou alors... peut-être que non. Peut-être que cette année allait véritablement être celle du changement.

« Je peux m'asseoir avec vous ?

Lucie venait d'arriver, plateau en main. Oh non, il était pas question qu'elle vienne tout gâcher ! Jusque là, Augustin me voyait comme un type normal... Je pouvais pas déjà faire disparaître cette image !

- Ah ! Euh, salut Lucie, est-ce que je peux te parler seul à seul trente secondes ? Commençai-je à toute vitesse.

- Bien sûr !

Je me levai et la prenait à part, loin de notre table.

- Écoute, ça va pas être possible. Il est nouveau et il faut... Fin... Comment t'expliquer, c'est pas que je veux pas mais en fait...

- Tu sais, je ne suis pas stupide, Melvin. J'ai très bien compris, m'interrompit-elle avec un petit sourire triste. Je ne dirai rien à maman et je te laisserai tranquille. Comme les années précédentes. Tu n'auras plus à te soucier de moi.

- Non, mais c'est pas ce que je voulais dire !

- Ah vraiment ? Alors qu'est-ce que tu voulais dire, exactement ?

Je baissai la tête. Je ne pouvais pas m'empêcher de me sentir mal pour elle. D'autant plus qu'elle m'avait percé à jour.

- C'est bien ce que je pensais. Ne t'inquiète pas, je ne t'en veux pas. Je comprends totalement que tu ne veuilles pas être vu avec « la Folle ». Je te souhaite une bonne année scolaire, Melvin. »

Sans me laisser le temps de réagir, elle partit s'installer toute seule à une table, à l'autre bout du réfectoire. Je retournai à ma table, d'une humeur un peu moins joviale qu'au début du repas.

« Qui était-ce ? Une connaissance à toi ? Me demanda Augustin.

- Ouais, c'est ma sœur.

- Elle ne voulait pas venir avec nous ?

- Euh... non. Elle est plutôt du genre solitaire. On s'entend pas trop, on va dire.

- Ah, je vois. C'est malheureux.

Une autre fille s'arrêta devant notre table. Je ne la connaissais pas et je fus assez surpris par son style qui était... hors du commun. Il me semblait que c'était ce qu'on appelait gothique ou emo, je savais pas la différence. Je croyais que ce mouvement n'existait plus depuis des années, mais j'avais en face de moi la preuve vivante de son existence. Elle avait des cheveux noirs qui ne devait pas être naturellement de cette couleur. Elle portait un T-shirt d'un groupe de Death Metal dont j'avais vaguement entendu parler et dont l'écoute n'était pas loin de me faire saigner les oreilles et le reste de sa tenue était tout aussi sombre et inhabituel.

- Augustin, faut que je te parle.

Ce dernier eut l'air embarrassé. Il me demanda de bien vouloir l'excuser et alla à la rencontre de la gothique. Ils discutèrent quelques petites minutes. Je n'entendais pas ce qu'ils pouvaient bien se dire (et ça ne me regardait pas), mais mon nouvel ami n'avait pas l'air enchanté d'avoir cette conversation. C'était quoi, une ancienne petite amie ? Rapidement, il revint s'asseoir.

- Je te prie de bien vouloir m'excuser. Disons que c'est un peu le même problème que toi : une sœur avec qui je ne m'entends pas trop.

Je lui lançai mon regard le plus compatissant. Je connaissais. Il avait dû se prendre des brimades à cause du look de sa sœur. Le reste du repas se termina de manière agréable. Augustin parlait peu de lui, mais m'écoutait et me posait des questions sur tous les sujets, même les jeux-vidéos ! Et moi qui avait ce besoin immense de pouvoir discutait de mes passions, c'était parfait.

Cette année commençait bien, je le sentais.




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Dernière édition par LixyParadox le Mar 06 Nov 2018 11:03; édité 3 fois
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Icer MessagePosté le: Lun 06 Aoû 2018 20:31   Sujet du message: Répondre en citant  
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J'avais fini 25 ans plus tard il y a quelques mois, il est normal que je sois au rendez-vous pour la suite. Cela dit, en prime, les prologues sont autant d'habiles résumés permettant de resituer les grandes lignes du récit précédent. J'ai également eu le plaisir de retrouver ton style, assez connu, tu es l'un des plus vieux auteurs en activité, et j'ai déjà eu depuis longtemps l'occasion de lire et relire tes diverses versions de Code Alpha !
Minho a visiblement eu le temps de livrer son analyse très... personnelle, sur le sujet.
De mon côté, je souhaite souligner quelque chose de très intéressant : l'approfondissement du personnage de Melvin. Dans le précédent récit, si Antoine et Ambre tenaient logiquement la corde, les deux autres ne semblaient que de pauvres faire valoir, encore que Jean avait le statut de l'ancien connard repenti, c'était toujours quelque chose en plus de Melvin, qui lui avait celui peu enviable du pote par défaut de l'ancienne vie. Bon. Donc j'étais plutôt content que la rentrée soit plus focalisée sur lui.
Scénaristiquement parlant c'est encore trop tôt pour vraiment se positionner bien sûr, il va donc me falloir continuer à te suivre Wink

Bon courage pour la suite, à bientôt !

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« Les incertitudes, je veux en faire des Icertitudes... »

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LixyParadox MessagePosté le: Mar 06 Nov 2018 10:48   Sujet du message: Répondre en citant  
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Chapitre 3: La tache de sang



Jean


La sonnerie de fin retentissait enfin. Jean poussa un soupir de soulagement alors qu'il était en train d'essayer de régler un conflit entre deux enfants. Il leur fit signe de regagner leur classes respectives et alla chercher tous les gamins qui faisaient semblant de ne pas entendre le bruit strident qui résonnait dans la cours.

« Allez, on retourne en classe, la récré est terminée !

Une fille lui tira la langue en s'en allant. Il ne se souvenait pas que les enfants c'étaient si chiants. Quand il était jeune, lui, il n'avait pas été comme ça. Bon, il avait probablement était pire. Personne ne pouvait lui dire quoi que ce soit, il était probablement le cauchemar de plusieurs adultes qui l'avait à leur charge. Justement, il s'était dit que parce qu'il savait ce que ça faisait d'être un enfant difficile, il arriverait à les gérer. En plus, il était habitué aux enfants vu qu'il devait sans arrêt s'occuper de Léa. C'était loin d'être si simple...

Mais bon, la paie était là, même si elle restait très basse. Quand Ambre était venu emménager chez lui et que sa mère s'était faite virer de son poste, il avait bien dû trouver une solution. Pendant qu'Ambre et Léa continuerait leur parcours scolaires, il subviendrait aux besoins de la famille. Surveiller les enfants lui avait paru parfait : simple et accessible. Pas forcément besoin de diplôme et il avait pu commencer à travailler dès ses 17 ans. Même si c'était pas évident, le jeu en valait la chandelle. Depuis qu'il vivait avec Ambre, il avait l'impression de revivre. Pour la première fois de sa vie, il arrivait à se projeter dans l'avenir et toujours, il se voyait avec elle. Même la présence de Léa devenait tolérable ; Ambre avait commencé à s'en occuper, comme si elle en était la grande sœur. Elle lui lisait tous les soirs une histoire. Jean venait écouter derrière la porte, rien que pour entendre sa voix. En ce moment, c'était Coraline de Neil Gaiman. Ambre mettait toujours les formes pour raconter quelque chose, en jouant chaque personnage et en y mettant des intonations. Elle aurait pu être comédienne. Et si elle voulait l'être, Jean ferait tout son possible pour qu'elle y parvienne. Il lui était dévoué et c'était magique. Jamais il n'avait vécu comme ça, en mettant quelqu'un d'autre avant lui. Tout prenait du sens ainsi.

Bon, tout n'était pas aussi rose. Dernièrement, elle avait l'air... fatigué. Jean repensait beaucoup au dernier coup qu'elle lui avait fait, dans la cuisine. Elle ne va sans doute pas très bien. Je ne pense qu'à mon petit bonheur, mais elle s'est quand même fait chassée de chez elle par sa mère adoptive. Et puis il y a eu cette histoire avec Antoine...

Quand il était rentré un soir, il l'avait trouvé en larmes. C'était une de ses premières crises. Jusque là, ils avaient vécu leur petit bonheur à deux.

« Je n'en peux plus, Jean ! Il... Il me harcèle ! »

Elle lui montra son téléphone. Elle avait reçu une vingtaine de messages et au moins dix appel manqué. Tous d'Antoine. Jean avait décidé de prendre des mesures. Connaissant Antoine, il savait exactement où le trouver. Tout le monde avait tourné la page sur les horreurs qu'ils avaient vécu l'an passé, tout le monde sauf Antoine. Il devait encore roder dans le laboratoire de l'usine.

Quand Jean se rendit sur place, il comprit qu'il avait touché juste. Tous les écrans du labo étaient allumés. Ils y en avaient même pas mal de nouveaux. Pleins de câbles jonchés désormais le sol. Antoine était assit sur le fauteuil central comme s'il s'agissait d'un trône.

« Jean. Parfait, j'hésitai à te contacter. Il faut que tu parles à Ambre pour qu'elle me réponde. J'ai besoin de sa signature pour qu'elle puisse venir vivre avec moi.

Le jeune homme se précipita sur le génie et le souleva en l'attrapant par le col.

- C'est quoi ton problème avec elle ? Elle vis avec moi désormais.

- Je sais. Mais sa place n'est pas avec toi. Comprends-moi bien, c'est une Belpois. J'ai besoin d'elle pour pouvoir...

Jean bouillonnait de rage. Il tenait Antoine par la main droite et commença à serrer sa main gauche. Pour qui il se prenait ce petit merdeux ?

- Si elle te répond pas, tu t'es pas dit qu'il y avait p't'être une raison ? Elle a pas envie d'être ta sœur. Elle est très heureuse avec moi, donc laisse la tranquille !

- Je crois me souvenir qu'Ambre était parfaitement capable de s'exprimer toute seule, elle n'avait pas besoin d'un singe ou d'un homme fort pour la représenter. Je ne la laisserai tranquille que si elle me le demande elle-même. En attendant, tu vas...

- Mais je vais rien du tout, putain !

C'en était trop, le poing de Jean s'en alla droit rencontrer les lunettes d'Antoine. Pris par surprise et incapable de se défendre, l'intello s'écroula sur le sol. Jean se retourna et s'avança dans l'ascenseur.

- Si tu lui envoie ne serait-ce qu'un seul autre message, je reviens et je finis le travail. Elle veut pas te voir.

- Jean, je t'assure que tu vas le regretter.

- Ouais, c'est ça, cause toujours. »

Les portes de l'ascenseur se refermèrent.


Depuis, Antoine ne s'était plus approché d'elle. Et pourtant, Ambre avait continué à sombrer dans la mélancolie. Je ne sais pas comment l'aider. J'essaye de la motiver à aller en cours, mais elle reste à la maison, à ne rien faire. Je suis sûr qu'elle n'a même pas été à sa rentrée.

« Hey, Jean ! l'interpella Mathilde, une autre animatrice.

- Ah, salut. Ça a été de ton côté ?

Mathilde était une nouvelle animatrice comme lui. Bon, elle avait beaucoup moins de soucis d'autorité que lui. Pourtant, il avait une voix qui portait beaucoup plus ! Il ne l'avait pas entendu une seule fois crier, et pratiquement tous les enfants l'écoutait. Si seulement elle pouvait m'apprendre son truc. Elle était aussi assez mignonne, avec ses cheveux roux mi-long.

- Comme d'habitude ! Tu rentres chez toi là ? Lui demanda t-elle.

- Ouaip.

- Tu prends le bus ?

- Ouaip.

- On le prend ensemble ?

- Ouaip.

- Roh, t'es chiant !

- Ouaip ! »

Et ils éclatèrent de rire.

Jean se demandait si Mathilde n'avait pas un crush sur lui. Peut-être qu'il se faisait des idées mais... Elle parlait peu aux autres animateurs, elle riait à toutes ses blagues, même les plus nulles et elle l'attendait le matin pour prendre le bus. S'il n'y avait pas eu Ambre, peut-être qu'il aurait été intéressé aussi... Elle avait un truc, une façon de lui redonner confiance en lui quand il se parlait. Ca allait probablement être une très bonne amie, à défaut d'être plus.

Après quelques minutes d'attentes à l'arrêt, ils montèrent enfin dans le bus. La rouquine engagea à nouveau la conversation.

« Ta copine va bien ? Ambre c'est ça ?

- Ouais, ça va, fit Jean, l'air vague.

- T'as des frères et sœurs ?

- Une petite sœur, hélas...

- Je comprends. Et Ambre, elle en a ?

- Un frère, ouais. Mais ils se parlent pas.

- Ah bon ? Pourquoi donc ?

Mathilde posait toujours beaucoup de questions sur Ambre. Clairement, elle voulait voir si leur relation était stable, si « la voie était libre » ou pas. Il fallait qu'il lui fasse comprendre que même si elle était très charmante, il resterait avec Ambre.

- Je sais pas trop. Elle l'aime vraiment pas. Elle m'a même envoyé lui casser la gueule.

- Tu l'as fait ?

- Plus ou moins.

- Tu dois être sacrément amoureux d'elle pour aller te battre comme ça.

- Ouaip. »

C'est bon, elle a compris, pensa Jean. Ils se dirent au revoir. Le jeune homme devait aller faire les courses avant de rentrer et d'enfin revoir sa bien aimée. Elle allait probablement mieux maintenant, il allait pouvoir passer un peu de temps ensemble.

Ombre


Je me lavais les mains depuis quelques heures. Pourquoi ? Je n'en avais strictement aucune idée. Elles devaient être sales. Et elles ne paraissait pas devenir propre malgré la montagne de savon que je déversais dessus. J'étais en sueur aussi. Je devais puer la transpiration. J'avais couru jusqu'à chez Jean, sans m'arrêter. Ce dernier avait été surpris de me voir si tôt de retour, et trempée par la pluie. Il avait voulu m'embrasser mais je l'avais repoussé. Il comprit que quelque chose n'allait pas et commença à me poser quelques questions, mais je ne lui donnai aucune réponse. Il dû croire que je lui en voulais pour une quelconque raison, et s'en alla se recoucher avant de finalement se lever pour aller à son travail. Ce n'était pas grave, je n'avais pas besoin de lui. Je n'avais besoin de personne après tout, n'est-ce pas ? J'étais Ombre, hein, rien ne pouvait m'arrêter. Rien ! Rien...

J'étais Ombre et je ne devais pas l'oublier. J'étais Ombre... et quelqu'un le savait. C'était impossible. Ça m'avait semblé si... irréel... Peut-être que j'avais tout imaginé. Après tout, ce n'était pas logique qu'une fille aussi frêle puisse m'envoyer valser aussi loin ! Et puis d'où une gourdasse que j'avais jamais vu pouvait être au courant de mon plus grand secret ? Personne n'avait jamais été mis au courant de mon existence ! Ambre, cette petite conne, s'était bien gardé de me mentionner à qui que ce soit ! Alors comment cette personne pouvait savoir que je n'étais pas celle que je semblais être ? Comment pouvait-elle savoir que ce n'était plus Ambre qui habitait ce corps ?!

Ah... mais si. Il y avait une personne. Une seule qui était au courant. Qui sans savoir m'avait déjà vu. Melvin. Lorsque nous étions sur Lyoko. Ambre lui avait peut-être expliqué. Mais comment aurait-il pu savoir qu'elle avait disparu ? Toute cette histoire avait des trous, je ne comprenais plus rien... Mais une chose était sûre : on m'en voulait. Je ne savais pas qui ils étaient, mais ils ne me voulaient certainement pas du bien ! J'allais sans doute devoir me défendre. Bien. J'étais prête à le faire. Je m'étais battue pour arriver jusque là, j'étais prête à continuer à me battre.

Prêt de l'évier se trouvait un gros couteau, il coupait bien, je m'en étais souvent servi pour faire la cuisine à ce fainéant de Jean et à sa petite pute de sœur. Je pouvais m'en servir pour me défendre. Il était bien propre, je pouvais voir mon reflet dedans. Je pouvais voir mon reflet, et soudainement ce reflet se mit à rire.

« Ma pauvre petite Ombre, on dirait un chien blessé. Que comptes-tu faire avec cette arme ? Tuer quelqu'un d'autre afin que ta misérable existence sans but puisse continuer ? 

Tuer ? Il n'avait jamais été question de ça... si ? Et puis Ambre... pouvait-on voir ça comme un meurtre ? Je ne l'avais pas tué. Ce n'était pas un meurtre, si ?

- Si. Tu l'as tué ! Tu es une meurtrière ! Un assassin ! 

Son sourire s'agrandit à un point qu'il n'était pas censé atteindre, déformant une fois de plus son visage.

- Je dirai même plus... tu es un monstre. Une abomination !

Et elle éclata de rire. Le même rire sadique qu'à son habitude. Je mis mes mains contre mes oreilles, mais sa voix résonnait dans ma tête, chantant :

- Ombre est un assassin ! Ombre est un assassin !

- Arrête... bredouillai-je, les larmes me montant aux yeux.

- Ombre est un assassin ! Ombre est un assassin !

-TA GUEULE ! hurlais-je en jetant l'ustensile contre le mur, de toute mes forces. Une immense colère s'était emparée de moi. Colère contre l'Autre et ses paroles qui faisaient toujours si mal. Colère contre cette salope d'Ambre qui continuait à me torturer alors que son absence devait tout résoudre. Colère contre le monde entier.

Léa arriva dans la cuisine en courant. J'avais oublié qu'elle était déjà rentrée de l'école celle là...

- Ça... ça va pas Ambre ? 

Elle tenait dans sa main le livre que je lui lisais chaque soir, Coraline. J'étais un peu comme une grande sœur pour elle. Sauf qu'en réalité, elle aussi, c'était à Ambre qu'elle tenait. Pas à moi. Je ne pouvais compter sur personne.

- Si ça va ! Tout vas bien ! Tout vas parfaitement bien dans le meilleur des mondes ! »

Sans lui laisser le temps de réagir, j'allai chercher mon arme. Cette salope avait tord. J'avais le droit d'exister, et tout ce qui allait me dire le contraire allait le payer. En commençant par Melvin. Et puis « Ambre », c'était terminé, il était temps de m'affirmer ! Peut-être qu'ainsi l'Autre allait enfin me laisser tranquille !

- Ambre... tu es sûre que ça va ? 

Je me retournai vers la petite fille, le regard plus agressif que jamais.

- Je ne m'appelle pas Ambre. »
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LixyParadox MessagePosté le: Dim 02 Déc 2018 18:21   Sujet du message: Répondre en citant  
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Chapitre 4: Drôle(s) de rancard(s)


Melvin


« Faites les exercices 32 à 35 page 25. Pour ceux qui auraient déjà fini, faites le 81 page 28. » avait dit le professeur de sa voix rocailleuse il y avait de ça un quart d'heure.

Ce n'était pas de chance d'avoir un enseignant d'apparence aussi antipathique comme professeur principal. Après tout, ce poste était très important, c'était à lui que les élèves devaient confier leur problèmes. J'étais certain que jamais, oh grand jamais je n'oserai aller me plaindre de quoi que ce soit auprès de lui. Il était bien trop... effrayant. Bref. Je m'étais attardé sur ces fameux exercices. Ce n'était pas pour rien que je m'étais retrouvé en économie sociale et que la section scientifique m'avait été refusé. Les maths et moi ça faisait... l'infini. J'avais d'ailleurs failli me retrouver en littéraire, mais j'étais tout aussi nul en français et je détestais lire. Pourquoi perdre son temps avec des livres quand on pouvait regarder un bon film, c'était quand même beaucoup moins chronophage ! Enfin, en une quinzaine de minutes, je n'avais toujours pas résolu le premier exercice. Augustin déplaça discrètement une feuille au centre de notre table, sur laquelle il avait écrit :

Tu sembles avoir des soucis, je me trompe ?

Il avait commencé à travaillé les cinq premières minutes et avait passé les dix restantes à faire tourner son stylo autour de sa main avec une aisance naturelle plutôt remarquable. Lui aussi avait dû être bloqué dans les exercices, mais il avait sans doute était plus loin que moi. En même temps, ce n'était pas bien difficile.

Ouais... Tu t'es arrêté à quel exercice ?

Après tout, quitte à être mauvais, autant s'entre-aider. Il me regarda avec un sourire compatissant et dit d'une voix calme :

« J'ai déjà terminé.

Quoi ? Mais c'était pas possible ! Monsieur Guidon avait expliqué la leçon d'une manière incompréhensible et nous avait envoyer ces exos dans la tronche sans aucune explications supplémentaires. Et en plus, c'était des notions nouvelles au programme qu'on avait jamais vu auparavant. Il avait du marqué n'importe quoi ou répondre totalement au hasard !

- Je me dois de m'expliquer. J'ai comme qui dirait une certaine passion pour les mathématiques. Un peu comme toi avec les jeux-vidéos. C'est un peu gênant, je ne l'ai jamais avoué à personne, alors garde ça pour toi s'il te plaît.

Il avait rougit comme si j'avais découvert un immense secret. Ce gars là était vraiment surprenant. Il rapprocha sa chaise de la mienne et regarda mon cahier.

- Mmmh... tu n'as sans doute pas bien compris. Tu veux que je te réexplique ? me chuchota t-il.

Je répondais aussitôt par l'affirmative, et il commença à me faire un mini cours particulier. Il connaissait bien son sujet, ça se sentait. Et il possédait une certaine aisance à l'orale et une pédagogie digne des meilleures professeurs que j'avais eu au cours de ma scolarité. Quand je traînais avec Antoine, j'avais remarqué que ce dernier aussi était doué en maths (même si pas autant qu'Augustin), mais plutôt que de m'aider, il passait son temps à vanter ses mérites et à se moquer de mes mauvais résultats. Je n'avais vraiment pas perdu au change.

« Tu veux être prof plus tard ? l'interrogeai-je soudainement.

Il paru surpris par ma question, et eut un petit rire.

- Non, pas du tout. Je n'ai absolument aucune autorité, je me ferais dévorer par les élèves !

Pour être franc, je ne pensais pas qu'il avait besoin d'autorité. Son charisme suffisait amplement, et à lui tout seul, il pourrait facilement subjuguer toute une salle d'adolescent, même dans un quartier défavorisé contenant les lycéens les plus turbulents de la ville. Enfin, pour les autres, je n'en savais rien, mais en tout cas, ça suffisait à me subjuguer moi.

- A vrai dire... je n'ai jamais songé à ce que je voulais devenir. » Dit-il d'une voix calme. Calme mais d'un calme différent de celui qui accompagnait normalement sa voix. Son sourire s'était peu à peu effacé et il était devenu tout à coup songeur.

Moi non plus je n'en avais aucune idée. Mais je n'y avais jamais sérieusement réfléchis. Que comptais-je faire après le lycée, une fois que j'aurais le bac en poche ? Enfin, tout cela impliquait que je réussisse le lycée, ce qui était loin d'être gagné. Et puis après... rien ne me tentait réellement. Peut-être que... peut-être que je n'ai pas vraiment envie de grandir et de devenir adulte. Si je pouvais avoir des amis fidèles et fiables, rester à Kadic pour toujours ne me dérangerait pas.

Une main se leva au milieu de l'agitation parmi les élèves. Ce n'était pas la main de n'importe qui, c'était la main d'Antoine, ce fumier. Au début, je me mis à rire, en me disant qu'il devait avoir une envie pressante. Mais rapidement, je remarquai que quelque chose n'allait pas. Il avait l'air inquiet. Très inquiet, comme je l'avais rarement vu. A côté de lui, la jolie petite Violette s'était mise à cracher du sang. D'une manière assez violente. Le professeur semblait ne pas y prêter attention, il était concentré à expliquer en râlant de sa voix désagréable la leçon à des élèves. Alors, l'ancien intello prit la parole.

« Monsieur, est-ce que je peux emmener Violette à l'infirmerie ? Comme vous pouvez le voir elle ne va VRAIMENT pas bien !

Monsieur Guidon leva le sourcil gauche et contempla quelques instants la jeune fille. Il comprit rapidement l'urgence de la situation et contre toute attente me pointa du doigt, ainsi que mon voisin.

- Vous deux. Accompagnez là.

Antoine ouvrit la bouche pour protester, il semblait vouloir à tout prix être celui qui l'escorterait, mais l'enseignant fut plus rapide.

- Il me semble, Monsieur Belpois, que c'est encore moi qui décide dans cette classe. Augustin et Melvin sont de grands garçons, ils sauront se débrouiller tout aussi bien que vous.

Nous nous levâmes et aidèrent la fille aux cheveux bleus à se lever. Le blondinet me lança un regard noir avant de bouder sur sa table. Nous quittâmes la salle en prenant chacun un bras de Violette, pour l'aider à marcher. Je n'avais jamais été aussi proche d'une fille. Même si c'était dans un cadre assez morbide, ça restait assez déroutant...

- Non... J'ai besoin d'Antoine... murmura t-elle doucement, sans conviction.

Ces deux là devaient être très proche. Ils sortaient ensemble ? J'avais du mal à y croire, comment un mec comme lui pouvait se taper un canon pareil. C'était peut-être encore une autre sœur cachée, comme Ambre. Ambre que je n'avais toujours pas revu d'ailleurs... Est-ce qu'elle allait bien ? Nous arrivâmes rapidement à l'infirmerie du lycée, la malade se laissant transporter sans encombre. Nous toquâmes à la porte et ce fut une nouvelle infirmière que je n'avais jamais vu qui nous ouvrit. Elle était grande, très grande mais aussi fine, presque squelettique. Elle avait peut-être eu des problèmes d'anorexie dans le passé. Son visage était creux et ses joues pâles. Ses cheveux noirs étaient coiffés en queue de cheval. Malgré ça, elle ne me semblait pas être bien plus âgée que nous. Deux ou trois ans, à tout casser.

- Bonjour très chère sœur ! Nous t'amenons une patiente qui a bien besoin de ton aide ! s'écria Augustin.

Elle jeta un regard sur sa patiente avant de s'exclamer :

- Ah oui... effectivement. Rentrez vite.

Encore une sœur à lui ? Il y avait déjà eu la gothique que j'avais aperçus à la cantine et maintenant cette nouvelle infirmière ? C'était dingue à quel point personne ne se ressemblait dans sa famille. On aida Violette à s'allonger sur un lit. L'infirmière lui fit boire une sorte de médicament pour l'aider à se calmer et à se reposer, et la petite beauté s'endormit rapidement. La crise semblait être passé pour le moment. Augustin me fit signe de m'asseoir autour du bureau.

- Alors, comme ça tu es le nouvel ami de mon frère ?

- Euh ouais... c'est moi. Melvin, enchanté.

Elle me tendit sa main, que je serrai immédiatement.

- Judith. De même. »

L'infirmière me regardait fixement avec un petit sourire en coin. Elle avait l'air sympa, mais quelque chose me mettait un peu mal à l'aise. Peut-être que c'était sa façon de parler. Ou son petit sourire, qui avait l'air de dire « je sais quelque chose que tu ne sais pas ».

Elle m'expliqua rapidement qu'elle n'était qu'en stage. La véritable infirmière était actuellement en congé maladie et que par conséquent elle occupait son poste à temps plein pour une période de temps indéfinie. Augustin avait tout l'air d'être intelligent, mais Judith devait l'être encore plus. Depuis les dernières réformes, le concours d'infirmière était extrêmement difficile. Avec la pénurie des médecins, on leur demandé d'avoir des connaissances et des capacités proche de celle d'un généraliste. La jeune infirmière se proposa de nous préparer une tisane. Elle affirma qu'elle nous ferait un mot pour retourner en cours plus tard.

Notre conversation fut coupée par un immonde son de crachat. C'était Violette, qui n'allait pas mieux. Judith se leva immédiatement, le regard déterminé. Elle sortit d'un placard une seringue assez effrayante et s'approcha dangereusement du lit.

- Euh... c'est le bon médicament tu crois ? m'inquiétais-je. La couleur fluo du liquide contenu dans l'outil ne me disait rien qui vaille.

Elle me lança un regard sévère, l'air de dire « tu vas pas m'apprendre à faire mon travail », mais se ravisa.

- Violette Hopper a un traitement spécial, j'ai toutes ses ordonnances. Ne t'en fais pas Melvin, je sais ce que je fais, me rassura Judith d'une voix un tantinet sèche. Il serait peut-être bon que vous retourniez en cours. Ravie d'avoir pu faire ta connaissance, Melvin. Occupe toi bien de mon frère. Il a besoin de quelqu'un qui s'occupe de lui, n'est-ce pas Augustin ? »

Ah, les fameux piques entre frères et sœurs. C'était drôle à entendre, mais Augustin ne sembla pas le prendre à la rigolade. Comme promis, elle nous fit un mot. Mot qui s'avéra être inutile car nous arrivâmes devant la porte de la salle pile au moment de la sonnerie. Les élèves s'empressèrent de sortir, et comme une furie, Antoine se jeta sur moi.

« Où est-elle ? Où est Violette ?!!

Ses yeux pétillaient d'une rage nouvelle que je ne comprenais pas. Sa petite amie était fragile, d'accord, mais apparemment tout avait été vu avec le lycée vu qu'ils avaient un traitement spécial pour elle.

- Calme Antoine, elle est encore à l'infirmerie. » lui dis-je.

Le blondinet ne répondit pas et se précipita dans le couloir pour rejoindre sa pote. Augustin et moi n'avions pas tout à fait le même emploi du temps. J'avais un creux d'une heure alors que lui avait encore cours. Nous nous saluèrent et il s'éloigna pour se rendre en classe. Soixante petites minutes de solitude, je pouvais tenir. Ca n'était pas comme si j'avais déjà dû endurer cent fois pire. Une envie pressante me força à me conduire aux toilettes. La sonnerie retentit et les couloirs se vidèrent. Qu'est-ce que j'allais faire pendant cette pause ? Aller au CDI ? Pourquoi pas. Au détour d'un couloir, j'entendis des bruits de pas derrière moi. Sans doute un élève souffrant aussi de l'appel de l'urinoir. Les pas accélérèrent et la personne arriva juste derrière moi. Je senti subitement des mains se porter autour de ma taille et une voix susurra à mon oreille :

« Coucou Melvin ! Je t'ai manqué ? »

Mon cœur se mit à battre la chamade. C'était Ambre. Avant que je n'eus le temps de dire quoi que ce soit, la jeune fille m'entraîna dans les toilettes des filles. Elle s'arrêta quelques instants, vérifiant l'intérieur comme pour être sûr qu'il n'y avait personne, et m'attrapa par le bras, me tirant à l'intérieur. Je ne saurais décrire tout ce que je ressentais à cet instant précis. C'était elle. C'était bien elle. La fille qui avait hanté mes rêves, celle qui m'avait été inaccessible et pour qui je pensais ne pratiquement pas exister... Et pourtant, c'était moi, Melvin le gros rouquin, le rejeté, qu'elle prenait à part. Je me serai cru dans un film. Allais-je trop loin en m'imaginant des choses ? A vrai dire, on ne pouvait pas m'en vouloir... la timide Ambre que je connaissais avait l'air bien sûre d'elle et m'avait entraîné dans un lieu clôt, en s'assurant qu'on ne serait pas dérangés. Il y avait quand même de quoi porter à la confusion. Non. Je devais me calmer. Ce genre de chose n'arrivait qu'à la télévision. Dans la vraie vie, les mecs moches comme moi ne pouvait qu'espérer en vain.

« Je t'ai cherché toute la journée ! » me dit-elle avec un sourire. J'ai cru que je n'allais jamais te trouver.

C'est à ce moment que je me rendit compte que quelque chose n'allait pas. Mon cœur battait toujours, mais plus pour les mêmes raisons qu'avant. J'étais au centre de la pièce, et la jeune fille aux cheveux blonds était devant l'unique porte de sortie. Je n'aurais su dire quoi, mais tout cela sonnait faux. C'était sans doute parce que je ne l'avais pas vu depuis quelques temps. Les gens peuvent changer très rapidement, peut-être qu'au cours de sa relation avec Jean, elle avait eu l'occasion de se décoincer. En tout cas la situation devenait très étrange et très gênante... Vite, trouver un sujet de conversation !

« Ah... et... euh... Jean, comment il va ?

Elle soupira et avança lentement vers moi, me regardant droit dans les yeux. Mon réflexe fut aussitôt de reculer. J'avais réussit à identifier le sentiment qui m'habitait. C'était de la peur. Ambre n'avait pas l'air d'aller très bien... Je n'y avais jamais songé, mais sous son masque de fille réservée se trouvait peut-être une fragilité émotionnelle. Il aurait suffit que Jean la quitte ou la trompe pour totalement la déstabiliser. Mais si c'était le cas, j'avais évoqué le sujet sensible... Ah merde !

- Jean ?

Elle haussa les épaules.

- Ne vient pas me parler de lui. C'est toi que je suis venue voir.

Je ne pouvais plus reculer, j'étais contre le mur. Elle n'était qu'à quelques mètres de moi. Je pouvais sentir son souffle sur le mien. La peur mélangé à l'excitation d'être aussi proche d'une personne du sexe opposée (consciente cette fois) avait des répercussions assez étrange sur le reste de mon corps, comme des tremblements.

- Ah... Ah oui ? balbutiai-je.

Comment avait-elle à ce point pu devenir quelqu'un de totalement différent ? La rupture était encore plus puissante que celle d'Antoine, qui n'avait fait que de s'enfoncer dans ce qu'il était déjà. Ici, je découvrais une toute nouvelle personne, ce n'était pratiquement plus la même. Mais pourquoi me terrifiait-elle à ce point ?! Pourquoi est-ce que tout les sens de mon corps me criait : « Danger ! Danger ! » ?! Elle posa ses mains sur mes épaules, les plaquant contre le mur, me murmurant avec un sourire étrange :

- Est-ce que tu m'aimes ?

La question était inattendue. J'avais dû rêver de cette situation un bon paquet de fois, mais pourtant je n'avais qu'une seule envie, c'était de m'éloigner d'elle. Et le plus loin possible. Avant que je réponde (puisque j'aurais tout de même tenté de bredouiller quelque chose), elle m'embrassa.

Mon premier baiser. J'avais toujours rêvé que ça soit avec elle. Sauf que c'était loin d'être comme je l'avais imaginé. Cela avait un goût étrange, de rouille comme du... du sang ?! Ce fut alors que je m'aperçus que ses lèvres étaient gercées au possible et même rongées par endroit.

- J'aurais une petite question, Melvin...

Laisse moi partir, laisse moi partir...

- Tu te souviens de la fois où nous avons été ensemble sur Lyoko ?

- Oui ! Je m'en souviens ! répondis-je automatiquement. Si je la contentais, cet interrogatoire s'arrêterait peut-être plus rapidement.

Son regard changea. Cette fois, ce n'était plus une impression : elle était devenue véritablement menaçante.

- Tu n'avais rien remarqué d'anormal ce jour là ?

- Non... je crois pas... Mais Ambre, je pense que tu devrais...

Elle me gifla. Très fort. Plus fort qu'on ne l'avait jamais fait. Je pense que je devais avoir une énorme marque rouge. Des larmes coulèrent de mes joues sous la surprise.

- Je ne suis PAS Ambre ! Pas possible, tu es la deuxième personne à nous confondre ? Toi qui nous a vu toute les deux, tu aurais du être capable de me reconnaître non ?

Elle lâcha son emprise, me tournant le dos pour aller au centre de la pièce. Je tremblai de panique. Elle... Elle n'était pas Ambre... ? Mais qui était-elle alors ?! Elle était devenue complètement folle, c'était pas possible ! Folle et dangereuse ! C'est à ce moment précis qu'elle, comme pour confirmer mes pensées, sorti un immense couteau de cuisine de son sac rose.

- Je suis Ombre. Et personne n'était censé le savoir ! PERSONNE ! Parce qu'après tout... Personne ne connaissait mon existence ! Personne ne m'a jamais vu ! A part toi...

Elle se rapprocha de nouveau. Elle ne souriait plus. Une haine indescriptible se lisait sur son visage. Son arme blanche était pointé dans ma direction. Ma pauvre Ambre... qu'est ce qui t'étais arrivé pour que tu deviennes comme ça ?! Et... qu'est-ce que tu comptais me faire ?

- Alors maintenant, sombre petit goret, si tu tiens à tes couilles, tu vas illico me dire à qui tu as dévoilé ma véritable identité !

Je pris mon courage à deux mains et m'écriai :

- Je ne comprends rien, Ambre... Arrête ça je t'en supplie ! J'ignore ce qui t'effraie à ce point, mais je n'y suis pour rien ! Si tu m'en parles, je pourrais t'aider !

Ce n'était de toute évidence pas la réponse qu'elle attendait. Elle serra les dents et brandit son couteau. Je fermai les yeux quand soudain...

- Non... Non ! Tais toi ! Je ne suis pas un assassin !

Elle parlais toute seule ? Pire, elle parlait au miroir. Cette scène était devenue tellement surréaliste que j'avais du mal à y croire...

- C'est faux ! Je... Je... Je n'allais pas lui faire du mal, c'était du bluff !

Ambre se mit à pleurer. Je n'avais jamais vu quelqu'un d'aussi alarmé et d'aussi dévasté de toute ma vie. Je me demandai si je devais aller la réconforter, mais ce qu'elle tenait à la main m'effrayait toujours beaucoup. Je préférai la laisser se calmer toute seule. Elle se mit alors à frapper le miroir de toute ses forces, criant à s'écorcher la voix :

« Tais toi ! TAIS TOI !FERME TA PUTAIN DE GUEULE ! »

La fin de sa phrase se termina par un cri strident, presque inhumain. Quand son « adversaire » fut brisé et ses doigts ensanglantés, elle s'arrêta, regardant le sol, plus perdue que jamais. C'était maintenant ou jamais. J'avais le choix, rester debout comme un lâche et faire ce que j'avais fait toute ma vie, c'est à dire me planquer, ou bien aller aider une amie qui semblait en avoir bien besoin. Je l'avais dit : jamais je n'oublierai les quelques jours où cette bande d'amis avait existé. Et Ambre en avait fait parti. J'étais prêt à l'aider. Alors je fis ce qui me semblais être la chose la plus évidente à faire : je la pris dans mes bras, et lui murmurai-je :

- Chut... c'est fini. C'est terminé.

Elle se mit à sangloter en tremblant.

- J-je n'en peux plus, Melvin...

J'essayais de lui prendre doucement le couteau des mains, en continuant :

- Tout vas bien se passer désormais, Ambre...

Je ne sais pas quel fut le mot en trop. Mais elle me repoussa sauvagement, me plaqua contre le sol et planta son ustensile de cuisine à quelques centimètres à peine de ma tête. Elle le retira aussitôt et se releva brutalement. Elle riait aux éclats désormais.

- AH ! Vous pensez que vous pouvez m'avoir, moi ?! Et bien vous avez tort ! Je vous aurez la première, je vous le garanti !

- Ambre... je...

- JE M'APPELLE OMBRE. »

Je pensais qu'elle allait me tuer. Sincèrement. Mais elle ne fit que partir en claquant la porte. Mon Dieu... Qu'est-ce qui venait de se passer ? Juste... pourquoi ? Pourquoi l'adolescente gentille et attentionnée que je connaissais s'était transformée en une dangereuse forcenée ? Je n'étais de toute évidence pas le seul à avoir souffert cette dernière année... Que devais-je faire maintenant ? La logique voudrait que je prévienne la police, mais... mais c'était Ambre. Si elle était comme ça, il devait y avoir une raison. Je croyais que plus rien ne pouvais me surprendre aujourd'hui, mais la porte de l'un des cabinets s'ouvrit. Quelqu'un avait été là durant tout ce temps !

« Ne t'inquiète pas, il y a quand même quelques filles normales dans ce lycée, dit une voix que je pourrais définir de blasée.

C'était l'autre sœur d'Augustin, la gothique du réfectoire.

- Je m'appelle Zoé, au cas où Augustin l'aurait pas mentionné, rajouta t-elle prestement.

- Tu... tu as toute entendu ? lui demandais-je.

- Allons plutôt discuter à la cafet', tu veux bien ? J'te ferais un faux billet d'absence si t'as peur de sécher. »

Comme quoi le monde est bien ironique. Moi qui me plaignais de ne pas être populaire avec les filles, voilà qu'en une seule après midi, j'échangeai mon premier baiser et la minute d'après j'étais en tête à tête autour d'un diabolo menthe avec une autre. Enfin... aucune de ses deux entrevues n'avaient eu quoi que ce soit de romantique. Ambre m'avait menacé et frappé, et puis Zoé... Zoé pour être honnête n'était pas vraiment mon genre. Même en tant qu'amie, je pense pas que ça ne pourrait se faire. Un simple pressentiment, elle m'avait pas l'air très sympathique. Elle et moi passèrent dix bonnes minutes à siroter nos boissons silencieusement. C'était elle qui avait commandé, et je n'étais pas très fan des diabolos menthes mais je le pris sans rien dire. Au bout d'un certain temps, je me décidai à briser la glace.

« Pourquoi tu n'es pas intervenue ? lui demandai-je avec emportement. C'était vrai : j'aurais pu y passer, et elle n'avait pas bougé de sa cachette, bien en sécurité !

- De un, tu vas commencer par me parler sur un autre ton. De deux, si j'avais eu l'impression que tu étais véritablement en danger, je serais intervenue, répondit-elle froidement, tout en continuant à vider son verre tranquillement.

Mais... mais elle était sérieuse ?! Ma vie avait été mise en jeu ! Le couteau s'était quand même planté juste à côté de ma tête, j'avais survécu par un simple coup de chance !

- Et de toute façon, qu'est ce que t'aurais pu faire, hein ? Ambre était incontrôlable, elle t'aurait massacré, dis-je en faisant la moue.

Zoé rapprocha son visage du mien et répondit avec un air tout à fait sérieux :

- Toujours est-il que tu es sain et sauf. Elle s'en serait prit à toi, elle ne s'en serait pas sorti indemne, c'est tout ce que je peux te dire.

Cette nana là était juste flippante. J'allais rajouter une autre complainte quand elle déclara d'un ton glacial :

- Bref, tu veux continuer de te plaindre ou tu vas me laisser parler ?

Bon... effectivement, elle marquait un point.

- Tu vas vite comprendre, mais quelque chose d'important se déroule depuis quelques temps. Depuis une dizaine de mois je dirai même.

Mais pourquoi est-ce qu'elle me racontait sa vie ? Je n'en avait strictement rien à faire ! Elle me lança un regard noir, me faisant comprendre que je devais faire des efforts.

- Melvin, depuis quand les attaques sur Lyoko ont-elles cessés ?

Lyoko ? Elle avait bien dit Lyoko ? Comment était-elle au courant de l'existence de ce monde virtuel ? Les seuls à la connaître étaient Jean, Antoine, Ambre, les défunt Ulrich et Mélissa et puis moi... Trop d'émotions en ce jour, elle avait raison sur un point, je n'arrivai plus à suivre.

- Réponds à ma question. Quand a eu lieu la dernière attaque sur Lyoko ?

Bon, puisqu'elle avait l'air de déjà tout savoir, autant raconter. Au moins, elle ne me menaçait pas avec une arme, même si elle ne me mettait pas à l'aise non plus.

- Ben... c'était l'année dernière, quand on a détruit XANA...

- Faux, dit-elle en terminant son diabolo menthe. Elle me demanda d'un signe de main si je comptais finir le mien, suite à quoi je lui fis comprendre qu'elle pouvait se servir. « La dernière attaque a eu lieu avant les vacances d'été.

- Hein ? Mais... quand est-ce qu'elles ont repris ? Et puis c'est pas possible, XANA a été détruit !

- Elles ne se sont jamais vraiment arrêtés. Le seul à être au courant, c'est Antoine. Enfin, il croit être le seul au courant... De plus, je n'ai jamais dit que ces attaques étaient provoquées par XANA.

Il fallait que je remette mon cerveau en marche. Une fille que je n'avais vu qu'une seule fois et à qui je n'avais pas adressé la parole venait me déballer qu'elle savait absolument tout sur mon plus grand secret. Pire, elle en savait même plus que moi ! Je devais admettre que je n'étais pas une flèche, mais quelque chose ne tournait pas rond.

- Comment tu sais tout ça ? interrogeai-je l'air suspicieux.

Elle soupira. Elle donnait l'impression d'essayer de se faire comprendre par un abruti.

- Je pourrai te le dire, mais ça ne ferai que t'encombrer avec du savoir inutile. Tout ce que tu dois savoir, c'est qu'il y a un conflit actuellement.

C'était bien culotté ! Mais je compris rapidement que je n'avais aucune chance d'insister. Elle allait me demander de prendre part à son camps, c'était sûr. Tout ça c'était du blabla de propagande en fait. Elle pensait que j'allais trahir mes amis, tout ça parce qu'elle m'avait payé à boire et fait sécher une heure de cours ? Jamais !

- Dans ce conflit... tu n'as pas ta place. Mais Ambre non plus. C'est pourquoi j'ai besoin de toi pour une seule chose : la sortir de l'enfer dans lequel elle s'est fourré.

Voilà qui était... inattendue. Elle me demandait de faire se que je comptais déjà faire. C'était assez intéressant comme retournement de situation. Peut-être n'était-elle pas aussi antipathique qu'elle en avait l'air.

- Et pourquoi moi ?

C'est vrai ça, n'étais-ce pas plutôt à Jean de se charger de sauver sa copine ? Il était rare que le copain gros et rouquin devienne soudainement le héros de l'histoire !

- Je vous ai beaucoup observé. Tous. Antoine n'est qu'un abruti, et Jean n'arrivera à rien, ça je peux te le garantir.

Elle sortit un carnet de son sac,, en déchira une feuille et inscrivit son numéro de téléphone.

- Voilà. Ne donne ce numéro à personne. Ne parle de ce qui s'est passé aujourd'hui à personne. Même pas les membres de ma famille. Surtout pas à eux, en fait. Et ne leur dit pas non plus que je t'ai adressé la parole. C'est bien compris ? Si tout va bien, on arrivera à éviter une catastrophe. Je peux compter sur toi ? »

Elle me tendit la main. Je réfléchis un instant, et je la serrais. Zoé n'inspirait pas la sympathie, mais si elle pouvait m'aider à ramener Ambre dans le monde de la lumière, alors c'était une alliée.
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LixyParadox MessagePosté le: Mer 24 Avr 2019 21:50   Sujet du message: Répondre en citant  
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Chapitre 5: Confessions d'un être supérieur

Antoine


Il en existe peu des génies. De vrais génies, je veux dire. Voilà la manière dont je me définissais il y a de ça un an. Je n'avais pas encore compris que mon intellect allait encore plus loin, qu'il était supérieur non pas à la moyenne, mais à tous. Je me croyais simplement destiné à révolutionner le domaine de l'informatique... Oui, je devais admettre que je m'étais montré capable d'un manque d'ambition assez flagrant. En même temps, il fallait me comprendre : je n'avais jamais rencontré le moindre obstacle, la moindre petite épreuve contre laquelle confronter mon esprit hors du commun. Mon incroyable voyage à travers la science n'avait pas encore commencé. Mes idées spectaculaires n'avaient pas encore germé dans mon esprit. J'avais été un adolescent normal, tout simplement, me fondant dans la plèbe, tout en sachant au fond de moi que j'étais différent.

Tout commença à changer peu de temps après les événements qui faillirent me coûter la vie et durant lesquelles je découvrais le supercalculateur ainsi que l'existence de la lutte de mon père contre une intelligence artificielle nommée XANA. Après notre victoire sur cette dernière, tout redevint peu à peu à la normale. Plus aucun signes d'agitation quelconque. Même Alpha, après nous avoir conseillé de virtualiser les cadavres présents à l'usine sur Lyoko pour s'en débarrasser, devint de nouveau silencieux, gardant pour lui ses derniers secrets concernant mes parents, leurs travaux et leur morts.

Nous avions organisé des tours de garde avec les autres dans le cas où une tour s'activerait. Pour être franc, chaque fois que c'était mon tour, j'espérais secrètement que l'écran redevienne rouge. Mais il n'en fut jamais rien. C'était paisible. Je regardais en boucle les bribes du journal de Jérémie Belpois, cherchant désespérément un sens à ce que je pouvais voir. Mélissa, possédé par XANA, avait refusé de me donner la dernière pièce du puzzle. Trop de zone d'ombre demeurait dans toute cette histoire.

Ce n'était pas tout. Ambre, ma chère Ambre avec qui nous devions unir nos forces... Commença à m'éviter, sans me donner la moindre raison. Je dû l'appeler une bonne centaine de fois, personne ne retourna jamais mes appels. Et lorsque nous étions tous ensemble, elle restait coller à Jean, à lui rouler des pelles d'une manière tellement immonde que rapidement j'eus l'impression que ces deux là ne formait plus qu'une seule entité reliée par la bouche.

La mort dans l'âme mais déterminé à aller jusqu'au bout, je fis des recherches sur ce fameux William Dunbar qui était celui qui avait tenté de nous tuer et ce que je découvrais ne faisait qu'épaissir le mystère. Il n'était pas simplement directeur et unique propriétaire de l'ensemble scolaire Kadic, mais aussi le principal actionnaire de Massive Dynamic, une étrange compagnie beaucoup trop présente sur la scène internationale pour être honnête. Je tombais sur des discours qu'il avait pu prononcer un peu partout, même à l'ONU ! Il arrivait toujours avec les mains dans les poches et un petit sourire confiant, voir narquois. C'était donc lui l'homme qui avait assassiné mes parents. De ses propres mains. Mais pourquoi ? Impossible de comprendre ses raisons. Autre chose d'intrigant : il avait été scolarisé à Kadic en même temps que toute la petite bande de Lyoko-guerriers du début des années 2000.

Et puis « Mélissa » avait évoqué un certain « H » avant de devenir muette et de trépasser. Là-dessus, mes trouvailles étaient proche du néant. Je ne perdais pas espoir, mais tôt ou tard, je compris qu'il était trop tard. Que certaines choses resteraient à jamais brumeuses. Et que ces « tours de gardes » étaient inutile : l'aventure était bel et bien terminée. J'allais redevenir un simple gars normal, parmi tant d'autres. J'avais insisté pour être le dernier à rendre visite à l'usine, les autres avaient accepté en hochant les épaules : ils étaient tous déjà passé à autre chose.

C'est alors que l'écran de l'ordinateur changea de couleur, indiquant une attaque tant redoutée par certains et tant attendue par moi-même. Je pris aussitôt mon portable mais la fenêtre de conversation avec Alpha apparut aussitôt.

A: Antoine. Quelqu'un essaie de rentrer en contact avec toi par mon intermédiaire.

Avant que j'eus le temps de répondre, ce quelqu'un se manifesta.

H: Bonjour Antoine.

Je ne rêvais pas. La personne avec qui je parlais s'intitulait « H » ! C'était forcement lui ! Le véritable assassin de mes parents, celui qui tirait les ficelles dans l'ombre ! Pourquoi donc se manifestait-il ?

« Qui êtes-vous ? Dis-je à voix haute. Je savais qu'il pouvait m'entendre.

H: On me connaît sous le nom de Hannibal. Veux tu jouer à un jeu ? Juste toi et moi. Tu n'as pas besoin de tes amis pour l'instant.

- Et pourquoi j'accepterai ? demandai-je d'une voix fière, essayant de garder fière allure.

H: Je te propose un véritable duel d'intellect. Une opportunité en or pour prouver ta valeur.

- Ce n'est pas une raison suffisante, dis-je calmement. Il n'allait pas m'avoir aussi facilement.

H: Effectivement. Je sais que tu te poses depuis longtemps des questions à mon sujet. De plus, je possède des informations sur tes parents, et tu n'as aucun autre moyen d'y avoir accès si ce n'est par mon intermédiaire.

Je compris qu'il ne servait à rien de demander l'identité de mon interlocuteur. S'il avait pris tant de précautions pour me parler, il n'allait pas se dévoiler aussi facilement. Et puis il devait avoir infiltré tout le système du supercalculateur pour pouvoir nous observer et communiquer avec moi de cette manière. Parce qu'une chose était sûre : il avait attendu le bon moment pour venir me parler. Celui où j'allais dire adieu à cet endroit et à tout mes rêves de grandeurs. Ce qu'il venait de faire, s'était de raviver ma flamme. Et il avait bien réussi !

- Comment se présente ton jeu ? Je suppose qu'on ne va pas s'asseoir autour d'une table et jouer aux mikados... éclatai-je sur un ton cinglant.

H: Le but est simple : mettre en échec son adversaire, par tout les moyens inimaginable.

Ça me plaisait. Ça me plaisait beaucoup. Je sentais une grande puissance grandir en moi. Cet affrontement allait-être spectaculaire ! Cet étrange personnage avait dû être un scientifique lui aussi, et devait avoir un quotient intellectuel assez développé. L'adversaire parfait pour prouver une fois pour toute ma valeur !

- Très bien, cher Hannibal ! Je relève ton défi ! M'écriai-je.

H : En revanche, cela doit rester entre toi et moi. Personne d'autre ne peut rejoindre le jeu.

- Je n'ai besoin de personne ! »

Commença alors ce que j'appellerai un véritable enfer. Il pouvait manipuler directement les tours de Lyoko et lançait jusqu'à cinq attaques par semaine, ne me laissant jamais respirer. Je passais mon temps à aller sur Lyoko et à désactiver des tours, encore et encore. Ça ne pouvait pas continuer comme ça. Je ne faisais que de me défendre. Ne m'avait-on pas toujours dit que la meilleure stratégie, c'était l'attaque ? En tout cas, ça se présentait très mal, Hannibal (qui était sans aucun doute celui derrière toutes ces attaques) ne me laissait aucun répit.

- Tu m'as dit que je n'avais pas besoin de mes amis pour l'instant... Mais est-il possible que je les implique ? lui demandai-je un jour, exténué.

H: Je suis déçu. Tu demandes déjà de l'aide ? J'ai dû te surestimer. Je suppose qu'Ambre peut te soutenir puisque les informations que je possède la concerne aussi.

J'étais extrêmement vexé par sa réaction. Mais en même temps, il avait raison. J'étais en train de perdre. Le fait de le décevoir alors qu'il était censé être mon ennemi m'était insupportable. Je devais cependant admettre qu'il était intéressant d'impliquer ma sœur. Les rares moments où nous avions travaillé ensemble, nous avions été en totale symbiose, cela avait été parfait. A nous deux, on pourrait sans problème faire ravaler sa fierté à cet étrange énergumène. Le problème était que depuis notre victoire l'an passé, elle semblait clairement m'éviter. J'essayai de la contacter mais elle ne me répondit jamais. En revanche, elle ne se gêna pas pour envoyer son chien de garde me menacer de me casser la tronche.

« Tu savais qu'elle n'allait pas venir me rejoindre, n'est-ce pas ? accusai-je un beau jour Hannibal.

H: Pas vraiment, non. La vie est pleine de surprises. J'étais d'ailleurs en train de me demander si tu étais capable de survivre jusqu'à cet été.

Capable de survivre... ?! Mais il me prenait pour qui ? J'allais le vaincre. C'était obligé, je ne savais pas encore comment, mais j'allais le vaincre. Pour le moment, je ne faisais que de me défendre, mais tôt ou tard, la roue s'inverserait. J'eus alors une idée fantastique. J'avais réussis sur mon rare temps libre à faire cracher toute l'adolescence de mes parents à Alpha. Mon père avait réussit à créer une forme matérielle à une créature possédant une forme virtuelle... Et si je créais quelqu'un - quelque chose à partir de rien ? Cela prouverait en définitive mon talent ! Alors entre les différentes attaque de XANA, je travaillais à plein temps sur le Projet "Violette", avec comme seul allié ce brave Alpha.

C'était de la science-fiction. C'était impossible. C'était-ce que je me répétais. Mais si les lois de la réalité m'empêchait d'accomplir mon dessein, et bien je les changerai à ma guise !! Il fut prévu que je mette une copie d'Alpha dans ce corps parfait que j'étais en train de créer. Une fille parfaite en apparence, avec des capacités de combats parfaites à la fois sur Lyoko ET dans le monde réel ! Avec ça, Hannibal pouvait toujours posséder un zoo entier pour venir m'attaquer, je ne craignais rien ! Je recherchais jour et nuit, trouvant toutes les capacités que je pouvais essayer de lui implanter.

Je ne sais pas combien de temps je travaillais sur ce projet totalement fou, enchaînant en même temps les missions dans le monde virtuel. Mon visage devenait de plus en plus squelettique. Je cru plusieurs fois que j'allais y passer. Que la fatigue allait m'emporter. Mais alors j'imaginais le visage de mon adversaire ricanant, se moquant de moi. Alors par un soir de juin, Violette vint au monde. Je n'oublierai jamais ce moment. Je n'avais pas dormi depuis pratiquement une semaine entière. J'avais fait quelques essaies mais rien de très pertinent. Je commençai à perdre espoir, mais je compris que c'était exactement ça le but de ce test : prouver celui qui avait le plus de ressources, celui qui avait le cerveau le plus puissant. Alors je m'étais accroché. Violette allait exister. Elle devait exister ! Après une bonne quinzaine d'heure de travail sans arrêt, je parvins à accomplir l'impossible. Sortant d'un scanner, complètement dévêtue, tel un ange, dotée d'une beauté surnaturelle. Je crois que je suis resté une heure entière à la regarder bouche bée, sans rien dire. Au bout de quelques temps, elle s'approcha de moi et me dit doucement de sa voix tellement mélodieuse :

« Bonjour, Antoine.

Elle était tellement parfaite qu'elle savait déjà qui j'étais ! Alors avec un grand sourire de victoire, je lui répondais en reprenant du poil de la bête :

- Bonjour, Violette ! Je suis content d'enfin te rencontrer !

Puis d'un coup, je me rappelai qu'elle était totalement nue devant moi. Mon premier réflexe fut d'aussitôt me retourner. Cela la déstabilisa.

- Ai-je fait quelque chose qu'il ne fallait pas ?

- Euh non, ne bouge surtout pas !

J'avais piqué pas mal de vieux vêtements chez ma tante, ce n'était pas très chic, mais au moins elle serait habillée. N'étais-ce pas la preuve de mon génie ?! N'étais-ce pas la preuve de ma supériorité ?! Sur Hannibal, sur mes parents, sur mon grand-père Franz Hopper ?

A partir de ce moment, tout devint plus simple. Je n'avais plus peur de Hannibal. Je n'avais plus peur de rien. Je pouvais gagner. Alpha faisait des centaines de calcul chaque jour pour essayer de traquer sa position. Il était habile et arrivait à se planquer pour le moment, mais maintenant que je n'avais plus à me soucier de gérer les attaques, tout était plus simple. J'avais fait en sorte que Violette possède les clés de Lyoko, je n'avais par conséquent même plus à me rendre là bas. Le seul souci que j'avais avec elle était des sortes de bug qui la faisaient saigner du nez et désactivaient toutes ses capacités, la changeant en une simple humaine. Le problème était que le métabolisme d'un humain n'est pas fait pour survivre à tout ce que contenait Violette. C'était comme... un retour de flamme on pouvait dire. Ça restait dangereux, si je ne la stabilisais pas tout les soirs, un grave problème pourrait arriver. Mais ce n'était qu'un petit détail ! Rien n'allait me priver de la joie de me rapprocher de la victoire !

- Alors très cher... Tu me sembles moins bavard depuis peu ! Le vent tourne, n'est-ce pas ? Bientôt Alpha trouvera ta location et j'enverrai Violette te chercher par la peau des fesses. Tu t'inclineras devant moi ! m'exclamai-je devant mon ordinateur un beau jour, relâchant toute mon arrogance. J'ignorai s'il allait me répondre. Peut-être s'était-il dégonflé.

H: Félicitation. J'avais commencé à perdre espoir, mais tu t'es montré digne et plein de ressources. La seconde partie de notre jeu va pouvoir commencer.

Seconde partie ? Qu'est-ce qu'il voulait dire ? Il me cassait mon délire de grand conquérant là !

H: Laissons nous deux mois de répits. Le temps pour que chacun d'entre nous puisse préparer nos différents pions.

Il me proposait de rester tout l'été sans rien faire. Sans essayer de le traquer. Cela signifiait aussi que les attaques allaient cesser. Ce n'était peut-être pas une si mauvaise idée. Ça allait me permettre d'établir une véritable stratégie et d'améliorer Violette et Alpha, mes seuls alliés. Et c'est-ce que je fis. Violette était devenue une véritable machine à tuer, aussi bien sur Terre que sur Lyoko. Je pouvais désormais activer des tours en simplement quelques clics. Est-ce que ça allait suffire ? J'en été persuadé. Cet automne serait rougi par le sang de mon adversaire.

Il se passa quelque chose de très étrange pendant l'été. Je ne saurai exactement en décrire la nature, et ce fut tellement perturbant que je préférai ne pas forcément m'en rappeler. Ce fut un événement des plus... inattendu mais qui au final allait m'apporter la victoire sur un plateau d'argent. Grâce à ce qui s'était passé, j'en savais beaucoup plus sur la véritable nature du jeu d'Hannibal et sur ses « pions » qu'il avait préparé contre moi. J'apprenais aussi quelque chose de terrifiant sur Ambre.

L'horreur dû se dessiner sur mon visage quand je compris tout ce que cela impliquait. Je compris que je devais agir. J'avais encore quelques temps pour trouver une solution. Pour récupérer ma sœur, ma seule famille, la seule à pouvoir me comprendre. J'essayais de ne pas trop penser à elle, mais je devais l'admettre, elle me manquait. Je ne m'étais jamais senti aussi complet qu'en sa présence.

Les huit semaines s'étaient envolées. Le combat contre Hannibal allait reprendre, mais avant ça, il fallait que je parvienne à sauver Ambre. L'année dernière, nous avions été à deux doigts de fonder à nouveau une famille. Ce n'était pas que j'avais besoin d'elle, certainement pas, c'était simplement que sa place était avec moi. Les Belpois devaient combattre ensemble, réussir ensemble là où leurs parents avaient échoués. J'avais trouvé comment la ramener de là où elle était bloquée. C'était encore quelque chose que l'événement de cet été m'avait permis de mieux comprendre. En revanche, la tache n'allait pas être aisée. Ça allait marcher, après tout, n'étais-je pas un génie ? J'avais essayé de la... chose qui avait remplacé ma sœur en lui envoyant Violette, mais ce fut un échec. La méthode brutale n'était pas efficace, il allait falloir être plus subtile. En plus, les pions de mon adversaire étaient déjà rentrés en action. Ils avaient fait quelque chose à Violette. Bien évidemment, j'avais su que ça allait se produire grâce à ce qu'il s'était passé cet été. Je pensais que j'aurai pu l'éviter, mais parfois le simple fait de savoir que quelque chose va se produire ne suffit pas à l'arrêter. Heureusement, j'avais prévu un plan de secours la concernant, mais l'enclencher allait me prendre beaucoup de temps. Hors, c'était justement de ça dont je manquais le plus.

J'avais passé l'après-midi à examiner ma créature dans les moindres détails en séchant les cours, dans l'espoir de corriger ce qui avait pu être fait. Rien ne semblait sortir de l'ordinaire, sa crise s'était calmée, mais je savais qu'en réalité, elle était hautement fragilisée... Je la fis finalement sortir du scanner, dans lequel elle était restée deux bonnes heures.

- Tout va bien Antoine ?

Je m'étais mis à rougir. Je savais qu'il n'y avait aucune raison de la faire aller nue dans le scanner mais... mais elle n'avait pas besoin de le savoir. Mais n'empêche... ce qu'elle était belle cette fille. Ma chose. L'une de mes pièces maîtresses. Celle qui allait me faire gagner. Je lui fis signe de se rhabiller. De toute façon, je ne pensais pas que mon regard avait choqué sa pudeur. J'étais son Créateur, certes... mais j'étais incapable de savoir si elle pouvait ressentir quoi que ce soit. Elle était artificielle, c'était donc peu probable qu'elle puisse avoir accès à ce genre de sentiments réservés aux humains. Bref, ce n'était pas important. Ce qui comptait, c'était qu'ils m'obéissent au doigt et à l'œil, Alpha et elle.

Je remontai à l'étage et me mettait aussitôt à converser avec mon sous-fifre virtuel.

- Alpha. Première question : est-ce que tu as éliminé tout les risques d'intrusions de Hannibal dans les systèmes du supercalculateur ?

Il y avait certaines choses que mon adversaire ne devait pas savoir. Il ne pouvait pas se permettre de rentrer dans mon ordinateur comme dans un moulin. Je m'étais assuré que certains fichiers caché soit impossible à cracker sans que j'en sois mis aussitôt au courant et que je puisse les supprimer à distance. Quand au reste... il n'y avait aucun moyen fiable de l'empêcher de pirater les réseaux de communication d'Alpha.

A: Chance d'intrusion de Hannibal d'ici 24 heures : 27% / d'ici 48 heures : 54 % / d'ici 72 heures : 89 %.

Bon, cela nous laissait un peu de répit.

- Bien. Deuxième question : comment avancent les recherches ?

Hannibal avait un puissant avantage : il savait tout de moi, de mon emplacement, et même de ma stratégie (enfin, d'une bonne partie), alors que je ne savais rien sur lui. Hors, le seul moyen de le vaincre était de découvrir qui se cachait derrière ce masque. J'avais beau déjà en savoir beaucoup sur ses sous-fifres, il avait réussi à s'entourer d'une aura de mystère qui m'horripilait.

A: Hannibal est de toute évidence un professionnel de l'informatique. Cependant, j'ai été moi-même conçu par des professionnels de l'informatique. Il ne pourra m'échapper éternellement.

J'avais déjà pensé à demander à Alpha s'il connaissait l'identité de mon rival. Il m'avait répondu négativement. Hors, cette intelligence artificielle ne mentait jamais.

- Troisième question : quels sont les risques d'attaque aujourd'hui ?

A: Mes statistiques ne peuvent pas être totalement fiable, mais je dirai de 11% seulement.

- Bien. Une dernière : mes adversaires sont-ils tous à Kadic ?

A : Affirmatif. En analysant les registres de cette année, j'ai pu retrouver les noms de Zoé, Augustin, Mathilde et Judith Guillot qui correspondent aux informations que nous avions reçus.

D'accord. Ainsi, mes ennemis étaient tous autour de moi, comme prévu. Cet Augustin était même dans ma classe ! Judith était l'infirmière et les deux autres se trouvaient dans d'autres classes du lycée. Ils pensaient m'encercler et avoir l'effet de surprise ! Mais s'ils savaient... Ce qui s'était passé cet été avait clairement changé la donne !

- Parfait. Je te laisse l'usine aujourd'hui. En cas de pépin, contacte moi illico !

Je commençai à reprendre ma veste, et à me préparer. Je savais que l'usine était devenu ma nouvelle demeure, mais l'enfermement commençait à me peser. Et aller au lycée n'était pas très agréable comme type de sortie.

A: Quel ton programme de la journée ?

- Je... euh... je vais sortir pour réfléchir à mon prochain plan d'action.

A : Très bien. Je reste parée à contrer la moindre attaque.

Je ne restai pas plus longtemps à parler tout seul face à un écran et j'allai chercher ma création sans attendre une quelconque réponse de la part d'Alpha. Depuis l'année dernière, je n'avais pas arrêté. Enchaînant recherches et combats, risquant ma vie et ma santé mentale à chaque minute de chaque jour, sans aucun répit. Alors pour une fois... pour une simple fois... Hannibal allait attendre. Ambre aussi, je te sauverai plus tard. Laissez moi tous au moins une simple après-midi. Même les êtres supérieurs ont le droit de se détendre parfois, non ?

Je fis signe à Violette de me suivre, et elle s'exécuta. Elle semblait soucieuse, comme si quelque chose lui échappait.

- Mais... ne devrais-je pas continuer à rechercher activement Ombre ? me demanda t-elle de sa petite voix.

Voix, qui pour mon plus grand plaisir devenait de plus en plus naturelle. J'avais passé une immense partie de mon temps libre à essayer d'améliorer la fille aux cheveux bleus. Il n'était même plus question de facultés de combat, j'avais juste voulu faire disparaître tout réflexe mécanique de sa personne, la rendre... humaine au possible. J'avais abandonné ce projet il y a peu, me consacrant à des choses plus importante, mais c'était agréable de voir que ça commençait à porter ses fruits.

- Chut, dis-je en mettant mon doigt sur ses lèvres. On a bien travaillé tout les deux. Et comme on dit : après l'effort, le réconfort !

- Le... réconfort ?

Il avait plu hier. Mais aujourd'hui, les nuages avaient commencé à disparaître, et une embellie était apparue. Le soleil aussi accepté de sortir le bout de son nez. Bien évidemment, ça n'allait pas durer. C'était déjà un miracle à la base. Les spécialistes avaient annoncé une averse toute l'après-midi, et elle ne saurait tarder à tomber. Je me rendais compte que je n'avais jamais emmené ma Reine au centre-ville. Elle était toujours resté à l'usine, et s'était parfois aventuré aux alentours pour combattre les attaques de XANA. La journée d'hier à Kadic... c'était la première fois qu'elle voyait autant de monde au même endroit. Est-ce que cela l'avait troublé ? Même si depuis peu, quelques ressentis était trahi par son visage, tout cela restait très primaire. Je ne pensais pas qu'elle était capable de pensée aussi complexe. Par pour le moment en tout cas.

Nous prîmes le bus. Elle fut sur la défensive quand des gens qu'elle ne connaissait pas commencèrent à la bousculer. Je la rassurai rapidement. Il s'en était fallu de peu avant qu'elle casse la figure à un inconnu. J'aurais dû lui expliquer que nous ne risquions rien - pour le moment. Que cette après-midi, c'était elle et moi. Tout simplement. Quand nous arrivâmes à notre arrêt et par conséquent dans la rue commerçante principale, je la regardais et lui demandais timidement :

- Euh... Violette. Tu peux me tenir la main ?

Je devais être rouge comme une tomate. Elle me fixa un instant, sans doute surprise que pour la première fois, je formulais une demande et non pas des ordres. Après quelques instant, elle accepta. Mon cœur battait la chamade et nous avançâmes comme sur le trottoir. Les gens nous regardaient bizarrement. Entre mon physique d'ermite et ses vêtements en piteux états...

- Ça... ça te dit qu'on aille faire les boutiques ? Je t'achèterai ce que tu veux !

Je me sentais stupide. Mais en même temps... j'étais heureux. En cet instant privilégié avec elle, j'avais le sentiment que plus rien d'autre n'avait d'importance. J'aurais aimé que ça dure éternellement. Nous allâmes dans plusieurs magasins. Violette semblait aussi perdue que si je l'avais lâché dans une jungle remplis de dangers. Je dû lui donner directement des habits à essayer. Quand elle sorti de la cabine d'essayage avec sa jupe blanche et son haut bleu clair, j'avais l'impression de voir un ange descendre du ciel. Je ne pouvais m'empêcher de ressentir une certaine fierté : après tout, ce design totalement parfait, c'était moi qui l'avait dessiné. Après ça, elle commença a choisir d'elle même ce qu'elle voulait porter. Je décidai de tout lui acheter, même les combinaisons les plus étranges, à l'aide de la carte bleue de ma tante, cette vieille peau.

Une fois de nouveau à l'extérieur, j'admirai encore une fois la beauté de ma Reine. Et en me raclant la gorge, je formulai une nouvelle demande.

- Tu peux... m'embrasser ?

- Pardon ?

- Embrasse-moi. Euh... maintenant, dis-je sur ton davantage autoritaire.

Elle pencha sa tête sur le côté.

- Comment suis-je censée faire ça ?

- Hum... euh... tu poses tes lèvres... sur les miennes.

Elle s'approcha et fit exactement comme je lui avais décrit. C'était une sensation... étrange. Mais froide. Sans aucune émotion. Il fallait que j'arrête ça. Violette n'était pas ma petite amie imaginaire, ce n'était même pas une vraie fille. Elle était ma pièce maîtresse, mais ça s'arrêtait là. Un simple pion sur l'échiquier de ma bataille contre Hannibal.

- Eh elle est mignonne ta copine ! On peut l'essayer ?

Je me retournai. Un groupe de trois personnes. Des « racailles ». Il y avait une chose que je détestais dans la vie, c'était de me faire interrompre dans mes pensées. Et surtout par des vermines dans leur genre. Je fis le signe à Violette. J'avais mis au point un langage silencieux avec elle pour qu'elle puisse comprendre mes instructions en toute circonstance. Elle avait parfaitement reçu le message. Elle s'approcha du groupe d'indésirable qui ricanait déjà... et le reste fut jouissif. En quelques secondes, plus aucun des trois n'osait sourire. De toute façon, quelques uns d'entre eux ne pouvaient plus, vu qu'ils leur manquaient désormais des dents de devant. Maintenant que le ménage avait été fait, je m'avançais vers eux avec jubilation et écrasait la main de celui qui m'avait parlé.

- Dis-moi, très cher... Comment appelle t-on quelqu'un capable de créer la vie tout seul à partir de néant ?

Il essaya de m'insulter mais j'enfonçais encore plus ma semelle dans sa paume.

- Il me semble que c'est un Dieu, n'est-ce pas ? Je suis de bonne humeur, nous allons en rester là. J'espère qu'ainsi vous apprendrez à respecter les êtres supérieurs ! Ah, et Violette : casse lui le bras, que ça lui serve de leçon.

Alors que ma création s'exécutait, je me rendais compte que beaucoup de gens s'étaient arrêtés pour nous regarder. Certains filmaient même. Alpha se chargerait d'effacer toute trace de notre présence ici, ce n'était pas un problème. Violette me demanda s'il fallait qu'elle s'occupe d'eux aussi.

- Non. Le temps de l'amusement est terminé. Il est temps de passer aux choses sérieuses.

J'avais eu mon après-midi de bon temps, maintenant j'étais en pleine forme pour la suite. Et la première étape était bien sûr de récupérer ma sœur. Et j'avais bien une idée. Après tout, Hannibal ne jouait pas selon les règles, alors pourquoi le devrais-je ? Je prenais mon portable et écrivais sobrement : « J'ai besoin de toi dès que possible à l'usine, c'est important. On doit parler d'Ambre. » Envoyer à : Melvin et Jean.



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Silius Italicus MessagePosté le: Jeu 08 Aoû 2019 15:29   Sujet du message: Répondre en citant  
[Krabe]


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Bonsoir très cher Pilorde,

Ainsi, vous nous faite danser sous la pluie ?

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il faut faire remarquer que le sommaire de ce récit n’est plus à jour dans la mesure où il ‘indique que 3 chapitres publiés outre les prologues, alors qu’il y en a, à l’heure où s’écrivent ces lignes, cinq.

De même que pour la première partie, retrouver cette réécriture du Projet Violette est une expérience assez particulière. Icer vous en déjà fait quelque peu part, de même que Minho (et Dieu sait qu’il est difficile de passer après Minho lorsque celui-ci est en forme, c’est-à-dire tout le temps). Même si les premiers chapitre du Projet Violette on maintenant 4 ans, certaines scènes et impressions restaient dans la mémoire du lecteur, en sorte que l’on aurait pu croire que la lecture de cette version-ci s’en trouverait amoindri, parce que déjà vue.

Et pourtant, ce n’est pas le cas. L’écriture s’est affinée, et cela joue sans doute à donner l’impression d’un récit toujours neuf. Finalement, le titre nouveau est bien adapté : « Rainy days », jours de pluie, pour un récit qui glisse si bien à la lecture et vous emporte dans son souffle.
Car, comme Minho l’a si bien développé, c’est un récit assez bigarré : tantôt drôle, tantôt triste, toujours sinueux et plaisant. Il est rare de passer au travers de palettes d’émotions aussi large à la lecture. C’est, si c’était un but visé, une réussite. Le style est simple, sans affectation, et reflète assez bien la personnalité des personnages

Puisque nous en sommes rendus au point où vous allez dévier par rapport à votre premier jet, autant en profiter pour faire un peu le point.

Jean est finalement celui dont il a été le moins question. Son influence sur l’histoire semble s’estomper. De manière intéressante, on peut lire une partie de Rainy Days comme une sorte de vaudeville. Jean s’installait dans la vie d’homme marié : une femme, un boulot, un enfant (sa sœur en fait, mais elle est à charge), et des projets (euphémisme pour désigner les achats immobiliers). Son point de vue est assez parlant en ce qu’il reflète le passage de l’état de célibataire, d’adolescent, à celui de conjoint, c’est-à-dire d’homme. Ce changement de statut se reflète aussi dans son rapport à la gent féminine : il est tout de suite plus intéressant et suscite une tentative d’approche de la part d’une collègue. Hélas pour lui, tout à son bonheur conjugal, il ne voit pas que son couple s’effondre : Ombre veut se séparer de lui et se rapproche physiquement d’un autre. S’ils n’étaient des adolescents dans un récit de science-fiction, on pourrait s’attendre incessamment sous peu à ce qu’Ombre demande le divorce. A la place, nous nous dirigeons sans doute vers un dénouement plus tragique. La potentielle visite à Antoine à l’usine justement parce qu’Ombre en serait le sujet pourrait bien précipiter ces évolutions.

Ombre nous joue un remake de Mc Beth, la scène de lavement des mains est particulièrement parlante. Il est intéressant de remarquer qu’elle se suppose né du néant, apparu sui generi dans la tête d’Ambre, mais que malgré cela, elle ne pense pas que ses hallucinations actuelles puissent relever d’un mécanisme similaire : de même qu’Ambre à accouché d’Ombre, Ombre pourrait être en train de créer une variante d’Ambre. Ironiquement, dans la mesure où Antoine a pu créer Violette, on pourrait imaginer qu’il aurait pu donner un corps à Ombre… si elle avait attendu un peu plus.

Antoine n’a pas beaucoup changé. Enfin si : maintenant il est drôle. A ses dépends et pour le lecteur il faut le dire. Le premier paragraphe du chapitre 5 est d’un tel niveau d’infatuation adolescente que c’en est burlesque. Notez, il n’a pas tout à fait tort : avoir créé Violette est effectivement une prouesse. Pour le reste, son obsession avec le fait de trouver Hannibal semble mal à propos. Antoine n’a pas les moyens de l’atteindre dans le monde réel, alors qu’Hannibal montre qu’il en a largement les moyens. Et encore, nous n’en sommes sans doute qu’à sa main d’ouverture. Il doit rester quelques cartes intéressantes dans son deck. Reste que l’attachement familial d’Antoine à Ambre est très étonnant.

Reste Melvin, celui à qui finalement le récit semble faire le plus de place. Il donne l’impression d’une certaine évolution par rapport à la première partie. Comment dire ? Il semble plus brillant intellectuellement, et de fait on tendrait à être d’accord avec Augustin sur le fait qu’il ne devrait pas se sous-estimer. Il est un eu l’incarnation de ce qui est duit plus haut sur le style : il fait montre en effet d’une large palette d’émotions et de réflexion, à un rythme assez rapide. C’est intéressant dans la mesure où cela permet au lecteur de se loger dans les méandres de sa pensée, de s’y accrocher et de la suivre tel qu’elle se formule et au rythme où elle apparait et disparaît. Et puis, il y a ce mélange si réel de réalisme et de naïveté dans son personnage…

Du point de vue de l’intrigue général, il reste quand même quelques questions intéressantes. Tout d’abord on peut se demander à quoi rime le petit jeu d’Hannibal. La seule option qui vienne actuellement, c’est de penser qu’il a besoin des capacités d’Antoine pour faire quelque chose : il veut qu’Antoine tire les marrons (mais lesquels ?) du feu à sa place. Et il est certain que son jeu va mener Antoine dans la direction voulu.

Dans le même ordre d’idée, les membres de la famille Guillot sont supposément des pions d’Hannibal. On peut dès lors se demander pourquoi il y a des dissonances entre eux. Dissonances qui ne sont pas juste de personnalités, mais bel et bien de méthode : ils ne sont pas tous d’accord sur ce qu’il convient de faire. D’ailleurs à ce jour Zoé occupe la meilleure place pour le poste de personnage focus du second prologue. Ce qui est intéressant, c’est que l’apparition de M. Guidon laissait à croire que c’était lui l’agent d’Hannibal et que les enfants représentaient un troisième parti. Il semblerait que ce ne soit le cas. Reste une question : M. Guidon sera-t-il un fusil de Tchekhov ?

En somme, votre récit est toujours aussi plaisant à lie, et bien que votre serviteur ait tardé à en faire état, il ne peut qu’espérer que vous continuerez à publier, et peut-être plus souvent encore.

Au plaisir.
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LixyParadox MessagePosté le: Jeu 03 Oct 2019 14:36   Sujet du message: Répondre en citant  
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Chapitre 6: Ombre et l'Autre

Melvin


Je passai le reste de la journée dans les vapes, perturbé par les événements qui s'étaient produits aux toilettes. Zoé, derrière ses airs de... de gothique agressive, était bien plus que ça. Elle savait certaines choses qui pourtant n'étaient connues que par Ambre, Antoine, Jean et moi. Et les défunts Ulrich et Mélissa. Ces derniers s'étaient peut-être confiés à d'autres personnes. Après tout, nous ne savions pratiquement rien d'eux. Et puis, nous n'avions pas été les seuls à avoir été impliqué dans cette affaire, j'avais oublié par exemple que c'était quelqu'un qui avait contrôlé XANA dans le but de nous tuer. Ce n'était pas possible de savoir combien de gens exactement étaient au courant. Mais le pire n'était pas là. Cette discussions avec la métaleuse n'était rien par rapport à l'autre choc que j'avais dû affronter : Ambre. Ma pauvre Ambre... La fille dont j'avais été tellement amoureux, réduite à un état sauvage semblable à de la folie. Elle avait été proche de me tuer. Je ne sais pas si elle en aurait été véritablement capable, et je préférai ne jamais le savoir. Parce que malgré ça, j'éprouvais quand même beaucoup de compassion pour elle. Alors peu importait que je n'avais absolument aucunement confiance en Zoé, j'allais tout faire pour sauver Ambre. Je lui devais bien ça. Cette après-midi j'allais prendre contact avec Jean pour prendre des nouvelles et essayer de comprendre comment mon ancienne amie avait pu en arriver là. Ça me semblait être un bon point de départ.

En attendant, il me restait deux heures d'anglais. Une matière dans laquelle j'avais toujours été extrêmement mauvais, comme dans beaucoup d'autres. Mais encore plus dans celle là. Parce qu'Antoine ne s'était jamais retrouvé dans le même groupe que moi, il n'avait jamais pu m'aider. C'était donc devenu ma séance de sieste favorite. Mais cette fois, si je pouvais me mettre à côté d'Augustin, ça pourrait changer. Je veux dire, ce gars là était l'intello parfait, il devait sans doute aussi maîtriser les langues étrangères ! Dans le doute, je lui demandais alors que nous rentrions pour la première fois dans la salle :

« Dis... t'es fort en anglais ?

Souriant comme à son habitude, il affirma :

- Je pense pouvoir dire sans mentir que je me débrouille ! »

J'étais rassuré. Quelle aubaine d'être tombé sur ce gars là le jour de la rentrée finalement ! Comme quoi, la chance, ça existait parfois. Mais la joie céda rapidement fasse à la déception lorsque l'enseignant nous plaça par ordre alphabétique. Je regardais mon nouvel ami avec des yeux de chien battu. Il haussa les épaules, comme pour me dire : « Tant pis ! » Alors dans cette matière, les choses n'allaient pas être différentes des années précédentes, j'allais dormir et me ramasser des caisses à chaque fois. J'installais mon agenda à la place qui m'était attitrée et posais lourdement ma tête dessus, prêt à m'assoupir. C'est alors qu'une voix féminine me tira hors du demi-sommeil dans lequel je m'étais déjà plongé.

« Eh ! T'as pas ton livre d'anglais ?

Moi qui n'étais pas habitué à ce que des filles m'adressent la parole, voilà qu'en deux jours c'était la quatrième à me porter attention ! J'observais ma nouvelle voisine et la jaugeais du regard. Elle avait une coupe au carré brune et des yeux de la même couleur. Ses vêtements étaient une veste en cuir et un pantalon gris. Son visage n'avait rien d'extraordinaire, mais pourtant il me semblait étrangement familier, comme si elle me rappelait quelqu'un sans que je puisse me rappeler de qui il s'agissait.

- Tu comptes me répondre à un moment ? dit-elle, agacée.

- Oh pardon. Ouais, je l'ai, dis-je aussitôt, me rendant compte de mon absence de réponse.

Je le sortais de mon sac, et la jeune fille s'en emparait immédiatement sans me demander mon avis, et commença à le feuilleter.

- Ralala... je comprends rien... dit-elle dans un gémissement énervé.

Ce n'était pas avec elle que j'allais améliorer ma moyenne... Bon, au moins je pouvais essayé d'engager une conversation avec elle. Après tout, à l'instar d'Augustin, j'allais passé toute une année à côté d'elle.

- Je m'appelle Melvin et toi ?

Elle me regarda, surprise et se mit à sourire.

- Melvin ! Je savais que je te connaissais !

De quoi ? On s'était déjà parlé auparavant ? C'était étrange, je n'en avais absolument aucun souvenir ! Pourtant je gardais à chaque fois en mémoire les rares moments où un membre du sexe opposé m'adressait la parole. Et il fallait admettre qu'elle n'était pas vraiment repoussante, si on avait véritablement déjà discuté, je m'en serais rappelé !

- Tu te souviens pas ? C'est moi, Sarah, on était ensemble en maternelle et en primaire ! »

Une vague de souvenirs remonta en moi d'un coup. Effectivement de la petite section au CE1, je traînais toujours avec Louis, un enfant en chaise roulante et avec une fille... nommée Sarah. On était littéralement inséparable, on avait fait les quatre cents coups. Vu que nos parents étaient amis, j'allais souvent jouer chez elle avec son frère aîné, Steven. C'était un peu brumeux dans ma tête, mais c'était toujours là. Notre groupe, c'était un peu le gang des reclus, de ceux qui étaient à l'écart. Nous avions tout les trois prit des chemins différent au milieu de l'école primaire, quand Louis dû partir à l'hôpital et quand Sarah fut envoyé en pension suite au décès de sa mère. C'était là qu'avais commencé ma solitude...

Je regardais la fille assise à côté de moi avec stupéfaction. Ça pouvait-être elle, oui !

« Non... Sérieux ? furent les seuls mots qui sortirent de ma bouche.

Elle eut un soupir, ma réaction semblait l'avoir rassuré.

- J'ai eu peur à un instant de m'être trompée. J'aurais eu l'air totalement conne !

J'essayais de rassembler toutes mes pensées pour me rappeler un maximum de choses à son sujet. Je l'avais jamais revu depuis son départ il y a longtemps. Je n'aurais jamais cru qu'on se retrouverait un jour. La preuve, je l'avais carrément zappée de ma mémoire.

- T'as vachement changée ! dis-je en l'examinant. T'étais beaucoup plus...

... comme moi. Oui, elle avait été beaucoup plus ronde à l'époque, on était devenu amis à cause de ça principalement.

- Ouais... je sais. Qu'est-ce que tu deviens sinon ?

Je me rendais compte à cet instant qu'une importante partie de ma vie était secrète. Il y avait certaines choses qui m'avait marqué que je ne pourrais jamais dire à Sarah ou même Augustin. Et si j'essayais, on me prendrait pour un fou, une sorte d'illuminé, voir même juste quelqu'un de triste qui s'invente une vie imaginaire. Tout ça, j'allais devoir le garder pour moi. Les seuls personnes à pouvoir me comprendre étaient Antoine, Ambre, Jean et de toute évidence Zoé. Pour le reste de l'humanité toute entière, je devais rester motus et bouche cousue.

- Pas grand chose. Et toi ? répondis-je rapidement.

Elle eut un petit soupir. J'avais l'impression qu'elle était beaucoup plus détendue depuis qu'elle connaissait mon identité. C'était le genre de personne à être très distant avec les gens qu'elle ne connaissait pas, et à ne se révéler uniquement qu'à ses amis. Amis. Après tout ce temps, me voyait elle encore comme un ami ?

- C'est... compliqué ! » fit-elle avec un petit rire.

Et puis elle se plongea dans la lecture de mon cahier d'anglais, comme pour changer de sujet. C'était étrange de revoir quelqu'un aussi longtemps après. J'avais l'impression de la connaître, mais en même temps, c'était une parfaite inconnue. Franchement, le fait d'avoir été très proche d'elle alors que nous n'avions que 3 à 6 ans ne voulait rien dire. Nous avions tout les deux beaucoup changé depuis. Surtout elle. Elle n'avait plus le physique d'une fille qu'on mettrait à l'écart, contrairement à moi qui avait toujours la même morphologie...

Mon portable vibra dans ma poche. C'était curieux: n'ayant que peu (voir pas) d'amis, il n'y avait que ma mère qui me contactait par message et jamais elle ne le ferai pendant mes horaires de cours. Je regardai rapidement mon téléphone pour remarquer que je m'étais trompé. Ce n'était pas elle. C'était Antoine. Le message disait « J'ai besoin de toi dès que possible à l'usine, c'est important. On doit parler d'Ambre. » Antoine avait peut-être des informations au sujet de la jeune fille que ni Zoé ni moi ne possédait. Malgré son comportement étrange, peut-être avait-il remarqué celui d'Ambre ? Ça valait le coup d'échanger des informations. Zoé m'avait fait promettre de ne rien dire à personne quand aux événements qui s'étaient déroulés dans les toilettes ce matin, mais en qui avais-je le plus confiance ? Un vieil ami que j'avais certes perdu de vue ou bien une métaleuse bizarre et particulièrement flippante ? La décision à prendre était plus ardue que je ne l'aurais imaginé, mais finalement, j'optais pour la première option. Après tout, c'était sa sœur, il avait le droit de savoir ce qui lui arrivait.

Je levai la main et déclarait avoir mal au crâne. Le professeur accepta que je me rende à l'infirmerie à condition que je sois accompagné. Sarah se porta aussitôt volontaire. Ça ne m'arrangeait pas trop... comment lui expliquer que je comptais en réalité faire le mur ? Au détour d'un couloir, je commençai à prendre le chemin opposé à l'endroit où nous étions censé nous rendre.

« Euh Melvin... Tu vas où exactement ? » demanda la jeune fille, un brin surprise.

Je me tournai vers elle. Je ne pouvais pas tout lui dire, mais je pouvais lui faire comprendre que tout ça c'était sérieux. Très sérieux.

- Écoute... tu ne me croirais jamais si je te racontais toute cette histoire, mais j'ai une amie qui est en grave danger. Et d'une certaine manière... moi seul peut l'aider !

Elle se gratta la tête, l'air décontenancé. J'avais essayé d'avoir l'air épique en lui annonçant ça, mais je me rendais compte qu'il aurait peut-être mieux valu que je me contente de trouver une excuse bidon, plutôt que de donner des bribes de vérité. Je devais paraître totalement ridicule.

- Je viens avec toi, dit-elle.

Ça c'était surprenant. Et inattendu. Ça devait être une blague. Pourtant Sarah avait l'air très sérieuse. Je ne comprenais pas sa démarche : ce que je venais de lui avouer n'avait strictement aucun sens !

- Je sais pas ce qui t'arrive, mais ça a pas l'air d'être facile à porter. On sera pas trop de deux pour aider ton amie, non ? Et puis je m'ennuie ces derniers temps, alors si ça peut m'occuper...

Je me mis à sourire. Je commençai réellement à être de nouveau entouré cette année. Elle allait venir avec moi et on allait régler toute cette histoire ensemble, comme au bon vieux temps ! Mais... Mais c'est alors que le souvenir du corps sanglant d'Ulrich me revint en tête. C'est alors que le souvenir de la fois où je ne pouvais plus contrôler mon corps et où j'avais failli tuer Ambre refirent surface. C'est alors que le souvenir du visage de cette dernière, déformé par une agonie monstrueuse, me fit baisser la tête. Tout ça était dangereux. Véritablement dangereux. Nous avions tous failli perdre la vie, et Ambre était dans un état très critique, prenant des risques pour les autres mais aussi pour elle même. Sarah n'avait rien demandé. Est-ce que ça valait vraiment le coup de lui imposer ça ? La réponse était non. Zoé m'avait confié cette mission, à moi et je me la serai confié de toute manière. Ça ne concernait personne d'autre.

- C'est gentil... mais non. Tu ne peux pas. »

Et je quittai les lieux en courant, sans me retourner. C'était un peu rude comme comportement, mais on était trop nombreux à avoir déjà souffert. Bien sûr, il n'y avait pas eu que de la souffrance : on avait passé quelques bons moments avec Jean, Antoine et Ambre. Comme je me le disais souvent, les quelques jours où nous avions affronté XANA avait été ceux où je m'étais sentis le plus vivant. Sans doute parce que j'avais failli justement y perdre la vie, comme nous tous. Mais là, c'était différent. Ce n'était pas une machine détraquée qui posait problème, mais une adolescente, comme nous, au bord du gouffre. Cette lueur de désespoir dans ses yeux était inoubliable. Et si ce qu'elle avait vécu l'avait mise dans cet état, ça pouvait le faire à n'importe qui. Alors non, il ne fallait pas impliquer qui que ce soit d'autre. Vu ma conversation avec Zoé, il était évident que c'était lié à l'usine et au supercalculateur. Antoine allait sans doute pouvoir apporter des réponses.

Jean


Jean était dans le bus, avec Mathilde. Il ne parlait pas. Elle avait essayé de commencer une conversation, mais il ne lui avait pas répondu. Quand il était rentré chez lui la veille, Ambre n'était pas là. Léa était allongée par terre en larmes. Il n'avait rien comprit à ce qu'elle lui avait raconté, Ambre l'aurait menacé semblerait-il... mais il refusait de croire qu'elle ait pu agir de cette manière, ça n'était pas logique ! Elle et Léa s'adoraient comme deux soeurs ! Et maintenant elle avait disparu... Jean dormit seul dans son lit pour la première fois depuis un an. Quand il se réveilla, il avait le moral dans les baskets. Il se surprit à hurler sur des enfants, en bouillonnant de rage. Mathilde avait dû intervenir, lui faisant comprendre qu'il ferait mieux d'aller se calmer. Les enfants qu'il avait reprit à l'ordre étaient en larmes, ils le regardaient avec une immense crainte dans les yeux. Il s'en foutait, une seule chose comptait à ses yeux.

Ambre... S'il te plaît, fais pas de conneries...

« Jean, si tu as besoin, tu peux m'en parler, lui dit doucement Mathilde, sa voix à moitié couverte par les conversations des autres passagers.

- J'ai... j'ai des problèmes avec ma copine... Elle est partie et je sais pas où elle est...

Elle hocha la tête avec un air grave.

- Tu veux qu'on essaye de la chercher ? Je peux peut-être t'aider. »

C'est à ce moment là que Jean reçu le message d'Antoine. Il hurla au conducteur d'arrêter le bus et en descendit immédiatement.

Antoine... J'aurai dû m'en douter...

Mathilde


Mathilde resta encore quelques instants dans le bus avant d'en descendre à son tour. Il pleuvait encore dehors. L'averse devenait même de plus en plus violente. Allait-il y avoir de l'orage ? Elle était seule dans la rue, les rares passants qu'elle croisait courraient pour se mettre à l'abri. Mathilde avançait sereinement, sans se presser. Elle arriva finalement à un kiosque. Les autres l'y attendaient.

« Et bien c'est pas trop tôt Mathilde ! On adore attendre dans le froid, tu aurais pu prendre encore plus de temps ! fit la voix sarcastique de Judith.

- Maintenant on est tous là et c'est tout ce qui compte, temporisa Augustin.

- Zoé n'est pas là ? Demanda la rouquine.

- Nan, pour ne pas changer, répondit Judith en levant les yeux au ciel.

Mathilde contempla ses frères et sœurs. Augustin accepterait. Chaque fois qu'elle proposait quelque chose, Augustin acceptait. Mais Judith... C'était l'exact opposé, elle mettait un veto sur tout, sans raisons. Elle donnait l'impression de juste vouloir les ralentir. Pourtant, on travaille tous ensemble désormais. Même avec Zoé. Pour le meilleur et pour le pire... pensa t-elle.

- Il se passe quelque chose avec Ambre. Elle a disparu de chez Jean depuis hier et il vient de recevoir un message d'Antoine. J'ai pas pu en savoir plus.

- Pareil pour Melvin, il a fait le mur cette après-midi en classe, compléta Augustin.

Il regarda ses sœurs avec un air grave. Il y eut un instant de silence, qui fut brisé par la fausse infirmière du groupe.

- Et vous étiez pas capable de vous renseigner pour savoir exactement ce qu'il se passe ?

Mathilde baissa les yeux. Tout c'était passé trop vite. Si elle avait eu plus de temps, elle aurait vraiment pu s'attirer la sympathie de Jean. Et sa confiance. Dès lors, il lui aurait tout raconté.

- Non... mais clairement, c'est important. Il faut intervenir.

- Et plomber notre couverture dès le début ? Déjà que la façon dont Augustin s'est démerdé pour que Violette vienne à l'infirmerie était tellement discrète, je suis sûr qu'Antoine ne se doute de rien. Et c'était vraiment nécessaire de faire venir ce gros tas avec toi ?

- Je n'y peux rien... Guidon a improvisé sur ce point là.

- Ouais, bien sûr... En tout cas, je refuse qu'on brise le peu de stratégie qu'il nous reste pour réparer vos conneries. On intervient pas.

- Judith, je sais que tu t'es toujours opposée à cette alliance entre nous. Mais maintenant, il faut qu'on avance tous ensemble et...

- Mais justement Mathilde, je pense à nous tous en vous empêchant d'agir d'une manière précipitée. Écoutez mes conseils pour une fois: on laisse faire et on avise. Qui sait, on aura peut-être moins de travail à partir de demain, si vous voyez ce que je veux dire.

Mathilde voyait exactement ce qu'elle voulait dire. Ils s'étaient repartis les tâches de façon à ce que chacun d'entre eux ait une personne à surveiller ou à approcher. Mathilde s'occupait de Jean, Augustin de Melvin, Zoé d'Ambre et Judith d'Antoine. La seule manière pour qu'ils aient moins de travail, c'était qu'une de ces personnes disparaissent.

Melvin


J'arrivai face à ce lieu qui avait hanté mes songes pendant de nombreuses nuits au sommeil agité. L'usine. Toujours aussi imposante, toujours aussi vide. Majestueuse d'un côté, triste de l'autre ; prête à tomber en ruine au moindre instant mais semblant défier par son immensité les nuages gris qui s'étaient rassemblés dans le ciel. Je restai quelques instants à l'observer, immobile au milieu du pont. Un sentiment mélangé à de l'excitation et à une profonde angoisse m'envahit. Je n'avais jamais cru que j'y reviendrais un jour. Pourtant, ma route me menait de nouveau dans cet endroit habité par des fantômes du passé, dont certains que je n'avais même pas connu. Je me décidai à avancer, et commençai à marcher doucement, toujours ébahi, ne sachant plus si j'étais encore en train de rêver où si j'étais bel et bien de retour ici. J'empruntai le monte-charge, mais chose curieuse, il ne semblait plus fonctionner. J'appuyai encore et encore sur le bouton, mais rien à faire. C'est alors qu'une voix familière sorti de l'interphone.

« Bonjour Melvin, ravi de voir que tu as pu venir aussi vite.

C'était bien évidemment Antoine, de sa voix désormais enroué. Avant que je n'eus le temps de répondre quoi que ce soit, l'ascenseur s'activa brutalement.

- Jean est déjà là. Nous allons pouvoir commencer, continua la voix de mon ancien ami.

Je serrai les dents. J'avais un très mauvais pressentiment quand à toute cette histoire. J'arrivai enfin au «labo» qui avait bien changé. Le sol était jonché de câbles en tout genre, reliant l'ordinateur central à dizaines d'autres écrans installés un peu partout. D'autres appareils dont l'utilité m'était inconnue étaient également présent, ainsi qu'un matelat et une sorte de mini-frigo. Le blondinet avait carrément emménagé ici ! L'ambiance de la salle était oppressante, toute cette mécanique incompréhensible me mettait mal à l'aise.

- Bon maintenant qu'il est là, tu vas me dire ce que tu sais au sujet d'Ambre ? demanda Jean, impatient.

Il avait lui aussi dû la voir dans un état pas possible, réalisai-je. Je comprenais qu'il voulait vite savoir pourquoi Antoine nous avait fait venir ici, et à vrai dire, j'étais dans le même cas. C'est alors que je remarquai dans un coin de la pièce, droite et immobile comme une vraie poupée de porcelaine, Violette, l'intrigante fille aux cheveux bleus. Qu'est-ce qu'elle foutait là ?

- Je crois que vous êtes conscient que je ne vous ai demandé de venir simplement pour le plaisir de vous revoir, commença l'intello depuis son siège, au centre du laboratoire.

Ça c'était sûr... vu son immense côté asocial...

- Écoutez moi bien, car je ne compte pas me répéter. Ambre, n'est pas Ambre. Enfin, elle ne l'est plus.

Il prit une grande inspiration avant de continuer.

- Il est temps que je vous apprenne quelque chose sur Ambre. Ma sœur n'a jamais été quelqu'un de vraiment normal. Après tout, elle a passé la plus grande partie de son existence enfermée. Cela a eu un impact sur sa personnalité. On pourrait dire qu'elle s'est... scindée. D'une part, il y a Ambre que nous connaissons et que nous aimons et de l'autre... une créature uniquement faite d'instinct et de pulsions, qui s'est auto-nommée Ombre. D'où les deux avatars qu'elle possédait sur Lyoko. Lors de la dernière attaque de XANA, lorsqu'Ambre a été dévirtualisée, elle était incomplète.

Sa voix devint nerveuse. Il commençait à s'énerver tout seul, rien qu'en parlant.

- Cela signifie que depuis presque douze mois, ma sœur est bloquée toute seule sur Lyoko tandis que ce... monstre a pris sa place !

Il y eut un grand silence. Mon cerveau était comme en mode « bug ». Cette affirmation était absurde et insensée... enfin, l'était-elle ? En tout cas, Ambre elle même supportait cette théorie en affirmant qu'elle était « Ombre ». Ce n'était pas ridicule du tout au final, c'était même très probable. Cela expliquait son immense changement de comportement. Après tout, j'avais déjà été témoin de choses beaucoup plus incroyable que ça, alors il valait mieux sauter directement la partie où je doutais de ses explications, pour passer à l'essentiel.

- Qu'est ce que c'est que ces conneries ? demanda Jean.

Il ne semblait pas être aussi facile à convaincre que moi... Antoine soupira, avec ce que je perçus être une once de mépris. Il pris une vieille télécommande en main et l'actionna. Tout les écrans s'allumèrent, nous repassant en boucle une scène s'étant déroulée sur Lyoko. On y voyait les avatars d'Ambre sur Lyoko avant la dernière attaque, puis après. Il n'en restait plus qu'un.

- Dois je présenter plus de preuves ? Je sais que cela doit être humiliant pour toi, de savoir que tu t'es fait roulé dans la farine depuis maintenant un an... A ta place, j'aurais réagis pareil. Enfin, sans doute pas, à cause de mon intellect largement supérieur au tiens mais tu vois où je veux en venir, non ? déclara calmement avec une pointe d'amusement le blondinet.

Ces paroles n'avaient qu'un seul but : être blessante. Antoine avait toujours eu la grosse tête et il n'avait jamais vraiment apprécie Jean, mais jamais il n'avait atteint un tel degrés d'arrogance. Son isolement avait eu de sacrés effet sur lui : il était définitivement encore pire qu'avant !

- Est-ce que vous continuez à douter ? Melvin, je n'ai pas encore entendu le son de ta voix agaçante. Pas de réaction stupide à faire ? De commentaire dégoulinant de débilité ?

C'était à moi qu'il s'adressait. Je ne comprenais pas son but. Nous avait-il demandé de venir ici juste pour fanfaronner en nous montrant sa découverte ?

- Je... je te crois. Ambre... enfin... celle qui lui ressemble m'a agressé ce matin au lycée... bredouillais-je.

Antoine eut un petit rictus, comme déçu que je n'essaie pas de contredire plus que ça sa théorie.

- Mmh... Intéressant. Alpha, note bien ça dans ta mémoire : dernière position d'Ombre : lycée Kadic !

- Mais juste... comment tu sais tout ça ? Ne puis-je m'empêcher de lui demander.

Il eut un immense sourire malaisant avant de déclarer en s'inclinant :

- Un magicien ne révèle jamais ses secrets.

Il appuya de nouveau sur son clavier, et la partie manquante de l'avatar virtuel d'Ambre réapparut sur les écrans. Il était entouré de nombreux chiffres en langage binaire et plusieurs points d'interrogations la décoraient.

- Ambre n'est pas morte. Je pense qu'il est possible de la récupérer, mais pour cela nous avons besoin de cette... chose qui habite son corps. Il est évident que je suis le seul à être capable d'effectuer de telles calculs, et à nous la ramener.

Le ton de sa voix changea, montrant clairement les efforts qu'il devait faire pour admettre avoir besoin de nous.

- Il y a une chose dont je ne peux me charger. Capturer la dénommée Ombre. Je vais avoir besoin de vous pour me la ramener.

- Et qu'est ce qui lui arrivera ? A Ombre... ? demandais-je soudainement.

Il se tourna vers moi, un mépris haineux brûlait dans ses les yeux qui me transperçaient de leur regard percent.

- Elle disparaîtra. Que veux tu qui lui arrive d'autre ? Ce n'est qu'une anomalie. Un bug dans l'esprit torturé de ma chère sœur.

Ça semblait... tellement injuste. De ce que j'en savais, cette Ombre était juste une... personne extrêmement perdue, mais une personne tout de même. Avec des émotions. Elle avait été capable de ressentir de la tristesse, de la colère même. L'état dans lequel elle était actuellement ne prouvait qu'une seule chose : elle ne vivait pas sans regrets. Ce n'était pas un être maléfique qui s'était débarrassé d'Ambre en ricanant d'une manière sardonique. Elle s'en voulait, j'en étais sûr. Avions nous le droit de la condamner ainsi ? Pour qui nous prenions-nous pour la juger ?

- Vous servirez d'appâts pour me la ramener ici. Votre utilité s'arrêtera là.

Le silence réapparut. Jean ne disait rien mais je pouvais voir qu'il bouillonnait. Il serrait tellement fort ses poings qu'ils étaient devenus tout rouge. Il allait parler quand un des ordinateurs produisit un "bip". Antoine retourna immédiatement sur le poste central. Son visage se referma aussitôt. Il fonça sur moi et me m'interrogea violemment :

- Est-ce qu'elle t'a suivi ?

Après avoir tenté de me tuer, elle était partie en courant et je ne l'avais pas revu. Mais vu que j'étais resté longtemps sous le choc... il était possible que je n'avais pas fait attention, et qu'elle m'avait tenu discrètement compagnie dans l'ombre. Je n'avais aucun moyen d'en être sûr !

- Que se passe t-il Antoine ? fit Violette depuis son coin de la salle. Elle avait été tellement silencieuse que j'en avais oublié sa présence.

Le blondinet posa sa main sur son menton, en pleine réflexion.

- Je voulais que ces deux là me la servent sur un plateau... commenca t-il, en oubliant notre présence. Mais là c'est beaucoup trop tôt ! Je ne suis pas prêt !

Jean sembla comprendre. J'avais compris moi aussi. Elle était là. Ambre, ou Ombre, ou qui que ce soit. Et si elle était dans le même état que ce matin, ça allait mal se passer. Jean se précipita soudainement dans le monte-charge et l'actionna à toute vitesse. Il se mit à crier :

- Vous êtes tous complètement fou ! Je vais... J'vais la ramener à la maison et tout va s'arranger !

Avant que les portes ne se referment, il ajouta à l'attention d'Antoine :

- Mais toi, tu t'approches pas d'elle !

Toutes ces révélations ne l'avaient pas convaincu, il voulait simplement tout redevienne comme avant. Dans un sens je le comprenais, mais la situation était risquée ! La fille aux cheveux bleus se tourna vers Antoine.

- Non Violette, laissons le. La suite des événements va se montre... intéressante !

Le monte-charge se referma derrière lui et commença sa descente. Nous étions tous rester immobile, sous le choc pour ma part.

- Attendez, vous allez le laisser tout seul ? Elle est armée ! Il est en danger ! m'insurgeai-je.

Antoine s'approcha de moi, un sourire étrange au visage.

- Mmh... très bien. Nous prendrons le prochain ascenseur. »

Le temps que le monte-charge revienne, quelque chose de terrible aurait le temps de se produire !

Ombre


Il pleuvait de nouveau. Encore cette foutue pluie, cette putain de pluie qui ne me quittait pas. Où que j'aille, elle me suivait, faisant disparaître le moindre rayon de lumière à l'horizon. J'étais ruisselante. Je ne savais pas si c'était justement le résultat de l'averse, de la sueur ou des larmes. Peut-être les trois. Sans doute les trois. Je faisais face à cet endroit horrible où je m'étais juré de ne plus jamais me rendre. Mais je n'avais pas le choix. Je devais assumer mes actes. Si j'avais pu aller jusqu'au bout dans les toilettes de Kadic... Non, je n'aurais jamais pu comprendre la vérité. Au final, heureusement que ça s'était passé comme ça. Après ma «confrontation» avec le répugnant rouquin, je n'étais pas partie bien loin. En réalité... je l'avais suivi, toute la journée, guettant dans l'Ombre. Ah... quelle ironie... Il avait parlé quelques temps avec une une fille au look assez spécial. J'ignorais autour de quoi avait tourné leur conversation, peut-être que je devenais parano mais j'étais persuadé que j'avais été le principal sujet de conversation. Combien étaient-ils contre moi ? Ce n'était pas bien grave. J'étais résolue à en découdre, même si je devais passer sur le corps d'une vingtaine de personnes. Plus rien ne me semblait avoir la moindre importance, si ce n'était une chose : la survie.

Alors j'avais espionné celui contre qui toute ma rage s'était dirigée, et je m'étais retrouvé là. C'était une surprise sans en être une. Au fond de moi, je savais que tout cela allait me ramener à ce lieu maudit qui avait été celui de ma libération : l'usine. Qui disait usine disait Antoine, peut-être même Jean. Ils étaient tous contre moi.

« J'ai hâte de voir jusqu'où ta folie va te conduire ! dit une voix moqueuse à côté de moi.

C'était l'Autre. Ce reflet d'Ambre, née de ma culpabilité. Elle flottait à côté de moi, son sourire monstrueux plus vif que jamais. Dans un sens, elle avait raison. C'était maintenant que tout se jouait. C'était maintenant que l'avenir d'Ombre allait prendre une tournure radicale. Laquelle ? Je ne le savais pas encore.

- Tu comptes rester longtemps à admirer le paysage ? » continua t-elle.

Mais je ne l'écoutais plus. Je réfléchissais. Mes pensées étaient brumeuses, je ne comprenais même plus mes propres choix. Je m'avançais. Il était tant d'en finir, une bonne fois pour toute.

Quelqu'un retint ma main. Ce n'était pas quelqu'un de réel, mais ce n'était pas l'Autre non plus. C'était Ambre. La jeune fille que j'avais tué qui revenait pour me hanter. Non, pas vraiment, ça c'était le rôle de l'Autre. Elle, était là pour me supplier. Elle avait les yeux rougies, comme si elle avait beaucoup pleuré. Je savais qu'elle aussi n'était qu'une illusion de mon esprit, mais c'était tout de même un choc. Jusque là, je n'avais eu le droit qu'à des démons venu me tourmenter, me rappeler mon crime. Pour la première fois... ce n'était pas le cas. Bien évidemment, ce n'était pas la vrai Ambre non plus. Juste une réminiscence de ce qu'elle avait été, une trace de sa présence dans ce corps.

« Ombre... il n'est pas encore trop tard... Arrête toi là, je t'en supplie !

Mes mains se mirent à trembler. Je ne savais quoi répondre. Je ne savais quoi penser.

- Pauvre petite sotte ! Tu ne vois pas que tu ne parles pas à un être vivant ! Tu parles à un monstre, une créature cachée sous le lit d'une petite fille mais qui a prit la grosse tête ! répliqua l'Autre.

Et aussitôt elle attrapa « Ambre » par derrière, dans ce qui semblait être une étreinte morbide. De ses griffes s'allongeant rapidement, elle écorchais la peau de mon ancienne moitié.

- Ça te ferait plaisir, hein ? Qu'Ambre revienne et te pardonne comme ça ! MAIS CElA N'ARRIVERA PAS !

Et elle transperça la jeune fille de part en pars, en partant dans un rire sinistre.

- Ça n'arrivera pas, car tu l'as tué ! Tout comme tu as tué Ambre ! TOUT COMME TU VAS TUER TOUS LES AUTRES !

Et le rire s'intensifia. Devenant une plainte que seule moi pouvait entendre. J'étais au sol, trempée et désormais boueuse, en larmes. Je ne devais pas me laisser abattre de la sorte ! Je me relevai d'un bond.

- Tu sais quoi ? Tu as raison !

Elle s'arrêta et me regarda surprise. Elle n'avait pas du s'y attendre, elle n'allait pas s'attendre à la suite non plus !

- J'ai tué Ambre. Et si c'était à refaire, je le referais ! Et aujourd'hui, tout ceux qui mettrons mon existence en péril iront rejoindre cette petite conne !

L'Autre me dévisagea. Son sourire de carnassier revint d'un coup, ce qui me fit sursauter mais je tentai de ne rien laisser paraître.

- Très bien, Ombre. Prouve le. »

Je serrai bien fort mon couteau dans ma poche et repris ma route vers l'usine, plus déterminée que jamais. J'y étais attendu par un visage très familier : Jean. Alors j'avais eu raison ! Lui aussi il était dans le coup ! Mais quelle enflure ! Avec tout ce qu'on a pu vivre ensemble ? Ce n'était pas possible, pas lui ! Il était persuadé que j'étais Ambre depuis le début ! Comme quoi j'aurais du me méfier... Il semblait désespéré, je ne l'avais jamais vu dans cet état.

« Ambre... qu'est ce que c'est que toute cette histoire ?

La Colère remonta en moi. La même qui avait prit le contrôle de mon corps quand j'avais essayé de séduire Melvin. Mais cette fois elle était trop puissante, alors je ne tentais même pas de la combattre. Pourquoi devais-je être entourée par des abrutis ? Pourquoi malgré tout ça, il continuait de croire que j'étais la fille dont il était tombé amoureux ?

- Idiot. Je ne suis pas celle que tu crois, lui répondis-je, de marbre, alors que la Haine grandissait petit à petit en moi.

Il me prit dans ses bras. M'embrassa dans le cou. Me murmura à l'oreille.

- Viens... on va rentrer à la maison. On va te trouver de l'aide, tout ira bien...

Ce fut la phrase de trop. Je ne pouvais plus me contrôler. Un cri bestial sortit de ma bouche et je plaquais violemment Jean sur le sol. Il ne tenta pas de se débattre, prit par surprise. Je sorti le couteau de ma poche et le brandit au dessus de son ventre.

- Ambre ?! Qu'est ce que tu...

Il ne put jamais terminer cette phrase.

- JE. Le couteau s'enfonça. Sursaut de la part de mon adversaire.

- M'APPELLE. Nouveau coup, avec plus de violence. Plus de rage. Jean se mit à cracher du sang.

- OMBRE. » Hurlais-je à pleins poumons.

Le temps s'arrêta autour de moi. Les gouttes d'eau s'immobilisèrent. Une seule chose semblait encore capable de mouvement: mon corps qui continuait de s'acharner sur celui de Jean. En revanche, je n'en avais plus le contrôle. J'étais réduite au rang de spectatrice avec à mes côtés, deux filles que je connaissais bien. Toutes les deux le visage livide, si bien qu'il me fallu un moment pour les différencier. L'Autre avait perdu son assurance naturelle. Elle observait le sol, toute penaude. Elle releva les yeux un instant et croisa les miens, secouant alors la tête dans un signe négatif. « Ambre » ne pleurait pas, mais c'était tout comme. Elles avaient du déverser toutes les larmes de son corps, si bien qu'elle semblait désormais se dessécher. Elle voulu prendre la parole, mais s'arrêta au dernier moment.

« Il ne fait pas très beau quand même, dit l'Autre, calmement.

Ambre hocha la tête, doucement, sans émotions.

- Qu'est-ce qui se passe putain ? finis-je par demander.

- Vous vous souvenez toutes les deux quand on jouaient aux aventurières dans la maison ? Maman n'était pas très contente, mais on rigolait bien.

Si... je m'en souvenais. Vu de l'extérieur, on aurait dit une petite fille rigoler toute seule en courant dans les escaliers, mais dans les yeux d'Ambre, c'était tout un monde autour de nous. Déjà... j'étais là avec elle. Elle n'était pas seule. Elle n'était jamais seule. Moi non plus d'ailleurs. Les chambres devenaient des temples millénaires, le salon était une jungle et la cuisine une montagne. C'était ridicule, mais quand on y jouait, on avait véritablement l'impression d'être projetées dans un autre univers. Pourquoi me parlait elle de ça maintenant ? En face de nous, je n'arrêtai pas de poignarder Jean, encore et encore. C'était une vision effroyable. Je ne ressemblai à rien. On aurait dit une bête furieuse. Voilà ce que j'étais devenue ? C'était bien triste.

- C'est fini, Ombre, me dirent elles finalement toutes les deux, à l'unisson.

- Nous ne pouvons plus rester.

Je n'avais aucune idée de quoi elles pouvaient parler, mais je compris que c'était quelque chose de grave. Que tout cela allait être un tournant dans ma "vie" d'ombre. Le peu de choses qui me rattachait encore à un semblant d'humanité allait disparaître. Même ma conscience qui avait pris tant de plaisir à me torturer n'osait plus me regarder en face. Puis je saisis ce dont il était question : j'avais commis l'irréparable. Plus rien n'allait être comme avant. Aujourd'hui, Ombre était réellement devenue un monstre. J'étais devenue un monstre. Mais après tout... ne l'avais-je toujours pas été ? Je me voyais à l'horizon, défigurant celui qui avait été mon amant. Oui... j'avais été stupide... Tellement stupide. Le nom que je m'étais choisis ne me convenait même plus, je n'étais même pas digne d'être l'ombre de qui que ce soit. Pas digne de vivre. Pas digne d'exister. Tout ça pour ça...

Mes deux âmes sœurs, mes deux seules amies que j'avais tant ignorées se levèrent et se prirent par la main. Me tournant le dos, elles commencèrent à s'en aller, sans un mot. Je me levais à mon tour, tendait la main dans leur direction, en pleurant, en hurlant :

- Non... ! Je vous en supplie. Ne vous en allez pas... Ne me laissez pas toute seule...

Ambre s'arrêta un instant. Se retourna et eut un petit sourire. Elle voulut me tendre la main. Mais l'Autre l'entraîna de force. Je tombais sur le sol. Elles étaient désormais si loin, je n'arrivais plus à les distinguer.

- Pitié... revenez...» continuai-je à les appeler, en vain.

Et bientôt, la lumière qui les avait éclairé disparu à son tour, me laissant sans personne dans la pénombre qui m'entourait. Je fus alors de nouveau projetée dans mon corps, au dessus de celui de Jean, le couteau entre les mains. La colère était partie, laissant place à la réalisation. Qu'avais-je donc fait ? Celui avec qui j'avais partagé mon quotidien était maintenant immobile, une triste surprise dessinée sur les restes de son visage qui avait été si séduisant autrefois. Une triste surprise ; celle de s'être fait ainsi attaquer par celle qu'il pensait aimer. C'était injuste. J'avais été injuste avec lui. Je lui avais menti dès le début. Mentant à tout le monde, et à moi la première.

Un cri retentit. Trois personnes étaient arrivés, les yeux rivés sur mon carnage et moi. Il y avait Melvin, les mains aux visages. c'était lui qui avait crié. Il murmurait quelques chose mais c'était inaudible. Je crois qu'il pleurait. L'horreur pouvait se lire sur son visage. Ensuite, il y avait Antoine. Personne ne m'avait jamais regardé avec autant de mépris et de haine. Il avait les bras croisés, ne laissant paraître aucune émotion si ce n'était la colère. Et enfin une fille. La fille. Celle aux cheveux bleus, qui m'avait agressé la veille. Elle était insensible et immobile. C'était presque effrayant.

« Je te l'avais dit, Melvin. Ce n'est pas Ambre. C'est un démon. »

Il leva la main. La fille aux cheveux bleus hocha la tête et avança vers moi, lentement. J'ignorais ce qu'elle comptait me faire, mais de toute façon, je n'avais plus cœur à lutter. Et finalement, si ! J'avais tout perdu. J'avais réalisé que tout ce que j'avais cru avoir n'avaient été que des illusions insensées d'une gamine malade et même inexistante. Alors quitte à ne rien avoir, autant garder le peu de dignité que j'avais. Face à cette nana là, je n'avais aucune chance, j'en étais consciente et certainement pas dans mon état actuel. Je tentais le tout pour le tout et fonçais sur le plus proche et la cible la plus facile : Melvin.

Je le prenais dans mes bras, plaçait mon arme sous son cou. Dès qu'il sentit la lame froide toucher sa peau, il arrêta aussitôt de se débattre. Je me tournai à présent vers Antoine et sa nouvelle amie.

« Un pas de plus et je lui tranche la gorge ! m'écriai-je avec le plus de rage possible.

Celle aux cheveux colorés se tourna vers son maître, attendant des instructions. Ce dernier hésita. Il hésita vraiment. Ça se voyait dans ses yeux, la vie de Melvin était moins importante que de régler ses comptes avec moi. Et c'était moi le monstre ? Finalement...

- Arrête toi là, Violette. Tu t'en tires pour cette fois, Ombre. Mais tu ne m'échapperas pas pour toujours. » dit-il d'une voix sèche, en insistant bien sur le mot Ombre.

Je prenais le rouquin avec moi et commençais à courir aussi vite que je le pouvais. Des larmes ruisselaient à nouveaux sur mes joues. Où est-ce que j'allai ? Qu'allai-je donc faire avec mon "otage" ? Je n'en savais rien, je voulais juste me mettre dans un coin, qu'on m'oublie et me laisse tranquille... mais bien sûr ce n'était pas possible. La vérité avait éclaté. Pour tous, j'étais un démon, une créature sanguinaire... Mais c'était faux... Je... n'étais pas que ça ! Enfin... je l'espérais... Quand l'usine n'était plus dans mon champs de vision, je poussai Melvin sur le sol. Il me regardait, apeuré et tremblant.

« Am... Ombre... ne me fais pas de mal !

- Va t'en.

Il fut surpris. Il avait dû sans doute s'attendre à ce que je... fasse comme avec Jean.

- Va t'en, à moins que tu préfères que je ne m'occupe de ton cas !

J'avais pris l'air le plus menacent possible. Hurlant même, lui ordonnant de partir. Il ne bougea pas. La peur quitta son visage. Étais-je devenue si pitoyable que je ne pouvais même plus l'effrayer ?

- Qui que tu sois... il existe une autre solution... ! Et puis... Il suffit peut-être d'emmener Jean à l'hôpital !

C'était faux. Il le savait, et il savait que je le savais. Jean était... Jean était mort, il ne reviendrait pas. Ambre et l'Autre non plus. J'étais toute seule désormais, et c'était moi qui avait provoqué ma propre perte. Alors je giflai Melvin. De toutes mes forces, le plaquant à nouveau au sol.

- Tu ne peux rien pour moi. Personne ne peux plus rien pour moi. Maintenant pars.

- Ombre... je...

- PARS.»

Il se releva d'un bon et se mit à courir, sans se retourner. Je restai quelques instants là, à regarder le sol sous la pluie. Sans même bouger. Sans même penser. Puis, je me mis à avancer, sans vraiment y faire attention. Je voulais m'en aller. Disparaître sans doute. Je n'étais rien. Je n'étais personne. Je n'avais même pas le droit de ressentir de la douleur. Je m'arrêtai dans un parc et m'allongeai sur un banc ruisselant d'eau. Ce n'était pas important, j'étais déjà trempée. J'avais froid, mais ça aussi, ce n'était pas important. Il pleuvait toujours mais le son de la pluie n'arrivait même plus à mes oreilles. Je n'arrivai même plus à réfléchir. Réfléchir à quoi de toute façon ? J'étais un spectre, sans vie, déjà morte depuis longtemps mais errant sans but. J'avais été trop loin. Même l'Autre m'avait quitté. J'étais seule désormais. Il commençait à faire sombre. J'étais là depuis combien de temps déjà ? Secondes ? Minutes ? Heures ? Est-ce que ça avait une quelconque importance ?

Dormir. Oui. Quelle bonne idée. Dormir, pour toujours. Je fermai les yeux, essayant de m'assoupir malgré mes pensées torturées alors que le crépuscule commençait à apparaître.
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Ramnabil MessagePosté le: Mer 20 Nov 2019 13:39   Sujet du message: Répondre en citant  
[Kankrelat]


Inscrit le: 16 Nov 2019
Messages: 3
Bonjour et merci pour le partage! J'ai hâte de voir la suite!!!!
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Icer MessagePosté le: Dim 08 Déc 2019 09:41   Sujet du message: Répondre en citant  
Admnistr'Icer


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Messages: 2316
Localisation: Territoire banquise
L'avantage du ridicule commentaire ci-dessus, que je vais laisser pour l'hommage, c'est de m'avoir fait remarquer que j'avais deux ou trois chapitres de retard. J'ai d'ailleurs pris la liberté de relire toute la fanfiction, ce n'était pas si long...

Je dois bien reconnaître que je suis toujours aussi emballé par tes écrits, et que ça n'a eu de cesse d'évoluer positivement. Je me souviens de ma lecture de la première version de ta première fic, j'étais clairement beaucoup moins chaud, avec des obscures scènes de lancer de livres que je ne m'étais pas privé de tailler dans mes propres écrits huhu. On peut saluer ta persévérance depuis tout ce temps, dont il apparaît qu'elle a bien fini par payer.

S'agissant de ce légendaire Projet Viol..., j'admets bien aimer la tournure que prennent les évènements. Bon, Antoine est insupportable, mais tu es parti extrêmement loin dans le conflit Ambre/Ombre avec désormais l'Autre, bien plus loin naturellement que mes Senja (mais ça n'a jamais été ma spécialité). Point positif, cela débouche sur la mort du personnage le plus inutile, Jean, tandis que Melvin, un peu balloté parles évènements, est finalement le personnage le plus sympathique niveau introspection, son côté un peu choqué devant les évènements inattendus rendant la lecture divertissante.

Au-delà de la bande originelle, j'aime bien la façon dont tu amènes les nouveaux personnages secondaires, même si bien entendu on fini fatalement par découvrir qu'ils ont un lien avec tout ce bordel.

Il nous manque encore d'en apprendre plus sur le mystérieux Hannibal, tu vas certainement nous sortir un truc bien senti Mr. Green

Bon courage pour la suite !

P.S : J'en ai profité pour faire un petit relevé :

Spoiler

_________________
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« Les incertitudes, je veux en faire des Icertitudes... »

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Silius Italicus MessagePosté le: Ven 29 Mai 2020 11:54   Sujet du message: Répondre en citant  
[Krabe]


Inscrit le: 03 Fév 2015
Messages: 252
Localisation: à l'Est d'Eden
Bonjour très cher Pilorde,

De fait, tout comme Icer le fit, il faut saluer votre persévérance. On ne peut qu’espérer que vous saurez aller au bout de cette partie deux, et même de la partie trois.

Le présent chapitre avait tout d’une conclusion d’arc narratif. Ce sixième chapitre amène une fin d’arc pour Ombre et pour Jean. Pour ce dernier, on peut supposer qu’il est mort et de manière assez définitive. Il semble douteux qu’il revienne. Pour Ombre, même si son histoire n’est évidemment pas finie, toute la narration tend à montrer qu’elle a fait un choix définitif. L’abandon d’Autre et du fantôme d’Ambre le montre d’ailleurs assez bien.

Cela étant, il est étonnant qu’Ombre soit nécessaire pour ramener Ambre (dont la survie est d’ailleurs étonnante en soi). En effet, Antoine a déjà toutes les données nécessaires. Il ne lui reste plus guère qu’à faire l’équivalent de ce qu’à fait Jérémie dans la première saison.

Du moins si l’on admet que le fait qu’Aelita ait été virtualisé en premier lieu n’avait pas ou peu d’importance quant au travail fait par jérémie pour la matérialiser.

Toujours est-il que cette réserve mise à part, on voit mal ce qui empêche Antoine de procéder, si ce n’est que cela va lui prendre du temps. Il est vrai qu’il en manque déjà. Mais alors, on peut se demander pourquoi il cherche maintenant à ramener Ambre. Une hypothèse serait que la matérialisation d’Ambre est un mensonge, ou un semi-mensonge, et que son but et juste d’éliminer Ombre de l’échiquier. Ce serait une pièce par trop instable.

Pour ce qui est de ce pauvre Jean… eh bien, le paratexte de ce chapitre disait bien que l’auteur avait du mal avec lui… Adieu Jean. Cela simplifiera la tâche des membres de la famille Guillot.

Cela étant, il semble que la l’effacement puis la mort de Jean du récit amènent tout deux à un rehaussement de Melvin. On est loin dans ce chapitre du personnage un peu attardé qu’il était à ces débuts. On a plus à faire à quelqu’un qui n’est pas assez sûr de lui et un peu timide. La réapparition de l’amie d’enfance ouvre d’ailleurs des perspectives pour lui. ; Une vie sociale plus remplie et satisfaisante, un éloignement de Lyokô, et possiblement un choix futur à faire entre Sarah et Augustin. Ce dernier en effet pourrait voir sa tâche se compliquer à l’aune de cette arrivée.

Du côté d’Antoine, il n’y a pas grand-chose de nouveau, à un seul point près : il a plié face à une simple prise d’otage. De ce que nous savons de lui et de ces défis actuels, Ni Jean, ni Melvin n’avaient grande importance dans son jeu. Pire, ils étaient une gêne potentiel. En ce sens, on se demande bien pourquoi il n’a pas pris le risque de la mort de Melvin pour récupérer Ombre.

Dans l’ensemble, c’était un chapitre qui faisait avancer le scénario de manière efficace. Il semble regrettable qu’il ait été un peu court. Il laisse le lecteur sur sa faim pour tout dire. Il manque sans doute une section du point de vue d’Antoine en fait. Dans le même ordre d’idée, le paragraphe sur Jean est un peu court. Il aurait peut-être mérité mieux avant de disparaître, ne serait-ce que pour créer un effet plus puissant autour de sa mort.

Au plaisir de vous voir continuer.
_________________
AMDG

Prophète repenti de Kane, vassal d'Anomander Rake, je m'en viens émigrer et m'installer en Lyoko.
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LixyParadox MessagePosté le: Ven 14 Aoû 2020 21:35   Sujet du message: Répondre en citant  
[Frelion]


Inscrit le: 06 Jan 2013
Messages: 91
Localisation: Perdue
Bonjour.

Ca fait longtemps, pas vrai ?

Spoiler


Chapitre 7: Le Froid de l'Océan


O??m??bre


Je courais à travers les gens. Je ne m'étais jamais sentie aussi vivante. La liste « des choses que je voulais faire » n'en était qu'à son début ! Et elle ne cessait de s'agrandir. Je trouvais toujours de nouvelles envies, de nouvelles idées. Tant que je bougeais, j'étais vivante. Tant que je découvrais, je me sentais exister. Jean me courait après, un grand sourire aux lèvres, me criant de l'attendre. J'étais trop impatiente et il allait trop lentement pour moi. Il ne comprenait pas pourquoi je prenais autant de plaisir à faire des choses aussi anodines. Sauf que pour moi, elles étaient exceptionnelles. Tout était une première fois. C'était le temps des découvertes.

Nous avions passé la matinée à essayer de cuisiner, en vain. Rien que ça. Rien que cuisiner, c'était quelque chose que j'ignorai. Bon, pour apprendre la cuisson des pommes de terre, on repassera. C'était surtout l'après-midi que j'attendais avec impatience. Nous devions nous rendre dans l'océan. Je ne l'avais vu qu'à travers des images. Ça allait être ma rencontre avec cette grande étendue bleue qui recouvrait toute notre planète. Une fois sur place, mon cœur s'était mit à battre la chamade. Sans attendre qu'on s'installe, je m'étais déshabillée, ne gardant que mon maillot de bain et je m'étais précipitée vers l'eau. Je riais aux éclats. Ce fut le dernier moment où je fus heureuse.

Cela ne faisait que quelques mois que j'étais venue au monde. L'usine, Lyoko, tout ça était loin. Je ne voulais plus y repenser. Mais parfois, il ne suffit pas d'avoir envie. Lorsque je plongeai dans l'eau, je me retrouvais pendant quelques instants coupée du monde. Le sentiment de Vide était déjà venu, juste après ma victoire sur Ambre, mais jamais n'avait-il était aussi fort. Jamais je n'avais eu l'occasion de réaliser à quel point j'étais seule désormais. Lorsque je sortais la tête de l'eau, je l'aperçus au loin. Je ne pouvais distinguer son visage, mais je reconnaissais ses longs cheveux roses. Elle s'éloignait, marchant vers l'océan. Je voulais la retenir. Lui hurler de revenir, mais aucun son ne pouvait sortir de ma bouche. Je réalisais que des larmes coulaient le longs de mes joues.

Jean était venu me chercher car la façon dont je guettais l'horizon avait commencé à l'inquiéter.

« Tout va bien, Ambre ?

- Oui... J'avais cru voir... Non rien. »

Cette nuit là, nous fîmes l'amour. Ce n'était pas la première fois, mais contrairement à d'habitude, aucune passion, aucun feu n'était présent. Juste le froid de l'océan. Et lorsqu'il murmura à mon oreille : « Ambre... je t'aime... », l'acte charnel devint douloureux. Ainsi a commencé ma longue descente en enfer, qui me poussa jusqu'à ce terrible choix. Celui qui n'annonçait aucune chance de pardon.

Qui suis-je ? Que suis-je ? Deux questions qui n'ont cessées de me tourmenter. Ils ne me restaient plus qu'elles, ainsi que ce même froid que je retrouvais désormais dans la pluie qui continuait à me poursuivre. Le nombre de mes victimes avait augmenté jusque deux. Même mes démons ne voulaient plus de moi. La voix railleuses de l'Autre commençait presque à me manquer.

Combien de temps s'était écoulé depuis l'incident sur le pont de l'usine ? Des minutes ? Des heures ? Des jours ? J'étais allongée sur un banc dans un parc pour enfant, trempée jusqu'à l'os. Je n'avais plus la force de lutter mais pourtant j'avais beau fermer les yeux, je restais là. A force de rester ici, sans boire ni manger, ne devais-je pas rejoindre Ambre et Jean ? N'étais-je pas censée voir une lumière au bout du tunnel ? Ou bien est-ce que même la mort ne voulait pas de moi ?

C'était peut-être ça mon châtiment... Rester en vie. C'était bel et bien le pire possible.

« Vous... vous allez bien ?

J'ouvrai les yeux. Je voyais flou mais je pouvais entre apercevoir une silhouette devant moi. Je ne répondais pas. Que pouvais-je lui dire ? J'hésitai entre « laisse-moi mourir en paix » ou « est-ce que j'ai vraiment l'air d'aller bien ? », mais je me contentai d'une sorte de grognement. Si je ne pouvais plus être tranquille ici, j'allais partir ailleurs.

- Ne vous levez pas, je suis pas sûr que vous en soyez capable ! »

Et puis quoi encore ? Je commençai à prendre appuie sur le banc pour me lever et... je m'effondrai sur le sol.

Melvin


J'étais silencieux. Elle l'était aussi. Nous étions dans la cafétéria depuis une bonne dizaine de minutes, immobiles. Je n'osais pas la regarder, mais je savais qu'elle me jaugeais du regard. J'avais essayé de parler à plusieurs reprises, en vain. Elle se montrait patiente, en se contentant de siroter doucement la même boisson que la dernière fois : un diabolo menthe. Elle m'en avait commandé un, même si je ne lui avais pas demandé. J'ouvrais de nouveau la bouche, mais elle fut plus rapide, me tendant mon verre :

« Bois. Ça te ferra du bien. »

En tant normal, j'aurais refusé de recevoir le moindre ordre de sa part, mais elle n'avait pas dit ça sur un ton autoritaire, plutôt compatissant. Alors je m'exécutais. Le goût sucré n'était pas désagréable, mais en réalité, je détestais la menthe. Aujourd'hui cette saveur était encore plus repoussante que d'habitude. Après quelques gorgés forcés, je prenais une grande inspiration et croisait enfin le regard de Zoé.

« Jean... Jean... Jean est... Il est... essayais-je de dire. Mais c'était impossible. les mots ne voulaient pas sortir. Comme si je ne voulais pas admettre cette terrible et effroyable réalité. Je fondais en larmes, bruyamment, en reniflant. Les autres ados présent commencèrent à me regarder bizarrement et quelqu'un éclata même de rire. La métaleuse me fit signe de les ignorer.

- Il est mort, terminais-je en m'effondrant sur la table. Je n'avais jusque là pas osé utiliser le mot « mort ». C'était la première fois que je le prononçais. C'était la première fois que quelqu'un que j'avais connu et véritablement apprécié était passé dans l'au-delà. Certes, il y avait eu Ulrich et Mélissa... mais ce n'était pas la même chose. Je ne les avais pas vraiment connu. Mon interlocutrice fut tellement surprise qu'elle manqua de s'étouffer en buvant.

- Qu'est ce qui s'est passé ?

Je prenais un mouchoir de mon sac et me mouchais.

- Melvin, qu'est ce qui s'est passé ? dit-elle sur ton un peu plus agressif. Pourquoi... ? Pourquoi est-ce qu'elle s'en prenait à moi ? Je n'y étais pour rien que je sache...

Je lui expliquais le message d'Antoine et l'entrevue à l'usine. Je pu voir dès le début qu'elle désapprouvais ma conduite. C'est vrai que j'avais promis de ne pas prendre contact avec Antoine ou quelque chose comme ça... mais ça m'avait semblé être la meilleure chose à faire ! J'étais dans un état tel que je ne lui cachais rien, même au sujet de la vérité sur Ombre. J'en venais ensuite à... à la partie douloureuse. A cette vision... d'effroi. Au corps meurtri de Jean.

Je ne pouvais pas prétendre avoir été très proche de ce gars là. Au contraire, à l'instar de sa relation avec Antoine, au début il se moquait constamment de moi. Et puis... même lors du conflit avec XANA, je crois que je ne l'aimais toujours pas. En fait, c'était de la jalousie. Lui avait tout pour lui, il était populaire, sportif et plutôt canon. Moi j'étais gros et timide... Je n'osai pas vraiment me rapprocher d'Ambre, même quand elle se confiait à moi, alors que lui avait agis sans hésiter, et avait réussit à conquérir son cœur... Plus que de la jalousie, c'était de l'admiration parfois. Jean était... avait été... quelqu'un de bien. Sous ses airs de caïd, il était en réalité quelqu'un remplis de valeurs, qui savait se battre pour ses convictions. Il était revenu affronter XANA avec nous et avait failli y laisser sa vie. Et même si ce qui nous été arrivé avait été horrible, stressant et parfois cauchemardesque, il avait toujours su garder le sourire et détendre l'atmosphère.

Pourtant... de part ma jalousie... parfois j'aurais aimé qu'il n'existe pas. Qu'il meurt d'une certaine façon. Il occupait toujours toute l'attention... peut-être que s'il n'avait pas été là... je me serais plus ouvert... peut-être qu'avec Ambre... J'étais un monstre d'avoir raisonné ainsi. Maintenant qu'il n'était vraiment plus là... C'était horrible, juste horrible. La derrière expression qui avait été dessiné sur son visage restait telle une emprunte dans ma tête, et elle ne voulait plus s'en aller.

- Et après ? » sortit rapidement Zoé, coupant mes pensées.

Alors je lui racontais. La prise d'otage d'Ombre, et ce qui s'était passé ensuite.

Je restais immobile dans le froid pendant quelques minutes, totalement sous le choc. J'avais arrêté de crier le nom de la jeune fille. J'avais compris qu'elle ne reviendrait pas. Je n'arrivais pas à réaliser ce qui s'était passé. Je croyais à ce que je lui avais dit. Je voulais y croire. Tout allait s'arranger. Tout s'arrangeait toujours, n'est-ce pas ? N'est-ce pas ?! On allait recommencer à vivre heureux comme si de rien était... Jean rigolerait, Antoine râlerait, Ambre... ou Ombre sourirait timidement et moi je les observerais, envieux... Rien n'était jamais perdu d'avance...

Soudainement, la dure réalité me revint en tête. Ombre, Antoine, Jean... pourquoi est-ce qu'il avait fallu que ça se te termine ainsi ? Après tout ce qu'on avait vécu, avec tous les liens qui nous reliaient... Comment avions nous pu en arriver là ? Je m'effondrais sur le sol humide, pleurant comme le faible que j'avais toujours été. Incapable d'aider qui que ce soit.

« Oh, tu es là, fit une voix derrière moi.

Je me retournais. C'était la fameuse Violette. La nouvelle pote d'Antoine, celle pour qui il nous avait remplacé, mais je n'avais pas la tête à réfléchir à ce genre de choses. Je m'empressais de me relever. La jeune fille avait l'air aussi à l'ouest qu'à son habitude, mais à cet instant précis, une aura effrayante se dégageait d'elle. Ombre avait eu peur d'elle. Ombre, qui avait été capable de plein de choses, d'aller jusqu'à la tentative de meurtre sur Jean et moi, et ce dans des lieux publics à chaque reprise, avait eu peur d'elle. Il devait bien y avoir une raison. En tout cas, son visage inexpressif ne me rassurait pas.

- La cible n'est plus là. » constata-t-elle sobrement.

Puis elle se retourna et commença à retourner à l'usine. Hein ? Elle comptait me laisser comme ça sans rien me dire d'autre ! Je la suivais et posais ma main sur mon épaule en m'écriant : « Hey ! ». Dès que je rentrais en contact avec elle, elle se retourna m'attrapa le bras et me plaqua violemment au sol, le faisant aussi aisément que si j'avais été aussi léger qu'une peluche. Puis, alors que j'étais sans défense au sol, elle s'apprêtait à me frapper mais se ravisa au dernier moment :

« Melvin est notre allié. » fit-elle, songeuse. Et au lieu de me donner un coup de ses bras minces, elle attrapa le mien et m'aida à me relever.

Comment avait-elle pu faire preuve d'autant de force ? Ce n'était pas... logique ! Mais bon, ce n'était que le cadet de mes soucis, et je la suivais lorsqu'elle reprenais la direction de l'usine. Là bas, l'horreur n'avait pas bougé. Allongé dans une mare de sang dans une position plus qu'étrange, Jean m'attendait. Je n'osais pas le regarder. Je savais qu'il... n'était pas en état de ressembler à grand chose. A sa place, je n'aurais pas voulu qu'on me vois dans cet état. Antoine était au près de lui, prenant son pouls ou quelque chose comme ça, je n'y connaissais rien.

« A... Alors ? Est-ce qu'il va bien ? bredouillais-je.

Je me rendais compte de la futilité de la question. Évidemment, qu'il n'allait pas bien, il fallait appeler des secours, et rapidement ! Je sortais mon portable.

- J'appelle une ambulance !

- Ce ne sera pas la peine. répondit le blondinet, en essuyant ses mains tâchés de sang sur le pantalon de la victime. Jean est mort.

Il dit cela d'un calme absolu. Presque comme s'il... comme s'il n'en avait rien à faire. J'osais finalement porter mon regard sur celui qui était par terre et je voyais l'expression sur son visage, ses yeux écarquillé. Le genre d'image qui pourrait vous faire faire des cauchemars pendant des mois et des mois...

- La police dans ce cas ! Il faut que quelqu'un fasse quelque chose ! hurlais-je, les larmes aux yeux.

Oui... La police. Ils allaient régler tout ça, et on allait être heureux comme avant... Une grande partie de moi savait que j'essayais de me convaincre, que ce n'était qu'un gros mensonge, mais une infime partie de ma personne voulait y croire. Rien n'était perdu !

- Je te déconseille fortement de faire ça. Si tu appelles qui que ce soit, je n'aurais pas d'autre choix que de demander à Violette de te mettre hors d'état de nuire.

Sa voix avait été froide. Il avait parlé avec un ton que je ne lui connaissais pas. Je n'avais aucun doute quant au fait qu'il était prêt à mettre ses menaces à exécutions... Putain, mais comment on en était arrivé là ?! J'éloignais doucement mon portable de mon oreille, ne comprenant pas le comportement de l'intello. Il n'y avait pas d'autres solutions que d'appeler les autorités compétentes !

- Ouvre bien tes neurones, d'accord ? Il est hors de question que le moindre adulte, la moindre personne ayant un rapport avec le gouvernement ou tout simplement la moindre personne que je n'ai pas autorisé soit au courant de cette histoire. Ou vienne à l'usine. Compris ?

Son sourire arrogant avait disparu, il était d'un sérieux terrifiant. La mort de Jean ne l'avait pas attristé, ça l'avait plus... agacé.

- Compris ?" répéta t-il, en appuyant fortement sur chacune des deux syllabes. Il me regardait droit dans les yeux. Ça me faisait peur je... je ne comprenais pas ce qui se passait, ni pourquoi il agissait ainsi. Il s'impatienta et rajouta avec énervement :

- Si tu en parles à qui que ce soit : je le saurais. Ce n'est pas un jeu, Melvin. C'est une guerre. Dans cette lutte tu es soit avec moi, soit contre moi. Et si je découvre que c'est la seconde option, j'agirais en conséquences.

Ce n'était même pas une menace. Ça donnait plus l'impression d'être un constat. Un horrible constat. Il était clair que sous son cynisme de tout à l'heure se cachait un sérieux à tout épreuve. Et vu... vu ce qui venait de se passer, il avait raison sur un point : ce n'était plus un simple problème d'adolescents. C'était quelque chose de bien plus important et dangereux... J'avais la soudaine envie de me réveiller dans mon lit et de pouvoir me dire que ce n'était qu'un affreux cauchemars.

- Qu'est... qu'est-ce que tu vas faire de Jean ? demandais-je en tremblant.

Il se détourna de moi et alla vers Violette, pour lui donner des instructions.

- Tu emmèneras... ça dans la salle des scanners, dit-il en pointant le corps sans vie du doigt. On va le balancer sur Lyoko. Après tu nettoieras toute cette saleté.

Quoi ? Comment pouvait il se conduire ainsi, avec si peu de respect pour la mémoire de notre ami ? Peu importait ce qu'il disait, je devais contacter la police. Ça allait trop loin pour nous ! Je sortais mon portable à nouveau, mais il le repéra immédiatement.

- Nous sommes nous mal compris, Melvin ? me lança t-il d'une voix glaciale, transpirante de mépris.

- Pas du tout ! Mais Jean a le droit a des funérailles digne de ce nom !

Il me toisa du regard un instant, m'observant comme s'il regardait un insecte. Il allait demander à cette super-nana de me foutre une raclée à coup sûr... Mais tant pis ! Pour Jean, j'étais prêt à subir ça !

- D'après toi, que va t-il se passer si nous contactons la police comme tu tiens tant à le faire ?

C'était une question inattendue... Et bien, il allait contacter sa famille, enquêter... faire ce que fait la police normalement !

- Quelles explications comptes tu leur donner quand à sa mort ? La thèse de l'accident étant impossible, il nous faudra alors dénoncer Ambre alors que nous comptions la sauver à la base. Une fois en prison, elle perdra toute chance de redevenir celle que nous aimons. Mais ça ne s'arrêtera pas là. Ils découvriront l'usine. Ils enquêteront sur le laboratoire. Des hommes du gouvernement prendront le relais et une nouvelle affaire s'ouvrira : celle de la disparition de Ulrich Schtern, de Mélissa Marple et surtout de William Dumbar, l'homme qui voulait nous tuer l'an dernier. J'ai fait des recherches avec Alpha, c'était un type puissant. A la tête de pas mal d'organisations. Certaines dont on ne connaît même pas l'existence, encore aujourd'hui. Ils se rendront compte que nous sommes tous les deux liés jusqu'au cou dans ces histoires. Et là, Melvin, que crois tu qu'il se passera ?

J'étais paralysé. Il avait plongé son regard dans le mien pendant sa tirade et j'avais pu imaginer les événements qu'il avait décrit. Ce n'était pas invraisemblable. Non à vrai dire, ça se passerait totalement comme ça. J'avais peur. De tout. De la mort de Jean. D'Ombre. D'Antoine lui même. De ce que l'avenir nous réservait désormais. J'étais incapable de parler. Le blondinet compris que je n'allais plus lui poser de problèmes, et me conseilla de rentrer chez moi, avant de rajouter :

- Je te recontacterai bientôt. J'aurais peut-être besoin de toi et de tes... compétences. » avec un air clairement ironique lorsqu'il prononça le dernier mot.

J'hochai la tête, j'étais dans le brouillard mentalement, je voulais juste rentrer chez moi. Je faisais le chemin sous cette averse qui ne voulait pas s'arrêter, perdu dans mes pensées. Tout se mélangeait dans ma tête, j'étais incapable d'y voir clair.

Le lendemain, il pleuvait toujours. J'avais passé la nuit les yeux ouverts dans mon lit, incapable de trouver le sommeil, espérant toujours avoir rêvé. Mais ce n'était pas le cas. Jean n'était plus, Ambre ou Ombre, ou qui que ce soit avait pété les plombs et j'étais impliqué que je le veuille ou non dans les magouilles d'Antoine. L'époque où nous étions tous amis me semblait si lointaine... J'aurais voulu qu'on me révèle que ce n'était qu'une plaisanterie de mauvais goût et que tout redevienne comme avant...

Mes frères ricanaient dans leur coin.

« Gravin pleure encore, fit Luc.

- Il s'est encore fait insulter tu crois ?

Je n'en pouvais plus. Je me levais d'un bond, en attrapais un et le secouer de toutes mes forces :

- Fermez vos gueules, putain ! FERMEZ VOS GUEULES !

- Melvin ! Lâche ton frère immédiatement !

- C'est ça, je le lâche !

- File prendre ta douche, et après on aura une petite discutions !

- Non, je me casse. »

Je m'habillais à toute vitesse et partais immédiatement. Dans la rue silencieuse, j'avais l'impression d'être dans un autre monde. Que tout était différent, même si au fond, rien n'avait changé. Je m'étais mis en colère pour la première fois de ma vie. Cette colère n'était toujours pas retombé. Elle avait prit la place de la tristesse et du désespoir. J'en voulais à la Terre entière. J'en voulais à Antoine. Surtout, je m'en voulais. Les gens avaient raisons de m'éviter. J'étais un petit gros inutile, qui avait été incapable de sauver un de ses amis.

Quand j'arrivais en cours de français, les places de Violette et Antoine étaient libres. Il n'allait sans doute pas venir aujourd'hui et c'était tant mieux. Sarah ne m'adressa pas un regard, sans doute vexée par ce qui s'était passé hier. Mais dans un sens j'avais eu raison de ne pas la confronter à ça. D'ailleurs, j'aurai aimé ne pas l'avoir été. Augustin s'assit à côté de moi, et remarqua tout de suite mon état.

« Quelque chose ne va pas Melvin ? me demanda t-il.

C'était horrible. Je voulais me décharger de tout ça. Je voulais tout lui raconter. Mais je ne pouvais pas. Je ne devais pas en parler à qui que ce soit. Je ne pouvais pas me permettre d'impliquer qui que ce soit d'autre là dedans. Surtout maintenant qu'Antoine était aussi dangereux.

- J'ai un ami... commencais-je. Que devais-je dire ensuite ? Un ami qui a disparu. »

Aussitôt je demandais à quitter la salle, je ne pouvais pas rester ici, au milieu de tout ces gens qui ignoraient l'horreur que j'avais vécu.

« Et dès que je me suis sorti, je t'ai contacté, dis-je pour terminer mon récit.

Zoé était songeuse, et son verre était vide. Je lui en recommandais un, et elle hocha la tête en signe de reconnaissance.

- T'as bien fait. Je ne pensais pas que les événements allaient prendre aussi rapidement une telle ampleur... marmonna t-elle doucement.

Je compris qu'elle ne me parlait plus vraiment, et qu'elle était en pleine réflexion. Normalement, elle me faisait trop peur pour que je l'interrompe, mais la situation était trop grave pour que ce genre de choses me retienne.

- Dis Zoé... Que va devenir Léa, la petite sœur de Jean ? C'était... c'était lui et uniquement lui qui s'occupait d'elle. Qu'est ce qu'elle va devenir ?

Encore une fois, Zoé baissa sa garde, me prouvant une fois de plus qu'elle n'était pas aussi insensible qu'elle avait voulu me le faire croire lors de notre précédente rencontre. Je m'étais peut-être un peu trompé sur son compte. Dans ma tête, le chagrin de la perte de Jean avait été remplacé par la peur pour la petite. Tellement gentille, innocente... et tellement dépendante de son frère qu'elle voyait toujours vu comme son héros...

- Je m'occuperai d'elle. Je t'en donne ma parole, je me porte garante de sa sécurité et de son avenir.

Elle avait l'air sincère. Et sérieuse. Elle me tendit une main et je la serrai aussi fort que je le pouvais, tout en me retenant à nouveau de pleurer.

- En revanche, je ne veux plus que tu sois impliqué là dedans Melvin, c'est d'accord ? Un innocent est déjà mort, il est hors de question qu'un deuxième le rejoigne.

- C'est facile à dire...

Elle leva un sourcil. Elle ne s'était pas attendu à ce que je la contredise.

- Pardon ?

- Je suis dedans jusqu'au cou, Zoé ! Antoine ne me laissera pas tranquille et il est hors de question que j'abandonne Ombre dans cet état !

- Et qu'est-ce que tu peux faire ? Je t'assure, il vaut mieux que...

- Qu'est-ce que je peux faire ? C'est la question que je me pose depuis le début. Et... et si j'y avais trouvé une réponse, ben peut-être que Jean serait encore vivant !

- Je ne peux vraiment pas te faire changer d'avis ?

Je lui fis comprendre par un signe de tête qu'il en était hors de question. Elle soupira et pour la première fois depuis que je la connaissais, elle eut un semblant de sourire.

- T'es vraiment un cas désespéré... Bon... J'aime pas avoir recours à ce genre de choses, mais pour le moment essaie de rester du côté d'Antoine.

- Comme un agent double ?

- Ouais. C'est ça. Par contre, méfie toi des membres de ma famille.

J'eus comme une sorte de déclic. Que Zoé soit au courant pour Lyoko et XANA m'avait tellement surpris que je n'avais jamais émis l'idée que ses frères et sœurs le soient aussi. Augustin, avait été tellement sympa... Est-ce qu'il avait lui-aussi un lien là dedans ?

- Pourquoi ?

- Melvin, c'est trop compliqué à expliquer... fit elle.

Je n'en pouvais plus d'être traité comme un abruti. Tout le monde autour de moi avait l'air de savoir pleins de choses que j'ignorais et s'attendait à ce que j'agisse comme bon ils leur semblaient ! Ça ne pouvait plus durer ! J'en avais assez d'être un pion et je ne pouvais pas supporter de rester encore à juste obéir sans pauser de question alors que quelqu'un était mort !

- Dans ce cas je m'en vais.

Je commençai à me lever.

- Non, Melvin ! Attends !

- Je t'écoute.

- Ça risque de ne pas te plaire...

- Tout ce qui s'est passé jusque là ne me plaît déjà pas.

- Augustin, Judith et moi ne sommes pas vraiment frères et sœurs. Nous n'avons même aucun lien de parenté. Nous venons du même endroit. Toute notre vie, nous n'avons été formé que pour une chose. Au départ, nous étions en compétition, puis... ça a changé. Le but était de... Melvin, je ne peux pas dire ça à haute-voix. Pas dans un lieu publique.

- Alors parle moins fort, sinon je m'en vais.

Elle eut l'air presque alarmée. Comme si elle pesait véritablement les différentes options que je lui offrais pour savoir laquelle aurait le moins de conséquence.

- Bon. Je vais raccourcir. Ma « famille » ne veut qu'une chose : détruire Antoine. Mais pour cela, il faut l'avoir sur son terrain, à savoir Lyoko. Une des stratégie mise en place par Judith était de récupérer tous ses alliés... dont tu fais partie.

Il fallu quelques secondes pour que je réalise ce que cela impliquait. Le comportement de cette jolie petite fratrie à mon égard... Leurs attentions, leurs compliments... Tout ça, c'était du chiqué pour m'avoir. Pour me détourner d'Antoine. En fait, ils étaient comme tout le monde : ils n'en avaient rien à foutre de ma pomme.

- Je suis vraiment un abruti...

- Je t'avais prévenu que ça n'allait pas te plaire.

- Et donc tu veux toi aussi t'en prendre à Antoine ?

- Je ne t'ai pas tout dit... Laisse-moi continuer.

- Non. J'en ai assez entendu. »

J'en avais plus qu'assez. On s'était encore une fois joué de moi. J'avais cru que cette année allait être différente... Que j'allais enfin trouver des amis... Mais d'un côté tout s'effondrait et de l'autre tout était factice. Je n'étais même pas de retour à la case départ, j'étais plus bas que terre. Ombre était folle à lier, Antoine probablement aussi, Jean allait être porté disparu à tout jamais... Et mes « nouveaux amis » ne m'avaient parlés que par intérêt et pour s'en prendre à quelqu'un que j'appréciais.

Pourquoi les choses ne pouvaient pas être simple pour une fois ? Pourquoi est-ce que tout devait être... aussi compliqué ? Je me souviens qu'avant je me vantais d'avoir pu vivre des choses aussi exceptionnelles... Maintenant je me rendais compte à quel point j'avais été idiot. J'aimerai n'être que Gravin, n'avoir que des problèmes de Gravin et que ça s'arrête là.

Je quittai la cafétéria en claquant la porte et je rentrai chez moi. J'avais encore des cours, mais peu m'importait. Quand j'arrivai, ma mère m'accueilla en hurlant mais je me mis à crier encore plus fort qu'elle, lui demandant de me laisser faire mon deuil en paix.

Je m'allongeai sur mon lit. Je faisais mon deuil de quoi au juste ? De Jean ? D'Ambre ? Ou de l'espoir d'avoir un jour une vie normale ? Je n'en pouvais plus en tout cas. C'était trop pour moi.

O??mb??re


J'ouvrai les yeux. Tout était toujours flou autour de moi, mais je ne sentais pas la pluie autour de moi. Au contraire, il avait plein de lumière venant d'en haut. Mes yeux, habitués à l'obscurité, devinrent douloureux mais je refusais de les fermer. Puis ils s'accoutumèrent. C'étaient des lampes qui m'éblouissaient. J'étais dans une sorte de petit salon. On m'avait enlevé mes vêtements et mit dans une robe de chambre.

Je devais rapidement partir de cet endroit qui ne m'était pas familier. Pour aller où ? Aucune idée. Ce fut comme un poignard. Qu'est-ce que je comptais faire ? Retourner chez Jean, comme si de rien était ? Impossible, tout ça avait volé en éclats. Je n'avais plus d'avenir. Et franchement, je n'en avais jamais eu. A part faire semblant d'être quelqu'un que je n'étais pas, d'être une pâle imitation, je n'avais rien accomplis pendant cette première année d'existence. D'ailleurs est-ce que je pouvais vraiment parler d'existence ? Qu'est-ce que j'étais au juste ?! Pourquoi... pourquoi étais-je venue au monde, si c'était pour que personne ne m'accepte ? Il se pouvait que je ne sois qu'une simple amie imaginaire ayant outrepassé ses droits. Une fantaisie d'enfant poussée trop loin. Ouais... c'était sans doute ça... Si on faisait le bilan de ma courte vie, j'avais fait plus de mal que de bien, agissant de manière égoïste... Je réalisai que... Au final, je réalisai que j'aurais préféré ne jamais venir au monde.

Après tout, était-ce un crime de vouloir plus que simplement exister ? Si je n'avais été destinée qu'à être qu'une simple observatrice, alors pourquoi est-ce qu'il m'était possible de prendre le contrôle du corps d'Ambre ? Ce que j'avais fait était inclus dans les règles du jeu, alors pourquoi... pourquoi putain tout semblait me crier que c'était une erreur ?! Que j'étais une erreur ! Ce n'était pas logique ! PAS LOGIQUE. Je prenais l'objet le plus proche de moi, à savoir une lampe et la brisais de toutes mes forces sur le sol. C'était stupide, mais j'en avais besoin. Je m'étais toujours persuadée que j'étais une battante et voilà que je pleurais encore. J'étais pire qu'Ambre à ses jours les plus sombres. Je n'y pouvais rien. J'avais juste envie de disparaître. Définitivement. Que cet enfer s'arrête.

Une jeune fille accourut à toute vitesse dans la pièce. Elle avait des cheveux mi-long roux. C'était elle, la silhouette que j'avais rencontré dans le parc.

« Tout va bien ? Me demanda t-elle immédiatement.

- Je suis où ? T'es qui ? Demandai-je brut de pomme.

-Je m'appelle Mathilde, et nous sommes chez moi. Enfin, dans la demeure familiale, mais c'est pareil. Je t'ai retrouvé dans un sale état... C'est pas un temps à être dehors...

- Et du coup, t'as prit la liberté de me ramener avec toi. Je vois. J'peux me casser maintenant ?

Je ne voulais pas lui être reconnaissante. Je ne voulais même pas lui parler. Je voulais... qu'on me laisse en paix. Ne plus voir personne, ne plus avoir à faire semblant.

- Je pense que tu devrais manger au moins avant de repartir.

- Je m'en contrefous de ce que tu penses. On sort par où ?

Je me levai du fauteuil avant d'y retomber immédiatement. Mes forces n'étaient pas totalement revenues.

- Je vais te chercher de quoi grignoter.

Je n'eus pas le temps de la retenir, elle était déjà partie. Recevoir de la gentillesse me mettait mal à l'aise. J'étais un monstre. J'avais tué... J'avais tué la seule personne qui tenait à moi. Même si ce n'était pas véritablement à moi qu'il tenait, c'était... suffisant dans un sens. Ouais... Je crois que j'avais fini par apprendre à l'aimer. Il n'avait pas mérité ce que je lui avais fait. Il n'avait pas mérité que je lui mente pendant un an. Putain. Et moi je ne méritais plus de vivre après avoir fait ça. Je jetais un coup d'œil par la fenêtre. Nous étions au quatrième étage. Avec un peu de chance... Ça allait suffire...


Chapitre 8: Une promesse en chocolat


« Bonjour mademoiselle ! Qu'est ce que je vous sers ? » demanda le jeune homme d'un ton joyeux.

Paul était un jeune apprenti boulanger. Il était loin d'être stupide, et était très cultivé, généralement plus que ses clients, avec qui il parlait de tout et de rien. C'était une sorte de philosophe du dimanche en herbe, aimant bien se poser des questions existentielles et en discuter avec les gens qui passaient dans le rayon pâtisserie du supermarché dans lequel il travaillait. On pouvait sans conteste dire que c'était quelqu'un d'agréable à côtoyer, qui dessinait des sourires sur les visages maussades des consommateurs qui venaient le voir. Il était un peu physionomiste et connaissait bien chacun de ses clients, gardant en mémoire leur physique et toutes les informations à leur sujet. Et puis, généralement, c'était les même habitués du quartier qui venait. Avec parfois de nouvelle tête, mais c'était assez rare.

Et puis un jour d'été, elle était arrivé. Il ne l'avait jamais vu, sinon, il s'en serait rappelé. Comment aurait-il pu oublier une telle beauté ? Une beauté aussi... peu commune, aussi étrange ? La jeune fille aux longs cheveux bleus s'était arrêté devant le coin qui lui était attribué. Elle poussait un cadis presque remplis et tenait à la main une liste de course très précise de ce que Paul pouvait voir. Quand elle passa devant l'étalage de gâteaux, croissants et éclairs au chocolat en tout genre, elle s'arrêta, surprise. Sans dire un mot au jeune boulanger, elle resta quelques instants à simplement contempler les différentes confiseries, comme si c'était la première fois qu'elle en voyait Paul, avec son énergie habituelle, lui avait posé la question elle aussi habituelle. La fille avait fait un bond en arrière de surprise et l'avait regardé avec des yeux ronds.

« Vous allez bien ? s'empressa de demander le jeune homme. Elle ne répondit pas tout de suite, le regardant avec un mélange d'intérêt et de curiosité.

- Qu'est-ce que c'est ? demanda t-elle rapidement. Elle pointait du doigt un pain au chocolat. Le dernier de la journée.

- C'est un pain au chocolat, dit-il calmement avec un grand sourire, pensant avoir à faire à une comédienne de très haut niveau.

- A quoi est-ce que ça sert ? rajouta t-elle. Elle posait ses questions sur un ton sec, faussement autoritaire. On pouvait tout de suite comprendre qu'elle était en réalité très intriguée.

Paul eut un petit rire face à cette cliente assez inhabituelle, ce qui la fit sursauter de nouveau. Il sortit de la vitrine la fameuse pâtisserie et la tendit à la fille aux cheveux bleus.

- Tiens, mange et tu verras.

Violette était surprise. Elle avait déjà vu Antoine manger, et elle avait crû comprendre que les courses qu'il lui avait envoyé faire était dans le but de le ravitailler en... nourriture ? Mais elle n'avait jamais "mangé". Elle n'avait pas posé la question à Antoine, car elle avait aussi saisi qu'il n'aimait pas trop qu'elle parle, il préférait qu'elle obéisse. Il lui faisait beaucoup de piqûres, c'était vrai. Peut-être que ça remplaçait ce besoin en nourriture. Mais alors que l'homme lui tendait l'objet de ses interrogations, son esprit jeune et innocent brûlait et se tordait dans tout les sens. Avait-elle le droit ? Le blondinet lui avait donné une liste d'interdiction bien précise, mais elle ne savait pas si cela en faisait parti. Une chose était sûre : elle en avait envie. Elle ne savait même pas ce qu'était une envie, mais c'était ce qu'elle ressentait en ce moment. Si elle le faisait, est-ce qu'Antoine lui en voudrait ? Pendant les quelques secondes qui s'écoulèrent, elle calcula tous les scénarios possible, allant du pire au plus inconséquent.

Et finalement, elle prit doucement le pain au chocolat, doucement comme si elle manipulait une bombe de retardement. Elle le porta à ses lèvres, jetant un coup d'œil au boulanger pour s'assurer qu'elle le faisait correctement. Elle croqua et le lâcha soudainement de surprise.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Ce n'est pas bon ? s'enquit Paul, déconcerté.

Elle le ramassa doucement et renouvela l'expérience. C'était la même chose. Elle ressentait des saveurs qu'elle n'avait jamais connu auparavant. C'était... agréable. L'éducation partielle d'Antoine lui avait omis beaucoup de chose, elle était assez intelligente pour s'en être rendu compte, mais elle avait été aussi suffisamment intelligent pour faire croire à son "créateur" de l'inverse. Il lui avait parlé, rapidement, de ce que signifiait le mot "agréable", mais il n'en avait donné que sa définition. Selon lui, si on se tenait la main, cela devait être agréable. Mais manger ce pain au chocolat l'était plus. Était-il possible que son Créateur et elle aient une notion différente de ce qui était agréable et de ce qui ne l'était pas ?

- Si. C'est... bon. C'est très... bon, dit-elle en cherchant ses mots.

Se souvenant soudainement que tout bien présent dans ce supermarché avait un prix, elle sortit le porte-feuille qu'Antoine lui avait confié. Elle avait retenu qu'elle ne devait le donner à personne, et uniquement en sortir le montant d'argent demandé.

- Oh non, c'est pour moi. De toute façon c'était le dernier de la journée, je n'aurais jamais pu le vendre demain ! fit-il en riant à la vue des billets que sortait Violette.

Autre chamboulement pour la jeune fille. Son Créateur lui avait longuement expliqué qu'on ne donnait rien dans la vie, que tout n'était qu'échange. Pourtant... le jeune homme venait de lui offrir de la nourriture... gratuitement. Il ne semblait pas attendre quoi que ce soit en retour. Violette n'était pas stupide. Elle comprit aussitôt qu'Antoine ne lui avait dit que ce qui l'arrangeait. Qu'il voulait qu'elle soit un pantin stupide, uniquement capable de suivre ses instructions sans réfléchir. Trop de choses ne concordaient pas avec le monde extérieur qu'elle avait eu parfois le temps d'entrapercevoir. Ce simple acte de bonté lui prouvait qu'on lui avait caché des choses. Elle se sentait trahie. Depuis sa « naissance », Antoine avait été tout pour elle. Il lui avait dit qu'elle devait lui être reconnaissante pour sa naissance, et par conséquent elle l'était. Elle aurait été prête à tout et n'importe quoi pour lui. Mais rapidement, elle se rendit compte que cette relation n'allait que dans un seul sens. Antoine s'en fichait d'elle, de ce qu'elle pouvait bien vouloir. Il était même probable qu'il pensait qu'elle n'avait aucun désir propre. Qu'elle n'était qu'une chose. Sa chose. Uniquement sa lutte contre Hannibal avait de l'importance, et Violette n'était qu'un outil, un pion dans cette guerre silencieuse. La jeune fille enchaînait les missions sur Lyoko, dormait seule à l'usine pendant que lui rentrait chez sa tante. Dans un sens, elle s'était sentie seule, sans même savoir ce que c'était que la solitude, sans jamais avoir connu quoi que ce soit d'autre. Et là... ce simple cadeau, ce simple pain au chocolat changeait la donne. Le monde n'était pas remplis de mini-Antoine. La vision des choses qu'il avait essayé de lui imposer n'était vrai que pour lui.

Commença alors une double vie pour Violette. D'un côté, elle était la création d'Antoine, le suivant dans tout ses plans de bataille contre ses rivaux, et de l'autre elle était Violette, une cliente du supermarché du coin, et habituée du rayon pâtisserie. Antoine ne comprit pas pourquoi elle insistait tout les jours pour aller lui faire les courses ou lui acheter un encas. Il dû prendre ça pour une réussite : sa pièce maîtresse apprenait à le servir de mieux en mieux. Tous les jours, elle retrouvait Paul, pratiquement à la même heure. Ce dernier aussi attendait le moment où cette étrange fille aux cheveux bleus viendrait le voir. Elle insistait pour payer désormais, et malgré la grande générosité du boulanger, ça l'arrangeait, sa paie n'aurait pas supporté d'offrir tous les jours des sucreries, même à la nana la plus belle qu'il ai jamais vu. Elle restait avec lui un bon quart d'heure, mais parlait peu. Généralement, elle arrivait avec une question tellement simple que si quelqu'un d'autre l'avait posé, cela aurait eu l'air absurde. Mais venant d'elle, ça ne le choquait pas. Il avait l'impression qu'elle ne lui mentait pas, qu'elle était sincère dans ses questionnements.

« Pourquoi ? demandait-elle avec curiosité, souvent sur des sujets portant sur le bonheur et l'accomplissement personnel. Et il s'empressait de lui donner son point de vue.

Elle commençait à véritablement l'intriguer. Il essayait de lui aussi l'interroger, mais elle éviter toujours de donner des réponses. Au final, il ne savait rien sur elle, si ce n'était son prénom : Violette. Ça n'allait pas l'aider pour faire des recherches... Et ce n'était pas son genre de stalker comme ça une nana. Puis un jour elle cessa de venir. Ce fut à partir de la rentrée de septembre. Sans prévenir, et du jour au lendemain. Paul fit des annonces dans la clientèle du supermarché, mais personne ne connaissait cette jeune fille à la couleur de cheveux aussi inhabituelle.

Violette n'avait pas eu le choix. Le mois de septembre annonçait le début des hostilités entre Antoine et ceux qu'ils surnommaient les « pions d'Hannibal ». Elle n'avait plus le temps de papillonner de la sorte. Mais elle était reconnaissante, Paul lui avait beaucoup appris. Cependant, elle devait faire semblant de n'avoir pas évolué auprès de son créateur, sinon il aurait l'impression de perdre le contrôle et qui savait de quoi il serait capable ? Il lui avait donné la vie, il n'était pas incohérent qu'il pense la posséder entièrement. Ainsi, du haut de ses quelques mois, elle avait rattrapé une bonne partie de son retard, grâce à ce drôle de boulanger. Ca lui avait beaucoup plus, et si elle avait connu l'importance du mot « merci », elle lui aurait dit un bon millier de fois. Malheureusement, ça ne faisait pas partie des leçons d'Antoine. Lui-même n'utiliser jamais ce mot, ainsi, il était absent du vocabulaire de la jeune fille. Une autre expression qu'elle ne connaissait pas et qui lui aurait été utile, c'était au revoir.

Ce mardi soir là, Antoine était de mauvaise humeur. Violette restait assise dans son coin habituel, à attendre tel une poupée de porcelaine, sans même cligner des yeux.

« Merde. Merde, merde, merde ! criait-il.

Il avait gardé son calme devant Melvin afin de donner l'impression qu'il avait le contrôle de la situation. Mais en réalité, la situation lui échappait totalement, et cela se voyait. Il avait énormément compté sur le retour d'Ambre pour sa lutte contre Hannibal, mais si l'informatique n'avait de toute évidence plus aucun secret pour lui, les rapports humains étaient une science qu'il ne maîtrisait pas du tout. Ça avait salement dérapé. Non seulement ramener sa sœur allait être encore plus compliqué maintenant, mais il avait perdu un pion. Certes, ce n'était pas un pion très important, mais c'était toujours embarrassant de voir une pièce périr non pas à cause d'un coup de l'adversaire mais à cause de ses propres erreurs. Surtout avant que la partie ne commence véritablement.

A : Antoine, calme-toi. Je sais que ne pas pouvoir retrouver Ambre te touche, mais ce n'est pas le moment d'oublier notre objectif principal.

- Je sais, Alpha, je sais ! J'ai... j'ai investi beaucoup trop de temps là dedans. Bon, au moins nous avons toujours notre avance.

Il commença à faire les cent pas dans le laboratoire.

- Si les informations qu'il m'a donné cet été sont corrects, et je n'ai aucune raison de croire qu'elles ne le sont pas, leur offensive aura lieu après-demain à Kadic. Alpha, où en est la récolte d'énergie ?

La contre-attaque qu'Antoine préparait depuis plusieurs semaines allait être très coûteuse. Ce n'était pas une activation de tour standard, bien au contraire. Il avait dû s'y prendre énormément à l'avance pour être sûr à au moins 90 % que ça puisse fonctionner.

A : Tout se passe comme prévu. Tu seras en mesure d'activer les tours requises jeudi.

- Et où en est...

Il jeta un regard vers Violette après s'être interrompu.

- Où en est le projet R ?

A : Il est en bonne voie aussi. Bien sûr nous avons perdu du temps avec les événements d'hier après-midi, mais rien d'irrattrapable.

- Parfait ! Parfait ! »

Le blondinet éclata de rire. L'isolement mélangé au fait de ne communiquer qu'avec des intelligences artificiels avait eu indéniablement un effet négatif sur sa personnalité. Après avoir rencontré quelqu'un comme Paul, Violette comprenait que quelque chose clochait chez son créateur. Il leur annonça qu'il allait travailler sur son projet pendant la nuit depuis chez lui et quitta l'usine en éteignant les lumières, laissant « sa Reine » seule dans la pénombre. Elle attendit quelques instants avant de prendre sa place à l'ordinateur central.

Depuis toujours, elle communiquait avec Alpha. Elle le voyait comme son véritable père. Enfin, étrangement, plus comme une mère car elle avait remarqué que l'intelligence artificielle accordait ses adjectifs au féminin. Contrairement à Antoine, elle ne lui avait jamais rien caché. Et si Paul lui avait fourni un enseignement sentimental sur ce que c'était d'être humain, Alpha l'informait sur tout le reste. C'était les deux seules personnes avec qui elle se permettait de ne pas faire semblant. Pour Antoine, ses alliés et même ses ennemies, elle se devait de paraître telle une machine sans âme.

V: J'ai compris quelque chose aujourd'hui.

A: Je t'écoute Violette.

V: Mes "crises" sont de plus en plus fréquentes, de plus en plus longue. J'ai étudié les résultats des scanners qu'Antoine a négligé.

A: Je vois.

V: Tu es déjà au courant, n'est-ce pas ?

A: Précise tes propos.

V: J'ai une durée de vie allant de trois mois à un an.

Violette tremblait. C'était une chose de faire des théories, mais si Alpha les confirmait, elles devenaient la réalité.

A: Exact.

La jeune fille posa ses mains sur sa tête. Elle s'en était doutée. Elle l'avait redouté. Elle n'était pas aussi parfaite que le prétendait Antoine. Au contraire, elle était totalement incomplète. Il l'avait crée en vitesse face à la nécessité et il en était parfaitement conscient. Ce n'était pas pour rien qu'il travaillait sur un « projet R », qui devait annoncer la naissance de sa remplaçante...

A : Je suis désolée, Violette.

V: Est-ce que ça a un rapport avec ce qui m'a été injecté quand j'étais à l'infirmerie ?

A: Peut-être. J'ignore ce qui t'a été injecté.

Elle se mit à rire, d'un rire triste et forcé. Il était clair qu'en l'absence d'Antoine, ce n'était plus du tout la même personne. Elle avait mis tant de temps à apprendre, à apprécier ce qui l'entourait, à apprécier la vie qui lui avait été donné... pour qu'en réalité tout cela ne soit qu'une simple brise. On allait tout lui retirer, aussi rapidement qu'on le lui avait donné. Ce n'était pas juste. Ce n'était pas juste, mais c'était comme ça, et elle comprit rapidement qu'elle ne pourrait rien y changer. Alors elle l'accepta. De son point de vue, le simple fait d'avoir pu vivre, ne serait-ce que quelques mois avait déjà été une chance inouïe.

Antoine m'a donné la vie. Même s'il ne le saura jamais, c'est grâce à lui que j'ai pu comprendre ce qu'étais le plaisir de manger un pain au chocolat... je me demande d'ailleurs si ça aurait été... agréable d'embrasser Paul. Je suppose que je ne le saurais jamais. Toujours est-il que si j'ai eu la chance de pouvoir apprécier tout ça, c'est parce qu'il a été là. Je lui suis reconnaissante, et avec le peu de temps qu'il me reste, je ferais tout pour qu'il remporte son combat.

C'était sa résolution, ça allait devenir sa dernière raison d'exister. Rembourser sa dette, dessiner un sourire sur le visage d'Antoine tout comme on en avait dessiné un sur le sien.

V: Dis moi, Alpha... Il y a toi aussi des choses que tu ne dis pas à Antoine.

A: Précise ton propos.

V: Cet été, tu étais étrangement au courant de ce qui se passait lorsque... Lorsque ce qui est arrivé... est arrivé. Comme si tu avais été en contrôle.

A: Je trouve ça horrible qu'Antoine ne puisse jamais réaliser à quel point tu es parfaite, Violette. Oui, tu as raison, c'est moi qui ai provoqué ces événements.

Antoine était intelligent, c'était sûr, mais il était trop imbu de lui même pour se remettre en question, ce qui limitait ses options. Il était par exemple persuadé qu'Alpha et Violette étaient sous son contrôle, alors qu'en réalité les deux gardaient une certaine indépendance et qu'Alpha était loin de lui avoir livré tout ses secrets.

V: Qui es-tu, Alpha ?

A : Je ne peux pas te le dire.

V : Tu ne me fais pas confiance ?

A: Oh si, Violette, tu n'as pas idée à quel point. Tu m'as déjà tellement aidé par le passé.

V : Je n'existe pas depuis longtemps. Comment ai-je pu t'aider ?

A : J'en ai trop dit. Arrête de te tourmenter avec tout ça. Tu ne veux pas prendre ta soirée et rendre visite à ton boulanger ? Je sais que tu en as envie.

V : Non. Il me reste peu de temps, et j'ai déjà eu la chance de pouvoir comprendre ce que c'était d'être heureuse. Maintenant, je dois renvoyer l'ascenseur à Antoine, même s'il ne le saura sans doute jamais.

C'était là la promesse qu'elle s'était faite à elle même. Une promesse en chocolat.
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Silius Italicus MessagePosté le: Ven 11 Sep 2020 13:06   Sujet du message: Répondre en citant  
[Krabe]


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Bonjour très cher Pilorde,

Ainsi, contre vents et marées, vous avancez ? En tout cas, ces dernières ont mis en retard le présent commentaire.

Il semble utile de commencer par parler du paratexte en tête de ces chapitre sept et huit.

Chacun a son approche propre, mais à titre personnel, c'est toujours le texte qui est pesé, et non son la personne réelle qui l'a écrit. Et s'il se dégage une atmosphère assez sombre du récit, il n'y a là rien qui permette de la rattacher à la vie de cette personne. S'il peut être intimidant de s'exposer en public de la sorte, il faut quand même garder en tête que le lecteur a une vision très différente du texte, n'y applique notamment pas les mêmes clés de lecture que l'auteur. Aussi ce qui est découvert et ce qui est celé ne sont pas si évident que cela.

Les chapitres sept et huit, donc. Nous voici rendus à la moitié du récit en somme. Cela commence à se ressentir : le décor achève d’être posé, les événements s’accélèrent.

A la réflexion, il est étrange d’avoir couplé les chapitres sept et huit plutôt que les chapitres six et sept. En effet, le thème du chapitre sept est incontestablement la mort et le deuil, faisant suite en cela à l’assassinat du chapitre six. En revanche le chapitre huit porterait plutôt sur la naissance : il n’est autre que le parcours de Violet devenant un individu, ce qui est une forme de naissance.

Pour en rester à ce point de vue thématique, Melvin et Ombre représentent ici deux manières d’aborder le deuil. De manière intéressante, Ombre n’est pas affectée par le fait qu’elle ait assassiné Jean. Non, la mort de ce dernier n’est que le catalyseur d’un mal-être plus profond. D’où l’intérêt du flash-back. Il vient montrer ce qui était en germe et permettre d’expliquer l’état d’esprit d’Ombre. Ombre représente de ce point de vue quelqu’un que la mort renferme sur elle-même. En même temps, Melvin a une réaction inverse : il cherche à partager et épancher. Dans les deux cas, ils sont mis face à l’absurdité final du monde qu’est la mort, ainsi que le dénote l’usage répété du mot « logique ».

Melvin doute. Il doute de sa valeur, de la nécessité de continuer. Pour lui, cette mort est le grand révélateur. Révélateur du grand jeu dans lequel malgré lui il est partie prenante. Révélateur de la qualité réelle des gens l’entourant, et de la vacuité des liens qu’il entretient avec eux. Melvin est trop creux de l’intérieur, ne s’attribuant de valeur qu’au travers des regards et attentions des autres. Ombre est trop pleine d’elle-même, elle déborde, et ces débordements tuent et l’isolent du reste du monde. Melvin se révolte ; Ombre voit sa révolte se briser.


A travers l’absurdité de la mort, Ombre doit faire face au doute final : quelle nécessité existe ou n’existe pas guidant à sa création, à son existence dans le monde ? Elle a goûté au fruit de cette liberté première et en trouve la leçon bien amère. Elle s’est posée seule et auto-suffisante face au monde. Ce faisant elle a vidé le monde autour d’elle. Et maintenant, tout bascule dans un vertige existentiel.

Cette attitude d’Ombre fait le lien avec le chapitre huit et son thème de la naissance par l’émancipation. Violette sait comment elle est née et pourquoi, et c’est après coup qu’elle éprouve les limites posées à sa naissance et se les approprie ou les défaits, ces limites n’étant autre que les connaissance et ordres fournis par Antoine. Elle transforme ces conditions initiales tout en restant dedans. C’est pourquoi elle cherche à renvoyer malgré tout l’ascenseur à Antoine. Ombre quant à elle s’est plus ou moins auto-créée ab initium. Par un acte de sa propre volonté elle est venue au monde. Et par d’autres actes de sa propre volonté elle n’a cessé de s’affirmer, en se coupant toujours plus de la source initiale sa naissance. Malheureusement, elle ne se débarrasse pas si facilement de son péché originel, ni de sa condition d’origine. Faute de l’avoir testé d’abord, elle s’y ramène toujours.

Au niveau du scénarios, ces chapitres sont une bonne avancée. Des choses dont on pouvait se douter sont confirmées : le fait que la fratrie doive battre Antoine sur Lyokô et non dans le monde physique entre autres. Ce qui suppose qu’ils arrivent à avoir un accès à un supercalculateur et des scanners. L’autre point sur lequel le doute est levé, c’est Alpha. Il semblait un peu étrange que ce dernier n’ait pas d’agenda propre. En somme, il y a là des avancées substantielles, tout en maintenant le voile de mystère nécessaire. De plus la fin du huitième chapitre annonce la reprise des activités virtuelles. De mémoire, 25 ans plus tard n’avait compris que quelques attaques, il est probable qu’il en soit de même ici. Il reste aussi à voir si et comment la fratrie va manipuler Ombre.

Vraiment, il s’agissait là de deux bons chapitres. Avoir un chapitre du point de vue de Violet était une agréable surprise. La suite se fait déjà attendre.

Avant d’en finir, peut-être une hypothèse. Dans la mesure ou Violette est un corps relativement fonctionnel créé artificiellement à partir des scanners, qu’est-ce qui empêche Antoine d’utiliser le cadavre de Jean ? Il dispose de son cadavre, des données de ses précédentes virtualisations, des talents acquis lors de la création de Violette, il ne devrait dès lors pas être compliqué de récupérer ce cadavre, de le soigner et d’y implanter un esprit. De sorte qu’Antoine pourrait récupérer un pion de plus avec un corps plus robuste et fonctionnel que celui de Violet (quoique n’ayant peut-être pas ses extraordinaires pouvoirs).

Enfin, deux petites remarques d’orthographe relevées dans le texte, à défaut d’un relevé systématique :

- « de part ma jalousie », en fait « De par ».

- « Ca lui avait beaucoup plus », en fait kle participe passé de « plaire » est « plu »

Au plaisir de vous retrouver encore.
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Zéphyr MessagePosté le: Jeu 01 Oct 2020 20:01   Sujet du message: Répondre en citant  
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J’ai hésité quelques jours entre Icer et Nelbsia pour un commentaire, avant de finalement me raviser en ta faveur. A l’instar de ce même Icer, j’ai lu/suivi la première version de Code Alpha (mais pas sa suite), sans trouver le temps d’y poser un commentaire. Il était temps de corriger le tir !

Ta réputation te précède (qui ne se souvient pas du légendaire Projet Viol… ?), notamment via ton ancienneté dans ce sous-forum et ta démarche d’achèvement de ton travail entamé il y a longtemps de cela. Finir une ou deux fanfictions est déjà un grand chantier, alors je n’ose imaginer ce que cela donne avec une réécriture derrière… Rien que pour ça, tu as déjà toute ma considération !

Concernant 25 ans plus tard, la petite cure de rajeunissement a fait son effet : les idées générales et directrices du texte restent les mêmes (malgré le postulat de base plan-plan), en mieux amené et développé.
Hélas, Antoine n’y a pas gagné en subtilité. J’ai même plutôt l’impression que depuis la 1.0, tu as encore plus gonflé son égo – ce qui n’était pas une mince affaire – afin de renforcer encore plus ses traits, là où @mbre a quand même gagné dans l’histoire un développement moins grossier et plus nuancé. Cela étant, le positionnement d’Antoine vis-à-vis de son héritage parental est mieux géré qu’auparavant et le passif avec la tante apporte des éléments de construction bienvenus.
Demeurent néanmoins quelques maladresses narratives et scénaristiques à mon sens. Le trio d’adultes Ulrich/Pauline/William a un traitement superficiel et fonctionnel qui m’a laissé perplexe. Leur présence se justifie pour les explications techniques et la nécessité scénaristique (continuité avec Code Lyokô, besoin de mentor/antagoniste humain), mais pour le reste, ils restent sacrément plats je trouve ! Ulrich, plus particulièrement, se résume littéralement à un alcoolique qui veut se faire la fille de son meilleur ami décédé, avant de mourir en laissant ce portrait-là derrière. Même William, qui a un temps d’exposition médiatique plus faible, a plus de profondeur que Stern, grâce à sa tirade sur ce qui a motivé sa trahison envers les Lyokô-guerriers (si faire de William l’antagoniste est un biais facile scénaristiquement, cette justification simple et efficace fait bien le boulot).

En tout cas, cette première fanfiction pose les bases de ton univers de manière tout à fait honorable. On sent d’ailleurs en commençant Rainy Days qu’il y a une volonté de mieux développer les personnages principaux. Les parcours d’Ombre et Melvin sont réussis jusqu’ici, je nourris presque l’espoir qu’Antoine gagne en relief. Tu as très bien fait de faire ce choix. Je pense qu’une de tes forces en écriture est de décrire la psychologie/l’état mental de tes personnages. On sent que tu en as pris conscience dans cette suite, et que tu t’appuies plus régulièrement sur cette force.
Par ailleurs, le fait que tes personnages aient des profils de marginaux, des personnalités plus originales, et/ou des soucis d’ordre psychologique/mental montre cet attrait de ta part pour la peinture des psychés de ceux qui sortent de la norme (socialement et psychologiquement notamment). Pour moi, cela explique que tu sois parvenu à « te passer » de Jean (ce qui était une bonne surprise, scénaristiquement, ce n’était pas forcément attendu) : le tour avait été fait sur sa personnalité et son statut d’amoureux transi le mettait dans une impasse narrative. Cela a permis de faire de la place pour des profils plus intéressants, comme Melvin et Violette.

Toujours sur tes personnages, et pour faire le lien avec ma remarque sur Ulrich/Pauline/William, tu sembles beaucoup plus à l’aise avec les profils adolescents qu’avec les adultes (d’où la liquidation du trio mentionné ?). Amélie Belpois en est une parfaite illustration puisqu’elle est restée cette adolescente mal dans sa peau et qui n’a jamais réussi à trouver sa place, malgré le passage à l’âge adulte.
En revanche, tu as fait l’impasse sur un personnage : Sissi. J’ai encore en travers de la gorge le « quand ma mère... enfin, celle d'Ambre me mit à la porte ». Elle est évacuée du récit beaucoup trop facilement, alors que Code Alpha avait disséminé des indices sur le fait qu’elle se retrouve avec la garde d’Ambre, ainsi que son devenir en général. Néanmoins, il reste encore quelques chapitres à poster pour cette fanfiction, et les chances que son histoire personnelle entre en ligne de compte à un moment sont assez hautes (après tout, si tata Belpois y est parvenue, pourquoi pas maman Delmas ?).
Du coup je te laisse le bénéfice du doute sur son traitement/développement (c'est pile le genre de portrait que je te vois traiter). Je maintiens et re-signe néanmoins : sa sortie du récit est assez peu naturelle, elle renonce trop facilement à celle qu’elle pense être Ambre, alors qu’elle faisait preuve d’une possessivité maladive jusque-là.

Pour le reste de Rainy Days, j’attends encore un peu de voir comment le scénario va se déployer (le seul réel élément perturbateur pour le moment, c’est bien Ombre) Jusqu’ici le développements ont surtout été socio-psychologiques, mais au vu du contexte de base (supercalculateur et Alpha ranimés, lutte contre Hannibal, les « surveillants personnels » de la petite), il va forcément falloir y revenir et épaissir tout ça.
Je suis assez intéressé par la place d’Alpha dans tout ça. Il me donne constamment l’impression de jouer double-jeu, et ça ne m’étonnerait même pas qu’il soit en réalité Hannibal (je suis assez sûr du fait que celui-ci n’est pas un humain, donc une I.A), pour former/tester Antoine, ou tout simplement le manipuler dans un objectif précis.

J’ai fait le tour je pense, et maintenant que je suis à jour, je devrais pouvoir te suivre jusqu’à la fin. Bon courage pour la suite, garde cette motivation et cette volonté de conclure !
_________________
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« Jérémie avait fait un superbe travail. Ce dernier voyage sur Lyokô promettait d'être inoubliable. »
Un jour, peut-être.
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